Premier jour ou presque hors du manoir. Je vais dire que c'est ça quand même. Presque sans surveillance. Uniquement presque. Parce qu'on m'a tout de même amenée au quartier général. C'est pas comme si j'étais libre. C'est pas comme si je pouvais m'en aller. Non, se serait bien trop beau. Mon mari est d'ailleurs sûrement dans le coin. Mari. Beurk. Ce mot me rebute, vraiment. Vous imaginez ? Je suis mariée. Beau bordel. Et je m'occupe déjà d'une petite fille. Grosse merde supplémentaire. Je sais pas d'où elle vient. Et j'demanderai pas. C'est pas si grave, je vais juste essayer qu'elle ne tourne pas trop mal ? Enfin. On verra. Je suis pas fane des enfants à l'origine. Mais c'est vrai que cette petite Eleia est adorable. Je crois que c'est son prénom. Oui je vis déjà avec elle depuis quelques jours et je ne me souviens pas de son prénom. Boulet que je suis. On va dire que je ne m'investis pas. C'est mal. Tellement mal. Je vais encore le faire battre. Bordel.

Homme, au pied. Je préfèrerais encore être ... "Chez nous". Parce que j'ai une occupation. Des livres. Ou des entraînements. Et là, je suis là à cause d'une maudite réunion. Réunion à laquelle je ne participerais pas, vous vous en doutez bien. Mais il n'y a personne pour me surveiller. Ou une merde comme ça. Ce n'est pas comme si j'avais vraiment écouté ce qu'on m'avait dit. Je vais me soûler. Voilà. Sauf que je serais pas une personne débile et niaise. Parce que j'ai une dignité, et même saoule, je ne l'oublie pas. Sûrement pas. Et je chercherais pas non plus la bagarre. Il ne manquerait plus que ça. Pareil, j'aurais des coups de fouet.

En fait, mon corps est rempli de cicatrices. Je ne sais même pas comment je peux encore être désirable. Peut être grâce à mes formes. Sûrement. Oui. Enfin, les cicatrices peuvent aussi avoir un côté de femme forte. Chose que je ne suis pas forcément, vous le savez tous, mais que je m'efforce d'être, de plus en plus.

Sinon, on m'a fait visiter le coin. Enfin, visiter est un bien grand mot. J'ai vu que l'entrée du QG était un bar de striptease. J'ai été légèrement écœurée. C'est tellement ... Grossier, vulgaire. Certains sorciers sont comme ça mais j'imaginais mieux de la part de Dorian, de cette immense organisation. Une fois rentrer dans le QG en lui même, on m'a montré les chiottes, "au cas où elle se sentirait mal, hein ?" Avec un coup de coude dans les cotes de son camarade, un clin d'œil et tout le bardin. Non il ne m'a pas engrossé. Pas encore du moins. J'espère. Je veux pas. Je ne veux absolument pas. Avoir un gosse ? Moi ? La grosse blague. Sinon on m'a montré le bar avant que tout le monde disparaisse. Me laissant avec des esclaves. Esclaves qui sont presque heureux de travailler ici, vous voyez ? Trop étranges. Bref, je ne pourrais pas m'enfuir. Alors je m'assoie au bar et demande un double whisky. Boisson d'homme. Et alors ?

Bref. Ça arrive. Et bien vite. Alors le trempe les lèvres dans le liquide. C'est fort. Très fort. Trop en fait. Du coup je sors une grimace. Petite mais tout de même visible. Heureusement que plus personne n'est là et que l'esclave a le dos tourné.

Je décide alors d'aller m'asseoir à une table vide. En même temps, tout était vide ici. J'ai l'air d'une alcoolique avec mon verre aussi mais bon. Ça m'est égal, honnêtement. J'entends une légère agitation dans une autre pièce, mais encore une fois, je m'en fiche. Je me fiche de tout en fait. Un homme arrive, je le regarde du coin de l'œil. Il me dit quelque chose. En même temps, j'ai l'impression de reconnaître toutes ces têtes. Il devait être au mariage. À mon mariage. Bouh, j'en frémis d'horreur.

C'est alors qu'une canette de Coca apparaît devant moi. Poussé par l'homme en question. Il s'assoit aussi à les côtés, avec deux assiettes de pâtes.

Là, je suis complètement perdue. Genre, il y a des gens gentils ici. Genre. Je n'y crois pas. Vraiment pas. Ce n'est pas possible. Enfin, gentil. Façon de parler. La plupart sont des gros manipulateurs après tout. Il veut peut être que je lui rende un service et voilà tout.



Cet homme est trop gentil. C'est trop suspect. Je n'aime vraiment pas ça. Et comment il connait mon prénom ? Je veux dire, mon vrai prénom. Tout le monde m'a toujours appelé Laure ici. Mon prénom japonais est banni. Seule Luka l'utilisait.

Kåre Nilsson. Drôle de nom. Je retourne la canette de soda et vois effectivement mon prénom inscris sur celle ci. J'aimerais froncer le nez, mais n'en fais rien. Je n'ai même pas envie de l'ouvrir. À vrai dire, je n'ai pas envie de parler à cet homme. Je ne veux parler à personne. Personne.

Mais bon. On m'a bien éduqué, je dirais. Je crois. J'aimerais tout de même savoir comment il connait mon prénom. Cette question me ronge. Mais je ne dois pas céder à la tentation de la poser. Alors je me tais. À la place, je fais glisser l'assiette vers moi et commence à manger. D'abord les boulettes. Parce que c'est ce qu'il y a de meilleur là dedans. Les boulettes de bœuf.



Pourquoi suis-je obligée de faire la conversation à un sorcier noir ? Pourquoi ? Tout ce qu'il veut c'est détruire les mêlés, esclavagir les humains, faire couler le sang, être le roi du monde. Ha, merde, c'est comme ça que je dois devenir aussi. Fais chier. C'est vraiment sur le changement en fait. Trop dur. Moi qui penserait que se serait facile, pas du tout. Mais arracher un cœur d'une poitrine ne m'a pas trop poser de problème ... Étrange. Passons.

Je prends alors une longue gorgée de whisky qui me brûle la gorge. La grimace apparaît une fois de plus. Ce breuvage est ... Presque infect. Je n'ai pas envie de toucher au coca. C'est une vie que je dois oublier.

L'autre con me sourit quand il voit que je mange. Sérieusement ? Putain mais qu'est-ce que ça peut te foutre espèce de barbare ! Ca me donne juste envie d'arrêter de bouffer, rien que pour qu'il est plus ce sourire con sur la face. Et en plus de ça, je devrais lui balancer l'assiette à la gueule. J'aime pas quand on me regarde manger. J'aime pas quand on me regarde tout court. Surtout maintenant. Surtout maintenant que je suis ici, entourée de gens que je déteste. Putain putain putain putain. Sauf qu'elles sont tellement bonnes ces boulettes ! J'aimerais bien leur demander comment ils les font. Mais à tous les coups je peux pas leur adresser la parole parce que se ne sont que de « vulgaires humains ». Et puis je n'ai pas à me préparer ma bouffe et RAAAAAH. Sérieusement, être sorcier noir d'une immense famille avec de la notoriété ça veut dire qu'on devient des assistés ? Ahaha ! Je devrais la balancer à Dorian celle la. Il serait ravi et je me prendrais une bonne beigne. Ca vaudrait le coup. « Au fait, tous les Cross sont des assistés ou comment ça se passe ? » le regard glacial qu'il me lancerait, ahaha, probablement suivi d'un coup de pied dans les côtes et un entraînement de survie dans les montagnes glaciales pour voir si « alors, assisté ou pas sans ton joli petit confort sang de bourbe ? » Ouais, j'ai pas trouvé d'insulte plus approprié. Surtout qu'elle l'est carrément pas. Mais c'est vrai quoi, si je mets Dorian au fourneau, seul dans une maison sans esclave, lui, il serait capable d'aller faire les courses tout seul et de cuisiner ? J'en ai pas l'impression. Se débrouiller en pleine jungle, je le crois. Mais je suis parle dans un milieu CIVILISE. Vous voyez Dorian pousser un caddie dans un Carrefour ? Ahaha, je ris. DORIAN ACHETE DES PAMPERS POUR SON FUTUR NOUVEAU NE ?! AHAHAA. Cette blague. Se serait encore plus drôle si il croisait un sorcier aussi renommé que lui. J'aimerais bien assisté à ça tiens.

Ah oui, l'autre me regarde, c'est vrai. Ma bonne humeur s'efface nette. Malheureusement, je riais bien, toute seule dans mon coin. Vous voyez, monsieur du nord, je n'ai besoin de personne pour me tenir compagnie. Je me tiens compagnie très bien toute seule. Alors dégage.


Il m'énerve. Il m'éneeeeerve. Laisse. Moi. Tranquille.

Bim. Maintenant dégage. Sérieux. Je veux manger en paix. Je veux rien faire en paix. Sans avoir de truc qui reste près de moi à cause de la … pitié ? C'est ça ? Il a pitié de moi ? Pfff, il peut se la carrer là où je pense sa pitié. J'en ai pas besoin. J'ai besoin de personne. La première fois j'ai réussi à m'enfuir toute seule. J'y arriverai de nouveau. Même si je suis mille fois plus surveillée qu'à ma dernière visite … Mais Dorian m'entraîne, ça ne peut être que bénéfique non ? Bon. C'est pas avec moi qu'il échafaudera les plans les plus machiavéliques et c'est pas avec moi qu'il partagera ses plus sombres secrets. Jamais je pense, il n'aura jamais assez confiance en moi. Vaut mieux pour lui. Mais qui sait, je pourrais peut être retourner les techniques qu'il m'apprend contre lui. Sweet revenge.

VOUS SAVEZ CE QU'IL EST EN TRAIN DE FAIRE CE GUEUX ?! IL BOIT MON WHISKY. Je fais les yeux ronds. Et je le fixe, j'espère qu'il sent la haine dans ce regard. Je fais des allers retours entre mon verre, reposé, vide, et lui. Il comprend où je veux en venir ?!

Au cas où mon expression ne serait pas assez obvious pour têtedeglandj'essaied'avoirdustyleavecmabarbemaisjesuisqu'unputaindehipsterdécérébré


Il reste deux glaçons dans le verre, je me lève donc, l'aggripe et lui balance à la gueule avant de lancer le verre contre le mur derrière lui, qui se brise en plusieurs morceaux. Je rebalance mon assiette sur la table qui nous sépare, assiette qui ne se renverse pas, dommage, j'aurais bien aimé que toute cette sauce tomate vienne salire son superbe costard, pardon Môssieur Jessaiedefairebonneimpression, personne n'en à rien à branler. Putain. Bref, j'me casse et vais m'asseoir ailleurs.

Vous savez, ya des trucs, qu'on appelle des batteries, ça se vide. Ma phrase veut rien dire, mais vous allez voir où je veux en venir. Imaginez que j'ai une batterie de sociabilité. Ou une batterie « conneries que je peux supporter ». Bah ce gars vient de me vider tout ça en moins de cinq minutes. J'crois que c'est un record. Je sais pas si on doit l'applaudir ou lui foutre une claque et lui écraser son joli nez. Je suis tranquille. Ouf. Je respire. Je lève les yeux et … Je vois gueule d'ange tout sourire. SERIEUSEMENT ? Ce gars me suit. Il me poursuit. Ahaha, je pourrais le dire à mon futur « mari », hey, ce gars me fait chier il me suit et tout. Comme ça, hop, plus de nordique à mes basques. Sauf que je refuse de parler à cet homme. Et encore moins de « problèmes » que je peux rencontrer. Surtout que ce genre de soucis, c'est pas comme si je pouvais les régler toute seule … (Si.)

Je suis énervée. Ce genre de phrase c'est quelqu'un qui soupire et qui accepte. Moi ? Non. Je comprends pas pourquoi il insiste autant. Je veux dire, je suis rien pour le gars en plus, il me veut quoi ? Débarrasse moi le plancher ou je pique une crise. Merde.

Vous savez ce dont j'ai horreur ? En plus des imbéciles arrogants qui se croient tout permis surtout quand ils viennent te voir alors que tu veux juste être seule mais ils insistent quand même parce que se sont de sombres connards ? Des gens qui sourient pendant que je suis hors de mes gonds. Oui, quelqu'un qui rigole, qui sourit parce que je suis en colère, ça a le don de m'énerver encore plus. Alors vous imaginez quand quel état je suis maintenant ? Vaut mieux pas. J'ai l'impression d'être un volcan. Un volcan prêt à exploser. Je vous jure que si j'étais élémentariste feu le QG aurait déjà sauté. Oh que oui. Boum. Plus de QG. C'est une idée intéressante à développer ça tiens.



Il sait qu'il y est pour rien le débile profond là ? Sérieux ? Il sait que ya plein de gens malheureux dans tout le monde ? Il va aller leur tenir la main à tous un par un jusqu'à ce qu'ils soient plus malheureux ? Bah bon courage mon gars ! Putain. En plus ya des gens c'est pas en leur parlant que tu vas les rendre heureux, asshole. Tu sais, ces gens qui fuient des guerre, qui crèvent la faim, la soif … Tu vas faire quoi pour eux, imbécile heureux ? Tu peux rien faire. T'es inutile. Alors tu fais quoi, tu te rabats sur moi ? Pourquoi ? C'est une cause perdue idiot. Je suis perdue ici moi. Et j'ferais confiance à personne. Surtout pas à un putain de sorcier noir de mes deux.

Attends, c'est lui qui parle d'humanité ? Je le regarde de haut en bas avec un jugement PROFOND. Tu sais, comme les garces qui te jugent de haut en bas parce que t'es mal sapée et qu'elle te tchipe après. Salopes. Moi aussi je sais tchiper ok. D'ailleurs j'aimerais bien le tchiper l'autre con en face de moi. Même mieux, je voudrais lui cracher dessus, sur toute l'insolence dont il fait preuve. Il fait partie de la plus grande organisation de sorcier noir d'Europe et le gars il sort quoi, quon devrait être plus humain. Non mais sérieux, remets toi en question déjà couillon. Tu fous quoi ici, si tu veux vraiment rendre le monde plus humains, ces connards d'égocentrique de « sang purs qui se la pètent grave parce qu'ils se croient meilleurs que tout le monde » vont pas t'aider. C'est eux qui ont foutu la merde comme ça. Qu'est-ce que tu fous chez eux ? Pourquoi tu te casses pas ? Ah mais oui, parce que t'es autant une merde qu'eux, voilà pourquoi.

Et tu as pitié de moi. Tu as pitié de la pauvre petite orpheline qui a fui sa famille et qui est obligé de revenir au bercail, la pauvre petite orpheline qui est malheureuse parce qu'elle n'appartient pas à cette famille, à cette façon de pensée. Mais la petite orpheline, elle est grande, elle sait lacer ses sandales toute seule. Alors sérieusement, tu me pète les couilles que je n'ai pas plus qu'autre chose. Lâche moi la grappe.

Alors en plus de manquer de lui cracher dessus et de le juger, je lève les yeux au ciel. J'ai pas du tout envie de lui parler, pourquoi j'exposerai mes arguments ? Pourquoi je lui dirais que c'est le premier des imbéciles ? Le seul argument qu'il va avoir, c'est mon poing dans sa gueule.

-C'est le verre en personne

OH MON DIEU JE RIS. Non. T'as avalé un clown ce matin au réveil mon coco ? Tu m'exaspères, tu m'énerves, si y avait pas autant de personnes autour de nous t'aurais eu mon pied dans tes couilles. Sauf que ya trop de monde derrière. Et j'me prendrais des coups, encore, et ensuite par Dorian, encore, et je serais humiliée, encore. Et bref, trop d'énergie dépensée juste pour remettre un pauvre con à sa place ? Je suis pas sûre que ça en vaille la peine.



Il parle à qui l'autre débile là ? Je lève un sourcil vers lui, il a pas bougé les lèvres. Hein ? Putain. Sakura. T'es vraiment con quand tu t'y mets. J'ai pas l'habitude qu'il y ait des télépathes autour de moi. J'veux dire, j'ai l'habitude d'entendre des bribes de pensées un peu partout, parce que je suis pas fichue de maitriser mon fichu don, du coup il fait n'importe quoi et j'entends beaucoup trop de choses, et là, un truc clair, que je suis censée ? Ou pas, entendre, rvbdfhjcxk. Voilà.

Mais sérieux, il parle à qui ? Ca m'énerve. Sa présence même m'énerve. Rhaaaaaa. Putain.

Bref. J'me casse. Loin de lui. Parce que marre marre marre marre marre marre et marre. Je veux être tranquille. Je voudrais être tranquille, en train de bouquiner. Oh oui, un bon petit bouquin. Dans un lit à soit, SEULE, sans personne pour m'emmerder à AUCUN FUCKING MOMENT. Et surtout pas cet idiot. Imbécile. Débile. Connard. Liposuceux. JE SAIS PAS POURQUOI OK. M'en fiche, ya pas beaucoup de Cross télépathes. Officiellement. Laissez moiiiiiiijfnfdcbx.

Evidemment qui se pointe devant moi ? Monsieurmabarbefaitdesmotifsswagmaiscaparaitcomplètementdébiles, évidemment. Qu'est-ce que les gens ont du mal à comprendre dans laissez moi tranquille ?



Ouais ouais, c'est ça, cause toujours tu m'intéresses. J'avais pas un verre moi ? Tssss. Aller le verre, apparaît là.

Hop, un verre, avec une paille, et un truc bizarre dedans, du liquide mais que je ne me risquerais pas à boire, parce que mon cerveau invente des trucs trop bizarres, et même s'il m'arrive parfois d'avoir des pensées suicidaires, surtout quand j'ai tronche de cake en face de moi, j'ai pas très très envie de mourir quand même. Alors non cerveau, t'es mignon, mais non. En plus Dorian serait bien capable de me ressusciter de je sais pas quelle manière obscure et me faire payer ça, en … Me tuant par exemple. Mais plus doucement, et avec de la torture, sinon c'est pas drôle. Ahaha. On se marre.

En vrai j'voulais juste un verre pour occuper ma main. Du coup je touille. C'est naze que je puisse pas boire. Sauf que si je reprends le l'alcool, monsieur va encore faire son connard et m'en boire ou me faire la leçon et PUTAIN JE SUIS PAS UNE GAMINE OK ET QUI T'A DEMANDE DE PRENDRE SOIN DE MOI PERSONNE ET SUREMENT PAS DORIAN TETE DE GLAND, alors laisse moi. Qui est la tête de gland ? Dorian ou l'autre con ? Bah, les deux. Obviously.

Et là je reçois quoi ? JE RECOIS QUOI?! DE L'EAU MOUILLEE BORDEL DE BITE. C'EST QUOI CE PUTAIN DE SOURIRE FACE DE RAT, je suis furieuse, FU-RIEUSE. La preuve, le verre explose. Parce que cerveau qui dit verre explose donc le verre explose. Bah oui. Parce que c'est mon verre je rappelle. Le verre de mon cerveau. ET POURQUOI LES ECLATS ILS LUI ARRIVENT PAS DANS LES YEUX HEIN, SE SERAIT DRÔLE CA AUSSI HEIN. Moi je me marrerais bien. Mais non. Parce que mon cerveau il pue du cul. Mais moins que face de pet.

J'ai envie de lui mettre une claque. Vraiment. En plus c'était quoi ce petit « plouf » minable avec ton sourire de merde. Putain. J'ai l'impression que de la fumée sort de mes naseaux comme les taureaux dans les animés quand ils sont vener. Vous avez l'image ? Bah voilà. Une Sakura en furie.

