Notes pour une âme en peine

Solitude. Béatitude.

Enfin. Qu'est-ce que Luke pouvait être tannant quand il s'y mettait... Surtout quand Matt avait besoin de pratiquer. Et bien quoi? Vous pensez qu'on prend des cours de musique juste pour le plaisir? Et non! Il y a bien sûr au moins deux concerts: celui de Noël et celui de fin d'année. La performance hivernale du violoncelliste l'avait laissé à désirer malgré les acclamations et les commentaires positifs. Lui, il savait qu'il pouvait faire mieux. Beaucoup mieux. Le concert était dans quatre jours et Mathew comptait bien en profiter. Sauf que Luke avait d'autres projets. Il voulait courir, sauter, crier, en fait faire toutes les choses qui empêcheraient son meilleur ami de pratiquer. Alors le musicien était sortit à l'anglaise.

Pendant un bon moment, il déambulait dans l'orphelinat dont il connaissait une bonne partie. Mais Luke aussi la connaissait. Alors il fallait trouver un autre lieux. Un endroit où personne ne pourra le trouver, pas même Mrs. Mystery. Plus facile à dire qu'à faire. Sois la place était barrée, sois elle était occupée. Il avait faillit ouvrir une porte mais c'était arrêté net. Il y avait un gars et une fille de l'autre côté. C'était assez facile à dire: les hommes et les femmes ne ressentaient pas l'amour de la même manière. Un humain aurait sans doute pu en dire plus, mais il n'était pas un Humain. À l'œil nu il paraissait Humain, certes, mais il était touche-à-tout. Il n'était pas vraiment Humain, mais il n'était pas non plus un Sorcier. Il était un Mêlé, un être dans le milieux. Il n'était ni un expert en magie, ni un virtuose en dons. Et il ne voulait pas l'être. Sa nature timide n'aimait pas vraiment fouiller dans les sentiments des autres, et avoir de l'empathie plus puissante ne ferait qu'empirer les choses.

Il passa finalement devant le salon de piano. Il allait passer son chemin quand une vague de tristesse inonda son esprit. Il sentit une larme rouler le long de sa joue et il se retourna vers la porte d'if. Une partie de lui voulait ignorer ce sentiment et continuer sa route alors que l'autre le suppliait à entrer. Finalement son don l'emporta et il poussa la porte massive et insonorisée.

"Euh, bonjours?"

Une couleur.
Un sourire.
Un rire.
Tout me la rappelle.

Aujourd'hui un des garçons de l'orphelinat a trouvé un bracelet et me la donner. Il est tout rouge ce bracelet. Comme celui de maman. Alors je l'enroule autour de mon poignet en faisant deux tours parce que sinon il serait trop grand pour moi. Je souris, parce que je n'ai pas encore réalisé l'ampleur de la réalité. Je souris et je dis merci à celui qui me l'a offert. Je suis heureuse. Mais ça ne dure jamais bien longtemps...

Déchirure.
Ce même bracelet.
Même poignet.
Même couleur.

Les larmes commencent à couler effaçant mon souvenir et mes remerciements. Toujours plus lourde comme si en elle, elles portaient tout le poids du monde dans leur reflet. Tout nos problème. Disparu. Tombé. Comme les larmes sur les joues, comme l'eau qui s'évapore. Je ne veux pas qu'on me voit pleurer alors je me réfugie ici.

On ne viendra pas.
Personne ne vient jamais.
Pourquoi viendrait-on ?
Voir une petite fille pleurer ?

Sauf qu'aujourd'hui c'est différent. Alors qu'une larme plus dense que les autres se préparent à combler la longueur de mon menton au sol, j'entends le bruit de la porte qui s'ouvre. Surprise, je relève la tête. La goutte vacille.

"Euh, bonjours?"

Equilibre.
Défi.
Echouer.
La larme tombe.

Visiblement c'est un des garçons de l'orphelinat et il est tout seul. Tant mieux, peut être qu'il repartira si je lui demande ?

- Est-ce que tu pourrais par...

Soudain je me tais. Le poids d'un fardeau est moins lourd à deux.

- Attends, reste.

Des yeux qui brillent.
Des yeux d'enfant.
Au reflet d'adulte.
Et de secret qu'ils n'auraient pas dû voir,

- S'il te plaît...

Moi, le poids de mes souvenirs est très lourd...

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« Elles n'étaient pas filles des elfes mais bien enfants des hommes. »

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"Attends, reste. S'il te plaît..."

