Les battements de coeur dans ma poitrine me rappellent à quel point je suis vivante et ça me fait encore plus mal. Je suis encore jeune, je me dis que je ne peux pas mourir. Et pourtant, encore une fois la réalité chamboule tout, détruisant mes illusions arc-en-ciel et mon monde enchanteur. Bien sûr que si je peux. Comme lui, l'enfant. Si jeune... il y a tellement plus de personne qui aurait pu être à sa place, qui aurait dû. Mais il faut croire que la mort comme la vie est injuste. Mais c'est ainsi, c'est le Destin qui décide, sans jamais laissé de place à l'Espoir. Jamais, jamais.

-" AAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaah !"

Je ne sais pas ce qui est le plus horrible. Les cris et les gémissements ? Les frissons au bas du dos ? Le simple fait de... savoir ? Durant des millénaires et sûrement pendant encore longtemps, les gens ont toujours chercher à fuir l'ignorance. Pourquoi ne comprenne-t-il pas qu'on faisant ça ils se font du mal ? Fermez les yeux, ne rien voir, peut-être que c'est horrible, mais c'est bien plus malin. L'ignorance est la plus belle des liberté. C'est celle des enfants qui vive dans leurs rêves, celle des vieux sage qui ont oubliés. A présent j'en sais trop et cela me fait souffrir. J'ai envie de me boucher les oreilles, de m'enfuir loin, très loin, mais pour moi il est déjà trop tard. Je ne peux pas faire marche arrière. Pire encore, j'emmène dans ce cauchemar plusieurs adolescents avides de curiosité. J'espère juste qu'ils ne m'en voudront pas trop de les éloigner définitivement de leur enfance. Si ils se retournent après ça, ils risquent de se transformer en statue de sel...

Voilà. C'est le moment. Mme Mystery n'arrive plus à le contenir au grenier, il faut aller aider son âme à trouver le chemin. Trois adolescent ont la "chance" de m'accompagner. La chance de perdre de vue leur passé. Avec eux, un exorciste. On est jamais trop face à un fantôme et c'est encore pire lorsqu'ils sont petits. Parce qu'ils ne comprennent pas toujours. Comment expliquer à un gamin qu'il ne pourra plus jamais jouer, plus jamais rire avec les autres ? Qu'il est mort. Un grincement sordide brise le silence. La porte est ouverte.

-" LAISSEZ MOI !!!"

J'aimerais tellement, crois moi bien. Mais il paraît que tu seras plus heureux là-bas, où l'on t'envoie. Ou peut-être pas. Mais ce qui est sûr, c'est que la terre n'est plus faite pour toi. Tu es mort. Oh mon Dieu, tu es mort ! Si petit, si petit. Le sourire qui parfois dansait sur tes lèvres, la joie qui traversait tes prunelles. Tu n'étais pourtant pas là depuis longtemps, mais tout me revient en mémoire, me subjugue. Je ne suis pas sûre de pouvoir résister face à la pression. Cependant, je suis ici pour montrer aux élèves comment s'occuper d'un fantôme. Pour le bien de tous, je ne dois pas faillir, pas tressaillir. L'espace d'une seconde je laisse mon regard s'égarer, croisant celui d'Ichiru Kurosai, ce sorcier solitaire que je ne connais pas bien et qui pourtant me rassure dès cet instant. Je dois me ressaisir.

- Jimmy ? Tout va bien se passer d'accord. Je suis Miss Artissa, ta professeur de dessin, tu te souviens ? Avec moi il y a Ange, Calypso et Hayley, trois élèves de l'orphelinat, ainsi qu'un sorcier du village. Nous sommes là pour t'aider, on ne te veut aucun mal.

J'essaie de teinter ma voix d'une douceur rassurante. Avant tout, il faut que le fantôme se détende afin qu'il puisse nous écouter dans le calme. Il ne faut surtout pas le paniquer avec nos émotions, cela ne pourrait que plus l'énerver. Les trois adolescent savent ça, évidemment, mais face à un cas réel sauront-il appliquer cette règle ? La théorie est une chose, la pratique en est une autre. Je sais à quel point il est dur psychologiquement de faire face à un fantôme si jeune, d'autant plus que nous le connaissions. Nous pourrions tous être à sa place, tout le monde ici le sait.

Oui, l'ignorance est le plus beau des cadeaux...

You're dead, we're all sad.

