Harry était un humain incroyablement résilient, certes, mais la vie lui avait jeté des montagnes et plutôt que de les gravir, il avait décidé de creuser des tunnels.
Il s'approcha du frigo d'un pas lent, laissant son regard trainer sur les bureaux adjacents qu'il pouvait apercevoir à travers les parois de verre. Des gens ici faisaient de l'administratif, de leur plein gré et ils étaient payés après, et ils rentraient chez eux et ils étaient contents. Comme il ne comprenait absolument pas le fonctionnement de ces humains (et d'Orpheo, Cormag avait l'air d'être chef mais pas trop en même temps, parce que des fois des gens le contredisaient et il était obligé de les écouter et ils étaient méprisants et odieux et orgueilleux et il se laissait faire, il ne les abattait pas). Harry savait qu'Orpheo ne tuait pas les gens, mais il pensait qu'au moins ils les auraient mis en prison.

Mais bon, non ?...

Il sortit deux bières du petit frigo. Il était en congés.
Payés.
Il avait des vacances.

Rien n'avait de sens.
Il ouvrit la porte et s'engagea sur la terrasse qui surplombait les toits de la belle Londres et il ferma les yeux un instant. Cette ville était chère à son coeur et sa nouvelle vie lui laissait peu de temps pour apprécier les choses simples. Il avait à la fois plus de temps et à la fois, plus du tout.
Il s'était abonné à Netflix.

Il décapsula les deux bières et en tendit une à Logan qui, les yeux brillants regardait dans le vide. Il entrechoqua sa boisson contre celle de son collègue (haha, collègue) et s'assit à côté de lui.

Réveil
Congelé
Levé
Force liquide
Liquide ambre qui brûle la gorge

Encore une journée de merde qui s’annonce, j’me cogne le petit orteil au pied du lit. Comme si elles étaient pas toutes merdiques. Depuis que les conservateurs ont le monopole d’Orpheo, je me retrouve à travailler pour eux.

Je sais pas ce qui est pire, être dans un QG puissant où ils sont partout, ou être muté dans un endroit pourri et rien n’avoir à faire comme les copains.

Je sais pas comment j’me suis retrouvé là mais j’y suis. Regard dans le vide, à prendre une pause (la combientième sur combien ?) à la terrasse.

Harry, le nouveau plus trop nouveau
J’ai pas confiance en lui
Ex noir qui est pas mort
Tout le monde a le droit à une seconde chance
Bizarre qu’il soit pas raide
Mort
Six pieds sous terre
Tout le monde a le droit à une seconde chance
Mais il fricote avec l’autre camp
Les conservateurs
Il se fond si bien dans son nouvel environnement décor

Il me tend le houblon
Ouverte en un coup de main
Le verre sonne entre nous
Il s’installe
Détente ?

Regard toujours dans le vide, le liquide évaporé de manière rapide
Fais bonne figure Logan.
Il en reste
La première gorgée fut uniquement trop longue
La tête bourdonne brouillard angoisse
Ça ira mieux si on finit
Ça ira mieux si on finit
Il cherche à faire ami ami ?

Les copains sont loin, dispersés par les conservateurs qui veulent pas créer la rébellion
Conservateurs qui en font toujours plus trop

- t’es pas censé être en vacances Harry ?

Être étrange qui change d’alliance
Traque dénonce trahit

Houblon m’appelle
Je résiste
Être modéré donner le change
Attendre
Raison

Harry pouvait, de toute façon lire l’intégralité des pensées de Logan. Il avait longtemps cru qu’un jour il se lasserait de faire la discussion avec eux mais force est de constater que ce n’était encore jamais arrivé. Ça avait probablement quelque chose à voir avec la béance avec les propos tenus au creux de leur cerveau et les mots qui passaient finalement la barrière de leur lèvres. Il porta aux siennes le verre froid et le houblon emmaillota sa langue. Des vacances.
- Souvent, j’ai du mal à faire la distinction entre ce qui est vrai et réel et ce qui ne l’est pas.
Harry s’était renseigné sur une panoplie de membres d’Orpheo quand il travaillait pour Croix, et encore plus depuis qu’il n’y travaillait plus. Impossible de craindre les représailles de son ancienne organisation par ailleurs ; la vie lui avait plus apportée en une poignée de mois que pendant le reste de son existence.
Il détailla Logan du coin de l’œil, incapable de réconcilier le tableau qu’on lui avait décrit et l’humain en morceau qui se tenait à ses côtés, pétri de jugements, en miettes, défait. Le soleil se levait encore le matin pourtant.
- Je croyais sincèrement que les vacances étaient pour les non doués et qu’on se foutait de ma gueule.
Dans l’ensemble, le personnel d’Orpheo avait pris relativement bien son intégration dans les diverses équipes, et, si Harry n’était pas hermétique au mépris et autres cruautés qu’on lui adressait, il s’en fichait profondément. Les mots ne le blessaient jamais. Il effleurait parfois le tissu cicatriciel qu’il aurait voulu montrer à d’autres.
- Les gens font beaucoup ça par ici, déclara-t-il platement. Du genre, vous avez le droit de torturer mais vous devez suivre des règles strictes. Vrai ou pas ? Ou genre…
Il passa une main dans ses cheveux et adressa un sourire tout en fossettes à la loque humaine qui croyait en plus rien du tout.
- Vous votez pour votre directeur, haha.
Il se sentit un peu bête.

