Anja était encore essoufflée de sa journée. Elle effleura du bout des doigts ses lèvres qui lui parurent brûlantes. Qu’avait-elle fait ?
Fébrile, elle chercha une feuille de papier et un stylo. La grande sorcière noire, cheffe de Rosenrot, crainte et respectée, avait le sentiment d’avoir 15 ans. 15 ans et enfin trouvé un moyen de se venger.

Green,

Comment commencer une lettre destinée à celui qui a tout lâché, tout abandonné ? Bonne question. Mais qu’importe de toute façon, tu n’as plus d’adresse pour la recevoir, tu n’existes plus vraiment sur cette Terre. Peu à peu effacé, de partout. De mon corps également, désormais.
Si je me doute que tu as déjà deviné là où je voulais en venir, je me délecte d’avance de tes raconter cette histoire. J’espère qu’elle va te plaire.

J’ai beaucoup cherché après ton départ. Cherché à plaire à d’autre ce n’était étrangement pas vraiment difficile. Mais ça ne suffisait jamais. Pourquoi ? À chaque fois mon pouvoir se débloquait au moment crucial et envoyait tout valser. J’étais incapable d’aller plus loin, comme si mon corps t’appartenait encore, comme s’il était possible que, moi, je t’appartienne.
Tu imagines la rage que je pouvais avoir.
Et puis un jour j’ai croisé Bianco Soul dans les couloirs de Rosenrot. Évidemment, ce n’était pas un choix raisonnable et je l’ai suffisamment fréquenté dans ma vie pour comprendre qu’il n’accepterait jamais. Mais papa et maman Soul ont fait une flopée d’enfants. Et si, il était hors de question de m’imaginer ne serait-ce qu’une seconde avec certains – Silver pour n’en citer qu’un –, d’autres étaient bien plus protecteur.

C’est ainsi que je débarquai, en plein milieu de l’après-midi, en robe un peu trop courte, chez Redwan. L’aîné de tes frères, celui connu pour ses coups de sang. Celui qui n’aurait aucune peine à mettre de côté ses remords de baiser avec l’ex de son frangin.
Arrivé chez lui – chez vous en réalité, là où tu as grandi, où ton odeur imprime encore les meubles –, un esclave me fit entrer avant de me faire patienter dans le hall d’entrée. Ton frère ne mit pas longtemps avant d’arriver, les cheveux encore visiblement mouillé, signe probablement qu’il sortait d’une séance d’entraînement.

– Anja. Je sui snavré de t’apprendre que Green n’est pas là. Mais suis moi dans le salon.

Le contraire aurait été pour le moins… imprévisible. Le grand Green Soul, recherché un peu partout sur la Terre et en vérité caché dans la maison de ses parents. Ses parents qui, eux-mêmes, le traquaient. Ça aurait été un coup de génie, à coup sûr. Un vrai tour de magicien.
Je me suis débarrassée de mon manteau en le fourrant entre les mains du premier esclave qui passait par là, dévoilant du même coup mes jambes, l’échancrure de ma robe ou le lourd collier, signe du pouvoir de Rosenrot, accroché dans mon cou et qui descendait jusqu’à la naissance de mes seins.
Je suivis ton frère dans le salon, choisis un fauteuil en cuir assez proche pour qu’il puisse respirer mon parfum, puis croisai mes jambes.

– Que nous vaut l’honneur de ta visite ?

Je faillis tout relâcher et me dégonfler, chercher un prétexte débile puis retourner ruminer ma solitude. Mais le bruit d’un plateau posé sur une table me ramena sur Terre. Je voyais cette expérience comme ma dernière chance de me débarrasser de toi. Pour de vrai, cette fois.

– Thé ? Café ?

J’aurais préféré un bon verre d’alcool pour y chercher du courage. Mais depuis quand la grande Anja tremblait-elle devant un de ses soldats ?

– Du thé avec un peu de lait.

Je le regardai verser le liquide brûlant. Les esclaves étaient tous partis et cela m’arrangeait. Du bout des doigts, j’utilisai mon pouvoir pour fermer les portes du salon afin d’être certaine qu’aucune oreille qui traînait ne pourrait capter notre conversation. Puis je me penchai, juste un peu trop, pour attraper ma tasse.
Je pris tout mon temps pour la porter à ma bouche et avalé une gorgée encore trop chaude. Surtout ne pas précipiter les choses, pendre son temps. Puis, délicatement, je reposai la tasse et déposai ma main sur son genou.

