Plafk.
La photo tombe sur l'eau, ride la surface d'un bleu foncé. Je vois les couleurs s’effacer lentement. Je n'arrive pas à croire que j'ai put faire ça. Mon passé envoyé dans la flotte, mon passé noyé dans ce port. Ca me fait mal, et en même temps, je crois que j'avais besoin de le faire. Pour me détacher un peu d'avant. Vous savez, cette photo, c'était juste moi dans ces bras. Juste.. Comme s'il ne représentait que ça. J'ai fais une photocopie avant de la balancer. Je ne voulais pas la perdre à jamais non plus. Mais l'autre, elle est là où je n'irai pas la chercher : Tout près de l'acte d'adoption. Du russe. Celui qui à détruit ma vie. Et lui, je l'oublierais volontiers.
Plafk.
Une seconde photo en noir et blanc. Encore lui, son regard. Marron clair. Non, il n'était pas vert émeraude, ni bleu océan, il était juste lui. Une larme vient rouler sur ma joue, avant de tomber dans l'eau. September est comme toujours près de moi, mais elle n'est ni joueuse, ni câline. Elle est juste assise au bout du ponton, regardant les diverses choses tombant dans l'eau. Elle jette de temps en temps un regard sur mon visage, gémit un peu mais n'ose pas s'approcher. Je l'appelle et elle se blottit contre moi, gémissant à nouveau. Elle ne pouvait pas comprendre pourquoi mon coeur se déchirait ainsi. Pas ta faute ma belle. Une caresse sur la tête, puis laisse aller au vent ta peine.
On m'avait dit.
Que les profs, que des gentils, que les cours, que du bonheur, que ces sourires étaient vrais. Ils mentaient, et pourtant j'y suis allé. Mais dès que tu dis, oui oui, je suis inscrite, les masques tombent. Et voilà, la galère, les problèmes, les heures la boule au ventre dans la pièce noire, aux milles odeurs, de douleurs.
Le soleil va disparaître derrière l'eau. Mais pas encore. D'abord, il donne sa couleur rosé, violine à l'eau. Mes pieds à quelques centimètres du liquide froid font danser des ombres sur sa surface. C'est joli, ça, quand même. La solitude fais du bien, parfois. Vous savez, c'est dur, une semaine au milieu de tous ses sourires. Ces regards heureux, ces cris de joie. Nous, y'avait toujours un silence de plomb. Alors voyez-vous, ce coucher de soleil, il vient à point. J'ai envie de rentrer dans l'eau. Même habillée. Même si elle est gelée. Même si je suis malade demain.
Nan. Nan parce que finalement je ne suis peut être pas seule. Je me relève lentement. September me suit immédiatement, mais je ne vois personne. Marre d'être parano. Je secoue la tête. Envie de partir. De ne pas rentrer. Mais y'en a que je ne pourrais pas laisser derrière moi. Qoralie ? Ma ponette ? Hey, je l'ai pas sauvé pour la laisser là. Et Milway, Milway qui aime tant dormir, jouer, chasser. Limite si je le nourris deux fois par semaine. Il aime beaucoup les oiseaux, mais a une sacré préférence pour les rats...
Je me rassois finalement. Il reste le papier redevenu blanc. J'ai presque envie de le reprendre, revoir une fois de plus son visage. Je jure. T'es trop débile Amy hein. Bah voilà, la larme coule. Je l'essuie d'un geste rageur. Puis me retourne. Sept ? Mince, le chien ! Pourtant, y'a pas des tas de cachettes sur le pont... Le chien ? J'entend gémir. Oups, elle était tombée à l'eau. Je la tire rapidement.
-" T'es pas douée avec tes pattes toi quand même. " Oui oui, je le pense. N'empêche pas que je l'aime hein ! Je tire une serviette de mon sac. Je sais pas ce qu'elle fou là, mais elle est bien pratique. Au cas où la belle soit pleine de boue, pour de je puisse la faire rentrer dans l'orphelinat. Je l'enroule dedans. La frotte tandis qu'elle se roule en boule. La minute d'après, elle dort. Et me voilà à nouveau seule face a mon coeur qui me tiraille. Je détache mes cheveux qui étaient reliés en un chignon. Ils n'ont pas pris la marque de l'élastique, c'est déjà ça. Ils sont châtains clair et souple. Ils sont fins, et je les aimes plutôt bien là.
Du bruit ? Je me lèverais pas. Aucune envie que ça fasse comme tout à l'heure. Je soupire. Le soleil va disparaître. Et moi, je vais devoir faire de même, aller dans cette chambre que je n'arrive pas à aimer. Je m'appuis sur mes mains vers l'arrière. Mes cheveux en cascade souple sur mon dos, je lève les yeux sur des étoiles qui brillent déjà. J'aime bien la nuit.
Et si cette fois le bruit était réel?
[/font]