Je sais même pas quoi faire pour qu'il comprenne que je ne veux PAS le voir. Putain.





Je crois que je l'ai pensé un peu trop fort. Boarf. Balek.


… Hein ? LOL. Il m'arrose, et le gars il croit que je vais aller tranquillou pepouse faire du bateau avec lui ? Comme ça ? De toutes façons même si je voulais je ne pourrais pas sortir de ce QG de merde qui pue la bite. Et je veux voir personne, alors pourquoi ?


Je suis même plus si je suis énervée ou blasée ou quoi. Marre. Marre marre marre marre marre. Il m'a épuisée. En si peu de temps. Sérieux. C'est quoi ces gens totalement irrespectueux de l'intimité des autres ? Ah mais oui, on est chez les sorciers noirs, le respect ça existe pas. LA PREUVE C'EST QUI QUI RAMASSE LES BOUTS DE VERRE LANCES TOUT A L'HEURE ?! Bah une esclave, à qui les autres gros crados là bas font des trucs obscènes en même temps. Ils me dégoûtent. Et moi ? Pourquoi je fais rien ? Parce qu'ils m'écouteront pas, et que dans l'état où je suis maintenant, je ne vaux guère plus qu'une esclave. J'vous rappelle que la moitié de l'organisation m'est passé dessus, si c'est pas dégradant ça.



J'escalade le bar et vais prendre une bouteille d'alcool cette fois, avec un verre. UN SEUL. Et je me remets à ma place. A côté de lui … Ouais, dégueu, je sais … Je me sers un grand verre que je descends aussi vite, avant de m'en resservir un.


Deuxième rasiade. Pfiouh, ça fait du bien. J'me calme. Un peu. J'me ressers, encore. Sauf que je sens son regard, malgré tout, alors, résignée, j'lui en dessine un qui apparaît devant lui. Parce que je suis gentille, résignée, j'ai abdiqué, je suis faible. Je sens que ce gars va me suivre partout jusqu'à ce que je cède. Alors autant arrêter de s'énerver, je crois.

Je me retourne vers lui. Il est con ou bien ? Putain, il m'énerve. Il m'éneeeeeeeeeeeeeerve. Je le regarde, les yeux exorbités, fixe mon verre avec mes mains, lève les yeux au ciel. Enfin, vous voyez toutes ces attitudes qui résument une pensée : CA SE VOIT PAS PAUVRE DEBILE ?! Ou encore : OBVIOUSLY. Je supporte pas les gens débiles, sérieusement, ça sert à quoi de poser ce genre de question alors que la réponse est sous ton nez gras ? C'est comme si, j'étais au téléphone, en plein conversation hyper importante, et on m'entend parler, parce que je suis en train de parler m'voyez, et là l'autre con arrive dans la pièce et fait « t'es occupée ? » A TON AVIS GLANDU ?! Hors de moi. Je suis hors de moi. Pourquoi je peux pas me casser sérieux, pourquoi on m'inflige sa présence merdique à ce con ?

Bref, je continue de touiller et il me semble l'entendre pouffer. Pouffer. TU FAIS QUOI DEBILOS LA, TU TE MOQUES ?! J'vais te mettre un aller retour dans la gueule tu feras moins le malin. Espèce de pédoncule. MON CERVEAU FAIT DES INSULTES DE MERDE PUTAIN. Je hais ce gars, je hais mon cerveau, je hais les Cross, je hais Croix, je hais la Terre entière. Voilà.

Et puis quand j'ai reçu de l'eau et que face de rat s'est moqué … Pourquoi j'ai pas un pouvoir hyper offensif ? Parce que il serait en miettes là, en train de souffrir, au sol, suppliant pour que j'arrête … Ahaha. Se serait si bon.

Wait, what ? Bon … ? C'est de la torture que je voulais lui faire là, non ?! Mon dieu.

Mais voilà, je voudrais pouvoir me défendre, efficacement, contre ceux qui m'emmerde. Et on peut pas dire que mes don et pouvoir soient très utiles pour ça … Enfin, encore faudrait-il que je puisse bien les contrôler. Et c'est pas gagner. Déjà mon don il fait n'importe quoi. Mon pouvoir, ça va déjà un peu mieux mais … Ya des trucs c'est pas tout à fait ça. Genre le liquide dans mon verre est sûrement impropre à la consommation. Et je pense que je serais INCAPABLE de dessiner une arme à feu fonctionnel. Ya trop de rouages dans ces conneries. J'ai jamais vraiment essayé, ok, mais même. Une lame, c'est simple, t'es prêt de la personne, t'as une ouverture, la lame apparaît dans ta main, tu frappes, et basta. Un flingue, généralement tu sais que tu vas en avoir besoin alors tu prévois avant, non ?


A mon tour de pouffer. Comment je peux être une personne appréciable ?

Parce que il en bave depuis le début, et il reste. Il est maso ? Ah mais oui, bien sûr.


Et puis, je lève les mains, signe que je juge pas. Enfin, pas de façon visible. Chacun son tripe. Mais c'est pas le mien. Il préfère quoi ? Se faire marcher dessus par des talons aiguilles ? Se faire fouetter ? Se faire traiter de salope ? Marcher à quatre pattes comme un chien en laisse ?


La colère revient. Je tape du poing sur la table. C'est quoi ces réponses débiles sérieux. J'en ai marre de ce gars. J'crois que si les autres dégueus nous laissent à un moment, mon poing sera dans gueule d'ange. Et ça ferait tellement du bien. J'aime bien évacuer la colère, ça m'apaise, j'en ai besoin. Et là j'ai rien pour, surtout qu'il continue de me l'agglutiner depuis qu'il s'est mis en face de moi. Je veux taper dans un truc, dans des trucs, me faire du mal, pourquoi pas, ça peut aider aussi, crier, hurler, on entendre des gens crier pour moi, c'est cool aussi. J'ai juste besoin d'évacuer toute cette énergie qui est en moi. Et c'est pas possible. Et c'est encore plus frustrant, surtout quand il continue à en mettre, à en mettre, à en mettre. C'est pas juste un poing qui va se prendre en fait, c'est tellement que sa mère le reconnaîtra pas. Je dis ça comme si j'allais maîtriser le fight, je suis drôle, hein ?

Il dit un truc dans sa barbe, mais j'ai pas bien pigé quoi. J'crois qu'il a dit un nom, mais don't get it, don't care.


Je le juge, encore et toujours. Il essaie de me séduire là ? C'est mal barré. Avec cette tête de chat Potté de mes deux. Je fais pas dans le sado maso, sorry sweetie. Enfin non, pas sweetie. Sorry [insérez ici une insulte qui finit par un son en i]. Cerveau de merde. Pour les insultes de merde il est au top mais quand il faut un minimum de cohérence c'est zéro pointé hein.

Bref, je le fixe toujours, avec une moue légèrement dégoûtée. J'vois toujours pas pourquoi j'irais avec lui. C'est complètement débile. Et pourquoi lui il veut faire quelque chose pour moi ? Ca n'a aucun sens. Sérieux. Ah mais oui, il est maso. C'est vrai. Je marche pas là dedans. Déso pas déso.

Il m'imite. Pfeuh. Ils sont toujours là les autres gueux, ça me dégoûte. Mes phalanges me démangent réellement. Elles veulent embrasser sa barbe naissante.



Je hausse les épaules et vais chercher une bouteille de Vodka. Et c'est probablement pas de la grosse merde vu … L'établissement. On va essayer de profiter des revenus de la famille pour se faire plaisir hein ? Se serait bien. Alors, vidons cette bouteille.




Parce que là ça fait deux fois. C'est relou, NE ME PARLE PAS. Et surtout pas dans ma tête sérieux. C'est MA tête. On va pas dedans. Je veux pas. En plus j'ai des barrières tellement forte que tu pourras même pas passer. Faux, faux, archi faux.

Parce que, ok, t'as le droit de parler tout seul, mais tout l'intérêt de parler seul est de le faire quand on est SEUL. EST-CE QUE T'ES SEUL LA PAUVRE POUILLEUX ?! Bah non. Alors tu parles pas. Tu fermes ta gueule. Tu zip ta bouche et tu jettes la clef dans la faille la plus profonde de l'océan. Et on aura la paix.


J'hausse un sourcil, pas vraiment convaincu de sa « mirobolante » personne. Ennuyante oui, énervante bien sûr, chiante tout à fait. Mirobolante n'est pas du tout le mot que j'aurais choisi pour définir cet être abominable. Abominable, ça ça aurait été bien.


DON DE MERDE, pourquoi tu t'échappes comme ça là ? Putain. La meuf, elle est majeure et elle est toujours pas fichue de contrôler sa télépathie. Sombre merde.


Bah ouais, faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué hein. JE descends un autre verre. Bientôt j'aurais bu toute la bouteille et là … Soit j'lui fous un poing dans la gueule, soit je l'accompagne sur son fichu bateau. Enfin, sortir à l'air libre, ça me ferait du bien non ? Et puis ptet que les autres mariolles ne m'accompagneraient pas. Evidemment, je ne pourrais pas lui faire faux bond, mais déjà, je serais plus « libre ». Pffff. Aller.

J'attrape la bouteille, je fais disparaître son verre pendant qu'il le portait à sa bouche, sweet vengeance. Je ris et me tourne vers la porte, chancelant légèrement sur mes pas. Un gros lourd me barre la porte.


Je me retourne vers l'intéressé pour qu'il confirme mes dires et que gorille nous, enfin, me, laisse sortir. Vers un aperçu de liberté.

Elle le faisait rire. Vraiment rire, même dans sa colère. Un peu comme une petite sœur qu'il n'avait jamais eu. Et après tout, s'il avait eu une petite sœur, ou un petit frère, qu'importe, il n'aurait peut-être pas été obligé de rejoindre Croix. Foutus ovaires maternels. Foutues histoires entre familles de sorciers, surtout. Laissons les pauvres ovaires de Mme Nilsson tranquilles, après tout, la pauvre. Kåre aimait sa mère. Et son père. Il ne leur en avait jamais voulu. Il avait accepté docilement le fait d'être donné à Croix, un genre de tribut, au final. Il en avait même été content, enfant, lorsqu'ils pouvaient faire les 400 coups avec Sven, finissant toujours par se faire punir par leur mentor. Mais ils s'en fichaient. Ils étaient gosses, ils étaient contents, ils se croyaient les plus forts du monde. Et puis Sven était mort.

Bah voilà.

C'est ballot hein.

Bref. Sakura lui parlait de déguerpir et de piquer une crise, sur un ton qui aurait pu lui laisser penser qu'elle allait partir en comédie musicale, mais ce n'était pas le cas, parce que la vie était actuellement beaucoup moins fun qu'une comédie musicale, surtout pas une comédie musicale mettant en scène un monstre vert avec un seul œil. Et des cornes. Pourquoi pas. Il avait un peu bu, rappelez vous, vils marauds. Elle le traita de masochiste. Il lui tira la langue.

-J'aurais bien aimé avoir une petite sœur comme toi, c'tout. Mes préférences sexuelles ne regardent que moi, chère Madame. Enfin, Mademoiselle, pardon. T'es fille unique aussi, toi, non ?

Mais plus pour longtemps. Malgré son insolence flagrante, Kåre eut la délicatesse de ne pas amener le sujet "mariage" sur le tapis.
Visiblement, il avait tout de même réussi à l'énerver de nouveau, car elle tapa du poing sur la table. Le suédois leva les mains en l'air, à hauteur de ses épaules, paumes vers la jeune femme, l'air de dire "j'ai rien fait, c'est pas moi, j'ai un alibi, j'étais au cinéma". Mais elle ne dit rien. Elle se contenta de regarder le sorcier noir avec un air vaguement dégoûté. Mais probablement qu'elle était intriguée, également, un peu, non ? Allez. Siouplé. Un peu de compassion pour Kåre le... simplet ? Ouais, disons ça, ça fera plaisir à Sakura.

Tout à coup, la Cross à peine revenue de sa quête de Vodka se mit à lui brailler dessus mentalement. Cette fois-ci, l'insulte était encore plus créative et fleurie : tête de prépuce. Le sorcier fronça les sourcils et remonta sa lèvre supérieure sur l'inférieure, afin de signifier qu'il n'était pas d'accord avec cette comparaison. Un prépuce, c'était vraiment pas joli. Et sans se trouver suprêmement magnifique, Kåre aimait à penser qu'il était tout de même plutôt bel homme. Il finit tout de même par ricaner :

-Tête de prépuce, hihi, t'as trouvé ça où ?

Puis il ajouta :

-Je parlais à la table, wesh. J'ai l'droit, non ?

Peut-être pas au final. En tant que membre de la famille Cross, Sakura Laure avait probablement plus de pouvoir que lui. Bon, étant donné que la plupart des hommes de l'organisation -pas lui- lui étaient passé dessus, ça remettait peut-être certaines choses en cause, mais tout de même. Kåre n'était pas haut placé. Kåre était un tribut, après tout.
M'enfin. Elle était assez importante pour se permettre de le contredire et de l'insulter par télépathie. Abominable, abominable. Lorsqu'il entendit cela, le suédois mima des "gnagnagna" avec sa bouche. Sa barbe. Elle avait critiqué sa barbe tout de même. C'était fort vilain. Elle était très bien sa barbe. Il se massa la mâchoire. Elle était douce en plus. Artémis l'aimait bien, en plus. Mais ça, il évita d'en parler en plein milieu du QG de Croix. Petite amie mêlée, tout ça.

En plus, la sale gosse venait en rajouter en disant qu'elle n'avait pas encore dit oui. Rho. Rabat-joie quoi. Kåre croisa donc les bras sur son torse et se mit à se balancer légèrement sur les pattes arrières de sa chaise :

-Très bien, j'attends, déclara-t-il.

Et alors que le trentenaire portait le verre de vodka qu'elle lui avait servi à sa bouche, elle le fit disparaître. L'alcool fit "splatsch" sur la table. Fourbe. Vile, vile créature, pensa-t-il. Mais il n'eut pas le temps de protester, trop heureux de la voir se diriger vers la porte, mais surtout, dire au molosse qui gardait l'entrée qu'elle allait faire du bateau avec... Tête de bite. Mais Kåre ne fit que noter l'insulte dans son esprit et se plaça derrière la jeune femme avec un grand sourire afin d'appuyer ses dires. Le garde, Frédéric Kaernac, un mec vraiment balèze en combat, chargé de la sécurité au Dark Descent le regarda d'un mauvais œil et finit par les laisser passer en grognant :

-S'il lui arrive quoi que ce soit, c'est toi qui prends, Nilsson.

L'intéressé hocha la tête, remuant tel un asticot d'excitation d'avoir réussi à convaincre Laure Cross de venir sur Sven, prenant des expressions faciales tout à fait bizarres, au passage. Mais il se recomposa rapidement un visage normal afin de répondre :

-Compris, capitaine.

Ceci dit, il poussa la gamine dans le dos, et, une fois dehors, il lui adressa un magnifique sourire con et déclara :

-M'enfin en vrai, c'est MOI le capitaine, AHA ! En route, moussaillon.

Sans rien ajouter, le sorcier commença à avancer d'un pas déterminé vers le port, qui n'était qu'à dix minutes de marche du club de strip-tease. Il ne fit pas trop le clown dans la rue, afin de ne pas se faire trop remarquer par les innocents, ce n'était pas le moment, d'autant que vu le caractère de la p'tite Laure, ils auraient eu tôt fait de se retrouver en garde à vue pour tapage, violence, ivresse sur la voie publique...

Arrivés au port, il se mit à courir vers Sven, qu'il voyait amarré au loin, entre deux autres petits bateaux de plaisance, surement en train de taper la causette avec eux. Grand sourire enfantin, encore une fois. Il hésita à prendre la jeune femme par le poignet et à l’entraîner avec lui, mais il la laissa le rejoindre, profitant quelques instants d'être seul le pont de son navire. Une fois la sorcière à ses côtés, il la regarda, les yeux remplis de fierté et de passion, et déclara :

-Bienvenue sur Sven, Sakura Laure. Attrape ça, on largue les amarres !

Il lui lança l'amarre qu'il venait de décrocher de la bitte d'amarrage -BITE !-, lui s'affairant de son côté à régler les cordages, estimer la vitesse du vent, et tapoter la coque de son bien aimé bateau, qui abritait l'âme de son meilleur ami, il en avait décidé ainsi. Sven. Sven je te présente Sakura, j'ai décidé que ce serait notre nouvelle amie, c'est d'accord ?

-J'attends de voir, Kår', j'attends de voir ce qu'elle vaut, la petite.

Il continuait de rire. Ca continuait de m’énerver. Il avait toujours pas compris ? Un poing dans la gueule putain. Je comprenais toujours pas pourquoi il insistait en plus. Le gars, je l’insulte de tous les noms, il continue de vouloir traîner avec moi. N’importe quoi.


Ouais, donc c’est un masochiste. Il aimerait avoir une sœur comme moi ? N’importe quoi. Ce type est fou. Ya qu’à voir sa barbe de hipster.

Seule, orpheline, et bientôt mariée. Yurk. A un gars que je connais pas du tout, à un membre d’une organisation que je déteste. Beurk beurk beurk. Ca va les mariages forcés ? Ya pas de honte chez vous ? Enfin, déjà que Dorian se tape sa nièce sans aucune honte, à quoi je devrais m’attendre pour un mariage d’intérêt ? La punition pour avoir fuit les Cross. Vous avez pas réalisé que j’ai pas la même vision que vous ? Non. Of course, non. Ils en ont rien à branler. Comme le gars que j’ai en face de moi. Parce qu’il est dans cette organisation, alors, soyons sérieux. Il est forcément comme eux. Comme tous ces tortionnaires qui veulent la suprématie du sang sorcier.

Il lève les mains, l’air de dire qu’il est innocent. T’es loin d’être innocent mon coco. Déjà t’es là. Ensuite, tu m’énerves depuis le début. Pourquoi a-t-il fallu que tu prennes pitié de la nouvelle arrivée ? Tsss.


Je levais les yeux au ciel. Exaspération et colère. Mes deux merveilleuses amies.



Et merde. Don qui fait n’importe quoi. Je m’énerve contre moi même et je bois. Boire pour oublier. En vrai ça marche pas vraiment mais sur le coup, ça fait TELLEMENT de bien. Alors je bois. Parce que de toutes façons, ce qui m’attend demain sera pire qu’aujourd’hui, et je préfère pas y penser. Ouais, demain se sera pire que tête de prépuce qui m’insupporte.

Et encore une imitation grotesque tout en agitant la tête. Mon poing. Dans sa face. J’vais faire apparaître un poing américain de plus dans ma main et il va bien souffrir. Les pommettes tout ça, ça fait mal quand c’est cassé. Il serait tout défiguré en rentrant chez sa môman.

Un air de défi, petite réflexion sur le fait qu’il allait attendre. Tsss. En fait j’ai pas le choix c’est ça ? J’suis sûre qu’il me suivrait jusqu’au soir pour que j’aille sur son putain de bateau. STALKER. Si ça se trouve c’est ça, c’est un putain de stalker. Et il va faire je sais pas trop quoi. Enfin, je sais me défendre, un minimum quand même, hein ?

Le contenu du verre avait atteint sa cible. Douce revanche. Ca lui apprendra à m’éclabousser hein. MOI AUSSI JE PEUX MOUILLER LES GENS HEIN. Non mais oh. Enfin, il le suit, ce qui donne un peu plus de poids à mes paroles devant armoire à glace. Il a ptet rien dans la cervelle et tout dans les muscles hein. Comme ces connards de footballeurs américains. Vous savez, ces pauvres débiles qui passent une plombe de temps à faire du sport de la muscu mais dès que tu veux avoir une conversation avec eux, c’est un petit pois. Bon ok, c’est pas le cas de Dorian. Ok c’est mal de faire des amalgames. MAIS JE M’EN BAS LES COUILLES OK. J’ai pas de couilles. Peut être que si. Vous savez pas.