– Pour être tout à fait honnête, c’est toi que j’avais envie de voir aujourd’hui.

Mon corps s’était emballé dans ma poitrine alors que je remontai ma main un peu plus haut sur sa jambe. J’avais terriblement envie que, enfin, ça marche.

[...]

Et pour la première fois depuis qu’elle écrivait des lettres qui restaient enfermées dans des coffres secrets ou brûlées dans des âtres, elle eut envie que son destinataire puisse lire celle-ci, au fur et à mesure qu’elle l’écrivait.

Un esclave prit le manteau de sa cheffe, dévoilant sa robe taillée court, plus court que d’habitude, qui moulait ses formes à merveille. Le collier saillant sur sa gorge attirait les yeux sur sa poitrine. Redwan essaya de ne pas la dévisager, découvrant ce corps ainsi vêtu pour la première fois. Il avait l’habitude de sa cheffe. Pas de la femme. Nul doute que l’homme qui partageait son lit avait de la chance. Lucky Bro.

Mais il avait fui, encore une fois. Lâche lâche lâche. C’était quoi qui était dur cette fois ? C’était plus dur que la première fois ? De quelle manière ? Cette fois, zéro humaine amourachée n’était morte. Alors quoi ? Quoi ? C’était la vie qu’il avait toujours connu, en quoi c’était difficile ?

Et puis, comment pouvait-on abandonner sublime créature ? Certains diraient « ah mais les relations humaines hm ». Pffff. On sait que chez nous c’est une relation de pouvoir, de domination, de concession, de compromis. Qu’est-ce qu’il cherche de plus ? L’amour ?! Pffff. Ridicule.

Redwan prit place, et Anja s’assît tout proche de lui. Il pensait qu’elle choisirait un siège plus éloigné, qu’ils puissent se faire face tout en discutant, tout en attendant peut être Allen ou Arya. Les personnes qu’elle serait venu voir en somme. Ou peut être Bianco pour lui confier une autre mission. Lui, on savait qu’il était doué pour tuer, traquer, torturer. Pas besoin d’expliquer le plan de long en large et en travers. On lui glissait généralement un dossier avec la cible, sans mot dire, tout était déjà dans le dossier. Et sinon, il faisait lui même le repérage qui était également une partie délicieuse. Se tapir dans l’ombre, noter les habitudes, attendre une occasion, alors que la proie innocente ne savait pas ce qui se tramait. Et d’un coup, l’horreur, la peur, et la mort. Délicieux.

Elle lui demanda du thé avec un nuage de lait. Il s’exécuta, ravi de ne pas à avoir à rappeler ses laquais qui avaient tout prévu sur le plateau. Elle se pencha pour attraper la tasse, il ne put s’empêcher de jeter un œil à son décolleté qui se révélait presque entierement sous la pose. Il déglutit. Il n’avait jamais envisagé cela. Enfin, avec elle.

Il ne l’avait jamais envisagé sous cet angle. Pour lui, elle était la cheffe, inatteignable, sur son pied d’estale. Lui n’était que le soldat fou empreint de rouge. Et la voir sous cet accoutrement aujourd’hui dévoilait une toute autre part d’elle. La femme, véritable. L’humaine dans le sens personne faite de chair, de sang, d’envie, de pulsions.

Il avait remarqué que toutes les portes du salon étaient fermées. Ce n’était pas le fait des esclaves, ils savaient que les portes restaient ouvertes quand les Soul recevaient, sauf si les maîtres de la maison avaient exigé la discrétion. Red n’avait rien exigé, ne sachant pas à quoi s’attendre.

Sa leader reposa sa tasse sur la table. Elle en profita pour poser sa main sur sa cuisse. Cela le surprit, il ne s’attendait clairement pas à cela.

– Pour être tout à fait honnête, c’est toi que j’avais envie de voir aujourd’hui.

Oh.

Ooooh.