La mort est quelque chose qui attriste les gens. On ne sait pas pourquoi, mais un jour on vous retrouve tout froid et immobile dans un coin.. Enfin ça ne se dit pas comme ça. Je me demande bien ce qu'on ressent quand on meurt, est-ce que ça fait mal? Et quand on devient un fantôme, que ressent on? Il y a des choses qui ne sont pas bonne à savoir vous savez. Le mot 'ignorance' a été créé pour ça après tout. Tout ce que je sais moi, c'est ce que ma religion m'a apprit, celui qui ne péche pas va au paradis..

Un jour, un enfant meurt, et à un autre moment de la même journée, trois autres naissent. C'est une estimation presque juste, je ne connais pas les vrais chiffres. Mais nous, on s'en fiche des trois qui naissent ailleurs, on en a rien à faire. Parce que nous nous sommes attristés par la mort de Jimmy. Certes, je ne le connaissais pas comme je connais Ange, que je ne connais pas entièrement soyons réalistes, mais je le connaissais en tant qu'orphelin, et en tant que frère de Mystery. Nous avons tous grandi ici, et en général, on se considère tous comme frères et soeurs, parce qu'on recherche une famille dans ceux qu'on connaît. Jimmy faisait parti de cette grande famille à laquelle je me suis attachée pendant 13 ans. Il était plus petit que moi, mais chaque enfant venant ici est directement un nouveau frère ou une nouvelle soeur, c'est comme ça et on y peut rien.

Nous sommes là, à cet instant précis tout bascule, lorsque ce cri retenti. Jimmy.. Ce pauvre petit Jimmy. Et pourquoi lui et pas quelqu'un de plus âgé? Les enfants n'ont pas le droit de mourir, on devrait mettre en place un décret, mais ça ne servirait à rien du coups, parce qu'on ne peut pas empêcher quelqu'un de mourir, c'est un élément naturel de la vie.

Ce cri qui glace le sang dans ce grenier pas très bien éclairé. Ange attrape ma main et la serre avec vigueur, moi aussi je serre la sienne, moi aussi j'ai peur. Je n'ai assisté qu'une seule fois à un exorcisme, avec Mr. Takahata, et il ne m'a pas laissé tout voir, j'ai du rentrer au Mystery sans voir la fin, et je n'y ai pas apprit grand'chose. Je comprends donc pourquoi Mrs Mystery a voulu que j'assiste à celui de Jimmy, parce que ce sera pour moi, et Ange, l'occasion d'apprendre, de pratiquer, et aussi parce que l'on connaissait Jimmy, pour qu'il se sente rassuré avec nous.

Miss Artissa commence à parler, à dire de gentilles choses de sa voix d'ange, et essaye de ne pas effrayer ou contrarier Jimmy. Quand à Ange, il lâche un spitch assez précis, mais décidé à calmer notre 'petit frère'.
-Oui, Jimmy, je suis là aussi. Ange. Tu sais, celui qui vous a raconté l'histoire des deux amis qui se sont fait manger par un placard mais qui ont réussi à trouver la sortie. Si tu veux, je peux te raconter encore une histoire...Tout va bien se passer. Hayley aussi est là, elle pourra te jouer un air de guitare comme tu aimais tant, tu sais comme quand elle montait dans votre dortoir, et que je chantais Knockin' on Heaven's Door...
J'acquiesce à tout ce qu'il dit, il a raison. En fait il fait remonter des souvenirs agréables. Espérant que Jimmy sache de quoi il parle, que sa mort n'ai pas mis tous ces souvenirs dans une petite boîte scellée. Moi je me souviens. Ange qui raconte des histoires aux petits et dès fois des petites anecdotes de sa propre vie, dont le placard. Et certains soirs pour calmer les petits nous allons dans leur dortoir pour le jouer des chansons calmes, et leur préférée est 'Knockin'on Heaven's Door'.

Ange me regarde dans les yeux, signe que je dois dire quelque chose moi aussi. Oui, je dois dire quelque chose à ce frère qui nous a quitté beaucoup trop vite. Je tente de garder un air calme.
- Bonjour Jimmy, souriais-je, et tentant aussi de refouler mon envie de pleurer. Aujourd'hui on est tous là pour que tu se sois plus seul. Tu nous manques beaucoup..
Mes yeux commencent à se remplir de larmes. Pourquoi ça fait moins mal quand on ne connaît pas la personne?
- Tu nous manques p'tit frère, je cherche quelque chose d'autre, Ange a déjà tout dit, et moi je ne trouve plus rien. Je serre encore plus la main de Ange, et je lâche un regard rapide aux deux personnes qui se trouvent avec nous: Calypso que je connais déjà, et un type inconnu habillé bizarrement, espérant qu'ils lui dise quelque chose de gentil.