Le garde donna un avertissement à ducon et nous laissa passer. J’inspirai profondément l’ai frais. Libre. Je bus une gorgée de vodka. Pare que j’avais pris la bouteille. Forcément. J’pourrais même la finir, ahaha. Pas cul sec par contre, faut pas déconner, mais quand même. La tête que ferait Dorian si il me voyait revenir complètement bourrée et gerbant partout dans son QG. Ahaha. La réputation que je ferais à l’organisation. Ahaha. J’aimerais beaucoup. J’me prendrai des coups mais franchement, se serait hilarant.

En passant, Kare lui fit une blague hilarante – non – sur le champs lexical des marins.

Je le suivis, plus si convaincue tout à coup que c’était une bonne idée. Il exultait de joie. Un peu plus et il sautillerait presque. Pourquoi j’ai fait ça ? J’me suis embarquée dans quoi là ? Un vrai enfant le truc.

Enfin, j’exagère parce qu’il s’est calmé sur le chemin. Le chemin était long. Trop long. On a croisé plein d’innocent mais qui serait venu me secourir, honnêtement ? C’était sûrement des humains non doués, ignorants de la magie, forcément. Et étant donné que j’avais pas les caractéristiques d’une personne kidnappée et séquestrée, après tout, je me promenai librement dans la rue, bah jamais ils ne me seraient venus en aide. Ils allaient faire quoi contre un sorcier de toutes façons ? Noir, qui plus est. Rien. Absolument rien. C’est pas comme si le port d’arme était autorisée en France en plus. Donc aucun moyen de se défendre. C’est faible un humain…

Faible. Ce mot résonnait en moi comme dans un écho. Moi aussi j’étais faible. Mais je venais de traiter ceux que je veux défendre de faibles. Qu’est-ce qui m’arrivait ? C’était pas moi…

Le port était enfin, ENFIN, en vue. Trop long ce trajet. Beaucoup trop long. Et il fait quoi l’autre zigoto ? Il court vers son bateau, tout enjoué. J’vous avais dit qu’il sautillerait. Voilà chose faite. Je prédis le futur maintenant. Parfaitement.

Je le rejoins doucement, à mon rythme, c’est hors de question que je cours comme une dératée. Une fois sur le pont, il me lance une corde que je regarde d’un air soupçonneux, je suis censé faire quoi de ça moi ?

Ca me disait pas ce que je faisais du cordage dans mes mains. Alors je le lâchais juste, sur le pont, comme ça. Je jetais des coups d’œil un peu partout. C’était propre, ça paraissait bien rangé même. Alors plutôt que de laisser ça traîner en plein milieu où quelqu’un pourrait s’empêtrer dedans et tomber – typiquement moi – je le poussais du pied jusqu’au rebord du bateau. Je faisais une petite visite de l’extérieure, du pont, pendant que l’autre bougeait dans tous les sens avant de démarrer. Le vent soufflait un peu et c’était agréable. Y avait un promontoire, je montais dessus et m’assit. Toujours accompagnée de ma vodka que je délesta de plusieurs gorgées. Enfin, le bateau recula et on sorti du port, doucement. Le vent emmêlant mes cheveux, la brise sur mon visage. Même accompagné d’une personne que je prétendais détester je ne pouvais expulser cette sensation de liberté que j’avais. J’étais un peu heureuse, en quelques sortes. Ne plus être enfermée dans ce QG puant et sombre, être là, au soleil, sur la mer, c’était agréable. Je ne pu réprimer un sourire qui éclaira mon visage.

De toutes façons on pourrait pas aller bien loin, ni bien longtemps. Kidnapper une Cross, inconcevable, surtout quand on avait des plans pour elle. Ils avaient sûrement tout un tas de localisateur pour nous retrouver après. Et se serait sa mort. Et je suis sûre qu’il ne voudrait pas ça. Et puis, c’e-était sûrement un chien fidèle à son organisation d’amour. C’est un sorcier noir après tout. Mais rien ne m’empêchait d’essayer d’apprécier ce petit voyage, ce semblant de liberté.

Je lui lançai la bouteille. Partage. Je suis généreuse aujourd’hui. Et moins oppressée ici. Je me retourne et voit le port qui réduit dans mon champ de vision, petit à petit, tandis qu’on s’éloigne de lui.

Kåre repensa à ce que Sakura lui avait dit alors qu'ils étaient encore au Dark Descent. Si elle était sa sœur, elle lui aurait mis une patate il y avait bien longtemps. Alors qu'il se chargeait des nœuds de Sven adossé à son grand mat, le suédois sourit à cette pensée. Si elle avait été sa sœur, ses parents n'auraient pas été dans la merde. Enfin, ironie, évidemment. Aucun des deux n'aurait voulu rejoindre Croix, et cela aurait été un sujet de sempiternelles disputes entre eux. Bon, peut-être que ça aurait été fun, juste un peu. Il l'aurait forcée à apprendre la batterie avec lui, ou à chanter dans son groupe. Il l'aurait chatouillée et jetée dans la mer. Il lui aurait appris à faire des nœuds à naviguer. Ils se seraient battus comme des sagouins. Kåre sourit de plus belle.

Tournant son visage vers la jeune femme qui, visiblement, ne savait pas quoi faire de l'amarre qu'il lui avait lancé, et se tint devant elle, les poings sur les hanches.

-Eh bien vas-y, déclara-t-il. Frappe-moi si ça peut te soulager. C'est open bar. Faut bien s’entraider entre gosses solitaires.

Il repensa aux dernières gentillesses que la future mariée lui avait proférées alors qu'ils tentaient de s'éclipser du club de strip-tease. Sa réponse à sa question sur l'insulte -ô combien novatrice- "tête de prépuce" avait été très décevante. Le sorcier avait affiché une moue dépitée et répliqué avec une voix de gamin :

-Pfff, t'es pas drôle. Et tu apprendras, très chère, que je suis très persistant. Têtu en fait. Oui, c'est ça, exceptionnellement têtu.

Pas contente la Saku, toujours pas contente du tout du tout. Mais tout de même décidée à faire du bateau avec lui, ce qui était somme toute un progrès conséquent. En tous cas, elle n'était pas d'accord avec le fait qu'il parle par télépathie avec les objets, ce qui était tout de même assez aberrant et assez peu en accord avec le droit du sorcier à disposer librement de son don. C'était un droit que Kåre venait d'inventer mentalement, mais qu'importe. Il se contenta de tirer la langue à son interlocutrice, et de répondre, en prenant toujours une voix et un ton d'enfant :

-J'fais c'que j'veux avec mon don, NA.

En plus elle n'avait presque pas réagi à ses idioties sur les capitaines et tout. Choçu le Kåre, choçu. Enfin bref. Le trentenaire se concentra pendant une quinzaine de minutes sur les réglages pour le bateau et pour sa direction, surtout. Il venait d'y penser, à la direction, car sa gentille et aimable compagne venait de lui demander où il l'emmenait. Et pour être tout à fait honnête, le sorcier naviguait souvent pour naviguer. Pas vraiment pour aller quelque part. Mais puisqu'elle le demandait... Il fixa son cap.

-Allez mon coco, pensa-t-il doucement en patpatant la coque de Sven.

Puis, il attrapa au vol la bouteille de vodka que la jeune femme lui lançait. Il aurait préféré du rhum. Cela lui fit penser qu'il avait une bouteille de rhum arrangé à la poire, offert par Joaquin Rejes, pour la naissance de Nevenn. Pour une fois qu'il ne se montrait pas radin sur la boisson sacrée, ce corniaud.
Le marin but tout de même une gorgée de la bouteille ramenée du Dark Descent, et s'assit à côté de Sakura, lui tendant de nouveau. Il sentait sa tête lui tourner légèrement, et il aurait aimé éviter de les faire couler. Mais Sven avait l'air confiant. Kåre se souvint qu'il devait une réponse à sa nouvelle mousse :

-L'Île d'Hoedic, tu connais ?

C'était une toute petite île à une heure et demie de bateau du port de Sarzeau (un peu moins grâce aux runes gravées sur la coque de Sven). Pleines de dunes. Un petit village de 113 habitants au dernier recensement. Ce serait marrant. Et peut-être que si elle arrêtait de faire sa tête de cochon, ils pourraient se baigner. Peut-être même qu'il pourrait la jeter dans l'eau ? En faisant plouf. Parce qu'en vrai, c'était cool de faire plouf.

Pfeuh, j'me retournais. C'était pas aussi drôle quand on t'y invitait. Par contre au prochain truc … Je me retiendrai pas. Voilà. Il va souffrir, c'est tout. Il a qu'à pas me faire chier. IL AVAIT QU'A PAS VENIR ME PARLER. J'étais bien toute seule dans mon coin, sérieux. C'est quoi ces gens qui veulent être sociaux là. Ca me gave. Genre de ouf.

N'empêche que, on peut pas dire qu'il est pas maso le gars. Il veut que je le tape. Donc qu'il dise pas qu'il l'est pas. Ah oui c'est vrai « mes préférences sexuelles ne regardent que moi ». Ca veut dire ce que ça veut dire. Enfin, il en faut pour tous les goûts, donc si le BDSM c'est son truc, il a le droit. MAIS IL EST QUAND MÊME MASO. Voilà.


J'haussais les épaules. J'ai jamais dit que j'étais drôle, je n'ai jamais prétendue l'être ET C'EST LUI QUI EST VENUE ME PARLER PUTAIN. Il avait qu'à se trouver un autre souffre douleur si il est pas content hein. Faut t'en prendre à toi même mon gars, c'est toi qui a décidé de me harceler. ALORS MANGE TES MORTS.

Et t'es mignon mais moi aussi je suis têtu. Bon, j'vais aller sur un bateau avec toi parce que tu me casses les couilles mais je suis têtu aussi. Tu vas le regretter têtepasrondeparcequecarréc'estpasrond.

Monsieur répliqua qu'il faisait ce qu'il voulait avec son don. A mon tour de l'imiter à coup de « nanana » silencieux tout en levant les yeux au ciel.


Nah. Moi aussi j'pouvais être aussi débile que toi hein. Moi aussi je pouvais avoir deux ans d'âge mentale et aussi débile que face de prépuce. Ouais, j'ai vraiment eu un coup de cœur sur cette insulte. Nan mais sérieux, c'est moche un prépuce. Comme une bite. C'est moche. Je parle de quoi là ?

Bref, je me dirigeais vers un coin du bateau toute seule pendant que le diplodocus s'occupait de son bateau. Enlever les amarres, démarrer le moteur... Enfin tous les trucs qui font qu'on pourra faire une balade en bateau. Mais cet air me faisait le plus grand bien et m'apaisait grandement. Je pourrais presque apprécier la présence du hipster. Genre, depuis le début il a pas eu l'air hyper agressif. Non c'est juste moi qui l'ai envoyé bouler, encore et toujours. Enfin, c'est pas parce que je me calme qu'il n'aura pas le droit à des remarques cinglantes, faut pas croire.

L'air était doux et je me prélassai au soleil. J'aurais dû amener un maillot, j'aurais peut être réussi à bronzer un peu. Sauf que j'ai pas de crème solaire. Pffff. Vie de merde. Kare attrape la bouteille au vol parce que je suis bien trop gentille pour lui. Il s'assit ensuite à côté de moi pendant que le bateau avançait tout seul. Sweet sweet pilote automatique. Ya plus qu'à faire gaffe aux autres bateaux parce que normalement ça esquive pas les autres bateaux. Sauf si celui là a un sonar ou je sais pas quoi. Celui sur lequel j'allais quand j'étais plus jeune avec mes parents en avaient pas, donc il fallait faire attention. Mais je m'amusais à voir le gouvernail tourner tout seul. J'avais quoi, six/huit ans ? Voire moins. J'adorais quand on mettait le pilote automatique, je les tannais à chaque fois pour. Et pour conduire aussi, évidemment. C'était une époque si heureuse, si apaisante. Ah. Saleté de Croix. Je fronce le nez, j'ai un des membres de l'organisation qui a tué ma famille à côté de moi, c'est vrai. D'un coup cette balade ne me paraît plus si prometteuse... Ne jamais baisser sa garde...


Je fis non de la tête. J'ai aucune idée de ce que c'était. Ni de où c'était. J'ai une bonne culture générale de merde. Ouaip. Je connais pas grand chose du tout, des fois j'me dis que les gens doivent vraiment me prendre pour une débile tellement je connais si peu sur peu de sujet … Vide, fade. Enfin, c'est pas comme si l'opinion des gens m'importaient beaucoup. Je m'en fiche à vrai dire.

Le soleil tape plus fort, heureusement que le vent est là pour ne pas que je fonde comme une glace. Ca faisait un mélange parfait. La chaleur du soleil, sa luminosité qui met de si bonne humeur, rien à voir avec le QG de Croix si sombre, si froid... Et le vent qui te rafraichit en même temps. Un peu plus et je voudrais me baigner. Mais je n'ai pas de maillot. Je pourrais m'en dessiner un. Mais je suis si douée qu'il pourrait se retrouver trop petit. Ou trop grand. Ou qu'il te tienne pas. Comme dans les rêves ou vous vous efforcez de faire tenir un truc de telle manière et jamais, ô grand jamais vous ne pourrez le faire tenir parce que c'est un rêve et que dans tous les cas ça tombera. Bah des fois ça me fait ça. Voilà. Je suis une sorcière tellement douée, c'est fou.

Je me retourne pour voir la côte s'éloigner encore de nous et une forme de diplodocus se détache dans les massifs de roche. C'est drôle, c'est quelque chose qu'on ne pourrait jamais voir depuis la terre. Enfin, quand je dis diplodocus, c'est surtout une grosse masse avec un looooooong cou (un arbre, très grand) et une petite tête. J'ai pas les quatre pattes. Mais quand je vois un long cou, tout de suite je pense à Petit Pied.

Tête plate tête plate tête plate. Je ne m'appelle pas tête plate je m'appelle Petit Pied !

Voilà pour l'interlude.

Je regarde ensuite l'eau. J'aimerais y voir des otaries, ou des dauphins, ou des lamantins. Les otaries à cette période de l'année sont parfois dans ces eaux. Mais elles ont plutôt tendance à prendre le soleil sur les rochers et on est déjà trop loin. Dommage. Les dauphins on peut en voir aussi. Et les lamantins je crois qu'il préfère les eaux plus chaudes. Dommage. Mais je devrais guetter les dauphins.

Mais j'ai chaud. Je veux me mettre en maillot. Mais je veux pas me changer devant face de rat. Alors je le pousse de mon promontoir. Oui, mon. Et descend à mon tour avec un sourire amusé avant d'aller dans sa petite cabine.

« Si tu rentres, j'te bute. »


Je ferme. Amuse toi bien tout seul sur ton pont. Je m'appliquais à me déshabiller, c'était plus simple d'imaginer des vêtements directement sur soit. Alors, commençons par la culotte. Un truc simple, sinon je vais pas tenir. D'ailleurs, si il disparaît à un moment le machin, je fais comment ? J'aurais dû lui demander un short de bain et un tee shirt. Rha. Je suis débile. Débiiiiiiiile. Gnnnnn. Neuneu. Donc culotte, elle apparaît. Je voulais une basique et je me retrouve avec une rayée blanche et bleu marine avec des petits nœuds sur les côtés. Ca s'appelle avoir un inconscient qui joue ça. Bon, un haut assorti ou pas du coup ? Bingo. J'ai réussi. Je remue un peu pour voir que tout reste bien en place. C'est le cas. J'ai réussi. C'est OUFISSIME. J'vous jure.

Je ressors de la cabine comme si de rien n'était. Je veux des lunettes. De. Soleil. Gnnnn. Tant pis. Je remets mes fesses sur mon promontoir et m'allonge tranquillement, comme si j'étais la reine de ce bateau et totalement seule (alors que je ne sais pas naviguer mais tout va bien) et rebois un peu du breuvage volé (?) au QG de Croix.


Ah il voulait une sœur comme moi hein. Bah va falloir qu'il s'habitue à toutes ces insultes le petiot. C'est pas prêt de s'arrêter. Ca lui apprendra à vouloir parler à des inconnus.

Tête de prépuce me pousse et je manque de tomber à l'eau. Genre gratuitement, comme ça, alors que j'étais un peu moins énervée. OKLM le gars. Genre vraiment. Du coup je le regarde, outrée, alors que je suis prise dans les cordes. Heureusement qu'elles sont là elles, sinon, pouf, plus de Saku. A l'eau la petite. Petitepassipetite. Petitequial'âgequ'onlamarriedeforce. Gneuuuuuh. J'ai envie de me venger. Il est trop loin pour un coup de poing. Et j'ai la flemme de dessiner un truc dans les airs qui lui tomberait dessus. J'pourrais faire une tapette à mouche qui lui latte la gueule mais c'est compliqué parce que ça induirait que cette tapette BOUGE en même temps. Donc ouais nan. Relou.


Bon. Y avait rien à faire pour qu'il arrête d'empiéter dans ma tête. Pas possible ces gens. Sérieux. Je lève encore les yeux au ciel et je souffle la mèche qui me tombe dans les yeux en même temps, à la manière d'Ariel. Mais ce gars est vraiment un gros gamin en puissance quoi. Je pense que si j'avais pas été prise par Croix pour la deuxième fois … Et si il n'était pas un putain de sorcier noir de merde, on aurait pu être bien pote. Malgré la différence d'âge, ahaha. Mais y aurait eu moyen quand même. Genre si on avait été deux humains normaux, si y avait pas de magie dans le monde, si y avait pas de guerres et tout. Enfin, avec les si on peut refaire le monde. Et je l'aurais peut être jamais rencontré. Mais voilà. Vous me comprenez ?


Koré. Genre comme la Corée ? Corée du nord ou Corée du sud ? Pas tout à fait la même chose hein ! Faudrait préciser un peu mon bonhomme ! Mais tu fais parti de Croix, ça doit être Corée du nord, non ?

Je suis tellement nulle en blague putain. Affligeant. J'ai envie de m'enterrer. Il va juger. Tellement fort. Tsss. Si il juge trop c'est lui qui va tomber à l'eau et voilà. Balek.

Et il me laissa ENFIN tranquille. Pour profiter du calme. Du soleil. De tout ça. D'un semblant de liberté. Et ça faisait du bien. On était au calme. Enfin, bien sûr que l'eau faisait du bruit contre la coque du bateau, mais c'est tellement pas comparable à la musique affreuse de la boîte de strip tease, aux conversations graveleuses, à la mauvaise odeur, aux sièges collants … J'étais beaucoup mieux dehors. Tellement mieux. Je respirais. Un peu plus et j'voudrais carrément écarter mes bras sur le devant du bateau, façon Titanic. Mais je ne le ferais pas. Et je risquerai plutôt de faire le « wouhou » hyper jouissif, apaisant, plein de liberté que Harry fait quand il monte sur l'hypogriffe. Une de mes scènes préférées. Rien que quand j'entends la musique cela me met en émoi et je veux faire comme lui, et crier ce trop plein de liberté qu'il pourrait y avoir à ce moment là. C'est le cri de puissance qu'on peut avoir sur le monde. Par là j'entends qu'on est prêt à le découvrir, à voir toutes les possibilités qui s'offrent à nous, le parcourir, le comprendre, l'appréhender, et non pas le former comme on le souhaite. Non, c'est le voir comme il est.