La main remonta plus haut sur sa cuisse. Il la regarda, belle, séduisante. Il ne sût voir les émotions qui la motivait peut être. Redwan était mauvais en émotion. Mauvais mauvais mauvais.

Il restait coit. Se dérida enfin, posa lui aussi sa tasse, posa sa main sur celle d’Anja. Ne sût que dire.

D’habitude il savait. D’habitude c’était parfois aussi des gens qu’ils n’avaient pas non plus envisagé sous cet angle.

D’habitude c’était pas l’ex de son frère.

Ça changeait quoi que c’était sa cheffe ? Ce n’est pas comme si leur relation professionnelle allait changer. Ce n’est pas comme si leur relation tout court allait changer. Il n’était pas Green, il ne tombait pas amoureux.

– Une idée en tête peut être ?

Il s’exprima avec un sourire taquin, un rire dans la voix. Un désir de vengeance même peut être ? Qui de mieux qu’un frère pour se venger de Green qui l’a abandonnée, après tout. Ce n’était pas comme si il était en très bon terme avec ce dernier anyway.

Il noua ses doigts au sien, dévisagea son visage et son corps et fut encore une fois surpris de sa beauté. Comme si il ne l’avait jamais réellement regardée.

Il huma son délicieux parfum qui se mélangeait à son odeur naturelle pour la sublimer plutôt que de la cacher. Regretta qu’elle ne soit pas sur le même canapé que lui. Il replaça une mèche de ses cheveux blonds derrière son visage, pour dégager ses yeux violets qui vous transperçaient, en un geste doux et presque affectueux.

Il vérifia que les runes étaient bien activées dans la pièce. Ce n’était pas eux qui avaient fermer les portes, c’était elle, et elle n’avait aucun pouvoir sur la bâtisse. Il les enfermait donc aux oreilles indiscrètes des esclaves.

Green n'avait plus d'adresse. Plus de téléphone. Trop runé pour qu'elle puisse demander à un localisateur de le retrouver.
Il avait tout aspiré derrière lui, le ménage avait été bien fait, sauf dans les sentiments de la reine qui la boursouffle de l'intérieur. Cloques sur son coeur noir et dans ses veines.

Elle aussi voulait lui montrer qu'elle avait fait le ménage. Chez elle et sur son corps.

[...]

Je le lisais dans ses yeux. Ton frère n'était pas tout à fait insensible à mes charmes. La preuve que d'autres choses que le sang pouvaient exciter le cruel Redwan Soul. Et au moins avec lui, pas d'attachement, pas de sentiments stupides. Juste cette luxure si répandue dans le monde magique - un peu comme si, avec nos dons et pouvoirs, venait le goût du sexe.

Je remontai ma main le long de sa cuisse et il resta un instant sans savoir quoi dire. Allait-il se tendre ? Était-il de ses hommes que le pouvoir effrayait, par peur de se faire marcher sur leur virilité ? Ou au contraire cela l'excitait ?
Puis il posa sa tasse sur la table et sa main sur la mienne, et j'y vis une forme de victoire.
Sur toi bien plus que sur lui.

- Une idée en tête peut être ?

Je souris, l'aîné des Green avait compris mes allusions bien peu subtiles. En même temps, s'il ne les avait pas saisies, je ne savais pas ce que j'aurais pu faire de plus à part lui sauter dessus.
Il noua ses doigts aux miens et je sentis ma tension aussitôt monter. Pas à cause du désir qui avait commencé à monter dans la pièce, mais toujours cette même impression de te voir dans un coin, nous juger, me juger, une présence fantôme pour me rappeler que je t'appartenais.
Je n'appartiens à personne et je serrai la main de Red un peu plus fort.

Il se pencha un peu plus vers moi pour remettre derrière mon oreille une longue mèche blonde et je retrouvai dans ses gestes un peu des tiens. C'était normal après tout, vous aviez grandi ensemble. Malgré les différences il y avait aussi des similitudes dans vos gestes  vos expressions, le détour d'un sourire.
As-tu déjà remarqué comme les lèvres du plus grand de tes frères ressemblent aux tiennes ?
Est-ce que dans le sexe aussi, je pourrai lire ce qui vous rassemble ?

