a very merry unbirthday.
«
Je revois la ville en fête et en délire. Suffoquant sous le soleil et sous la joie. Et j'entends dans la musique les cris, les rires, qui éclatent et rebondissent autour de moi.»
Huit août de l'année deux mille treize, Los Angeles. Aujourd'hui est un jour spécial, enfin un jour qui aurait dû être spécial. Aujourd'hui ça fait.. Non, dans quelques heures ça fera vingt-cinq ans que je serais née. Anniversaire, c'est censé être un jour de joie, de bonheur. Un jour où la famille vous appelle toute la journée pour vous souhaiter une bonne fête. Votre jour, celui où vous recevez des cadeaux et où on vous apporte un gros gâteau avec pour défis de souffler toutes les bougies d'un coup. C'est un défi simple à relever quand le nombre de bougies n'est pas conséquent. Mais avec les années, les éteindre toutes d'un coup devient difficile. Petite, Logan m'encourageait à sa façon, me disant de prendre un grand souffle et de tout évacuer d'un coup en bougeant la tête rapidement. Ou alors on s'amusait simplement à enfoncer la tête de l'autre dans le gâteau ce qui ne plaisait pas toujours aux parents, surtout maman. Parce que maman nous faisait toujours nos gâteaux, c'était elle qui passait énormément de temps à la cuisine rien que pour nous, pour nous faire son gâteau spécial. Et jamais son tablier se retrouvait couvert de tâches, jamais elle n'avait à recommencer. Elle avait ce don en pâtisserie, j'ai essayé de nombreuses fois de suivre sa recette, mais jamais je n'ai réussi à le reproduire. J'ai un jour cassé le four après l'avoir ouvert et fermé trop de fois, je continue à croire que Fergus m'en voulait malgré tout un peu d'avoir massacré notre cuisine de chocolat et de farine également. Faire un gâteau avec maman, je lui avais demandé de m'apprendre à en faire un pour mon anniversaire, que ce soit son cadeau. Et maintenant, maintenant je me retrouve sans rien de tout ça pour ma journée spéciale.
« Nobody said it was easy.
No one ever said it would be so hard.. »
Quatre mois que nous sommes ici, quatre mois qui semblent être passés si lentement. Un semblant de conversation entre Claire et nous semble s'installer petit à petit, mais ce n'est toujours pas ça. Nous avons toujours du mal à lui pardonner ce qui s'est passé. Au fond de moi j'ai vraiment envie, mais cette.. Haine envers elle est beaucoup trop forte pour s'évincer même après tous ces mois. Le fait de n'avoir absolument aucune nouvelle de mes proches y est pour quelque chose. Aucun contact de quelque sorte avec eux, nous nous y sommes engagés au début de cette aventure forcée. Savoir des choses sur eux pourrait nous faire du mal. Je ne veux en aucun cas savoir s'ils ont fait quelque chose de mal depuis. Non, je sais pertinemment qu'une fois réunis ils me mettront au jus dès que nous jugerons qu'il est temps d'en parler. Une fois réunis, ce jour que je souhaite plus que tout atteindre, mais qui pourtant me semble si lointain. Hier encore je pensais confronter Claire, lui forcer à nous avouer clairement le pourquoi du comment. Catelyn et moi ne sommes pas stupides, et même si cette dernière est enceinte.. Ça ne pourrait être qu'un plus pour nous d'apprendre à faire face de front à nos problèmes. Les régler une bonne fois pour toute. Nous n'allons pas rester cachées encore quatre mois, c'est une chose que je refuse. Je nous sortirais de là, de quelque manière que ce soit. En ce jour de mon vingt-cinquième anniversaire c'est la promesse que je fais. Nous faire retrouver nos vies, retrouver nos familles. Melody, je reviendrai bientôt. Avant ton premier anniversaire,
je te promets.
Et ce matin j'étais allée m'acheter un petit gâteau au chocolat et une seule petite bougie. Je m'étais dit que.. Je devais tout de même fêter cette journée avec moi-même, seule. Je ne voulais pas que les autres soient là, j'avais tout simplement envie d'être un peu seule pour mon anniversaire, un peu seule à réfléchir. Qu'est-ce qu'ils seront en train de faire là-bas aujourd'hui ? Se souviennent-ils au moins de moi ? Peut-être que Logan m'aura offert un tournesol, qu'il y aura gravé une rune pour qu'il ne fane jamais, qu'il ne meurt pas. Et tous ensemble ils auront peut-être.. Que sais-je, lâchés des ballons. C'est la première fois qu'on est séparés, ça laisse place à tellement de possibilités diverses et variés. Beaucoup trop de possibilités. Appuyée contre la fenêtre de ma chambre, à force de trop y penser les larmes remontent jusqu'à mes yeux. Penser à notre vie séparée.. Je ne veux pas, parce qu'elle ne durera pas éternellement. Ne pas y penser, surtout ne pas y penser.
