Le son de l'eau qui s'abat sur les parois retentit dans tout l'appartement. Une sonnerie de téléphone vient interrompre ce calme, malgré que nous soyons à Londres. L'appartement est très bien isolé. Le bruit de l'eau s'arrête. Un homme sort de la cabine. Il prends une serviette qu'il noue autour de sa taille et en utilise une autre pour ces cheveux. La sonnerie de téléphone retentit toujours. Il marche alors vers son portable. Le correspondant est noté sur l'écran, il décroche. Petit à petit, sa tête se décompose. Son sourire s'en va. La journée commençait pourtant si bien ...

Il tombe dans son canapé, juste derrière lui. Le téléphone tombe à terre, toujours en communication. Mais l'homme est trop choqué pour s'en préoccuper. On peut entendre des "Allô ? Allô ?!" fréquents, répétitifs et inquiets dans le combiné.

La communication se coupe peu après. L'homme fixe le vide, le néant, toujours aussi abasourdi. Il n'arrive pas à y croire. Donc il reste là, longtemps. Les gouttes sur son corps et dans ses cheveux gèlent petit à petit. Son canapé devient de plus en plus dur ainsi que ses serviettes. Soudain, il explose. Tout l'appartement est recouvert de gel, de quelques flocons aussi. Un cri strident sort de sa bouche, et il s'effondre, au sol. Il se recroqueville sur lui même, nu, souffrant, pleurant. Il n'arrive toujours pas à y croire. Ça ne se peut pas, il ne peut pas. Comment a-t-elle pu ?

Après quelques heures, il se relève, avec difficultés. Les larmes coulent, mais il est à présent en colère. Il sait où il doit aller. Il s'habille donc en vitesse, prend sa valise et la remplit en quatrième vitesse de choses et d'autres. Il descend les escaliers quatre à quatre et prend un taxi au passage. Direction l'aéroport. Durant le trajet, il envoie un SMS à sa patronne.

Problèmes familiaux. Ne serait pas là pendant quelques jours.

Il regarde le paysage londonnien défilé devant ses yeux. Il ne pense à rien. Il essaie de ne pas pleurer, même si c'est extrêmement difficile, alors que la nouvelle est si récente.

Une fois à l'aéroport, il se rue vers le guichet. Il demande un billet d'avion. Le vol part dans deux heures. Ce qui est parfait pour lui. Il passe son bagage à l'enregistrement et va patienter.

Après un voyage qui aurait pu être plus long, il arrive enfin à destination. Il passe chez ses parents, en vitesse, juste pour déposer sa valise. Il n'a pas envie que ça l'encombre durant son altercation. Il ne parle pas non plus à ses parents, tout aussi dévastés que lui. Il le sait. Mais là n'est pas son but. Il ne veut pas pleurer en famille, pas pour le moment du moins. Non, il se dirige vers une autre maison, en furie. Son corps est déjà gelé comme de la glace.

Il défonce presque la porte de la maison, entre en trombe, et cherche une personne en particulier. Une fois qu'il tombe sur elle, il explose, une nouvelle fois.

- Fergus ! Comment as-tu pu ?!

Un petit éclat dans ses yeux qui disparaît très vite. Il est abattu, la tête dans ses mains. Des mouchoirs disséminés à ses pieds. Quand il a relevé la tête, Logan a vu ses yeux rouges. Aussi rouge que les siens. Des yeux tristes, qui ont pleuré longtemps, beaucoup. Toute sa joie a disparue. Toute. Les voilà anéantis. Leur coeur le sont aussi. Mais Logan lui en veux, profondément.

- Comment as-tu pu la laisser partir ? Comment est-elle partie ?! POURQUOI FERGUS ?!

Il s'énerve, tout se transforme en glace autour de lui. De la glace dure et froide. Il s'effondre aussi par terre, à genoux, non loin de Fergus, sanglotant la perte de sa soeur.

Tic. Tic. Tic. Tic. Tic. Le vide, le néant. Rien, juste une horloge qui tente désespérément de s'accrocher à la vie en bredouillant ses tics incessants. Le temps. Le temps filait et ne manquait pas de lui rappeler sa solitude. Dans la pénombre, un homme se tenait, assis sur le sol, la tête dans les bras.
Rien en semblait plus l'atteindre. Il n'était lui même que néant. Vide, vide d'espoir. La vie semblait l'avoir quitté. Cette lueur vive qui traversait tantôt ses  yeux remplis d'émerveillement  et de malice semblait l'avoir quitté. A présent, il n'était plus rien. Les larmes l'avaient asséché. En réalité, il n'en avait même plus pour pleurer. Et puis à quoi cela servait t-il maintenant?  Elle était partie et elle ne reviendra jamais.
Il était perdu.

-Pourquoi? Lâcha-t-il dans un gémissement.