- Souvent, j’ai du mal à faire la distinction entre ce qui est vrai et réel et ce qui ne l’est pas.

Haussement de sourcils interrogateurs
What the fuck
Who is this alien



- t’es sorcier et tu sais pas différencier le vrai du faux ? La matière de l’illusion ? Hm ?

Weird

Frappe la table comme on frappe à la porte



- réel. Matière. Tangible.

Bonhomme de glace



- réel.

Gorgée

- réelle.

On détaille le sorcier. Autre chose ?

- Je croyais sincèrement que les vacances étaient pour les non doués et qu’on se foutait de ma gueule.

Yeux au ciel

- everyone needs a break.

Comme si ça suffisait.
Comme si on ramenait pas les soucis à la maison.
Comme si le boulot restait au boulot.
Comme si le personnel restait à la maison
Comme si on était pas dévoré par les angoisses tout le temps à toutes heures du jour et de la nuit.

La bonne blague

Gorgée

- Les gens font beaucoup ça par ici. Du genre, vous avez le droit de torturer mais vous devez suivre des règles strictes. Vrai ou pas ? Ou genre…

Frissons visibles.
Frémissement.
Brrrrr

- tout le monde ne torture pas.

Hors de question.
Quoique congeler quelques conservateurs me déplairaient pas trop.
Inefficace contre le grand manitou hélas

- faut des règles pour vivre dans une société « saine »

On a rien de sain actuellement.
À vomir.

- Vous votez pour votre directeur, haha.

- si seulement c’était aussi simple.

Oui oui démocratie blabla. C’est facile quand on traverse une crise de jouer sur les peurs des gens. C’est facile de manipuler les plus jeunes. C’est facile de détester l’autre.

Facile

Bien plus dur de se battre pour des vrais idéaux et une vraie justice.

Ils ont baissé les bras ?
Partis ?
Gone
Morts.

Pendant les premiers mois de liberté dont il avait pu octroyer après les différentes tortures que je lui avais infligées Sloane Carver, Harry s’était cru un peu plus cassé que la moyenne par son éducation. Il s’était aperçu que les gens ne portaient pas leurs cicatrices en parures, n’avaient pas la main légère pour l’abattre sur les enfants et avaient appris, pour une bonne moitié à dire non aux figures d’autorité qui les utilisaient à leur guise.
Parce qu’après tout, c’est à ça que servent ces dernières, n’est-ce pas ?
Mais les traumas de chez les gentils étaient différents et vicieux et d’étranges conflits les liaient. Des plaies improbables pour lui qui savait que le feu, ça brûle, mais n’avait pas encore saisit que « niania il avait dit que mais en fait il n’est jamais revenu et niania il a embrassé quelque d’autre » pouvaient aussi ruiner des gens.
Et les morts !
Les morts !
Harry avait toujours envié les morts qui avaient tenu leur part du bargain et pouvaient désormais reposer en paix. Les doués d’Orpheo les pleuraient à l’infini, pleuraient leurs chats et leur hamster. Par étonnant que Dorian Cross ait souhaité tous les annihiler. M’enfin.

- t’es sorcier et tu sais pas différencier le vrai du faux ? La matière de l’illusion ? Hm ?

À nouveau, il songera qu’il pourrait juste s’immiscer dans sa tête pour jouer un théatre d’horreur, ou s’immiscer sous sa peau et sectionner les ligaments nécessaires à la diction de tels mots méprisants. Harry se lécha les lèvres, essayant à la place de sectionner les réflexes qui le liaient encore à son éducation malade.
Il songea également un bref instant au fait qu’il aurait dû dire à Madame Carver que son pouvoir n’était que temporaire et qu’il ne fallait pas ainsi trop compter dessus. Le bien, le mal, le bien le mal.
Utile, inutile.
Question de point de vue.

- réel. Matière. Tangible, réel, réelle.

L’anglais coula un regard vers le patin brisé qui gisait à ses côtés et soupira en se laissant choir dans sa chaise.

- everyone needs a break.

Mais ?

- tout le monde ne torture pas.