Quand il revient s'asseoir à côté de moi, je ne sais toujours pas quoi penser de lui. Parce que comme ça, il a pas l'air méchant. Il a l'air d'être une personne tout à fait normale. Je sens pas toute l'animosité que je peux ressentir quand je suis près de Dorian, Sebastian, Dylan ou des autres... Je parle pas d'empathie, je parle d'une vague noire qui émane de ces gens là. Tu sens la noirceur de leur cœur, l'envie de meurtre qui vient d'eux. Et chez lui, je ressens pas tout ça. Pourtant il est dans cette abominable organisation. Je ne sais tellement pas quoi penser de lui. Je suis perdue. Tellement perdue.

Du coup je le pousse en me levant, retour à l'envoyeur mon coco hein, pour aller me changer tranquillement. Face à son grognement, j'ai fait la bonne mégère hautaine qui passe la tête haute sans avoir rien vu. Enfin, j'ai essayé de dissimuler un petit sourire de fierté. Je ressors plus ou moins rapidement avec un maillot. Pitié, faites que ça me fatigue pas trop de le garder ici. Il fait beau et plutôt chaud, donc si j'avais l'occasion de pouvoir me baigner, et d'un peu bronzer par la même occasion, j'aimerais beaucoup. Et surtout, je ne veux PAS me retrouver à poil. Le gars je le connais pas, alors se serait bien que … voilà quoi. Si ça se trouve il va croire que je lui fais des avances et il va être bizarre déjà. Je rappelle que je ne le connais pas. Pas. Du. Tout. Et je suis sur un bateau avec lui. Et maintenant je suis sur un bateau alors que je suis quasiment nue avec lui. Qu'est-ce qui m'a pris ?

J'lui demandais donc quand est-ce qu'on arrivait. Un peu comme les gosses. Et il grimpa sur son mat tel un chimpanzé, en plus il était tout aussi poilu qu'un chimpanzé.

C'EST QUOI CETTE INSULTE GRATUITE LA ?! Bon ok je l'insultais gratuitement depuis tout à l'heure mais moi j'avais le droit. Parce que j'ai tous les droits et qu'il me faisait chier. LA J'AI DEMANDE GENTIMENT. J'étais tellement sous le choc que j'ai même pas bougé face à cette insulte.

Et voilà que le chimpanzé se déshabillait. Vous voyez, j'aurais pas dû m'aventurer là. Enfin, il eu la décence de garder son caleçon. Heureusement. En même temps il avait encore son pantalon par dessus donc il pouvait pas trop faire autrement. Sauf s'il n'avait pas de caleçon tout court. Beurk. Il sauta ensuite près de moi et me planta un index dans les côtes en criant GUILI avant de s'enfuir comme un macaque. Evidemment j'ai eu une réaction de surprise, de recul et OUI CA A FAIT DES GUILLIS. Pourquoi il veut que je joue avec lui ? Il est chelou lui. Genre, vraiment. ET SI IL JOUE QUI CONTRÔLE LE BATEAU ?!

Avec un soupir, je commence à marcher à sa poursuite. OUI. JUSTE MARCHER. Je rappelle sur je ne connais pas cet individu nommé Ricoré. Accompagnée de ma fidèle vodka, je vais à sa suite, sauf qu'il est beaucoup plus doué que moi pour marcher alors que le bateau tangue. Et il se déplace plus facilement que moi dans ses putains de cordages. Moi je ne ferais que m'emmêler, et il faudrait venir m'aider à me dépatouiller de tout ça. Pitoyable. Vraiment.

J'avais réussi à le « rattraper ». Genre j'étais sous lui. Et lui bien trop au dessus.

PARCE QU'IL TRICHE. Si tu veux on joue sur la plage après. Je vais sûrement tomber, parce que je suis pas douée, ou mettre mon pied dans un trou de caillou comme ça il sera tout écorché se sera génial, ou m'érafler tout le flanc ou je sais pas, mais bref. Là c'est pire que déloyal. Enfin, j'essayais quand même de monter à ce truc. Je glissais. Beaucoup. Putain de mains moites. Et de pieds moites. J'avais pas l'habitude de ça, les cordages me brûlaient mais j'arrivais enfin. M'aurait-il attendu ?

Arrivé en haut, j'avais assez d'accroche pour trouver une position confortable et sans risque, j'avais dû laisser madame vodka en bas et c'était fort regrettable. Par contre d'ici, je voyais l'île qui se rapprochait de plus en plus. Elle était... plutôt grande. Je m'attendais à un truc tout tout petit moi. Même pas. Y avait de la civilisation même. Mais de la plage quand même. Des kilomètres de sable. J'avais hâte d'y être. Alors je profitai encore un peu plus de ce voyage, souriant à cette plage, souriant au vent, à la mer, à tout ça, devant moi.

Sakura était toute emmêlée dans les cordages. C'était drôle. Kåre rit avec beaucoup de moquerie, mais aussi beaucoup de bonne humeur dans la voix. Il fallait croire que l'humeur de la sorcière noire s'améliorait également, puisqu'elle venait de faire un jeu de mots sur son prénom. Le suédois lui adressa une vilaine grimace, mais au fond, il était content qu'elle se déride un peu. Il ne pensait évidemment pas qu'elle n'avait pas de raison d'aller mal, ou même de faire la tête. Simplement, c'était comme ça que Kåre s'en sortait dans la vie. En étant optimiste. Même après la mort de Sven, il s'était vite relevé. La brûlure de la perte était bien là, enfouie dans ses entrailles de marin, dans son âme de sorcier. Simplement, un haussement d'épaule, et il repartait. Mais il n'oubliait jamais. Il croyait en l'espoir. Et en l'espoir de l'espoir, l'espérance.

Bon, ça ne changeait rien au fait que Ricoré, c'était vraiment nul. Au final, c'était quoi Ricoré ? Même pas du vrai café. Peuh. Du café, plus de la chicorée. Et la chicorée, c'est quoi au final ? Une fort jolie fleur bleue, mais surtout un ersatz de café. Et Kåre refusait d'être un ersatz. Ce fut pourquoi un sourire machiavélique se dessina sur les lèvres du trentenaire.

-Ma vengeance sera terrible, cerisier.

Quitte à se moquer des prénoms de l'un et de l'autre, hein. En plus elle l'avait poussé. Elle méritait vraiment qu'on s'occupe de son cas, cette petite. Définitivement. Oui, bon, pas définitivement, non, mais il allait bien lui rabattre son caquet. C'était décidé. Elle allait prendre la flotte. Mais pas la flotte gentille comme au QG, non, cette fois ci, ce ne serait pas juste quelques gouttes sur la tête, mais plouf dans l'océan, AHA. Kåre s'en frottait les mains d'avance. Il avait décidément un niveau de maturité assez affolant pour son âge. Dire qu'il allait être papa. Il soupira et se fit un facepalm mental avant de foudroyer la jeune femme du regard, afin qu'elle comprenne bien qu'il n'était pas content du tout, oh, non, not amused.
Absolument pas crédible, le regard. Au pire, il s'en fichait.

Par contre, ce dont il ne se fichait pas, c'était de l'occasion en or qu'il venait de se créer.
En provoquant ainsi la jeune fille, elle s'était décidée à le suivre, un peu mollement, certes,
pendant que lui se balançait de cordage en cordage tel un chimpanzé. Un fort joli chimpanzé,
tout de même, pensa-t-il, pas peu fier de ses petits abdos. Gentil Kåre. Kåre un peu viril. Content Kåre. Le patriarcat faisait décidément des ravages.
Et elle, elle disait qu'elle allait se casser la gueule. Moh. Il rit, moqueur.

-Bah alors, et ton entrainement, c'est de la gnognotte ?

Il avait bien envie de rabaisser les Cross. Enfin, ça, et aussi, il avait envie de la foutre à l'eau.
A l'eau Saku, à l'eau, criait son esprit. Et Sven le bateau ricanait en scandant ces mots également.

Il la vit poser sa bouteille de vodka sur le pont et commencer à faire sa petite guenon grimpante sur les mats et les cordages. Il lui adressa un grand sourire franc afin de l'encourager. Il l'observa avec une certaine admiration mêlée d'amusement galérer quelque peu. Mais elle s'en sortait pas mal. Visiblement, les cordages la brûlaient un peu, mais eh, c'est le métier qui rentre, pensa Kåre.

-Bah alors, elle est où la puissance des Cross ? lui demanda-t-il alors qu'elle semblait se trouver dans une phase de galère.

Elle n'allait peut-être pas apprécier qu'on lui rappelle son appartenance à cette famille un peu... Spéciale, mais le suédois n'avait juste pas de filtre. Enfin presque. Aussi, plus ou moins consciemment, il tentait de lui faire extérioriser sa colère, pour lui faire du bien. Kåre avait,
certes, une façon un peu bizarre de gérer les problèmes des gens, mais ce genre de méthode avait souvent et surprenament bien marché. Et puis, il fallait avoir un peu d'auto-dérision,
dans la vie. Surtout dans ce genre de situation merdique. Ca pouvait sauver des vies, il en était persuadé.

La sorcière finit par atteindre son niveau, et s'assit sur quelques cordages solides. Il laissa passer quelques secondes avant de sortir de nouveau son sourire machiavélique, se rapprocha un peu d'elle, mine de rien, comme ça. Et soudain...

-VENGEANCE ! s'écria-t-il en enlaçant fermement Sakura dans ses bras et la balançant d'en haut par dessus-bord.

Dès qu'elle fut en chute libre, il utilisa son pouvoir afin de s'assurer qu'elle rencontre bien de l'eau et non pas le pont du bateau, ce qui serait, somme toute, très fâcheux. Une grande vague vint l'attraper pour l'emmener dans l'océan, et aussi pour éviter qu'elle ne fasse un plat sur l'eau. Le but était de l'asticoter, pas de lui faire mal. Asticoter. J'aime bien ce mot, pensa Kåre, qui créa, l'instant d'après, une colonne d'eau sur laquelle il pouvait se tenir debout -un peu comme Jésus, mais en moins mystique-, afin de lui aussi pouvoir se sentir en contact avec le Gros Glouglou -surnom affectif envers l'océan, pas de jugement-, et de pouvoir observer sa jeune victime dans l'eau, les bras croisés, un sourire satisfait sur le visage.

Ils étaient tout proches du rivage. Elle pourrait sûrement nager jusqu'à l'île. Kåre réalisa qu'il n'était pas tout à fait normal pour un humain de se tenir debout sur une colonne d'eau,
et ordonna à la vague de le ramener sur Sven, afin de pouvoir prétendre qu'il était un gentil monsieur tout ce qu'il y a de plus normal qui emmène juste sa petite sœur sur une île sympa.
Pas un type chelou qui tue des gens avec son pouvoir de contrôler la flotte et qui essaie de faire sourire la nièce de son boss.

Évidemment que j'avais le droit à des moqueries, quoique je fasse anyway, il se moquerait de ma pauvre personne absolument trop malheureuse. J'étais heureuse, avant. Il fut un temps. Gnieuh. J'me demande pourquoi ces guerres trop débiles existent. J'veux dire dans le fond, on est tous les même, magie en moins à la rigueur, même entre humain doué et sorcier ya pas une hyper grande différence. Je pige vraiment pas tous ces conflits du coup. Vous savez ce que je vois ? Je vois deux yeux, comme les miens, et un nez, quelque part par là, deux oreilles... Voyons voir, quoi d'autre ? Deux mains ? Oui c'est vrai. Maintenant fermez les yeux, oubliez ce que vous voyez, qu'est-ce que vous sentez, sur votre poitrine ? Un cœur. Moi aussi j'ai un cœur. Vous voyez, on est exactement les même. Les noirs ne voient juste pas ça.

J'ai fait un magnifique jeu de mot avec Ricoré. Magnifique. (pitoyable) (je suis nulle en blague) (genre vraiment) (j'me fais de la peine) Et j'ai eu le droit à une magnifique grimace Ma blague nulle a fait mouche ! Ce gars est un enfant, mais genre vraiment. Pire que moi. Déjà que je suis pas trop mal... Enfin, quand je suis de bonne humeur disons, et c'est pas le top en ce moment, vous voyez pourquoi j'espère.





Oups, j'ai dit ça à voix haute. Enfin, dis... Plutôt crié. Je le fusille du regard avant d'aller me changer. J'espère qu'il dira rien. Forcément qu'il va faire une réflexion, se serait pas drôle sinon, VOYONS.


Evidemment il me provoque le petit con. Sinon c'est pas drôle. Et pendant qu'il saute de cordages en cordages comme un ouistiti, je galère comme une grosse vache à monter sur ce putain de mat, à coup de gnagnagna. Et il m'observe hein, sinon c'est pas drôle. Je sais pas à quoi ça ressemble et je veux pas le savoir.


Je brandis un ENORME DOIGT (oh vous savez lequel) pendant que j'essaie de me dépatouiller avec ces putains de cordages qui font mal ET BORDEL JE SAIS PLUS OU J'EN SUIS JE SUIS PERDUE DANS CE LABYRINTHE DE CORDES C'EST LA GROSSE MERDE.


Ouais, on est au delà de tuer. C'est la destruction maintenant, c'est comme ça. PARCE QU'IL A DES JEUX DEBILES. Et moi je suis, comme une meuf encore PLUS débile. Pourquoi j'le suis déjà ? Sérieux ? Ah oui, parce que son truc sonnait mieux que le QG de Croix, et c'est pas faux. Pas faux du tout hein. Il fait beau, je suis en maillot (qui va disparaître à un moment ça va être sweet), on est sur un bateau, et en vrai, j'ose même pas avouer ça à moi même, jamais je le dirais à haute voix, JAMAIS, bah... C'est plutôt sympa. Malgré le fait que je suis hyper ronchon (c'est ce qui fai mon charme) bah... C'est drôle et je m'amuse bien. VOILA. JE L'AI DIT. MAINTENANT TUEZ MOI PITIE.

ENFIN. ENFIN. Je suis arrivée à son niveau. Hallelujah. J'aimerais bien m'allonger de tout mon long pour reprendre des forces mais … YA QUE DES CORDAGES ICI. Bordel. Alors je m'assoie juste sur un qui a pas l'air trop fragile. Et plutôt stable. A l'air. Parce que j'en sais foutre rien. Je suis en sueur. J'ai l'habitude de bosser beaucoup avec Dorian ou les autres, c'est pas le soucis mais … Pfeuh. Relou.

Je souffle quelques secondes et le mâle se rapproche de moi. Euh, tu veux quoi prépuce ? Il a un sourire … Affreux sur son visage. J'aime pas ça, ça sent le coup fourré, et avant que j'ai pu m'enfuir (je sais pas trop comment j'aurais pu d'ailleurs), il me prend dans ses bras et me jette en criant « VENGEANCE » (vengeance de quoi sérieux, c'est lui qui a commencé) … Comme ça … Et je vois le pont se rapprocher de moi, beaucoup trop vite. IL EST SERIEUX CETTE PETITE PUTE LA ?! Enfin c'est lui qui aura des problèmes si il m'arrive un truc. Ahaha. MAIS J'AIMERAIS EVITER DE ME CASSER UN TRUC EN VRAI, je morfle déjà assez comme ça !

Et là une vague vient me cueillir. Oui, cueillir, parce qu'elle fait pas mal ni rien, elle me récupère avant que je m'éclate contre le bateau, je fais pas de plat ni rien du tout et je me retrouve dans l'eau. Ca fait quand même un peu l'effet d'être jeté à l'eau cette histoire. Cet homme me blase. Comment je me venge de ça moi maintenant ? Je fais des bubulles ronchons dans l'eau en le fixant.

Et monsieur se prend pour Saint Crésus, à marcher sur l'eau. Avec son sourire satisfait là. Tssss. Je réfléchis à ce que je pourrais faire pour me venger. Je vais trouver. Je vais trouver. Sa vague le ramène sur le pont de son bateau. Je me tourne vers le rivage qui est pas très loin. Alors je nage jusque là. Parce que de toutes façons, il peut pas m'abandonner là. Enfin, il pourrait toujours dire que j'ai essayé de fuir et qu'un téléporteur me ramène et que je subisse mille et une tortures à cause de ça … Mais il ferait pas ça, pas vrai ? Si ? Rah. J'vais sur la plage anyway.

Une fois arrivée, le vent me donne quelques frissons. J'ai pas de serviettes, forcément. Et c'est mort, j'en dessine pas une. Parce que je serais capable de me retrouver à poil sinon. D'ailleurs... Non c'est bon, j'ai toujours le maillot. Ouf. Plus pour longtemps à mon avis. Saleté de Ricoré. Le soleil va me sécher. Voilà. C'est ça. Et en attendant qu'il arrive, je peux préparer mon plan diabolique.

Sauf que … Il va viendre comment l'imbécile ? (oui, viendre). En bateau ? Jamais il pourra venir jusqu'à la plage, sa coque va vite racler le fond. Et no way il pousse son bateau jusque là. Et il comptera encore moins sur mon aide pour le repousser dans l'eau après. Ta connerie, tu te d'emmerdes. Et ouais. C'comme ça. Don't mess with Cross. Il va nager ? Il va surfer en mode « je suis un bg je contrôle l'eau comme Moana ahaha » Tssss. Intolérable. J'vais creuser un trou. Et j'vais mettre des branches par dessus le trou. Et remettre du sable. Et j'vais me mettre devant. Et il tombera dans le trou. Ouais. Ouais. J'vais faire ça. Mais faut que je fasse vite. Gnuh. J'peux pas utiliser mon pouvoir, si ? Ca commence à me crever en vrai tout ça. Mais c'est pour la bonne caaaaause. Sinon ya des branches déjà par loin alors c'est déjà ça. J'vais juste, transformer un peu tout ça, ça me fatiguera moins. Ouais, j'vais faire ça.

Piège en plaaaaaaaace. J'en peux plus. Mon dieu. Trop crevant. Tombe vite dans ce trou prépuce. Et file moi une serviette avant que je me retrouve à poil.

Bon, comme c'était totalement couru d'avance, voilà maintenant Miss Cross qui râlait sur le fait qu'il avait mal traduit son prénom. Béoui cocotte. Tu te moques de mon prénom, je me moque du tiens. Non mais. Ca va bien hein. En plus maintenant, elle l'insultait dans sa tête. Encore. Ca devenait lassant. Kåre soupira en la regardant d'un air consterné pendant que le flot d'insultes télépathiques de déversait dans sa tête. Au moins, on pouvait lui accorder le fait d'être originale... et.... de s'auto-insulter ? Oui bon, en soi, elle était en train d'insulter son don. Son don qui était une part d'elle. Les poings sur les hanches, le suédois haussa les épaules. Après tout, lui aussi déblatérait parfois des choses incohérentes. Assez souvent, même. Mais bon. Il vivait bien avec. Tant qu'il ne faisait pas ça devant Dorian Cross ou quelqu'un d'autre de haut placé, tout allait bien.

-T'écorches mon nom, j'écorche ton nom, déclara-t-il d'un ton impassible, farfouillant dans ses cordages à la recherche de celui sur lequel il avait l'intention de faire un nœud. Et sois gentille avec ton don. Il sera plus gentil avec toi.

C'était débile mais c'était drôle à dire, et ça allait sûrement l'agacer. Tout ce que Kåre recherchait en somme. Bon, pas exactement, il aimait bien aussi le fait que la jeune fille se détende un peu. Il ne pouvait pas la sauver de Croix, ni de son mariage forcé, mais il pouvait au moins rendre des journées un peu agréable. Il pouvait lui offrir un ami. Et un souffre douleur, visiblement, mais bon, il acceptait son sort, il l'avait bien cherché.