Mathew se faufila entre les canapés et les tables basses. C'était assez difficile, compte tenu de l'étui en plastique qui pendait sur son dos. Il faisait quasiment sa taille et gênait sa mobilité, même s'il n'était pas très lourd. Il fini par se mettre en petit bonhomme devant la petite fillette. Son visage était mouillé de larmes. Matt remarqua alors que ça faisait un bout qu'il n'avait pas jouer avec l'eau et le besoin se faisait sentir. Lentement, ouvrit ses paumes devant les joues de la petite. Lentement, les larmes se mirent à se détacher de la peau. Il flottèrent autour des main du musicien, petites bulles d'eau salée. Puis, elles changèrent de forme. De petites ailes translucides, des pattes et une petite tête. Finalement, elles s'allumèrent d'une faible lueur turquoise. C'était à présent une demi-douzaine de lucioles qui volaient autour de Matt.

"Ne t'inquiète pas, je suis ici."

Il regarda la fillette. Elle lui rappelait l'époque quand lui il venait d'arriver. Il se sentait perdu, seul. Mais il y avait eu Luka. Alors cette enfant l'aurait lui. Les insectes continuait à virevolter, illuminant le coin de leur éclat. Les cheveux châtains de la demoiselle prenait se même éclat, lui donnait une apparence féerique. Elle était mignonne, ou du moins elle le serait si elle ne pleurait pas. Mais ça, c'était son travail.

"Dis-moi, c'est quoi ton nom? Moi, c'est Mathew."

Et il lui afficha un sourire radieux. Il savait comment le faire. Luka lui avait montré. Non, cette petite fille avait besoin d'un grand frère ou d'une grande sœur. Mais malheureusement, Matt n'était pas encore prêt à prendre ce rôle. Il pouvait devenir son ami, mais sans plus pour l'instant. Lui aussi avait encore des problèmes à gérer. Comme le violoncelle. À ce rythme, il n'allait encore pas pratiquer... Mais pourquoi il pensait à ça? Il y avait devant lui une personne qui avait besoin d'aide, et lui, il pensait à ses problèmes!

"Qu'est-ce qui ne va pas?"

La réponse, il pouvait la deviner, mais il avait besoin qu'elle parle, C'était bon pour l'âme. Comme la musique. Bon sang Matt! Oublie la musique!

Petites bulles.
Au reflets arc-en-ciel.
Qui volent.
Et volent.

J'étais fascinée par la danse de la myriade de mes larmes, mais ce qui m'émerveilla le plus, ce fut leur transformation. Cela se fit avec une telle légèreté et une telle finesse que mon coeur s'envolait presque avec les insectes translucides.

"Ne t'inquiète pas, je suis ici."

Une présence.
Une certitude.
Je ne suis plus seule.
Pour combien de temps ?

"Dis-moi, c'est quoi ton nom? Moi, c'est Mathew."

Il me sourit alors je lui souris en retour. Vous savez, des fois une simple mimique, un simple regard, peut en dire bien plus long qu'une tonne de mots. Je n'étais plus seule, mais c'était égal pour combien de temps, car quelqu'un pensait à moi.

Pense à moi.
Ne m'oublie pas.
Tout ira mieux.
Tout sera bien.

J'essuie mes larmes avec ma manche et arrête un peu de sangloter afin de pouvoir répondre à sa question. Mes yeux doivent être tout rouge, mais ce n'est pas grave je m'en fiche. Quelqu'un est là pour moi et rien que cela me remonte le moral.

- Je m'appelle Myaw.

Un sourire.
Puis un autre.
Qui se croisent.
Et nous illuminent.

Puis arrive une autre question de sa part. Une question normale, légitime. Qu'est-ce qui ne va pas ? Tout. Non peut être pas en fait... Je suis heureuse ici. Ange me raconte des histoires, Luka est gentille avec moi, la femme rousse partage mes rêves... Je devrais être heureuse ici.

Mais il y a un vide.
Incommensurable.
Elle me manque.
Maman me manque.

- Tu sais parfois, j'aimerais bien être un fantôme. Je me dis que peut être eux ils oublient plus facilement.

Oublier.
Oublier que je l'aime.
Oublier qu'elle est morte.
Oublier qu'elle me manque.