Je me frotte alors les yeux et vais chercher le gâteau et la bougie à la cuisine. Je les mets dans un petit sachet avec un briquet et une assiette. Je ne resterais pas enfermée, le ciel est orangé dehors. C'est magnifique à voir. Bientôt la nuit, bientôt les étoiles. Et nous qui aimions tellement aller les voir.
Après avoir enfilé les ballerines que nous avions achetées avec Catelyn il y a quelques jours et avoir ajusté la nouvelle robe, je suis sortis de l'appartement sans le moindre regard en arrière attrapant un linge. Après tout, je reviendrais dans ce maudit appartement, lui ne bouge pas, il est toujours là même quand je souhaite qu'il ne soit qu'un rêve éphémère. C'est une prison, une cage d'orée que je peux quitter, mais où je suis forcée de revenir. Et je m'éloigne de cette cage d'un pas lent, j'ai tout mon temps pour arriver à la plage. J'aimerais parfois pouvoir l'arrêter, le temps. Parfois il file à vive allure, parfois il dure une éternité. Les bons moments pour le premier, les mauvais pour le deuxième. Cela a toujours été comme ça, et ça le sera encore longtemps. Nous avions l'éternité devant nous avant.
Ici le sable est chaud, Los Angeles en été, là où on peut aller se baigner dans l'océan sans avoir froid. Là où l'eau est bonne, où le soleil ne se retrouve pas caché sous les nuages trop souvent. Ça change, beaucoup même. J'enlève alors mes chaussures, enfouissant mes pieds dans le sable pour m'habituer à la sensation. Je les prends d'une main et avance vers l'eau, c'est quand même plus beau quand on est près. Entendre le bruit des vagues, c'est un son si relaxant. J'étale le linge et m'assoies dessus en tailleur. La petite brise vient faire voler mes cheveux. Je les mets de côtés écartant ma frange. Là-bas, au loin dans l'horizon on peut voir le soleil descendre, dans quelques minutes il aura complètement disparu derrière l'océan. C'est un spectacle magnifique, encore plus beau si on a quelqu'un avec qui le partager. Mais j'allume la bougie que je pose sur le gâteau, regardant le coucher du soleil, regardant ma montre. Les derniers rayons réchauffent mon être tout entier avant que ceux-ci ne disparaissent, laissant place à une obscurité qui progresse rapidement derrière moi. Je vais me retrouver dans le noir.. Non, les lumières de la ville éclairent bien l'endroit où je me trouve. Je jette un dernier regard à ma montre et je soupire.
«
Joyeux anniversaire Kirsten, puissent tes vœux se réaliser. »
Je ferme les yeux, je n'ai même pas besoin de réfléchir à un souhait, mais je le pense très très très fort pour qu'il se réalise. Oui, je crois en ce genre de choses, il faut toujours avoir la foi. Je les ouvre et souffle la bougie solitaire, la fumée noire vole un moment avant de se dissiper dans l'air. Et voilà, j'ai vingt-cinq ans et je ne me sens pas plus heureuse que ça d'avoir été seule pour ce moment. Je regrette même de ne pas avoir invité Catelyn. Et ce gâteau ne me donne plus envie, je n'en veux plus. Je le remets dans sa boite, j'irais le ranger au frigo et qui voudra le manger pourra. C'est un cadeau que je vous fais avec plaisir. Moi je ne peux pas, je n'y arrive pas.
Je m'allonge sur le linge, une main caressant mon ventre par réflexe. Je regarde les étoiles qui apparaissent, elles scintillent, elles doivent avoir quelque chose à fêter. Au moins elles, elles restent là-haut, sans bouger, toujours à veiller. Les yeux clos je prends une grande inspiration et me tourne de côté un bras sous la tête. Et je souris, j'ai l'impression que ça fait tellement longtemps que je n'avais pas souris sincèrement. Je lui prends la main et la serre fort, je ne veux pas qu'on s'efface ou qu'on disparaisse au loin. Plus jamais.
« Hey, à quoi tu penses ? »
« Oh, à pas grand-chose, et toi ? »
« Que j'aimerais voler. »
« .. Voler ? Pourquoi ? »
« Pour vous retrouver, toi et elle, quoi qu'il puisse se passer. Vous retrouver toujours.. »
« Mmm, d'accord on sera des oiseaux alors. C'est déjà mieux que des flans mous. »
« Oi toi, la ferme et prends moi dans tes bras idiot ! »
Et tu pourrais éclater de rire enlacés sur ce linge tellement tu le trouves.. Lui. Parce que dans tes rêves tout est possible, tu peux leur parler et les serrer dans tes bras. Leur dire à quel point tu les aimes, et revivre cette journée comme tu aurais aimé quelle soit vraiment. Parce que dans tes rêves les limites n'existent pas. Parce que dans tes rêves tu es tout simplement ce que tu n'es pas éveillée, heureuse.
« .. Oh take me back to the start. »