En attendant, il pouvait profiter de la vue délectable que présentait Laure qui tentait de grimper aux cordages pour venir le rejoindre. Elle galérait, grognait, et le menaçait de le détruire s'il prenait des photos. Ah oui, et elle lui fit un gros doigt d'honneur aussi. Malpolie. Il lui tira de nouveau la langue, et toc. En tous cas lui il se marrait bien, se délectant de bientôt mettre à exécution son plan machiavélique. Mouahaha. Il n'y avait que ça à dire, en réalité, c'était bien la seule chose qui correspondait à la situation. C'était exactement ce que Kåre était en train de penser, et était en train de dire à Sven, qui, comme à son habitude, étant un objet plutôt taciturne, se contentait de grommeler calmement.

Laure ne sembla se méfier que lorsqu'il commença à s'approcher d'elle avec un sourire machiavélique aux lèvres. Mais trop tard. Déjà elle tombait dans la mer. Et Kåre marchait sur l'eau. Et elle le maudissait. Heureusement qu'elle était en maillot de bain. Ca aurait peut-être était plus drôle si elle avait été habillée tout de même. Mais c'était déjà bien. Elle était à la mer, et c'était le principal.
Après le moment inévitable d'abasourdissement, la jeune femme sembla réfléchir, puis non sans le fusiller du regard, se dirigea vers l'île, à la nage. Kåre sourit et s'écria :

-BAH FAUT PAS BOUDER !

Il marcha ensuite jusqu'à Sven, et s'occupa de jeter son ancre dans la zone réservée aux petits bateaux de plaisance qui stationnaient ici pour un temps limité. Cela suffirait, ils ne passeraient probablement pas la nuit sur l'île, tout de même. Il se déshabilla en quatrième vitesse, enfila son maillot de bain, et jeta son canot de sauvetage en plastique à l'eau, y mit des serviettes et deux trois affaire utiles avant d'enjoindre la petite embarcation orange à rejoindre le rivage, l'y aidant avec son pouvoir.

Quelques minutes plus tard, il faisait quelques grands coucous ridicules à Sakura, qui était posément assise dans le sable, et avait l'air de profiter du soleil et de son excursion à Hoedic, ce qui n'était pas pour déplaire au marin.
La plage était assez vide, malgré le beau temps, mais tant mieux, au moins si un pouvoir ou un don décidait de faire une escapade, ce ne serait pas trop remarqué par les innocents. Kåre voulait simplement s'amuser avec sa nouvelle copine, pas envie de s'embêter avec les contingences du Secret, tout ça.
Il sauta sur le sable chaud, et se mit à sautiller vers sa compagne du jour, lorsque, crac.

Boum.
Aïe.

Il était tombé. Dans un trou. Un trou. Pas besoin d'être Sherlock Holmes pour deviner QUI était à l'origine de ce méfait. Sakulavilaine. Maraude. Mécréante. Fou comme la langue est riche en insultes désuètes super marrantes. Quel sale gosse. En fait, c'était vraiment une Cross. Kåre crachait du sable, et était égratigné de partout. D'une colère au final assez feinte, il se mit à tenter de jeter des poignées de sable par dessus le trou afin d'atteindre sa tortionnaire, mais c'était assez inefficace, la moitié lui retombait dessus à chaque fois.

-Mécréante ! S'écria-t-il, histoire qu'elle puisse profiter elle aussi de son vocabulaire français si développé. Marin d'eau douce ! Moule à gaufres ! Sac à patate mal léché !

A ce stade là, il ne savait pas trop ce qu'il disait, mais au moins, c'était drôle, il se faisait même rire tout seul. En fait, la situation le faisait rire tout seul. Et puis le trou n'était pas très haut il pouvait largement se remonter tout seul, ce qu'il fit, passant ses bras au dessus du rebord, et s'en aidant pour refaire surface, débarquant nez à nez avec la coupable, sur laquelle il se jeta pour la chatouiller en poussant en genre de... Rugissement/cri chelou.

-Mécréaaaaaaaante ! maugré de nouveau Kåre en se roulant dans le sable avec sa victime.

Enfin, à y réfléchir, qui était le plus une victime depuis le début, c'était un peu kiff kiff. Ce qui étaient sûr, c'était que le niveau de maturité ne devait pas excéder celui d'une classe d'enfants de CE2, et encore, c'était sous estimer les enfants de CE2.

Blablabla. Avec ce ton et cet air de donneur de leçon. Tu te prends pour qui hipster là ? Genre, ok, j'me doute qu'il déconne, mais d'où il est si sérieux là ? Tsss. J'lève les yeux au ciel. De toutes façons il me voit pas parce qu'il fait ses trucs avec ses cordes là. Des trucs. Des bidules. Et des machins. C'est un vrai bordel là dedans et je comprends dalle.


Bah oui. Et puis quoi encore ? C'est pas ma faute si il fait de la merde tout le temps ce petit con.


Trop relou. Je pouvais pas … Être bourreau à la place ? Non ? Ca m'irait bien pourtant. Il se serait pris de sacrées … Décharges ? Ou je sais pas comment ça se manifeste, mais il aurait subi depuis longtemps le prépuce ! Et ça m'aurait fait un bien fou ! Non, à la place je suis pitain de télépathe. C'est putain d'inutile. Je contrôle que dalle. En plus des fois il va lire dans les pensées des gens aussi, comme ça, gratuitement. Genre le bordel il se balade, il décide que ça je dois l'entendre, ça ils doivent l'entendre... RE-LOU. Le truc il a sa propre conscience en fait et c'est coucoujefaisdelamerdeetjefousdanslamerdemasorcière. Voilà. C'est exactement ça. Imaginez un jour j'hurle dans la tête d'un innocent non doué et non au courant ? Il va penser qu'il est fou ! A la rigueur si c'est juste un inconnu que je croise sans faire exprès dans la rue, ça peut passer, mais si c'est quelqu'un à qui je m'adresse … ! C'est la grosse merde. Putain. Pourquoi je suis incapable de le contrôler sérieux ? Ah oui, un peu parce que j'ai parfois l'impression d'en avoir rien à branler.

Vous savez qu'elle est la réponse du macaque après mon doigt ? Il me tire de la langue. Tellement prévisible. Puéril. Comme si il avait pas déjà fait ce geste des milliers de fois depuis qu'il est venu m'adresser la parole. J'ai limite envie de dire que je suis heureuse qu'il l'ai fait maintenant. Ca change vraiment du QG, c'est fou. J'en suis presque à oublier cette pression que je ressens à l'approche du mariage forcé et tout. J'me sens... Libérée, un peu, en quelques sortes. Une sorte de récréation. C'est ça. Un petit souffle de liberté avant d'être enchaînée à tout jamais à ces monstres. Monstres... Comme lui, non ?

A l'eau. Je suis à l'eau. Toute mouillée. Même mes magnifiques cheveux. Que j'avais coiffés. (ou pas, faut pas déconner non plus). JE SUIS RONCHON. MES BUBULLES LE PROUVENT. Sale rat. J'le fusille du regard pendant qu'il est tout content. Il est content Gaëtan. Du coup j'me dirige vers la plage parce que clairement, c'est pas lui qui va m'aider. J'aurais pu le foutre à l'eau tout habillé. Mais j'aurais sûrement perdu avec un face à face. Je suis si faible. Non, faut que je le prenne par surprise. Alors je vais lui faire un piège sur la plage. Et oui. Et oui.



Et cette fois, la télépathie était intentionnelle ! Très pratique. Inutile j'ai dit tout à l'heure ? Bon, ouais, si j'avais du crier, j'aurais du m'arrêter dans ma nage, en plus j'ai la moitié la tête sous l'eau pour rejoindre au plus vite la plage pour élaborer ma stratégie qui le fera souffrir mille morts.

Môôôôôôôôssieur le chieur daigna enfin pointer le bout de son nez sur son canoë de sauvetage d'une couleur criarde. Vous voyez, si j'avais embarqué là dessus, ça aurait été plus facile de le foutre à l'eau. Mais on ne m'a pas laissé le choix, n'est-ce pas ? Le gueux fait de grands gestes de coucou. Stop me foutre la tehon steuplé. Ta barbe de hispter est amplement suffisante comme ça. J'dis ça mais ya quasiment personne près de nous et au pire, ils en ont rien à faire (moi aussi en vrai mais j'ai pris goût à l'insulter).

Aller, vas y, avance. Je fais mine de rien et reste allongée, impassible. Il avance. Je souris intérieurement. En fait non il avance pas, il rebondit comme Tigrou. Trop d'énergie là dedans. Il est aussi énergique le matin aussi ? Parce que franchement, quand t'as encore la tête dans le cul et que t'as quelqu'un de si énergique alors que t'as pas encore décuvé de ta nuit, c'est juste … PAS POSSIBLE. Faut pas que je croise cet homme quand je viens de me réveiller en fait c'est pas possible.

Et là. Crac. Patatra. Badaboum. Je jouis de bonheur. IL EST TOMBE DANS MON PIEGE AHAHA. LES QUATRE FERS EN L'AIR AHAHA. Victory is mine.

Je me relevai donc, pour mieux apprécier ce beau spectacle qu'était le Carré tombé dans un trou fait par une amatrice. Il toussait, peuchèèèèèèèèère. Ah c'est caca le sable dans la bouche hein. Et oui. DON'T MESS WITH CROSS. AHAHA. C'est nous qu'on est les meilleurs ok.

Bref, il essaie de se venger, en me lançant du sable, qui lui retombe dessus, obviously. Mais moi je fais quoi ? LA DANSE DE LA JOIE. Et oui Jamie. Alors je tourne autour de son trou, en lui lançant encore plus de sable, ahaha ! Que je m'amuse ! Que c'est drôle. C'ETAIT LA VENGEAAAAAAAANCE.


Je riais à gorge déployée. Déjà parce que j'avais réussi à le piéger. Et ça c'était fort cool. Ensuite parce que sa position. Et ses insultes. Priceless. Bref, tout ça faisait que je peinais même à faire ma danse de la joie, tellement je me tordais de rire. J'en avais mal aux abdos. Ca faisait tellement longtemps que je n'avais pas ri comme ça, j'avais oublié l'effet que ça faisait tiens. Et lui aussi riait. On était bien beau comme ça. Deux gros gamins. Cinq ans. Voilà. Pas plus.

Il se releva pendant que je m'écroulai par terre de rire, tellement la situation était drôle. Tellement longtemps qu'un fou rire comme ça ne m'avait pas arrêté dans ce que je faisais. Il sortit de son trou, dommage, c'est vrai qu'il était pas hyper profond non plus, assez pour le faire chuter Voldemort (nez en moins)(je dis de la merde), assez comique. Il se rua sur moi en rugissant un MECREAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAANTE qui me fit encore plus rire. Et pour continuer il me chatouilla. Cet enfant ! UN ENFANT. Sérieux. J'en pouvais plus. Pourquoi pile à ce moment là il fallait que je sois chatouilleuse ? Ca pouvait pas être « POKERFACE, tu fous quoi là ? » NON EVIDEMMENT. Ca aurait tout cassé. Ca aurait été drôle. Non, je me tortillais dans tous les sens pour échapper à ses mains qui me faisaient mille supplices. Je n'avais pas d'échappatoires, aucune, et je n'en pouvais plus, je ne pouvais même plus respirer, j'avais les larmes aux yeux.


Et je continuais de rire. Mais pitié. Pitié. Stop. J'en peux pluuuuuuuuus ahaha. Bon si ça marche pas, va falloir faire autre chose, j'essayais de rouler sur le ventre et de mettre mes jambes sous moi pour … M'enfuir à quatre pattes ! Avant d'essayer de me relever, tant bien que mal, en espérant qu'il ne me poursuive pas de trop près, en espérant que je m'étale pas par terre à cause du sable, en espérant que mes abdos tiennent après tant de rire. Mais je me relevai et fit face à Kare, quelques mètres plus loin du trou. Et si il me suit de trop près, je lui envoie du sable à la figure, parce que j'en ai plein les mains ! AHAHA !

Visiblement, la jeune femme avait des soucis à régler avec son don. Kåre fouilla dans son esprit pour tenter de se souvenir si la télépathie avec les objets ou le contrôle de l'eau lui avaient déjà posé problème à un moment où à un autre de sa vie. Bon, parfois les objets étaient chiants et râlaient un peu trop à son goût, pour des objets. Mais en réalité, le trentenaire avait toujours accepté ses don et pouvoir comme ils venaient, comme faisant partie de lui, il les avait embrassés, tout simplement. Il ne s'imaginait même pas ayant d'autres formes de magie en lui. Il avait toujours été en communion avec l'eau, surtout la mer, être élémentariste l'eau le définissait presque plus que d'être un sorcier, en réalité.

Le suédois redevint sérieux pendant un instant, regarda sa compagne dans les yeux, et dit simplement :

-Essaie de faire la paix avec lui. Il est simplement sauvage, comme toi.

Puis il regarda l'horizon. Il n'y avait que quelques nuages, quelques jolis nuages qui formaient des taches éparses et fines, quelques petits moutons des airs qui paissaient dans l'infini. Et lui était sur son bateau, à faire jouer des cordages entre ses doigts plutôt qu'à réellement en faire des nœuds, ne faisant qu'un avec Sven, avec le vent, avec la mer. Il était bien. Mélancolique, un peu, comme toujours. Mais bien. Et le fait qu'il ait une gamine jouant malgré elle au macaque sur ses cordages ne gâchait pas le tout. Il avait bien fait d'insister, c'était une après midi agréable, peut-être même un peu pour Sakura également.

Bon, peut-être pas lorsqu'elle se retrouva à l'eau, et partit rejoindre l'île à la nage, tout en lui demandant... de la mordre ? Par télépathie ? En anglais ? Si c'était une expression, ce n'en était pas une que Kåre connaissait. Il voulait bien embêter la jeune française, mais pas spécialement la mordre. C'était soit trop sexuel, soit trop violent. Mais il ne pouvait de toute façon pas lui répondre, puisque sa télépathie à lui ne marchait que sur les objets. Le suédois se contenta donc d'afficher une moue perplexe, faisant remonter ses lèvres pressées entre elles, ce qui lui donnait un air stupide, et d'aller fixer son bateau quelque part, afin de pouvoir ensuite rejoindre sa jeune compagne.

Kåre était donc tout content, jusqu'à ce qu'il arrive sur la terre ferme, et qu'il tombe tel un lapin ahuri et stupide de trois semaines, dans un trou même pas si profond, creusé par qui, eh bien, creusé par Sakura Laure Cross. Le trentenaire était donc là, en train de râler tout son soûl dans trois langues sur l'adolescente, qui, elle dansait autour de son piège en lui lançant du sable, qui lui atterrissait dans le visage, et dans les yeux. Evidemment.

Mais ce qui était important, c'était qu'elle riait, et cela rendait le sorcier noir heureux. Il sourit avec attendrissement, malgré le sable sur tout son visage. Il ne pouvait améliorer la vie de Sakura Laure Cross sur le long terme, mais au moins, il l'avait faite rire, peut-être oublier sa condition angoissante, pendant quelques instants, en lui offrant une distraction, au prix de son propre ridicule, ce qui n'était, après tout, pas cher payé. Ca en valait bien la peine. Il aurait pu faire plus. Il aurait dû faire plus. Mais il ne pouvait pas se compromettre. Pour sa famille.

Le suédois chassa ces pensées de son esprit afin d'obtenir sa vengeance. Il n'eut même pas besoin de pousser Sakura au sol pour la chatouiller. Elle était elle-même tombée sous le coup de son fou-rire, et il fallait bien avouer que cela entraîna également chez lui des gloussements incontrôlés. Il riait, tout en poussant des cris et des insultes qui avaient plus ou moins de sens, et se mit donc à chatouiller la gamine, -qui était le plus gamin des deux, en réalité, ça n'était pas dit-, qui pleurait maintenant de rire, et qui finit par lui demander de s'arrêter. Il ne fallait pas dire ça à Kåre, qui se mit à la chatouiller de plus belle. Malheureusement pour lui, elle réussit à s'échapper... A quatre pattes... Le trentenaire explosa de rire, ce qui laissa le temps à la française de s'éloigner de lui, et de se tenir en face de son tortionnaire, défiante, menaçant de lui jeter du sable à la figure. Il sourit en serrant les dents. Il réfléchit quelques secondes à sa prochaine stratégie d'attaque, avant de décider qu'un peu plus de sable dans la figure, ça pouvait aller, et de sauter sur la jeune femme, l'empoignant par la taille pour la faire tomber. Tout allait bien, il allait plaquer de nouveau son adversaire au sol, lorsque sa main rencontra malencontreusement... Un sein.

-BOOB ALERT ! s'écria le maillot de bain de Kåre, tandis que celui-ci devint écarlate, écarquillant grand les yeux en regardant Sakura, essayant d'éviter sa nudité, pendant un instant qui lui parut une éternité.

Puis son cerveau se remit à "fonctionner", c'est à dire, en réalité, à faire en sorte d'agir, mais pas d'agir de façon cohérente. Le suédois se jeta en boule sur le sol, les mains enveloppant le dessus de sa tête, et se mit à crier :

-PARDON C'EST PAS MOI JE SUIS DÉSOLÉ, J'AI PAS FAIT EXPRÈS J'AI RIEN VU.

Il s'arrêta un instant, puis se mit à geindre, toujours recroquevillé sur le sol, face contre terre et bien décidé à ne pas bouger :

-Tu aurais pu me dire que tu avais dessiné ton maillot de bain.

C'était gênant, gênant, et re-gênant. Sakura Cross à poil n'était pas quelque chose qu'il avait imaginé, ni qu'il avait eu envie d'imaginer, d'ailleurs. Ce qu'il savait, c'était que cette fille en avait vécu assez pour se faire observer par un semi-inconnu de plus sur une plage, et que lui n'avait globalement pas envie de voir d'autres filles nues qu'Artémis, en tous cas sûrement pas une amie-chieuse-relation nouvelle et étrange.

Je lève les yeux au ciel.


Parce que franchement, ça ne m'amuse PAS. Nop.

La chose qui m'amusait par contre, et jamais je ne l'avouerai à voix haute, jamais, nop, surtout pas à tête de prépuce, c'est cet après midi. C'était si rafraîchissant, si innocent presque. Ca faisait du bien. Finalement, j'étais heureuse qu'il ai insisté pour me faire chier. Vous imaginez, sinon je serais encore dans le QG glauque de Croix. C'est bien plus fun ici, non ? La mer, le soleil, la plage qui pointe le bout de son nez. J'ai presque l'impression de vivre. Presque, si il n'y avait pas toutes ces choses qui m'attendaient au retour. Le mariage, le fait d'être enchaînée à Croix pour toujours. Mais il fallait que j'oublie cette pression, juste pour quelques heures, pour profiter de cet oxygène donné par … Un sorcier noir. Que faisait-il dans cette organisation ? Etait-il si insouciant tout le temps ? Ou était-il juste un gros gamin qui prenait quand même plaisir à torturer et égorger des mêlés ? Ces questions me restaient en travers de la gorge, à qui j'avais à faire exactement ? Quelqu'un comme moi ? Ou quelqu'un comme eux ? Tout le monde savait pertinemment que j'étais une des gentilles, ils espéraient ardemment me changer. Et lui ? Qui était-il ?