C'était aussi un peu pour ça que j'avais sonné au grand manoir Soul. Pour contourner le blocage en arnaquant ma tête, en lui donnant un peu de Green distillé dans un autre.
Afin d'arriver enfin à ouvrir mon corps à un autre que toi. Toi, toi, toi. Le seul à avoir jamais marqué ma peau, caressé mes cuisses, embrassé mon sexe. Ça avait toujours été toi.
Jusqu'à aujourd'hui.

- Beaucoup d'idées en tête.

Je m décrochai nos mains pour me relever, dos à lui et je défis lentement les noeuds qui retenaient ma robe en place. Sensualité de la reine. Le tissu tomba à mes pieds, devoilant mon corps presque nu, dont les muscles ressortaient dans la lumière presque tamisée du salon. Ce corps que tu connais si bien, sous le regard d'un autre.

- Sauf si tu n'en as pas envie...

[...]

Libérer le corps pour libérer le coeur.

La sorcière interrompit un instant l’écriture de sa lettre pour observer son reflet dans le miroir. Avait-elle changé ? Un détail, même imperceptible, un port de tête, un froncement de sourcil, un tremblement surprenant.
Elle ne vit rien.
Si ce n’est la robe noire qui la sublimait, la même robe noire qui, quelques heures auparavant, gisait dans le manoir Soul.

[...]

Peut-on dire non à Anja ? À Dorian ? À ces grands méchants comme on les lit dans les livres ?

Red ne dit pas non. Il roula les yeux, posa ses mains au niveau de mes genoux avant de remonter, doucement, caressant mes jambes nues, mon corps, remontant sur mes fesses pour m’attirer un peu plus vers lui, mon ventre au niveau de son visage, son souffle contre ma peau. Je me demandais quelle odeur se dégageait de mes cuisses, si elle l’enivrerait comme elle t’enivrait toi, s’il me désirerait comme tu me désirais toi, avec toute ta violence.
Il se releva, son visage ne décollant pas de ma peau, caressant mon ventre pour remonter jusqu’à ma poitrine, faire sortir un sein, le lécher là où toi tu le mordais, glisser sur la clavicule là où toi tu t’arrêtais, remonter jusqu’à mon oreille.

– Je ne suis qu’un homme. Que puis-je faire contre mes pulsions surtout quand tu me l’offres sur un plateau ?

Ma respiration se bloqua. Ne pas paniquer, surtout pas à ce moment. Il ne fallait pas que je trahisse mes peurs, mes dégoûts des autres corps. Reconnaître ton odeur contre le musc sauvage de ton frère. Lire tes gestes dans le jeu de ses doigts contre le bout de mes seins. Laisser venir l’excitation et le désir sans essayer de trop penser, de trop intellectualiser. Comme au premier jour avec toi, dans ce bureau.
Le début de tout le reste.
Le début de trop de restes.

Il se détacha de moi pour ôter ses habits, une bosse déformant son boxer. De ce côté là non plus, ton aîné n’avait rien à t’envier. Alors qu’il revenait contre moi, ses lèvres s’imprimant contre les miennes et que je laissai entrer sa langue dans ma bouche, je me demandai s’il devinerait que mon corps n’avait été touché que par le tien. Que les nuit de folie et de sueur s’étaient toujours déroulées dans tes bras. Qu’il n’y avait eu personne d’autre, ni avant, ni depuis.
Trop tard. Tu étais parti et Red était là, presque nu.
Je ne voulais pas être simple spectatrice, jouet entre les mains de ton frères. Alors je répondis à son baiser, une main derrière sa nuque pour l’approcher plus près, plus férocement contre moi, mon autre main descendant vers sa verge gorgée de sang, décidée à en finir vite. Pas le temps pour des heures de préliminaires, pour des mots débiles, juste du cul, son sexe dans le mien.
Lui dans moi.
Mes doigts glissèrent sous l’élastique de son boxer, avant de la pousser le long de ses jambes, faisant surgir son sexe droit contre mon ventre, brûlant son ma peau. Et ma main autour pour l’exciter encore plus, toujours plus loin, plus loin de toi.

[...]

La robe noire, témoin de son aventure, preuve de l’existence de Redwan entre ses cuisses.