Les gouttes de pluie tombaient  de toute leur force sur les fenêtres. On ne voyait même plus les étoiles. Il ne dormait pas et elle non plus. Mais il était heureux. Il la serrait contre sa poitrine, son visage enfoncé dans sa chevelure rousse, sentant son parfum si doux de fleur d'oranger.  "Je t'aime" lui murmura t-il près de son oreille, à moitié endormi. Il la sentit esquisser un sourire. La petite dormait dans la chambre d'à coté. Un léger bruit se fit entendre. A peine audible avec toute cette pluie! Le portable de Kirsten vibra. Elle marmonna. Qui venait donc la troubler dans son sommeil?
Il l'a vit prendre son mobile, surement un message. Elle se leva. Nue, elle enfila rapidement une chemise de nuit.

-C'est qui? dit-il avec nue voix pâteuse et endormie.

Mais elle était déjà partie. Il n'avait peut être que parlé en rêve. Elle descendit les escaliers. Il somnolait, bercé par les tics de l'horloge se promenant entre ses rêves et la réalité. Ce furent les cris qui le réveilla. Une dispute éclatait en bas. Qui était-ce? Il se leva, enfilât rapidement un caleçon et en peignoir et descendit les escalier quatre à quatre. Il manqua de louper une marche. Il était tard et tout ce bruit n'était pas normal. Il entendit nue femme parler avec Kirsten.

-Kirsten qu'est ce qui...?

La salle se mis à tourner. Les lumières dansaient, les couleurs se brouillait. Il voyait les mots défiler devant ses yeux. Le sol dégringola sous ses pieds laissant place à un trou béant. C'est alors qui la vit: la jeune femme aux cheveux d'or. Claire. Son nom résonna dans son esprit tel un écho lointain. Il entendit sa femme crier et supplier, puis rien. Le néant.


La lumière lui transperça les yeux. Le jour s'était levé. Sa tête lui faisait mal. Son cerveau tambourinait  contre son crâne comme si ce n'était qu'une mauvaise cuite.  Etourdit il se leva. Kirsten... Que c'était-il passé? Il ne savait plus. Il sortit, le vent frais du matin lui caressait les joues. Les flocons de cendre grise entamait un ballet devant se yeux. Il tourna la tête, les cendres s'agitèrent et se ruèrent alors sur lui, lui fouettant les yeux. Elle était là. La chair calcinée. Sa vie s'effondra d'un coup.

-Kirsten... Lâcha-t-il dans un souffle.

Sa gorge se noua, son corps lui faisait mal, comme si des millions de poignard lui transperçait la poitrine.

-KIRSTEN!

Il l'a pris dans ses bras, espérant encore qu'elle allait se réveiller, que ce n'était qu'un mauvais rêve.

-Reviens, ne me laisse pas. JE T'EN SUPPLIE KIRSTEN RÉVEILLE TOI! S'il te plais... réveille toi...

Mais c'était bien réel, elle ne reviendrait plus. Ses larmes ruisselèrent contre ses joues. Il laissa échapper une plainte désespérée. Son corps s'effritait entre ses doigts. Plus il la serrait contre son cœur plus elle lui échappait. Morte. Ce mot n'était même pas envisageable.


Les gyrophares éclairaient le jardin. La voisine les avait appelés. Il était rentré, recroqueviller sur le canapé, tenant un foulard aspergé de parfum. Son odeur était la seule chose vivante qui lui restait.

-Dr Who? Je suis l'inspecteur Doyle du département  de la police magique. J'aurai quelques questions à vous poser...

Il le regarda à peine, ses yeux rouges, bouffis pas les pleurs regardaient au loin. Il était vide.

-Est-ce que vous vous souvenez d'un événement quelconque? Quelqu'un aurait-t-il pu en vouloir à Kirsten.

Mais il n'écoutait pas. Il n'entendit que  son nom,  et ce fut comme recevoir un coup de poing dans le ventre.  

-Qu'est ce que je vais dire à ma fille? Kirsten... Sa voix se brisa.

Ses larmes tachaient les coussins en tissus du canapé.

-je suis désolé docteur... Nous allons faire tout notre possible pour retrouver celui qui a commit ce crime. Mais pour ça il faut répondre à nos questions... Est ce que...?

-Ne vous fatiguez pas , il ne répondra pas. Lança un des officiers. Il ne se souvient de rien, on a déjà essayé. Le médecin a dit que c'était une amnésie port traumatique. Il ne se souvient de rien.

L'inspecteur s'éloigna, le laissant dans son chagrin. Il lui jeta un regard remplit de pitié. "Il ne se souvient de rien" les mots résonnaient dans sa tête. Si seulement...


Tic. Tic. Tic. Tic. Tic. Le vide, le néant. Rien, juste une horloge qui tente désespérément de s'accrocher à la vie en bredouillant ses tics incessants. Le temps. Le temps filait et ne manquait pas de lui rappeler sa solitude. Trois jours, trois insupportables et pauvres jours s'étaient écoulés depuis la mort de sa femme. Et pas une évolution dans l'enquête. Ils étaient navrés. Navrés de quoi? En réalité, personne ne cherchait vraiment. Orphéo avait d'autres chats à fouetter.  
Il était là, sur le canapé. Il n'avait pas bougé. Ses parents étaient venus chercher Melody pour s'occuper d'elle. Lui il en était incapable, il restait hanté par ses démons.
La porte vola en éclat. Logan était là.