Et puis il était tombé dans mon piège. Sweet revenge. C'était si drôle. Je m'égosillais comme je n'avais pas fait depuis longtemps. C'était si agréable de rire. Rire à s'en faire mal aux abdos. Rire à s'en rouler par terre. Rire à n'en plus pouvoir. Rire comme si il ne se passait rien d'autre au monde que ce moment. Le rire de l'insouciance, de la jeunesse, de complicité. Parce que lui aussi riait, on était à l'unisson. Alors j'oubliais toutes mes interrogations sur cet homme et je profitais uniquement de ce qui m'était donné à ce jour.

Je me retrouvai donc à quatre pattes, quelques temps plus tard, à vouloir échapper aux guillis du mâle prédateur hipster alors que je lui avait hurlé de se stopper, parce que je ne pouvais plus respirer, et vraiment, c'était plus possible ! Et ce glandu, il a fait quoi ? Bah il m'a attaqué de plus belle. Mais j'essaie de te dire que je ne peux plus respirer pourquoi tu me fais ça tu veux que je meurs en fait c'est ça avoue avoue you murderer. Du coup j'me suis enfuie, j'avais pas trop le choix m'voyez. Parce que je veux quand même vivre un minimum. Sans être étouffée. Cause de la mort « surplus de chatouilles » c'est un peu ridicule. Hors de question que je décède comme ça. Hors de question que je décède tout court. J'vous rappelle que j'ai encore une vengeance à faire.

Je le défiai donc du regard, pendant que je continuai de le jeter du sable parce que OUI JE SUIS ARMEE DON'T MESS WITH CROSS. Bon évidemment ma magnifique garde n'a rien pu contre lui et je me suis retrouvée deux bras m'entourant. Il voulait faire quoi en fait là ? On aurait dit un magnifique plaquage digne d'un rugbyman.

De 5 ans.

Et môssieur voulait reprendre les attaques, mais j'étais déjà si faaaaaaible. Il voulu m'attraperme plaquer au sol et je sentis sa main se poser sur ma poitrine. Bizarrement je ne sentais rien entre nos deux peaux. Alors qu'il y aurait dû y avoir le maillot de bain.

Doucement, je regardais cette main, entre deux de ses doigts se trouvait mon petit téton. KEUWAAAAAA ?! MAILLOT DE BAIN OU ES-TU ?! Je... Putain. De. Merde. QUOI. MAIS. Pute de pouvoir. Pute de don. Ma magie me veut du mal.

Je ne savais pas comment réagir. Mon cerveau avait juste bugué. Hurler ? S'indigner ? S'énerver ? Après qui ? Être honteuse ? S'en foutre ? Lui aussi bugait pas mal en vrai, il se détacha enfin de moi pour se mettre en boule par terre, protégeant sa tête. Ainsi donc, cet homme a peur de moi, niark niark niark.

En vrai ça m'a aidé à me débloquer de mon état de stupeur qu'il bouge. Et surtout son cri.

J'me marrais, intérieurement. Parce que j'étais … Pas vraiment pudique. Bon certes, j'aurais préféré ne pas me retrouver COMPLETEMENT NUE devant lui (parce que oui, le bas aussi avait disparu hein). Je faisais genre de cacher mes parties intimes avec les bras et mains. Bon par contre si des inconnus arrivaient vers ce côté de la plage ça me ferait bien chier, faut pas croire. Mais je crois qu'il a amené des serviettes dans son petit bateau gonflable. Ca m'arrangerait bien. Putain de pouvoir.

Si drôle. Je lui balançai du sable avec les pieds sur lui. Même si il se protégeai la tête il le sentirait sûrement. L'attaque de OUF.

Sabelette, attaque sable.

En plus c'est trop choupi les sabelettes.

C'était quoi ses bruits bizarres ? Mais oui mais oui ! Il venait bien de lui ! Geeeeeeeeeeeeeeeindre. Ahaha. So funny.

J'allais à son petit bateau gonflable, pris une serviette et l'enroulait autour de moi. Histoire d'éviter d'exposer ma nudité à tout le monde.

Chaleuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuur.

Relou.

Je retournai vers Kare et lui foutu un coup de pied au cul. En espérant le déséquilibrer assez pour qu'il se retourne et qu'il s'aperçoive que je m'étais rhabillé légèrement.

Teubé.

Chaleuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuur.

Nan mais c'est pas possible, je vais pas survivre avec un truc aussi chaud autour de moi alors qu'il fait déjà hyper chaud. Je laissais tomber la serviette sur le sable et allait me tremper dans l'eau. J'me renloulerai après dedans. Au moins je serais mouillée et ça me rafraîchira.

Parce que je suis désolée, il verra pas grand chose dans l'eau. C'est trouble. Et flou. Et au pire, bah il a déjà vu mes seins, donc bon. Trop tard.

Je faisais la planche, histoire d'attendre le hipster. Je profitais du bruit de l'eau dans mes oreilles, du soleil qui me réchauffait. Si doux. Si agréable.

J'aimerais que cette après midi ne se termine jamais.

D'après Sakura, son don était tout bonnement incontrôlable, et il n'y avait rien à y faire. Kåre fit une petite moue peu convaincue du bout des lèvres. Il était persuadé que c'était surtout une histoire de paix intérieure. Oui, il était parfois un peu hippie sur les bords. Mais forcément, dirait-il, si on est en crise d'adolescence toujours en conflit avec soi-même, comment sa propre magie peut-elle être docile ?
Peut-être que le caractère capricieux du don de la jeune fille n'était pas causé que par cela, mais le suédois était persuadé que tous les traumatismes qu'elle avait vécu et l'instabilité mentale dans laquelle elle semblait se trouver jouaient un rôle capital dans cette histoire de télépathie rebelle. Lui-même, lorsqu'il était énervé, et évidement au moment de la mort de Sven, se sentait pollué, mené en bateau, malmené par son propre don. Il en avait eu, des moments de harcèlement intense par divers objets, durant lesquels ils avait eu envie de se projeter contre les murs, ce qui était une mauvaise idée, car ensuite les murs se plaignaient d'avoir mal.

Le trentenaire prit une grande inspiration d'air marin, et déclara simplement en regardant intensément sa compagne :

-Essaie de te détendre.

Essaie car oui, il savait que ce n'était pas facile, lorsqu'on était captive de sa famille de psychopathes qui dirigeait une organisation de psychopathes et qui prévoyait de vous marier avec un homme que, non seulement vous connaissez à peine mais qui a également plus de 25 ans de plus que vous.

Au moins, même si on pouvait faire toutes sortes de reproches à Kåre, et notamment celui d'être chiant, dans le sens chiant "bien lourd", voire même "relou", comme disent les jeunes -en France, parce qu'on ne parle le verlan français qu'en France, si je ne m'abuse, ou au moins dans les pays francophones. Bref.- il voyait difficilement comme il était possible de nier que leur petite escapade de l'après midi était bénéfique à Sakura Laure Cross. Bénéfique d'un point de vue du moral, déjà, car elle semblait prendre un immense plaisir à se foutre de sa gueule, l'insulter, mais également à le torturer par tous les moyens mis à sa disposition, notamment le sable, notons le, qui, ma foi, est une réelle saloperie lorsqu'il est mal utilisé, se dit le suédois alors qu'il était en train de s'en recevoir dans la figure.
Bénéfique également d'un point de vue cathartique, du coup, car la petite sorcière avait ainsi trouvé un magnifique punching ball/être quelconque sur lequel faire sortir tout son ressentiment. Pourquoi ? Parce que Kåre s'était tout de suite et tout naturellement mis dans cette position, et voir, qu'au final, la jeune femme se détendait un peu grâce à cela lui faisait extrêmement plaisir.
Et pour finir, cette sortie était probablement bénéfique à la jeune Cross d'un point de vue corporel, car même si ce n'était pas un entrainement à proprement parler, jusqu'ici elle avait escaladé des cordages, nagé, creusé un trou, s'était "battue" avec lui, et avait un peu pris le soleil. Ce qui était probablement un bon ratio de trucs plutôt chouettes niveau santé physique. Bon, si on excluait aussi l'alcool qu'ils avaient consommé, mais bon, leur vie était assez merdique pour ne pas chipoter non plus.

Dans tous les cas, leur niveau de maturité n'était plus à prouver, avec mention honorable à Kåre qui, du haut de sa petite trentaine, s'était tout simplement roulé en boule après avoir touché un sein nu. Le canoë gonflable était d'ailleurs en train de se foutre de sa gueule en ricanant et en disant qu'il avait certainement des choses à régler avec sa mère, enfin, des conneries du genre. Qui eût cru que le canoë avait lu du Freud ?

Sakura, quant à elle, avait tout simplement hurlé. Un genre de cri de pokémon qui avait malgré tout fait glousser le sorcier dans sa barbe.
Sans lui laisser de répit, elle lui hurla dessus qu'il était un pervers, et le suédois se sentit rougir jusqu'aux oreilles, parce que justement, il ne voulait surtout pas qu'on croie qu'il était un pervers. S'il y avait bien une chose qui le dégoûtait, c'étaient les criminels sexuels. Allez savoir pourquoi. Peut-être parce qu'il tenait tellement à sa sexualité épanouie et qu'il portait cet aspect de sa vie en si grande estime qu'il considérait ignoble la simple idée de ne pas respecter celle des autres ? Bref. En réalité, sa nouvelle coupine n'avait pas l'air si traumatisée que ça, elle paraissait même plutôt joyeuse d'avoir une nouvelle occasion de malmener le pauvre type qui l'avait abordée comme, ça, au QG, pour presque aucune raison.

Et voilà qu'elle lui lançait du sable, encore.

-Pas fait exprèèèès, gémit Kåre d'une voix plaintive.

Il y eut un instant de répit. Le sorcier attendit. Sa position n'était pas confortable, mais il avait un tout petit peu trop honte encore pour oser regarder Sakura dans les yeux. Ou pas dans les yeux d'ailleurs, le plus problématique dans tout ça étant surtout qu'il ne savait pas si elle avait pu se couvrir.

Au moment où il décida de glisser un œil entre ses doigts pour essayer d’entrapercevoir ce qui se passait au dehors de sa carapace, il se prit un magnifique coup de pied dans les fesses, de la part de, devinez-qui, évidemment, Sakura Laure Cross, qui d'autre ? Bon, il l'avait bien mérité, après tout. Et puis, on restait dans l'idée d'aider à la catharsis de la jeune femme. Il fallait qu'elle se défoule, autant qu'elle se défoule sur lui. Autant qu'il soit utile à quelque chose, lui qui ne faisait pas que des choses mirobolantes de sa vie.

Et en plus, il était débile. Evidemment qu'elle avait dessiné son maillot de bain. Comme elle était en train de lui démontrer si brillamment, elle n'en avait absolument pas lorsqu'ils étaient partis du Dark Descent. Il aurait dû faire plus gaffe avant de se lancer dans une bataille de guilis. Teubé. Toujours en boule, il se mit à se frapper frénétiquement le sommet du crâne en s'écriant :

-Méchant Dobby, méchant Dobby, méchant Dobby !

Peut-être saisirait-elle la référence. Lui même n'était pas un expert d'Harry Potter, mais ce passage du deuxième film l'avait marqué.

Le coup de pied en soi l'avait à peine ébranlé, il avait juste poussé un petit gémissement, comme ça, un genre de truc entre "aïe" et "gni".
Mais sa courte existence en tant que bulot des plages était visiblement sur le point de s'achever, car, toujours en l'insultant, évidemment, faut pas déconner non plus, sa jeune amie lui cria de le rejoindre pour se baigner. Elle lui demanda également s'il n'avait pas un maillot de bain en rab. Ce qu'il n'avait pas. En tous cas pas pour femme. Il prenait bien soin d'enlever toutes les affaires d'Artémis lorsqu'il se rendait en Bretagne, ou globalement lorsqu'il était en contact avec d'autres sorciers noirs.

Se relevant et s'époussetant tout le corps, il se mit à réfléchir à ce qu'il pourrait bien prêter à la jeune femme pour se couvrir. Il courut tel un gosse beaucoup trop content vers la mer et s'y jeta en faisant un gros "splatch", onomatopée qu'il imita d'ailleurs avec sa bouche, avant de rejoindre l'autre sorcière noire à la nage.

Une fois arrivé à son niveau, il remplit sa bouche d'eau de mer et le cracha en un joli jet régulier sur la figure de Sakura, qui faisait innocemment la planche, telle une jolie étoile de mer, juste parce que, voilà, c'était drôle. Et peut-être même que ça allait l'énerver.

Le suédois reprit son sérieux deux minutes pour dire :

-Si tu veux je peux te prêter un grand t-shirt et un maillot de bain pour homme. A part ça je crois que j'ai une combinaison de plongée. Mais elle est très certainement trop grande pour toi. Je suis désolé.

Il lui adressa un joli petit minois désolé de chien battu et enfonça la moitié inférieure de son visage sous l'eau tout en se mettant à la fixer d'un air dérangeant et en faisant des bulles avec sa bouche.

-Blblbl, je suis une créature marine, blblblllll sorcière, feaaar ! lui dit-il par télépathie, avant de se mettre lui aussi en position de la planche, et de se positionner près de la jeune française.

Kåre regarda un instant les nuages épars dans le ciel bleu, tout pimpant, tout content d'être un ciel d'été, seulement traversé quelques fois par des mouettes rieuses, elles aussi contentes, probablement d'être des mouettes bretonnes dans un ciel d'été.

-Ca doit être quand même chouette, d'être un lamantin, fit remarquer le sorcier. Même un métamorphe lamantin, ça doit être chouette. Juste flotter, comme ça, au fond de la mer. Et être gros. J'aimerais bien.

Il pensa aux tanches, ces poissons d'eau douce avec des têtes pour le moins stupides, parce que voilà, c'est rigolo le mot "tanche" (ça se dit "sutare" en suédois), et que penser aux poissons d'eau douce, ça permet de se sentir supérieurement intelligent, et ajouta :

-En tous cas ça doit être vachement plus chouette que d'être une tanche.

Une pause. Encore une pensée débile.

-Etre une chouette ça doit être chouette aussi.

Puis il se tut, se disant que Sakura avait déjà bien assez matière à se foutre de sa gueule pour le moment. Mais c'était agréable, de dire des choses comme ça, sans réfléchir. Ca détendait, c'était drôle. Et Kåre aimait bien rire.
Soudain, prit d'une illumination subite, il se redressa dans l'eau, arrosant la jeune femme au passage, et lui dit :

-Viens on fait le concours de celui qui tient le plus longtemps sous l'eau.

Bon d'accord c'était de la triche étant donné qu'il était élémentariste d'eau. Kåre roula des yeux.

-Promis je triche pas.

A tous les coups elle allait essayer de le noyer, fourbe comme elle était. Mais il était prêt à prendre le risque. De toute façon, c'est très dur de noyer un élémentariste d'eau, c'est un truc qu'il faut savoir. Pas qu'être élémentariste assure toujours d'être immunisé contre les effets d'un élément donné. Mais disons que c'est plus dur. L'élément n'est pas contre lui à la base.

En conclusion, Jeanne d'Arc aurait peut-être vécu plus longtemps si elle avait été élementariste de feu.

Je roulais les yeux vers le ciel. C'est bon, ça faisait quasiment 18 ans (bon, ok, moins), que je vivais avec ce putain de don de télépathie qui faisait n'importe quoi. J'veux dire, mes amies, au Japon, elle me faisait souvent « hm ? T'as dit quelque chose ? » Aheum. Non. Le malaise, je vous raconte pas. Et je veux dire, à cette époque j'allais bien. J'avais mes parents, j'avais mes amies et amis, je n'étais pas isolée socialement, je n'étais pas reloue, méchante et tous ces trucs là. J'étais heureuse, j'étais bien. C'était la période la plus heureuse de ma vie. Et même si j'étais une pré-ado/ado, j'allais bien quand même. J'avais des disputes avec mes parents parce que, hey, c'est l'âge qui le veut mais je les aimais quand même passionnément et tout. Et on se réconciliait le soir même so.. J'ai jamais fait de fugue ou quoi, même à l'époque je me considérai comme une personne heureuse. J'étais heureuse.

Ca fait si longtemps. Même à l'orphelinat je n'ai pas été aussi heureuse, en même temps, comment aurais-je pu ? Il me manquait deux des personnes les plus importantes de ma vie. Mes parents. Jamais j'aurais pensé qu'ils seraient morts aussi tôt. Alors que j'étais si jeune. Sérieusement, c'est affreux. Même aux côtés de Ian, qui pourtant a réussi à me dérider alors que c'était si mal parti. Sakura, la fille qui a tout perdu, qui ne veut pas du tout se rattacher à quelqu'un ou quelque chose, parce que tout est si éphémère, et les ruptures si douloureuses. Je voulais pas me rattacher. Tellement pas. Et pourtant, comment ne pas craquer devant sa pretty face ? Seriously. Et il a enchaîné sur tous les autres, que je connais pas forcément beaucoup mais qui sont tout aussi adorables. Parce que, on était tous dans la même merde au final. Sans famille, alors c'était à nous de se recréer une famille.

J'étais bien, j'aurais pu retrouver le bonheur. Et puis ils sont revenus. Ils sont coriaces quand même, cette putain de famille Cross. Alors me revoilà privé de mes amis, de ma famille. Et sérieusement, comment on peut s'attacher à des briseurs de famille, de foyer, de vie ? Des assassins, des psychopathes, des sociopathes ? Comment on peut les aimer, les apprécier et vouloir passer du temps avec eux ? C'est tellement pas possible du tout.

Est-ce que cet homme est différent ? J'ai envie d'y croire. Mais ne suis-je pas naïve une fois de plus en pensant ça ? Si, sûrement. J'vais juste me dire que c'est un meurtrier de sang froid mais que je vais juste profiter de ce break qu'il peut m'offrir, de manière égoiste et hypocrite. Sans avoir à jamais lui reparler après.

Ou alors leur parler de choses qui ne fâchent pas ?

Je sais plus où j'en suis. Je sais plus ce que je dois faire, honnêtement. Et je n'ai personne à qui me confier. Je ne peux décemment rien lui dire. C'est un membre de l'organisation qui a détruit ma famille. No way je lui dis quoi que se soit sur ce que j'ai sur le cœur. J'peux me confier à personne, c'est tout. Enfin, c'est pas comme si j'avais pas pris l'habitude au bout de toutes ces années seule.

Mais j'oubliais bien vite toutes ces pensées sordides qui m'envahissaient au profit du moment présent. Respirer, courir, sauter et rire.

Vous vous imaginez que je suis en train de rire à gorge déployée avec un sorcier noir que je suis censé détester ? Comment je fais moi pour m'y retrouver dans tout ça sérieusement ? C'est n'importe quoi.

Enfin, rire, j'étais quand même en train de l'insulter. Mais je riais tellement à l'intérieur. Je vous rappelle qu'il m'a touché un boobies. Heureusement que je suis pas si sensible que ça de cette partie supposément érogène de mon corps. Enfin, disons surtout que ça dépend des moments.

Il gémissait. Non mais sérieusement, comment pouvait-on prendre cet homme au sérieux ? C'était juste n'importe quoi. Vous êtes sûrs que c'est un sorcier noir ? Pour moi c'est un homme qui pourrait se faire malmener par n'importe qui hyper facilement. Regardez moi çaaaaaa. C'est si drôle.

J'attrapais des poignées de sable et continuais de lui lancer à la figure.

J'espère qu'il n'ira pas essayer de me mordre le cul après ça, pour vérifier. L'humour des hommes, sérieusement, faut qu'ils arrêtent.