Tout semblait maussade au Mystery Orphanage. Oui, je m'étais décidé,
décidé à aller rendre visite à Kei et Ruka, enfin, à Ruka surtout,
parce qu'avec mon frère, on en était toujours eu stade "je te hais
Ichiru, tu as tué papa et maman".
Sauf qu'en entrant dans
l'orphelinat -que je ne connaissais absolument pas-, tout ce que je
voyais c'était des enfants, et des adolescents attristés, par la mort
du petit Jeremy Hopricks, ce gamin qui venait tout juste d'arriver il y
avait quelques semaines. Je les observais chacun leur tour, l'ambiance
aujourd'hui n'était pas telle que l'on me l'avait décrite, joyeuse,
non, là elle était triste, comme si tout était mort.
Je montais au
premier étage, cherchant où je pouvais trouver ma frangine, lorsque
j'entendis un hurlement qui venait de l'étage du dessus, voir peut-être
même encore au dessus.

" AAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaah !"

Je sursautais, et reculais même d'un pas. Simple réflexe. Un fantôme? On
dirait bien. Intrigué non seulement par l'ambiance, mais aussi par ce
cri d'enfant, je montais au deuxième étage, et observais les alentours.
Rien à signaler. Je montais donc au troisième étage, et croisais un
groupe de quatre personnes qui se dirigaient vers un escalier. Ils
étaient probablement là pour aider ce fantôme à trouver la paix, je
leur annonçait que j'étais exorciste, que je pouvais les aider s'ils en
avaient besoin. J'entendis des bruits au dessus de ma tête, des bruits
venant ... du grenier? Oui, probablement. Les deux adolescents
montèrent prudemment les marches, main dans la main, suivit du
professeur puis de la jeune femme. Je les suivis donc à mon tour.

"LAISSEZ MOI !!!"

Je sursautais encore une fois. Oui, c'était bien un fantôme, et quelque
chose me disait que ce devait être celui du garçon qui était mort
quelques jours plutôt. Jimmy. Je m'avançais dans la pièce sombre,
tandis que chacun disait quelques petits mots doux pour rassurer Jimmy.
Après qu'ils aient dit tout ce qu'ils avaient à lui dire, je
m'adressais à mon tour à Jimmy.

" Salut Jimmy. Je m'appelle Ichiru, je suis le grand-frère de Ruka et
Kei, tu les connais peut-être? Je suis venu ici pour t'aider. Tu n'es
plus seul Jeremy, nous sommes tous la pour toi, tu peux compter sur nous tous, sur tout l'orphelinat, sur tout le village même. Nous ne te laisserons jamais tomber, fais nous confiance "

Je souris à l'intention de Jimmy, pour le réconforter, même si je n'étais
pas sur qu'il me voit. Ca allait certainement être dur d'aider un
enfant, ils sont souvent plus dur à convaincre que les adultes.. Mais
nous y arriverons.

Il faut savoir vivre dans le présent et oublier un instant le passé. Voilà ce que je ne cesse de me répéter chaque jour. Profiter d'aujourd'hui, parce qu'il n'y aura peut-être pas de demain. Mais comment dire cela à un fantôme ? A un être qui n'a plus ni présent ni futur. Tout ce qu'il lui reste ce sont ces souvenirs, ceux qu'on évoque tous les uns après les autres. Te souviens-tu de nous ? Oh, little boy... Pourquoi a-t-il fallu que tu meurs ? Nous nous posons tous la même question; pourquoi si jeune ? J'aimerais tant pouvoir te prendre dans mes bras un instant, même si je sais que c'est impossible. Car tu n'as plus de consistance. Tu es un ectoplasme, une âme perdue.

-" Je suis mort..."

A présent je vois ces gouttes d'eau translucides naître au creux de tes yeux. Depuis quand les fantômes pleurent-ils ? Depuis que meurent les enfants... Ta voix se casse, comme brisée par le vent de la tristesse. La réalité est tellement dure à accepter, je le sais. Il est déjà si dur de voir la mort à travers les autres, alors que ressent-on face à sa propre destruction ? L'inconnu nous fait face, on a le choix entre avancer vers cette lumière éblouissante ou reculer dans les ténèbres... Il est tellement plus facile de rester se réfugier sur Terre quand on ignore où nous conduirait la mort... Mais notre monde n'est plus pour lui, il appartient au vivant, il faut savoir partir quand c'est notre tour. Lâcher la corde. Même si c'est douloureux, même si on ignore où nous mènera notre chute.

-" JE SUIS MORT !"