Les sanglots et les larmes reprennent alors, incontrôlable. Je ne devrais pas avoir envie d'oublier. C'est une trahison. Mais pourtant, tout serait tellement plus facile, si rien qu'un instant, elle pouvait cesser de venir hanter mon esprit. Le passé est le passé, alors pourquoi reste-t-elle figée dans mon présent qui ne lui appartient pas ?

Laisse moi Maman...

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"Tu sais parfois, j'aimerais bien être un fantôme. Je me dis que peut être eux ils oublient plus facilement."

Matt la regarda avec compassion. Et pas seulement à cause de son don. Lui aussi avait été dans cette situation. Oublier. Tout aurait été tellement plus facile. Mais là n'était pas le but. Notre passé fait de nous qui nous sommes. Oublier serait perdre une partie de nous. C'est Luka qui le lui avait dit. Ses yeux suivirent une lucioles aqueuse pendant un certain temps, se perdant dans ses reflets miroitant. puis, reprenant ses esprit, Mathew se retourna vers Myaw. Elle avait recommencé à pleurer, et il devinait pourquoi.

"Tu ne devrais pas avoir honte d'avoir envi d'oublier. C'est normal. Mais tu ne devrais pas te concentrer sur le fait que quelqu'un n'est plus là non plus. Essaye de te faire des amis, peu être même une famille. Je me suis fait une sœur et une nouvelle mère ici..."

Matt eu un pincement au cœur. Ses parents. Ils lui manquaient probablement moins qu'à la petite fille. Il ne les avait jamais connus. Mais il y avait eu ce vide, ce trou qui refusait de se refermer. Et il était encore là, ce trou, mais Luka, Luke et Mrs. Mystery aident à la boucher. Et lui, il allait aider Myaw. Soudain, Mathew eut l'idée du siècle. Il sortit lentement le violoncelle et l'archet de leur étui et accorda l'instrument. Les lucioles s'approchèrent, fascinées par l'objet. En fait, c'était le sud-conscient du musicien qui l'était. Le garçon se tira une chaise, se mit en position et fit glisser l'archet sur les cordes de métal. Ses doigts pinçaient le manche aux endroits nécessaires, les notes claires et précises.

La nuée d'insectes se laissa emporter par la musique et commencèrent une espèce de valse pétillante et lumineuse. La musique était douce comme une fine pluie d'été, mélodieuse comme le chant d'une sirène et réchauffante comme une tasse de chocolat chaud. Elle avait pour but d'aller noyer la tristesse de la pauvre fille, de lui rendre le sourire et lui permettre d'avancer dans sa vie. Le passé était mieux laissé tranquille.

Vole petite luciole.
Déploie tes ailes.
Parce que toi tu es libre.
Libre de t'envoler.

"Tu ne devrais pas avoir honte d'avoir envie d'oublier. C'est normal. Mais tu ne devrais pas te concentrer sur le fait que quelqu'un n'est plus là non plus. Essaye de te faire des amis, peut-être même une famille. Je me suis fait une sœur et une nouvelle mère ici..."

Comment pourrais-je me permettre d'oublier ? Je veux. Je ne peux pas. Je veux. Je ne dois pas. Pourquoi ? Parce que les photos de mon passé sont ce qui me constitue. Je ne serais pas comme ça, je ne serais pas là. Pourtant, j'aurais préféré... Ce que j'aimerais n'a aucune importance. C'est égoïsme de ma part de me concentrer uniquement sur mes envies. Je ne dois pas oublier, je ne dois pas.

Même si j'en ai envie.
Même si j'en rêve la nuit.
Les étoiles brillent.
Et je ne dois pas oublier.

Soudain, Mathew saisit son violon et ses doigts semblèrent voler sur les cordes, l'archet faisant monter la musique dans les airs et battre les coeurs. J'oubliai. Pas comme on oublie un devoir de maths ou ses clés. C'était différent, les souvenirs étaient enterrés, mais toujours présent, comme si je pouvais les ressortir, tel un album photo et les consulter quand je voulais. La mélodie s'intensifia et le sang battu plus fort dans mes veines.

Encore une fois je pleurais.
Parce que j'étais heureuse.
Grâce à la musique.
Grâce à mon nouvel ami.

Ma voix ne fut qu'un murmure qui ne surpassait pas la musique. Mais les mots avaient besoin de sortir maintenant, tout de suite, pas à la fin du morceau. Je ne pouvais attendre. Peut-être ne m'entendit-il pas. Peut-être que oui. Mais c'était sincère.

- Merci Mathew...

Puis je fermai les yeux et la musique s'intensifia.

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