Je rentrais au QG de Croix, ramenant des informations graves. Selon moi un mouvement important de sorciers, notement d'Orphéo, se préparait et devait etre mieux surveillé. Je n'avais pas prit de rendez vous pour voir Dorian et d'ailleurs, je ne pensais pas que cela puisse attendre plus longtemps sans prendre des risques inutiles.

Et là, devinez ce que je vois ! Une gamine qui s'en va. Et visiblement, elle ne veut surtout pas etre vue. Trop tard. Je m'approche donc d'elle, les mains dans les poches. Visiblement vu sa posture ce n'est pas une sorcière. Et vu comment elle est habillée je penserais meme plutot a une esclave.

-  Je peux savoir ce que tu crois faire là ?

Sans lui laisser le temps de répondre je l'attrapa par le bras, ca tombe bien je vais faire d'une pierre deux coups. Et puis allez savoir ! C'est peut etre elle qui file des informations a Orphéo et qui expluqueraient les mouvements d'Orphéo.

En arrivant je me fais quand même annoncer. Ce problème ne mérite pas que je manque de respect envers mon supérieur. Oh mon dieu... Je réfléchi comme un vieux ! Je regarde la gosse que je ramène. Je ne manquerais pas de faire une petite parenthèse sur elle pendant l'entretien.
Une fois annoncé on me dirige vers le bureau. J'y entre et tire la mome devant moi et je referme la porte derrière moi.

- Tes esclaves me semblent avoir beaucoup de temps libre Cross.

Bon d'accord. Ca sonnait mieux dans ma tete. C'est pas grave. Je laisse la p'tiote dans un coin, elle n'ira pas bien loin de toute façon. Et j'explique donc ce petit problème qui me tracasse quelque peu, mais il est vrai que je suis novice et que donc, je m'inquiete peut etre pour un rien. Mais au cas ou ! On ne sait jamais et mieux vaut etre prudent.

Une fois le problème expliqué, je pose mes mains sur le bureau, droit, juste devant Dorian. D'accord, moi j'ai encore besoin de pietiner sur son territoire pour m'imposer alors que lui n'a meme pas besoin de bouger pour que l'on soit envahi par une sensation d'inquietude.

- T'aurais pas envie de m'en preter deux trois ?

Ou est le mal de demander ? Moi je veux, moi je demande. Point final. Peut etre même que je pourrais insister un peu et qu'il cedera. Il n'a pas besoin d'autant de main d'oeuvre. La preuve : il ne voit meme pas que certains se font la malle. Et puis je ne lui demande pas de me donner la moitié de ses petits esclaves.

C'était le service du soir à Mystery Orphanage et le Réfectoire se remplissait d'affreux petits sorciers noirs. En cuisine, les esclaves allaient et venaient dans un grand fracas chargés de marmites et de vaisselle. Un gros couteau dans la main, debout devant la fenêtre, Sheryl rêvait d'évasion et de vengeance – mais pour l'heure, elle coupait des carrotes et des aubergines en vue d'une ratatouille aussi affreuse que les monstres qui allaient l'ingurgiter. Il ne restait que trois carrottes et une tomate à découper et, voyant qu'on ne s'occupait pas d'elle, la jeune fille souffla un peu. A force d'être debout, les muscles de ses jambes la faisaient souffrir et elle ne songeait à rien sauf au repos. A travers la fenêtre son regard fut attiré par du mouvement à l'angle de la bâtisse ; elle se pencha en avant pour observer. Des silhouettes de gamins encapuchonnés s'agitaient en cercle, autour de quelque chose qui poussait des hurlements stridents. Sacrebleu, trois petits cons de Cross s'amusaient à torturer un chat. L'indignation monta d'un coup dans les entrailles de Sheryl, qui s'apprêtait ni une ni deux à bondir par la porte de derrière. Heureusement, la cloche du repas retentit et, après un dernier coup de pied, les sales gosses rejoignirent le bâtiment pour passer à table. Furtivement, Sheryl aperçut le chat qui s'enfuyait ventre à terre, tant bien que mal. Elle se dit que vu son état il n'irait pas bien loin et décida d'aller le guérir (oui, à la base elle avait quand même le pouvoir de guérisseuse avant de finir en cuisine). Alors que la plupart du personnel apportait les plats au Réfectoire, elle sortit discrètement et se dirigea vers là où le chat avait disparu. La nuit était déjà tombée et le vent  glacial s'engouffra sous ses maigres vêtements. C'est quand elle voulut mettre les mains dans ses poches qu'elle se rendit compte qu'elle tenait encore le couteau de cuisine ; au même moment, elle sentit soudainement une présence près d'elle et, par réflexe, elle fourra le couteau dans les plis de son habit.

- Je peux savoir ce que tu crois faire là ?

La voix, dure et masculine, la fit frémir. Un jeune homme lui attrapa le bras et, sans ménagement, reprit sa marche, la forçant à le suivre. Sa haute taille la fit se sentir encore plus petite qu'elle ne l'était déjà. Elle n'eut même pas le temps d'avoir peur ; un masque de stupeur avait remplacé sur son visage ses traits d'habitude si fiers. Son cerveau enregistra la situation sans qu'elle ne put y réfléchir consciemment : elle était une esclave en délit de fuite, emmenée où ne sait où par un sorcier noir qui, apparemment, ne lui voulait pas du bien.

Ils arrivèrent en France devant une bâtisse haute et imposante, d'architecture ancienne. Ok. Surement un repère grouillant de sorciers noirs bien richous et bien vilains. L'homme qui accompagnait Sheryl était plein d'assurance, mais la jeune fille sentit qu'il n'était pas très à l'aise en ce lieu. Une fois entré, il prit la peine de se faire annoncé, et attendit dans un petit salon, très sobre et peu accueillant, jusqu'à qu'une femme le conduise devant la porte de ce qui semblait être un bureau. Avec moins de brusquerie qu'il en avait fait preuve jusque là, le sorcier poussa la porte, traînant toujours la petite esclave derrière lui. Et quelle ne fut pas la surprise de Sheryl quand elle découvrit, assis derrière un immense bureau, Dorian Cross en personne ! Elle eut un mouvement de recul précipité et, de surprise, l'homme qui la tenait la lâcha. Elle voulut repartir dans le couloir, mais il se tenait dans l'encadrement de la porte, lui bouchant le passage, et, sans réflechir, elle alla se nicher dans un coin de la pièce, entre le mur et une biblothèque. Bon d'accord elle n'était certainement pas super bien cachée, mais bon, ça pouvait faire illusion.

Le sorcier qui l'avait emmenée – sans aucune raison, d'ailleurs – sembla reprendre de la superbe et s'avança jusqu'au bureau en lançant d'un air effronté :

- Tes esclaves me semblent avoir beaucoup de temps libre Cross. 

Dorian Cross n'eut aucune réaction, à peine un sourcil qui se leva imperceptiblement. Un peu moins assuré, son visiteur poursuivit et parla de sorciers qui se réunissaient en nombre douteux et qui représentaient potentiellement un danger pour … Sheryl n'écoutait pas. Elle avait repris ses esprits et cherchait activement un moyen de s'en sortir. Mais jusque là, les solutions qui venaient à son esprit se résumaient à : se rouler par terre en criant, se cacher dans la fausse armure qui trônait près d'elle – ce qui ne serait pas chose aisée – ou se jeter désespérément par une fenêtre en criant Jolly Jumpeer !