Son hurlement déchire mon coeur encore plus que les mots choisis. Il se répète parce qu'il a peur, parce qu'il n'arrive pas à y croire. Lentement il réalise qu'il ne pourra plus jamais jouer à la marelle avec les autres enfants, qu'il ne pourra jamais grandir, devenir père puis grand-père. Emporter si jeune... Il a le droit d'être fâché et de hurler sa haine au monde. Mais il ne peut pas rester, cette Terre là n'est pas faite pour lui. Où ira-t-il après ? Ca je n'en sais rien et j'espère pouvoir l'ignorer encore longtemps. Ce n'est pas à moi de lui décrire le chemin, je dois juste le lui montrer.

Soudain, le tonnerre déchire le silence, aussitôt suivit du martèlement de la pluie contre le toit. L'eau s'infiltre doucement dans le grenier mal isolé, venant courir sur nos visage, un peu comme des larmes. Je sens l'eau se faufiler dans mon col et je suis encore plus triste pour Jimmy. Les fantômes ne peuvent pas sentir l'eau frapper leur peau, couler dans un frisson avant de disparaître à jamais dans le replis d'un vêtement. Quand j'étais petite et que ma mère était encore de ce Monde, elle me racontait chaque soir une histoire avant de m'endormir. Aujourd'hui, l'une de ses légendes remonte dans ma mémoire et j'ai envie de la partager avec cet enfant au visage translucide.

- Un jour, une femme pleine de sagesse m'a raconté que la pluie était les larmes des nuages. Ils pleurent parce qu'on leur manque. Et c'est pour toi qu'ils pleurent Jimmy, ils t'attendent dans le ciel. N'as-tu pas envie de les rejoindre ?

Je lui souris tendrement, retenant mes propres larmes au bout de mes cils. Je n'ai pas le droit de me montrer triste, ce n'est pas mon rôle. Ange, Hayley, Ichiru et moi sommes là pour aider et soutenir cet enfant. Pas pour nous apitoyer sur son sort.

Va à présent, voler avec les nuages. Et quand il pleuvra, je reconnaîtrais tes larmes entre toutes...

L'enfant semblait calmé, mais cela ne dura qu'une fraction de secondes, il nous regarda tous, chacun notre tour, et des larmes coulèrent sur ses joues.

" Je suis mort..."


Effectivement Jimmy ... Tu es mort. Mais tout le monde était bien trop triste pour vouloir le dire à voix haute, tout le monde se dégonflait, parce que tout le monde l'aimait.

" JE SUIS MORT !"

Ses paroles firent trembler la pièce sombre. Pauvre Jimmy, le paradis est un monde sans contrainte où tu n'as besoin de te soucier absolument de rien. Tu seras heureux là-bas, bien plus que dans ce monde peuplé de sorciers noirs, et de gens qui nous veulent du mal. Tu n'auras plus tes amis pendant un moment, mais un jour, tu les retrouveras, ce jour là, sera le plus beau jour de ta mort.
Mademoiselle Artissa, la professeur prit la parole une seconde fois, réconfortant le petit Jimmy avec des paroles douces et recherchées, et puis ce fut au tour de l'adolescent, Ange je crois, de prendre la parole. Tout le monde cherchait à l'aider, mais personne ne savait réellement si Jimmy arriverait à passer de l'autre coté en acceptant sa mort. On m'a toujours dit que c'était plus dur de faire passer un enfant de l'autre coté, mais je devais avouer que jusqu'à là je n'en savais rien. C'était la première fois que j'avais à faire à un fantôme d'enfant, et j'avais l'impression que ça allait réellement être dur.
La plus commençait à tomber, claquant sur le toit, elle le traversa et vint dégouliner sur nous, sur nos visage, sur nos vêtements, mais pas sur Jimmy, non, elle le traversait.

" Écoute Jimmy, écoute la pluie, tu l'entends? Ce sont les anges, ils te réservent un accueil chaleureux, ils te font signe de les rejoignes, pour que tu sois heureux avec eux. Il faut que tu ailles les rejoindre, Jimmy. Ta place est parmi eux désormais. "

Cette phrase fut difficile à prononcer, mais c'était la vérité, rien que la vérité. Il devait s'en aller maintenant, rejoindre les anges au paradis, parce que c'était là où il allait aller, j'en étais sur, nous en étions sur. J'ignorais si Jimmy allait réellement accepter de s'en aller aussi vite, mais en tout cas, je l'espérais. J'espérais qu'il accepterait mes paroles, bien qu'elles fussent dures à acceptées d'un certain coté, le petit garçon savait que c'était la vérité. Oh oui, il le savait.