Trop d’intensité dans son corps, dans le mouvement de sa main qui, fébrile, traçait les lettres cassées sur le papier. Reine sur une vieille chaise en bois, un coin de bureau dans une pièce aux murs nus, isolée du reste du monde.
Anja planquée, Anja essoufflée.
Le matelas nu sur lequel elle devrait passer la nuit, loin des autres souvenirs, loin des bras des Soul. Green et Red dans la nuit, étoile verte contre étoile rouge. Un lit seul pour combler l’absence, la douloureuse.

[...]

Redwan avait-il deviné que je ne faisais que l’utiliser pour combler ton absence, pour me venger de ta disparition ? Lisait-il dans mes gestes les tremblements de la seconde fois, de celle qui n’y connaissait rien, du léger manque d’assurance de la reine qui, pourtant, n’avait jamais peur de rien.
Si tel était le cas, il n’en laissa rien paraître. Peut-être qu’il était trop concentré sur le prix, sur l’idée de me baiser, salement parce qu’avec ton frère ça ne pouvait être que sale, comme les esclaves qu’il martyrisait et le sang qu’il aimait faire couler, toujours plus.
Aimait-il aussi voir le sang sur ses conquêtes ?
Il y avait une forme de facilité terriblement excitante dans toutes ses scènes. Redwan n’était pas toi. Pas besoin de se battre, pas besoin de hurler pour provoquer, capter son attention. Il suffisait d’un peu de nudité, de séduction, quelques mots bien placés comme un collier de perles. Rien de plus pour avoir son corps nu contre le miens et ses doigts qui glissaient sous le tissu de ma culotte pour venir me caresser là où tu me caressais.
Pas comme tu me caressais.
Puis les choses s’accélérèrent. Il arracha le dernier bout de tissu avant de se mettre à genou devant moi, sa langues, ses mains, partout sur moi, fouillant tout alors que ma main s’accrochait à ses cheveux, mes ongles contre son crâne. Pas peur de lui faire mal, de faire faux, qu’il puisse détester ce moment. Redwan était bien trop fidèle à Rosenrot pour aller crier sous tous les toits qu’il avait baisé la reine et qu’elle était un mauvais coup. Même pas une question de respect. Juste qu’il savait où sa place se trouvait.

Mais sa langue n’était pas la tienne, sa langue ne savait pas, ne trouvait pas comment me faire jouir. C’était simplement un contact un peu mouillé sur mon sexe, une pression qui me fouillait. Des gestes mécaniques, pas de vrai plaisir. Une alternance tantôt lente, tantôt rapide, jamais vraiment agréable.
Lorsqu’il remonta, embrassant mon corps, toujours, toujours, lorsqu’il se redressa pour me faire face, j’en avais déjà assez. Je le repoussai jusqu’à ce qu’il se retrouve allongé sur le parquet – c’était facile, pour des corps rompus au combat, de savoir en faire tomber un autre, même dans l’intimité la plus extrême. Puis je le chevauchai, me positionnant au-dessus de son sexe, sans plus attendre, enclenchant le ronronnement de mes hanches.

Je n’avais pas envie de jouir. Juste que ça se termine, qu’il me salisse, de pouvoir repartir.

[...]

Toujours penchée sur son écriture, la reine noire essayait de ne pas penser à l’absence de tissu sur ses fesses.

Reine culottée, déculottée sur le bois de la chaise, les fesses à l’air dans une humiliation certaine. Mais pas plus que l’humiliation de s’être fait abandonner par celui qui lui avait été promis – pour des raisons de pouvoirs, certes, mais Green et elle savait que ça allait plus loin que les machinations d’Allen Soul.
Toujours prête à gratter plus loin la grande sorcière noire de Rosenrot, à s’enfoncer plus profondément et à tracer plus sur le papier.

[...]

Ton frère ne chercha pas à me repousser lorsque je le poussai par terre, et je me glissai immédiatement sur lui pour bouger, vite, toujours plus vite, que ça passe. Mais Redwan n’avait pas l’air du genre précoce et après s’être calé un moment sur mon rythme, ses mains agrippées à mes fesses pour me pénétrer encore plus profondément, il se redressa pour mordre mes tétons – avec tellement de force que la marque de ses dents est encore imprimée à l’heure où je t’écris. Puis se releva, sortant de mon corps pour me retourner, me prendre contre le canapé, dos à lui, ses mains venant claquer mes fesses à un rythme effréné, toujours plus fort, toujours plus vite.