Après que son visage eu mordu la poussière -enfin plutôt le sable là- il se prit à s'insulter d'elfe de maison. SI INNOCENT. SERIEUSEMENT.

Ce gars tue des gens ? Vraiment ? C'est vraiment possible ? J'y crois pas. Je gardais par contre ma réflexion pour moi avant d'aller me jeter dans l'eau. Parce que je me répète.

Chaleuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuur.

Le hispter à tête de bite me suivit, s'écrasa d'un gros splatch qui me mouilla tous les cheveux (merci, je vais friser maintenant) (nan en vrai balek) (mais j'aime râler) (et l'insulter) (j'le regarde d'un air balsé) (pourquoi je traîne avec ce gamin?). Et comme si ça suffisait pas il me cracha de l'eau à la figure, telle une fontaine poilue et moche. Moche comme les gens qui se prennent pour des artistes et qui font des trucs hideux (comme l'art contemporain, exactement).

Je le regarde avec un air encore plus blasé, si c'est possible d'être encore plus blasé que ça. Déjà que mon visage au naturel est blasé, c'est encore plus dur de faire « ouais là gros, j'suis vraiment blasée, encore plus que d'habitude, c'est pour te dire ». Genre ya des fois des gens qui me disent « mais t'as quoi ? » ou « Mais souris » mais putain c'est ma tête naturelle laissez moi tranquille c'est bon. Stop. Et les gars qui te disent dans la rue de sourire. On se connaît ? Non. Alors tu fermes ta grande gueule ou je te casse les dents.

J'ai pas peur des gens dans la rue moi. Généralement c'est des humains innocents, donc ils vont pas me faire grand mal. Moi si. Aha.

Des fois je me fais peur, j'ai l'impression que je pourrais vraiment avoir la mentalité de quelqu'un de méchant. Mais en même temps c'est vrai, le gars tout faible il va s'attaquer à un sorcier. Clairement, il a pas les moyens il pourra rien faire. Pourquoi tu essaies ?

Déjà pourquoi t'emmerdes une femme de base. Tu fais pas. Tu la laisses tranquille et tu fermes ta gueule.

Sinon j'te casse les dents.

J'vais faire partie d'une milice pour les femmes harcelées dans la rue. J'vais aller casser les dents de tous les gars qui parlent, castrer tous les frotteurs, et couper les mains de tous ceux qui mettent des mains là où ils ont pas le droit de toucher. Sûrement qu'au bout d'un moment ça se calmera. J'serais la vengeresse de toutes celles qui peuvent pas se défendre. Je les défendrai et tout ça. Faut défendre les faibles awai.

Bref, avec sa fontaine, j'avais arrêté de faire la planche. Parce que j'aime pas trop ça avoir de l'eau qui rentre dans mon nez. Ca pique et j'ai l'impression de m'étouffer. Petite (et encore des fois maintenant, aha), j'me pinçais le nez pour plonger dans l'eau. J'aime pas l'eau dans le nez. Ca brûle. J'aime pas quand ça brûle moi. Imaginez une tête triste. Voilà.

Je riais, encore. J'aime faire chier les gens o-èm-gé (c'est pas PSG ni OM hein, c'est OMG). Ca veut mater ça veut mater en fait. Clairement.

Il commença à faire des bulles sous l'eau, en me regardant chelou. CE GARS EST CHELOU PUTAIN JPP DE CET HOMME (encore une fois à prononcer ji pé pé)


OH L'INTRUSION DE LA TÊTE. J'avais qu'une envie c'était de l'enfoncer encore plus sous l'eau pour le couler. L'attaquer par surprise et tout m'voyez. ET QU'IL SOUFFRE MILLE MORTS. Sauf qu'il contrôle l'eau. Ca fait quoi un élémentariste eau qui se noie ? Ca peut se noyer ou pas ? Enfin, genre pour un élémentariste feu, le feu ça brûle pas, mais un élémentariste eau ça respire sous l'eau ou pas ? Ca développe des branchies au bout d'un moment ? Comme Harry quand il mange de la branchiflore ? (D'ailleurs branchies, ça donne un sacré indice, j'dis ça, j'dis rien). (Ca marche dans l'eau douce ou salée ou les deux alors?). Ou alors ça tient juste plus longtemps sous l'eau parce que je sais pas quoi ? Ou alors ça meurt ?

Il sorti enfin la tête de l'eau, alors que moi je barbottai (comme un canard, avec plus de classe. Parce que j'ai décidé)


J'étouffai un rire, qui venait de nulle part, tout comme cette phrase.

Euh, what ?

Jpp de cet homme. Vraiment. J'vais le noyer j'crois bien. Comme ça je lui vole son bateau et plus jamais je reviens à Croix, en France, en Europe et tout. Plus jamais jamais. Oh se serait trop bien. J'vivrai sur son bateau et balekouille du reste. J'vivrai de la pêche et de la cueillette. J'aimerais tellement. Quitter toute cette vie. Aller m'isoler dans un endroit inconnu de Croix, loin, si loin... J'peux pas m'enfuir ?


JE VAIS POUVOIR LE NOYER AHAHAHA OUIIIIIIII JE METS MON PLAN A EXECUTION ET APRES JE VOLE SON BATEAU ET JE PARS LOIN OUI OUI OUIIIIIIII.


Je sautais de l'eau en m'écriant

Et j'le mettais sous l'eau. Et moi aussi. Parce que c'est quand même un concours et ma fierté, et tant qu'il est pas mort j'peux pas trop lui voler son bateau, quoique ? Sauf qu'il est télépathe avec les objets pas vrai ? Du coup son bateau il est lié à lui et il a une conscience en quelque sorte non ? Il voudra pas se faire voler, si ? J'en sais rien, j'entends pas les objets moi. Et ya jamais aucun objet qui a refusé de faire ce que je voulais faire. Du coup pourquoi le bateau il voudrait pas abandonner son propriétaire hein ?

Vous savez quoi ? Une fois sous l'eau et les yeux ouverts, bah l'eau est pas si trouble que ça. Du coup le pervers continue sûrement de me voir à poil. Pourquoi j'ai pas pris ses affaires quand il me l'a proposé ? Ah oui, parce que j'avais la flemme de sortir de l'eau. Parce que

Chaleuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuur.

Mais là on est bien pas vrai ? J'ai la tête toute mouillée, les cheveux qui vont faire du gros caca avec l'eau salée et le sable. J'les avais lavés, sérieuuuux, relouuuuuuu. Et puis j'ai les yeux ouverts. Là ça fait pas trop mal ça va, c'est pas le top mais ça va. Mais je vais tellement douillé en sortant, je veux pas sortir, sauf que si je sors pas je vais tellement me noyer. Aha. Si drôle (non). Du coup pendant qu'on attend sous l'eau que monsieur l'élémentariste se noie, j'me mets en tailleurs, ouais sous l'eau. C'est une bonne idée pour gaspiller encore plus d'oxygène pas vrai ?

Tu sais que je vais me noyer avant toi ?

Et du coup tu seras dans la merde.

Dorian va te tuer.

Ahaha.

Merde, des bulles d'air sont parties de mon neeeeeez, noooooon, reviens précieux petit oxygène qui petit à petit continue de se périmeeeeeeer. Je vais jamais tenir omg. Comment ils font les gens pour tenir plus de trente secondes ? En vrai si ça se retouve on est déjà à deux minutes et j'le sais pas. J'en sais rien en vrai j'ai pas compté mais je souffre so muuuuuuuch. Ca commence à manquer dans les poumons jpp.

Du coup on va punir le pervers de l'attaque fourbe de faire un concours d'apnée avec quelqu'un qui n'est pas élémentariste eau. J'nage dans sa direction (enfin, il est à deux mètres quoi, c'est pas vraiment ce que je vais appeler nager si vous voyez ce que je veux dire …) j'mets mes mains sur ses épaules et le regarde dans les yeux. J'suis toujours à poil aha. J'me fais basculer derrière lui et je commence tranquillement, posément à m'asseoir sur ses épaules, popopo (vous comprenez pourquoi j'me suis mise derrière lui, hein?). Du coup je me relève et OH MON DIEU JE RESPIRE ENFIN CA FAIT DU BIEEEEEEEN.

Enfin, j'ai quand même les seins à l'air libre. Mais bon, ya toujours personne à l'horizon so balek. Je tousse, parce que faut pas déconner.

ET MON DIEU MES YEUX NOOOOON. Ah j'ai trop mal. Autant il a trop moyen de revenir me faire valser dans l'eau et d'me couler ce petit con en se relevant à son tour.

J'ai complètement perdu. J'peux encore lui voler son bateau ? Sur un malentendu ça passe ou bien ?

J'ai les yeux qui piquent. Ils pleurent même je crois. Azy la serviette est gavé loin en vrai, mais, mais... erh. Il va faire chaud dans la serviette, j'ai pas envie de me recouvriiiiiiir. Et puis maintenant que je suis toute mouillée de partout (bah oui de partout j'étais dans l'eau vous croyez quoi) bah il fait pas si chaud que ça. Il fait pas froid. Mais juste, on est bien.

Ouais, on est bien.

La Cross en était rendue à demander si son cul c'était du poulet tout en continuant d'asperger Kåre de sable.

- J'vais pas aller vérifier, couina-t-il d'une voix presque inaudible, ouvrant à peine la bouche, de peur de d'avaler du sable par mégarde.

Il en avait assez fait niveau pelotage involontaire, il n'allait pas en rajouter volontairement, déjà parce qu'il ne touchait pas volontairement les parties érogènes des femmes hors Artémis, et d'autre part, parce que le suédois était quelqu'un de plutôt à cheval sur le consentement, au final. Parce qu'il ne faudrait pas croire qu'on est un malotru juste parce qu'on a été élevé chez les sorciers noirs. A part leur lâcheté et leurs idéaux, les parents Nilsson étaient des personnes tout à fait respectables, ayant communiqué certaines valeurs à leur fils. Dont celle de respecter les femmes. Un sorcier noir n'est pas forcément sexiste. Tout le monde n'est pas Dorian Cross. D'ailleurs, il peut être bon de se souvenir qu'il avait été précédé par une femme à la tête de l'organisation, songea le jeune homme alors qu'il rejoignait Sakura pour barboter dans l'eau, son élément de prédilection, au final. La jeune femme était en train de flotter sur le dos, telle une étoile de mer.
Sauf que les étoiles de mer ne flottent pas au fond de l'eau.
Normalement.
Parfois, il enviait un peu les métamorphes animaux. Animaux marins, évidemment.

Mais il était tout de même bien content des avantages que lui conféraient son pouvoir en termes de navigation. Tout comme son don, au final, d'ailleurs. Enfin, tant qu'il s'entendait bien avec son bateau. Car s'il avait navigué sur un rafiot mal luné qui ne l'appréciait pas, il en eut été tout autrement.

En tous cas, actuellement il avait à gérer le regard de plus en plus blasé d'une gamine en pleine crise existentielle.
Au moins, le fait qu'il lui avait craché de l'eau dessus ne semblait pas l'avoir rendue plus agressive, ce qui sembla au sorcier être, somme toute, un bon point. Elle ne riposta même pas, à sa grande surprise, il en fut même presque déçu. Il afficha alors une moue boudeuse, parodiant volontairement celle de sa compagne, et s'apprêta à plonger sous l'eau pour lui tirer les pieds, mais celle-ci l'interrompit avec une nouvelle agression verbale, le faisant passer pour un gros pervers. Alors qu'en fait, bah il n'aimait qu'une seule et unique femme. Sauf qu'il ne pouvait pas la mentionner à Sakura. Ni à personne d'ailleurs. Cette pensée assombrit son visage un instant, mais il se reprit, éclaboussant la jeune fille de plus belle, et répliqua :

- Oulah, mais enfin ma p'tite, je ne fantasme pas sur les enfants, moi.

C'était vrai quoi, la Cross était à peine majeure.
Bon d'accord, il aurait été franchement abusé d'essayer d'affirmer qu'elle avait un corps d'enfant.
De ce qu'il avait pu voir, elle était même extrêmement bien foutue.
Et dire qu'elle allait devoir servir de chair fraîche à un sorcier de plus de 20 ans son aîné.
Certes, elle aurait pu tomber sur pire que sur Mohamed Al Hattal. Plus vieux, plus moche, moins sympathique. Mais quand même. Cela restait un mariage forcé, on ne pouvait pas essayer de minimiser la chose.
Kåre se mit à serrer les dents, et réalisa qu'il avait froid, ses pensées l'avaient gelé de l'intérieur. Merde. Non, il ne devait pas plomber le moral de Laure, il fallait qu'il se reprenne.
Et puis, il ne pouvait pas faire face à ça. Il était trop faible, trop lâche déjà avec sa propre vie, pour essayer de sauver la gamine. Bizarre comme, malgré tout, l'air de rien, il essayait de la pousser vers quelque chose, autre chose qu'une vie de sorcier noir forcé, éclaboussée de sang. Peut-être qu'il l'encourageait juste à ne pas perdre le goût de vivre, à nier un peu l'horreur de son existence. Comme lui.

Le trentenaire prit une grande inspiration, secoua la tête, et réussit à sortir de son instant figé, se dégelant grâce au petit rire que l'adolescente venait de sortir. Grâce à sa blague nulle. Au moins, il servait à quelque chose.
Ce qui réussit à lui rendre le sourire, à faire de lui un être un peu heureux, pas trop honteux de sa condition pathétique, ce fut qu'elle lui répondit, partant dans la même direction absurde que lui. Il rit à son tour, d'abord un peu timidement, encore un peu froid, plus à gorge déployée. Parce qu'elle imitait un lamantin qui se cognerait à quelque chose, à l'aide de ses deux poings fermés, tout en faisant les onomatopées qui allaient avec, et c'était drôle, il avait 5 ans, et elle aussi. Elle se posait même des questions sur les propriétés de la peau de lamantin, c'était n'importe quoi.
Mais il aurait, en cet instant, réellement aimé être un métamorphe lamantin.
Peut-être même que Laure se serait accrochée à son cou et qu'il aurait nagé, nagé, emportée loin, comme dans un conte pour enfant. Que cette après midi était. Que le reste de leurs vies n'était pas.

- Oh oui, une baleine, murmura-t-il doucement, marquant un temps d'arrêt, le regard dans le vide.

Puis ses yeux se tournèrent vers Sakura, et il sauta vers elle avec un grand "splash" tout en criant d'une voix grave :

- BALEIIIIIIINE !

Atterrissant plus ou moins sur l'épaule de la jeune fille, il se fit la remarque que tout de même, il imitait vachement bien les baleines échouées au large. A moins qu'on ne puisse s'échouer que sur une plage ? Ouais, il lui avait vraiment de penser de la merde. C'est ça le problème de la pensée, se dit-il. On ne peut pas tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de penser. Les pensées viennent comme ça. Heureusement en fait, au final.
Ohlala.

Il n'eut pas le temps d'en penser plus, car la future jeune mariée s'introduisait dans son esprit afin de lui signaler qu'elle n'allait pas être des plus fair-play au jeu-de-celui-qui-reste-le-plus-longtemps-sous-l'eau et plongeait la tête la premier dans les profondeurs, en beuglant qu'elle était un terrible calamar géant. Le suédois se demanda s'il n'avait pas déjà entendu ça quelque part, mais ne parvint pas à remettre la main dessus. Enfin, façon de parler. De penser. Merde.

La phrase "ah ouais, elle sont où tes tentacules ?" se retrouva donc bloquée dans les pensées de Kåre, et par le fait, condamnée à ne pas être prononcée.
Saleté, pesta-t-il intérieurement.

Parce que là, elle le regardait, elle le fixait avec vilenie, méchanceté, et fourberie. A peu près tout ça à la fois. Elle était marrante, avec ses cheveux qui flottaient dans tous les sens, vers le haut. Il haussa les sourcils. De toute façon, il avait plutôt confiance en sa capacité à retenir sa respiration qu'elle, même sans utiliser son pouvoir. Tout simplement à cause de l'entrainement, il avait bien passé la moitié de sa vie sur ou dans la mer, alors forcément. Et puis, il avait tant joué à ça avec Sven. Sven l'humain.

Visiblement, Sakura en avait bien conscience, car elle était en train de lui détailler la suite des événements. Elle allait prétendument se noyer, et Dorian allait le tuer. Lui. Boah. Peut-être qu'il le remercierait, non ?
Il décida de lui répondre comme il avait fait la dernière fois, en dirigeant ses pensées vers son bateau, afin de créer de l'onde télépathique qu'elle entendrait. Sven saurait que le message ne lui était pas adressé.

- Qui te dit que ce n'est pas Dorian qui m'a mandaté pour te tuer ? Et que je vais pas laisser ton cadavre ici au milieu des poissons ? Ils vont manger ton corps. Les crabes aussi.

Peu crédible, à quelques semaines du mariage de la petite, mais ce n'était pas le but. Ce n'était qu'une taquinerie stupide, sans conséquence. Personne n'allait mourir aujourd'hui. Enfin un break.
Il se trouvait particulièrement amusant, et avait fait exprès de prendre un ton glauque sur la dernière partie de sa tirade. Sinistre, il la fixait à présent comme s'il allait réellement la tuer.

Mais la sale gosse avait, visiblement, elle aussi des plans, car elle se mit à nager vers elle, et, ses yeux toujours dans les siens, elle posa ses mains sur ses épaules.
Là, il réalisa qu'elle était toujours nue, alors que, jusqu'ici, il avait totalement fait abstraction. Il laissa s'échapper une bulle d'air, et failli s'étrangler avec de l'eau de mer. Kåre tenta de se débattre par réflexe, mais de façon totalement incongrue, Sakura était en train de s'asseoir sur ses épaules.
Le trentenaire bloqua pendant quelques secondes, le temps que le fait qu'il avait un sexe de femme directement collé sur la nuque fasse son chemin jusqu'à son cerveau. Une femme qui n'était pas sa copine. C'était gênant. Pas d'érection, s'il vous plait, se prit-il à penser.
Car s'il ne désirait pas la jeune femme, le corps avait certains réflexes, même à son âge canonique, et il n'avait pas envie de quiproquo.

Avec l'énergie du désespoir, le sorcier noir poussa son corps le plus possible afin de faire tomber la gamine impromptue, qui finit par tomber en arrière, de nouveau, dans la mer.

-BRAAAAAAH ! hurla-t-il en remontant à l'air libre, enchaînant directement avec une session de crawl aussi rapide que possible, comme s'il venait de se faire attaquer par un requin.

Il rejoint rapidement le rivage, et s'enroula dans une serviette, et se mit à fixer ses pieds traumatisé.

- Plus jamaiiiiis, grogna-t-il à la fois à voix haute et par télépathie, à l'encontre du rectangle de tissu éponge.

- SALE GOOOOOOOSSE ! cria-t-il à la sorcière qui était encore en train de profiter de la mer, à quelques mètres de là.

A ce stade, il se fichait pas mal qu'on le regarde bizarrement. De toute façon, l'après midi allait toucher à sa fin, et les familles tendaient à disparaître de la plage, une à une.

Il mériterait un autre coup de pieds au cul celui là. Non mais je vous jure. C'est quoi ces manières de paysan. Tu es un paysan, carré. Un vulgaire paysan avec plein de miasme et qui pue et qui est tout hirsute. Ouais, j'sais plus ce que je dis. C'est n'importe quoi, je perds la tête. Trop de soleil, trop d'air pur et trop d'amusement pour une après midi je crois bien.