- Fergus comment as-tu pu?!

Mais Fergus n'entendait pas. Il releva à peine sa tête. Il pleurait. Il n'osait même pas croiser le regard de celui qu'il avait pour habitude d'appeler frère.
 
- Comment as-tu pu la laisser partir? Comment est elle partie?! Pourquoi Fergus?

Mais Fergus était bien loin de tout cela. Fergus n'écoutait pas. Il ne voulait pas. L'air se fit froid, le salon gela. Logan s'effondra. Très bien, qu'il gèle tout. La vie sans elle n'avait plus aucune importance de toute façon. A quoi servait-t-il de vivre si la chose qu'on aimait le plus au monde; si ce qui nous importait le plus avait disparu du monde? Si le seul moyen de la revoir était de mourir?

L'homme qui venait d'arriver fut étonné de la non réaction de l'homme par terre. Comme si ... Il n'avait plus rien. Mais Logan comprenait, il se sentait pareil. Il était dans le même état, juste effondré. Mais il reportait ses sentiments sur quelqu'un, sur Fergus. C'était son mari, il devait la protéger. Alors comment avait-elle pu mourir ? Comment ? Comment était-ce possible ? A Little Angleton en plus, le village le plus paumé du monde, où personne ne verrouille sa porte le soir. Et pourtant sa soeur a été retrouvée morte sur le palier.

Le salon était déjà gelé, tout dur, et bientôt tout serait trempé, Logan ne réchauffe pas la température, il la refroidit. Il est incapable d'enlever la glace, il peut uniquement la faire apparaître. Une fois qu'elle est là on peut uniquement la briser ou la faire fondre.

L'homme araignée, comme certains s'amusaient à l'appeler était à genoux, dévasté lui aussi, comme Fergus, presque à ses côtés. Il avait encore une fois explosé. Il n'arriverait décidément jamais à maîtriser ces émotions. Enfin, c'était déjà mieux que quand il était très jeune, sans éducation. Maintenant au moins ce n'était pas à chaque petite dispute que la salle de transformait en patinoire. C'était face aux grosses émotions, quand il y en avait trop. Et quand on touche à sa soeur, sa petite protégée de toujours, alors, forcément, ça craque.

Alors, il se reprend, ce n'est plus de la tristesse, ce n'est plus de la colère, c'est de la haine. Il se relève, marche vers l'homme encore par terre, la fine couche de glace craque sous ses pieds. Il a envie de le taper, de le pousser, de lui faire du mal. Il est conscient qu'il souffre déjà, autant que lui. Mais il a besoin de déverser ses sentiments sur quelqu'un, et lui était censé la protéger. Il a failli à sa tache. C'est de sa faute. De sa faute.

Le voilà alors debout, la tête baissée devant l'autre homme, en proie à un dilemme, car il ne sait absolument pas quoi faire. Il a toute cette haine en lui, toute cette colère. Mais le voilà, les bras balants, ne sachant que dire, que faire. L'insulter ? Le taper ? Le pousser ? Tandis qu'il continue de réfléchir, il sert les poings, de plus en plus fort, les larmes coulent, sans qu'il puisse les contrôler, sa respiration se fait également plus forte. Et puis c'en est trop. Son poing s'abat sur le crâne de l'homme qui est normalement son ami, son frère.

- Tu étais censée la protéger Fergus ! Je te faisais confiance ! C'est de ta faute ça ! De ta faute !

Une nouvelle fois, il explose, il sent la magie monter en lui, alors il se retourne vers la fenêtre la plus proche, lève les mains vers elle et fait passer sa magie à travers elles, de la glace sort alors, explosant la fenêtre, comme si ça ne s'arrêtait jamais.

Enfin, ça se tarit, au lieu de traverser la fenêtre, les morceaux de glace tombent nonchalamment sur le sol, se rapprochant de plus en plus des pieds de l'homme à présent exténués. Bientôt, il s’évanouira si il continue sur ce rythme. Mais dès qu'il repense à cette perte, son coeur se brise, il se serre, et il a envie d'exploser à nouveau.

Logan se rapproche à nouveau de Fergus, l'agrippe alors par le col, le relève pour le regarder dans les yeux. Il sait que ce qu'il fait est cruel, méchant, qu'il ne devrait pas se comporter ainsi, que l'homme en face souffre tout autant que lui mais ... C'est plus fort que lui, il n'arrive pas à se contrôler.

- J'aimerais qu'elle ne t'ai jamais rencontrer.

Il le relâche alors, en espérant qu'il retombe à terre.

- Elle ne serait pas morte aujourd'hui !

Il se retourne à nouveau. Morte. Il n'avait encore jamais dit ça. Il n'osait même pas le penser. C'était trop dur. Ce fut alors un coup de massue. Il s'approcha du mur, se retenant à lui, les larmes coulèrent alors plus fort tandis qu'il abattait son poing dessus, dévasté.