Et je serrai les dents encore plus fort, fixant le mur en face de moi, les veines dans le crépi, le cuir du canapé sous mes mains qui s’accrochaient, la souffrance entre mes cuisses, sur mes seins, mon corps dans la violence.
Encore et encore.
Et puis je n’y tins plus. C’était trop, mais c’était pas assez. Je glissai ma main dans mon dos, agrippant sa verge pour la positionner contre mon anus, hurlant, autant que la violence qui glaçait mon sang.

– Encule ta reine, chien de Rosenrot !

Qu’il me déchire. Qu’il me déchire en deux, me démembre, m’éparpille. Qu’il me sorte de ta présence permanente. Je voulais pas ta douceur, ta présence, ta violence calme entre mes reins. Je le voulais avec la douleur et la haine, la rage qui pétait dans mes entrailles, la rage pour toi et pour tout ce que tu m’avais fait, la violence de ma souffrance, mais projetée sur mon corps et ma sexualité.
Plus que l’acte, il me fallait la brutalité dans mes hanches pour m’éloigner de toi, m’imprégner de la guerre dans le sexe, de la force virile de ton frère prêt à me détruire toujours plus profondément, alors que la sodomie m’explosait dans une torture sèche. Du cul animal, bestial, du cul comme j’en avais jamais fait avec toi, qui m’arrachait la peau à l’intérieur et me démolissait. Encore plus fort que nos combat, que nos qui se brisait dans la détresse de notre haine mutuelle.
Ça saignerait. J’étais sûre que ça allait saigner. Et secrètement j’espérais que ça ferait plaisir à ton aîné, que ça le rendrait encore plus violent, encore plus salissant, encore plus jouissant dans mon fondement.

Redwan, Redwan, Redwan.

[...]

Sa main s’arrêta un instant au-dessus de sa lettre, hirondelle menteuse planant tristement au-dessus de sa proie.
Comment cacher les mots, comment alors que partout dans son encre ça hurlait la seule personne à laquelle elle pensait vraiment, en plein durant sa première sodomie.

Green, Green, Green.

Le rythme était installé, la sueur ruisselait, les corps claquaient, le temps coulait. Sa reine était dis à lui, il la prenait avec de violents accoups, essayant de faire claquer toujours plus fort leur deux corps ensemble. Essayant d’aller jusqu’au bout. Essayait-il de lui faire mal sans s’en rendre compte ? Peut être que ses tendances BDSM étaient maintenant trop ancrées dans sa chair et dans ses habitudes. Mais il n’y avait pas le moindre cri de souffrance de l’autre part, alors il continuait.

Puis Anja se redressa quelque peu, prit son entrejambe dans sa main et le positionna à l’entrée de son anus.

– Encule ta reine, chien de Rosenrot.

Il obéit avec plaisir, rentra sans sonner, sans prendre de précaution. Il ne pouvait pas savoir qu’elle était vierge de ce côté là. Il ne forçait jamais la sodomie, il attendait qu’on la demande ou alors il proposait. Alors, dans ses habitudes, quand c’est demandé comme ça... oui, il y allait sans prévenir.

Les peaux se déchirèrent. Il ne fit d’abord pas attention au sang qui coula légèrement, il se dit que c’était bon, que c’était si serré que oh c’était bon. Il se cambra, allant toujours plus loin, toujours plus fort. Mais pas toujours plus haut cette fois.

Il alla lentement, plus pour son propre plaisir que celui de sa compagne d’aventure. C’était sec, il avait un peu de mal à bouger. Il se retira, de pencha et lécha la zone sans timidité. Il sourit au goût du sang. Il ne put s’empêcher de toucher sa vulve en même temps.

Il se redressa bien vite, attrapa les cheveux de la blonde, et pénétra sans sommation, encore une fois, avec avidité. Avec violence. Il tira sur les cheveux pour la cambrer d’avantage, pour avoir plein de sensation différente en une seule fois.