Sinon monsieur le relou m'a aspergé au visage, et j'ai même pas réagi. J'ai juste été blasée, c'est quoi ses manières ? Genre je réplique plus ? Genre je suis déjà fatiguée d'être autour de lui, j'me suis habituée à ses gamineries du coup je réagis plus ? Mais c'est juste du grand n'importe quoi olalalaaaaa. J'vais me venger, j'vous jure que je vais me venger. Quand il s'y attendra pas.

Il boude, le hispter boude. Pourquoi tu boudes ? Parce que je réponds pas à ta provocation ? AHAHA, ça te fait chier hein mon petit. Un point pour moi du coup. En vrai une bataille d'eau ça aurait été cool. Peut être plus tard. Peut être, sait-on jamais. On verra.

J'suis fatiguée je crois.

Nan mais vraiment, ça le fait chier que je réplique pas, et mon but premier est de le faire chier, n'est-ce pas ? Alors j'ai gagné, hihi. Mais je vais répliquer, plus tard. Quand il s'y attendra plus, pouf. De l'eau toute mouillée qui va s'abattre sur sa barbe parfaitement taillée. Oh, se serait trop drôle que sa barbe soit juste du vulgaire maquillage, comme ça avec l'eau elle serait toute dégoulinante et dégueulasse. Ahaha. Trop drôle. Est-ce que je peux dessiner ça moi ? J'crois pas, se serait plus du domaine de l'illusion quand même. Dommage. ARRRRRH, DOMMAAAAARH. C'est un accent allemand dégueulasse, parfaitement.

WOW WOW WOW. Il va se calmer le petit père. Déjà, j'suis plus une enfant. D'abord, ça fait des années que j'ai arrêté d'être un enfant. La vie tout ça, m'voyez. Ca fait un peu beaucoup mal du coup t'es obligé de grandir et de mûrir d'un coup. C'est pas hyper normal mais si tu veux survivre t'as pas le choix en fait. Et chez les Cross, j'vous assure que t'as envie de survivre et c'est pas eux qui vont t'aider. Survivre ou mourir. A la rigueur ya que les esclaves qui pourraient potentiellement être sympa avec toi. Sauf les Hassassins, faut pas déconner non plus.

Et puis, je suis pas sûre que mon corps fasse penser à un enfant, si ? Dans ce cas là faudrait m'expliquer. Enfin j'sais pas, j'ai peut être une vision hyper biaisée de moi même en me disant « hay mais je suis grave bonne en fait. J'crois que je pourrais être actrice et ça marcherait gavé bien ». Sauf que je me dis pas tout ça. J'ai plutôt tendance à voir mes défauts m'voyez. Du coup je suis pas hyper confiante et tout mais … J'sais pas où on peut voir l'enfant en moi. Sauf si on connaît mon âge.

Il connaît mon âge lui ou pas ? J'en sais tellement rien.

Et ça veut dire quoi ce « moi » bien insistant en fin de phrase là ? J'suis pas attirée par la marmots bordel. Je déteste ça en plus. Ca crie, ça bave, ça court partout. Erk. Affreux, horrible. Ou alors il parle des autres membres de l'organisation ? Genre comme tout ceux qui me sont passés dessus ? Un tel régal, délice, tout ça tout ça. J'ai pris mon pied ce jour là (non).

Nan mais les pédophiles je les comprends pas. Après, j'suis pas une gamine non plus. J'ai couché avec tellement de gens avant d'être majeure en plus, aha. Des vieux dégueulasses, la majorité du temps. Ouais, j'ai probablement couché avec des pédophiles, tout va bien. Après je sais pas si j'avais un corps très enfantin encore à l'époque ou pas. Un peu quand même... Sûrement... Surtout au début... Erk. Mais hey, on fait ce qu'on peut pour gagner sa croûte.

Je vis le pervers du coin de l'oeil qui serrait les mâchoires. Bah quoi ? T'as un truc qui va pas ? Il est encore tout triste que j'lui ai pas envoyé de l'eau à la gueule le petit pèèèèèère. Oh, bah faut pas être triste comme ça voyooooons. Alala, ces vioc alors. (Parce que oui, si moi je suis une gamine lui c'est un vieux croulant, d'à peu près l'âge de Ruel, voire même plus.)

Il secoue la tête, comme pour chasser de mauvaises pensées. Eh bah coco, tu vas mieux petit père ? C'est bon ? T'as arrêté ta dépression débile ? Sérieuuuuux. J'crois que mon rire l'a aidé parce qu'il s'est mis à bouger à ce moment là. Sérieux gars, stop se figer comme ça c'est pas possible. On passe une bonne aprem, non ? Alors gâche pas tout, steuplait. Déjà que … Erf, t'es un sorcier noir, j'essaye d'en faire abstraction tu vois. Mais si tu commences à faire ce genre de choses moi aussi je vais aller penser à tout ce que j'ai perdu dans ma vie. Et c'est beaucoup.

Continue de faire des blagues, c'est mieux.

Et puis tu vois, toi aussi t'arrives à rire. Faut dire que mon imitation de lamantin est assez priceless. Blouuuuum, bouuuuuulm, des trucs qui se rebondissent dessus. Moi aussi j'ai envie de me transformer en lamantin alley. Et aller faire des trucs de lamantin avec mes copains lamantins. Et leur foncer dessus à toute vitesse pour rebondir sur eux et repartir encore plus loin. Ahaha. Se serait juste tellement trop drôle. Blouuuuuuum.

Hey, on se transforme en lamantin et on part loin ? On oublie les sorciers noirs, Croix, les organisations nulles qui veulent juste buter tout le monde ? Et on continue de vivre comme si cet après midi était juste hyper longue ? Qu'elle durait pour toujours ? A jamais ?

Et que peut être, je pourrais retrouver mes amis, Ian, et les autres. A chaque fois que je parle de mes amis je cite que Ian, j'en peux plus de moi. A croire que c'est le seul avec qui je me suis vraiment lié... Enfin, c'est le cas en fait. Du coup je restais plus avec la bande de potes de Ian, un peu en retrait qu'autre chose. Mais je préférais passer du temps juste avec lui, comme des amis. C'était si apaisant. Wouah.

Et puis, ptet que Kare aussi il a des gens auxquels il tient qu'il ne peut ou ne veut pas abandonner, ça se comprendrai. On est jamais vraiment tout tout seul dans une vie. C'est pas trop possible. Même si les relations ça fait mal... C'est tellement plus agréable de passer un peu de temps avec quelqu'un que juste tout seul. Tout seul, tout le temps. C'est dur. Du coup il pourrait pas s'enfuir. Et puis, pourquoi s'enfuir avec une gamine reloue, hein ?

Super, c'est à mon tour de faire une tournée de dépression, yeepee.


Et ses yeux se perdent dans le vide. Comme les miens.

Et puis, venant de nulle part j'ai un gros poids mort tout poilu qui vient s'échouer sur moi en m'éclaboussant de partout tout en hurlant « BALEEEEEEEEEEEEEEEEEEEINE » C'est quoi ce genre sérieusement. J'essayais de me dégager en lui donnant des petites tapes et essayant de le pousser (sauf que j'ai juste zéro force) et sans grandes convictions.

Je riais en vrai, enfin, glousser serait plus exact. J'allais me noyer sous tout ce poids en fait. Quelle idée d'être gros. Faut se raser un peu, j'suis sûre que c'est toute cette pilosité, ça fait 50kg en plus. J'en suis sûre.

Et du coup nous voilà sous l'eau. Au concours de on-sait-tous-que-c'est-le-hispter-qui-va-gagner. Et lui il m'enquiquine avec son regard de « héhé je sais que je te fais chier, je vais gagner lalala » mais je t'emmerde mon dadais, tu comprends ça ? Du coup j'le fusille du regard. Voilà. Moi aussi je sais tricher. Genre en … En … J'sais pas. J'peux dessiner un requin pour qu'il le bouffe et comme ça c'est lui qui perd ? J'crois pas. Et puis, avec le maillot de bain qui a disparu, plus retenir sa respiration, j'suis pas sûre que se soit une excellente idée de dessiner un truc sous l'eau... à part un caillou sous ses pieds comme ça il retourne à l'air libre et c'est moi qui gagne. Hihi.

J'sais pas où est le sol. Erf.

Une moue outrée passa sur mon visage. HAN. COMMENT OSES-TU, TRAITRE. Je sais me défendre tu sais. Et puis, pourquoi j'aurais limite une garde ou je sais pas quoi des fois ? Et pourquoi j'aurais un mari désigné ? Ou alors c'est lui qui veut me buter pour qu'il soit pas emmerdé avec quelqu'un, une gamine, qui va lui péter les couilles en plus. Et puis si il croit m'impressionner avec son air sinistre là, il se met le doigt dans l'oeil ! Aller, mets toi le doigt dans l'oeil. J'vais aller lui mettre le doigt dans l'oeil moi, il va voir, hihi. Je suis diabolique, mouahaha.

Et puis comme je sens que je vais perdre bien vite, j'vais commencer à crapahuter sur lui. Une fois sur ses épaules, je palpe son visage et … BIM, DOIGT DANS L'OEIL AHAHA. Assez doucement pour pas lui arracher l'oeil quand même, faut pas déconner, il a tout de même été assez mignon pendant cet après midi à me supporter moi, la reloue de service. Par contre si un jour il essaie de m'attaquer, j'lui arracherai les yeux, j'l'épilerai de haut en bas, je le scalperai... Bref, la totale. Je sais me défendre. Même sans aucune force. Même sans aucune maîtrise des pouvoirs.

Erh.

Il a essayé de se débattre pendant que je gesticulais sur lui. Vainement. J'ai réussi à masteuriser l'escalade du hispter sans aucun soucis. Et puis il s'est figé un moment. Bah quoi ? T'as jamais eu de femme nue sur toi ? Hihi, je suis trop drôle.

Et puis d'un coup ce fils de pute se relève, me faisant tomber à la renverse en grand bruit. Ok, c'était largement prévisible, et je retombe tête la première dans l'eau. Et puis il s'enfuit vers le rivage en continuant de crier et tout. J'le suis, avec juste les yeux qui sortent de l'eau. Je suis le crocodile.

Ah les crococo les crococo les crocodiiiiiileuh sur les bords du Nil ils sont partis n'en parlons plus.

Il est déjà sur le rivage, je rejoins vite le sable, reste dans l'eau et le fixe, longuement, assez longtemps pour qu'il soit mal à l'aise, toujours juste les yeux de sortis. Hihi.

Je fus traitée de sale gosse. Hihi, tout allait bien.

Monsieur était bien emballé dans sa serviette, assez proche de l'eau, j'arrêtais de le fixer, balançait mon bras vers l'arrière et d'un coup, lui balançait de l'eau tout dessus lui pour qu'il soit tout mouillé et que sa serviette soit ruiné. Ahaha. Ahaha.


Et je sortis alors tranquillement de l'eau, en prenant mon temps, toujours consciente que j'étais toujours nue. Il faisait moins chaud que tout à l'heure et le soleil déclinait dans le ciel, laissant passé des rosés. Les nuages devenaient rouges et oranges.

Je prenais alors ma serviette et l'enroulait autour de moi, mes cheveux dégoulinaient. J'aimais pas ça, j'allais être sèche bien plus vite qu'eux et … Ils allaient tout me remouiller. C'était tout caca. J'aimais pas être mouillée quand j'étais sèche, surtout avec la petite goutte qui te tombe tout le long du dos. Argh.

J'me rapprochais de Kare, doucement, sans animosité cette fois, et m'asseyais dans le sable, la serviette toujours nouée sur ma poitrine. Il était safe de me regarder, aha. L'après midi touchait à sa fin, au loin on entendait les cris des parents appelés leurs enfants, suivis de « on rentre ». On entendait les amis se séparer, on entendait les bateaux partir, s'éloigner.

Nous aussi il faudrait qu'on rentre, d'un moment à l'autre. J'en avais tellement pas envie. Toute cette bouffée d'air frais, qui serait à présent juste un souvenir. Un souvenir que j'aimerais revivre tous les jours, plutôt que d'être enfermé dans le QG glauque, froid, insipide, ininspirant de Croix.

Je tournais ma tête vers Kare, avec un sourire, petit sourire, sourire à moitié triste, à moitié joyeux.

Hey, j'veux pas m'en aller.

Les petites mains énervées (et énervantes) de Sakura s'acharnaient sur lui, en réponse à son imitation 100 oscarisable de la baleine. Kåre aimait bien les baleines. Avant, parfois, il passait du temps sur son bateau, dans les grandes étendues froides, ridées par les coups de vent, à chercher les baleines. Lorsqu'il arrivait à les repérer, il s'arrêtait presque de respirer, il ne sentait plus l'air glacé, il n'y avait que le silence, et les mammifères géants, les ondulations lentes et paisibles de leur peau sombre et lisses.
Il ne reprenait son souffle qu'en même temps qu'elles, lorsqu'un immense geyser brisait la surface de la mer, ébouriffant ses cheveux, constellant sa peau de gouttelettes salées.
Kåre aimait les baleines. Il aurait aimé leur parler.
Il en avait regardé une dans les yeux, une fois. Il avait plongé, et était resté sous l'eau longtemps, son pouvoir aidant, un idiot suivant un mastodonte marin, cherchant à le voir au plus près, à capter son attention. Elle avait fini par le voir, l'observer un instant, puis repartir. Un des meilleurs souvenirs de Kåre à ce jour. Tout au fond de lui, il s'était senti important, ne faisant qu'un avec la mer et ses habitants.

Ce qu'il vivait actuellement avec la jeune Cross était beaucoup moins paisible, mais tout aussi intéressant. La jeune fille gloussait, riait telle l'adolescente qu'elle était, en réalité, tout en se moquant de lui, jouant à celle qui en avait marre, qui n'en pouvait plus de lui, alors qu'ils s'amusaient, et qu'ils n'avaient plus d'âge, plus d'appartenance, ils étaient des sourires et de la bonne humeur.

Une fois sous l'eau, la gamine tenta de l'assassiner du regard, et il leva les yeux au ciel, amusé, afin de lui montrer que peu lui importait. Il était le maître du game, sur ce plan là.
Enfin, maître du game jusqu'à ce que la sale gamine ne décide de monter sur ses épaules afin de le faire couler, et de mettre sans aucune pression -ni délicatesse, d'ailleurs- un doigt dans son œil, ce qui lui fit affreusement mal. Sous le coup de la douleur et de l'agacement, il se débattit et réussit à virer la sale petite sorcière à poil de ses épaules.

- Mais c'est quoi ton problèèème ? cria-t-il en crachant de l'eau de mer, qu'il avait ingurgité malgré son pouvoir. Tout ça, c'était la faute de cette fillette au corps de femme qui se trimbalait à poil en toute impunité.

Fillette d'ailleurs un peu flippante, car, en se retournant au cours de son petit crawl afin d'atteindre le rivage, Kåre put l'apercevoir jouant la créature des marais, ou autre truc flippant. Elle n'avait que les yeux qui sortaient de l'eau, et le regardait fixement. Pour un peu, elle ferait froid dans le dos.

- Ok, bon bah, j'vais y aller moi, hein, grommela-t-il en jouant celui qui avait réellement peur, rejoignant vite la plage pour s'enrouler dans sa serviette.

La position du burrito bien empaqueté post-baignade était des plus délicieuses. Le suédois adorait nager, mais, ça, c'était une des choses qu'il préférait. Cela lui rappelait quand c'était sa mère qui l'enserrait dans une serviette éponge plus grande que lui après ses baignades volontaires ou involontaires dans les étendues glacées bordant leur domicile. Souvent, il y avait Sven avec lui, et ils faisaient une bien jolie paire de burritos. Leurs parents buvaient leur café de l'après midi, les couvant du regard, et riant des futurs petits soldats de Croix.

Kåre soupira.

Eau froide. Mouillé.

- Aaah ! s'écria-t-il en bondissant sur ses pieds.

La sensation de froid n'était pas si importante que ça. Le sorcier venait tout de même du grand nord de l'Europe, et avait connu bien pire. La Bretagne, pour lui, c'était la Méditerranée pour les bretons.
C'était surtout la surprise d'être tout à coup trempé alors qu'il s'était doucement enfoncé dans ses souvenirs d'enfance au coin d'un feu de cheminée, quand il l'amour qu'il portait à ses parents était encore inconditionnel et sans questionnements. Quand Sven était encore là pour rire à ses blagues et à faire des trucs toujours plus bêtes avec lui.

L'esprit engourdi, il voyait Sakura sans vraiment la regarder, sans faire attention au fait qu'elle était nue. Elle était là, juste, elle venait de l'arroser, et elle sortait de l'eau, toujours aussi insouciante, je-m'en-foutiste, n'ayant plus rien à perdre, rien à prouver. Il aimait bien cette gamine. Pour une fois, il pensa qu'il aurait bien aimé ne pas avoir été fils unique, pour une autre raison que pour pouvoir échapper à Croix.

Il la vit vaguement prendre sa propre serviette et s'en enrouler à son tour. Et il n'eut pas envie de la re-balancer à l'eau. Il aurait bien aimé la prendre par la main et l'emmener dans son souvenir d'enfance, qu'elle puisse voir la neige épaisse et les arbres nus à travers les fenêtres du salon, réchauffer ses petites mains auprès du feu, goûter au chocolat chaud de Tatjana Nilsson.

Mais ils étaient sur la plage d'une petite île bretonne, une jolie île, une jolie plage. C'était bien aussi. Simplement, il ne serait plus jamais un enfant. Sakura non plus. C'était ça le plus triste.

Il s'était rassis, trop abasourdi par ses propres pensées, par l'air du large. Elle s'était approchée de lui. Et maintenant elle le regardait, avec un sourire à pleurer, un sourire qui était un des derniers résidus d'innocence et de bonheur. Kåre regarda ces jolis yeux bleus, ces joues encore rondes, et passa un bras sur son épaule, essayant de sourire à son tour alors que tout doucement, une petite voix au fond de son esprit lui disait qu'elle ne voulait pas partir. Une supplique d'enfant, qui voulait de lui un espoir que ce ne soit pas fini, qu'ils puissent devenir autre chose qui leur permettre de s'enfuir. Des pirates, peut-être, des mouettes, ou des lamantins, puisqu'ils les affectionnaient tous les deux.

- Peut-être bien que moi non plus.

Il se leva, et incita la jeune fille à faire de même en lui tendant la main. Il la prit dans ses bras. Câlin. Allez, pensa-t-il très fort alors qu'elle ne pouvait pas l'entre, peut-être que ça va aller, peut-être qu'on va survivre à tout ça, pas perdre nos âmes, trouver un moyen, le courage de décider pour nous-mêmes, de se battre.

Il lâcha la gamine, et, les mains posées sur ses épaules, lui adressa un sourire, le plus honnête possible.

- Promis, on le refera.

C'était vrai. Il se foutait de se faire cramer la face par Mohamed Al Hattal ou par Dorian Cross. Probablement que ça amuserait Sakura, d'ailleurs, de voir sa barbe en feu. Tant qu'il ne se faisait pas virer de l'organisation, tout lui était égal. Il voulait simplement remplir son devoir auprès de ses parents. Le reste, il s'en carrait. Il avait de la place pour cette ado presque femme dans sa vie de branquignole amoureux, lâche et désorganisé. Il faisait n'importe quoi. Il fonçait droit devant lui, jusqu'à ce que ça casse, qu'il paie le prix de ses défauts.

Kåre éclata de rire et remit le canoë en plastique à l'eau, y balançant tout ce qu'il avait pu laisser sur la plage, et se jeta dans l'eau, le traînant derrière lui en nageant.

- Le dernier arrivé au bateau est un bernard l'hermite !

Riant toujours, pleurant presque, il se laissa discrètement porter par l'eau vers Sven.