Il ouvrit la bouche pour le contredire puis se ravisa alors que l’autre parlait de société saine et de démocratie. Il regretta de ne pas avoir de joint à partager avec Coley, checka sombrement son téléphone. Le bureau derrière lui grouillait d’une effervescence qu’il ne comprenait pas, mais il fallait un certain lâché prise pour cesser de vouloir trouver un sens à la vie. Après un nouveau swing de sa bouteille pour déverser de l’alcool dans ses veines il se tourna vers Logan. Ses yeux clairs scrutèrent le visage fracassé de son collègue. Il se demanda si Sakura, à sa place, l’aurait giflé.
Sûrement.

— J’ai appris il y a peu que la dénomination exacte de vos postes à vous c’était exorciste. Il me semble pourtant qu’il y a bien longtemps que vous n’exorcisez plus rien et que vous…

Il se mordit la lèvre, conscient qu’il s’apprêtait à dire « nous » pour parler des sorciers noirs. Les habitudes avaient la peau dure, surtout quand elles étaient couvertes de boursouflures.

— Tout le monde a fini par se transformer en meurtrier. Parce que tout le monde peut mourir.

Il adressa un clin d’oeil à Logan. Après tout, n’était-ce pas ainsi que se jouait la vraie vie ? Les étalons tabassaient ceux qui pouvaient prendre leur place et se faisaient un jour abattre, les lions dévoraient les prétendants gênants et les sorciers noirs égorgeaient les faibles, les abrutis, et ceux qui étaient trop cons pour leur propre bien. Les conservateurs finiraient par être dévorés, il en était certain, mais il ne comprenait pas comment, et pourquoi ceux d’Orpheo acceptaient de vivre comme Logan : en se plaignant, défaits, le cul sur une chaise. Ne valait-il mieux pas tenter de supprimer la menace qu’il croyait réel plutôt que de s’autodévorer à petit feu pour suivre d’étranges règles ?

— Planifier la mort de son supérieur. Normal ou pas normal ?

Bonne ambiance
Pensées sombres qui tournent en boucle
Souvent
Trop souvent
Gorgée

Où sont les copains pour remettre du baume au cœur
Où sont les fous rires de Nawel
Où est la douceur de Newt

Où est Logan naïf heureux

Trop de drames
Chamboulé par l’horreur de la vie
L’horreur des conflits magiques


— J’ai appris il y a peu que la dénomination exacte de vos postes à vous c’était exorciste. Il me semble pourtant qu’il y a bien longtemps que vous n’exorcisez plus rien et que vous… Tout le monde a fini par se transformer en meurtrier. Parce que tout le monde peut mourir.

J’me renferme
Les choses que j’ai faites
Tout me revient en pleine face
Hypocrisie

Tuer ou être tué

Quand en face le mot miséricorde et pitié n’existe pas
Légitime défense
Sauver les innocents
Sauver sa propre vie
Égoïste
Les valeurs quand ta vie est menacée, à deux doigts d’être anéantie, n’existent plus

J’ai vu des tortures
Essayé d’intervenir
Mis des œillères

Quand les conservateurs du département de recherches te forcent à bosser sur un outil affreux
Que tu comprends à quoi il va servir
Que t’es pieds et poings liés

Am I?

J’pourrais partir. Devenir solitaire.

Je pourrais
Pourquoi je le fais pas ?
L’espoir que tout redevienne comme avant ?
Que les copains sauvent Orpheo ?

Les copains les copains les copains
Et moi dans tout ça
Je fais quoi
Loque inutile

— Planifier la mort de son supérieur. Normal ou pas normal ?

Rire jaune


- imaginer, normal, presque sain. Surtout si tu le détestes, si c’est une personne affreuse, pas du tout en rapport avec tes valeurs, la meilleure personne de toi même, celle que tu veux être, que t’as envie d’être. … planifier …


Combien de fois j’ai imaginé Cormag mort.



- échafauder un plan, réalisable… le mettre à exécution …

Pause



- Les innocents ont fait un film dessus. Il est drôle.

La réalité c’est pas drôle.
Le vrai monde c’est pas drôle.
La guerre, les pertes les morts c’est pas drôle.



- encore une fois … ça dépend de comment t’es aligné moralement avec lui. Si tu passes des bons moments. Si c’est que du mauvais … si …

Oui j’aimerais que Cormag meurt.
Mais les conservateurs ne mourraient pas avec lui.
Les idées sont trop ancrées, trop vastes.
Tuer tout le monde ?
J’aimerais bien que se soit possible.
C’est pas bien.