C’était pas tous les jours qu’on pouvait réaliser l’exploit de conclure avec la cheffe de Rosenrot. Ça avait quelque chose d’exaltant de fricoter avec le pouvoir.

Il tenu le rythme autant qu’il put, restant dans son anus, se pencha parfois sur elle, léchant sa colonne vertébrale, remontant jusqu’à son cou. Allant titiller son clitoris.

Il n’avait malheureusement pas de godemichet dans cette salle pour pénétrer son vagin en même temps.

Enfin, il jouit. Il se déversa à l’intérieur d’elle, se retira alors que ce ne fut pas fini pour finir sur son dos. Il caressa sa fesse et s’affala nu sur le canapé en cuir de la maison. Il ne doutait pas qu’elle allait filer aussitôt que cette histoire fut finie.

Il se resservit d’une tasse de café qu’il commença à siroter. Il attendait que la sueur sèche d’elle même avant de se revêtir pour retourner sous la douche. Mais inutile de tacher les vêtements d’un blanc immaculé.

Elle avait envie d’une clope. D’une clope et d’alcool, de se mettre la tête à l’envers pour oublier la douleur qui pulsait encore dans son anus, la trace de sang qu’elle ne manquerait pas de voir sur la chaise sur laquelle elle était assise.
Mais il ne fallait surtout pas oublier Redwan. C’était Green qu’elle devait effacer.

[...]

J’eus l’impression d’avoir été éventrée. Il pénétra en moi avec précipitation, sans faire attention, déchirant la peau et je sentais déjà le sang qui coulait. Déchirée dans une douleur difficile à exprimer.
Mais je serrai les dents. Ce n’était rien face aux heures de combat, face aux plaies qui traversaient parfois ma peau alors que nos ennemis appliquaient leurs armes contre nous. Je me dis parfois que la vie humaine doit paraître bien insupportable. Comment supporter la souffrance quand tu ne l’as jamais connue ?
Voilà notre avantage, Green.
Sauf que moi, la souffrance de ton absence, je ne la supporte pas. Alors je préfère encore celle de sentir ton frère me déchirer l’anus, sa main accrochée à mes cheveux pour me pénétrer encore plus fort, encore plus loin. La perversité de sa langue qui se dardait parfois sur mon dos, léchant le long de l’os pointu de ma colonne vertébral. Et ses doigts qui martelaient mon clitoris, incapable de trouver la manière de l’exciter vraiment. C’était juste une douleur de plus dans cet océan de souffrance.
Mais ce n’était toujours rien face à ton absence.

Enfin, il jouit, après ce qui m’avait paru être une éternité. Je le sentis vibrer contre ma chair, puis une partie du liquide chaud atterrit sur mon dos. Sa main caressa mes fesses, comme s’il remercierait un animal de l’avoir laissé le saillir.
C’était ça en fait. Un truc bestial, qui n’avait aucun sens si ce n’était celui de t’oublier et de te faire du mal.
Il s’affala ensuite sur le canapé, nu, l’air satisfait de lui-même. Je repris un instant mon souffle avant de me relever, concentrée pour ne rien laisser paraître sur mon visage. Pas la douleur qui crevait le bas de mon corps à cet instant. Je sentais le liquide brûlant qui coulait contre mes jambes, alors j’attrapai un de ses habits pour m’essuyer. Je savais qu’il n’oserait rien dire, pas devant la reine qui, après s’être fait enculer, reprenait sa place.
Le tissu blanc fut rapidement sale. Un tableau fait de brun et de rouge, une laideur incroyable que je gravais pourtant dans ma mémoire. Que j’aurais eu envie que tu voies, envie de te dire « regarde, je sais faire sans toi ».

Mais c’était ridicule, non ?

Puis sans rien dire de plus, je remis ma robe, sortit de cet affreux salon pour récupérer mon manteau et sortir dans l’air glacial extérieur.

Anja

Elle referma la lettre qu’elle laissa ainsi posée sur le bureau avant d’allers s’écrouler sur le matelas nu de la pièce. Faire le deuil d’une histoire qui était morte à ses yeux. Un deuil solitaire, loin de tout, loin de tous.