- pas normal… pas légal

Mais tuer des gens l’est pas non plus
Pourquoi on peut tuer des noirs mais pas un Orpheo qui pense pas comme nous ?
Alors que les conservateurs et les noirs agissent pareil ? Pas pour les même raisons, mais la conséquence est la même
La mort

Pourquoi Cormag me féliciterait si j’avais réussi à tuer Dorian Cross, mais me brûlerait vif si je tuais son bras droit ?
Alors que je déteste et ne comprend pas leur manière d’agir des deux
Tout le monde a le droit aux secondes chances
Tout le monde devrait pouvoir se repentir
Tout le monde peut changer

… les conservateurs aussi ?

Logan partit dans sa tête et dans une tirade. Harry ne suit pas. Il leva les yeux sur la lumière qui se fraie un chemin à travers la ville. Il pensa à quand il a accompagné cette fille aux AA juste parce qu’il le pouvait, un goût de liberté sur le bout des doigts. Sur le bout des doigts seulement ; ne se retournait-il pas régulièrement pour les angles sombres de ruelle ? Ne rentre-t-il pas chez lui, arme au poing, ne vérifie-t-il pas ses runes le matin, le soir et sous son lit à l’heure à laquelle les bogeyman dévorent les enfants ?
Enfin ; cette fille avait dit « this too shall pass » et « one day at the time » ou ce genre de regaines usées jusqu’à la corde mais toujours recousues.
Il se leva au moment où l’autre finissait sa tirade et se dit qu’il n’était définitivement pas fait pour babysiter des inconnus qui le traitaient comme pas-vraiment-un-humain, pas-vraiment-un-soldat, pas-vraiment-une-arme-létale non plus, et qu’il n’avait de toute façon que très peu d’intérêt à aider des gens qui ne s’aidaient pas du tout. Il regarda l’heure, termina sa bière et se leva. D’autres fourmis avaient rejoint les bureaux fourmillants dont Nawel Meish, qu’il évitait comme la peste.
Il ferma les yeux une brève seconde alors que la femme, évidemment se dirigeait droit vers lui. Il hésita entre reculer et se planquer quelque part où menacer directement Logan avec une lame mais elle se téléporta immédiatement sur la terrasse, dos à lui et il s’engouffra dans le bâtiment sans demander son reste. Malgré tous les discours qu’il tenait sur les mots qui ne pourraient jamais blesser comme les coups et les coupures, il savait qu’elle s’était spécialisée dans le brisage de coeur et il n’avait aucune envie d’être essoré par ses brutalités.

Vous savez comment ça marche, l’armée ? On invente une arme. Quelqu’un invente le bouclier alors on invente une arme plus forte. Alors on invente des runes mais quelqu’un invente des runes en plus mais quelqu’un invente des ondes qui dévient les missiles alors quelqu’un invente des missiles à double tête pour qu’au moins une touche sa cible.
C’est pareil avec les runes anti téléportations des bureaux claqués de Londres et c’est ainsi que je me retrouve à sauter de bureau en bureau en rendant fou tout le monde. Tant mieux, cheh pour vous les nazes.

Jusqu’à tomber sur cette vieille loque de Logan. Contrairement à ce que j’aurai pu faire dans le passé, regardez moi ça comment j’ai mûri je vais me passer de l’eau sur le visage avant. Avant à l’automne, la drogue et les fêtes faisaient fondre de mon visage une dizaine de kilos qui étaient repris quand le froid me chassait des ambiances électros. Mais cette année, le boulot ras la gueule et les conservateurs m’ont surtout survie des cernes sur un plateau d’argent. Putain de Cormag.
Je retourne sur la terrasse, croise Harry Adelman qui se ratatine — good boy — alors que je me tp face à Logan. Il porte ses douleurs en masque, évidentes et toutes disposées à être disséquées par un connard comme le sorcier noir qui s’éclipse tel la vermine qu’il est.

— Putain, Logan.

Il berce une bouteille de bière et son visage tout ravagé me fait presque péter un plomb. Je l’attrape à bras le corps et fait la chose la plus censée que je trouve dans mon cerveau. Je nous téléporte à Kesington Garden, au bord de la Round Pond et je pousse le détritus qui est le mien dedans. J’ai besoin qu’il soit alerte, qu’il redevienne lui même et qu’il arrête de s’enfoncer dans la vieille gadoue qui habite désormais son dedans. Luka l’a quitté, certes, des fils de pute sont au pouvoir, c’est certain, mais ça va, il a deux bras, deux jambes, deux yeux et deux tympans et franchement c’est pas le cas de tout le monde.
Je claque des doigts par habitude à côté de mon oreille droite et évidemment, je ne l’entends pas. Pas plus que je ne vois ma main à l’extérieur de ma vision.

- Et tu laisses pas ta bouteille dans le lac hein, tu la ramasses c'est dégueulasse ! je hurle en tournant les talons.

Allez, barbote un coup, j’ai besoin de toi back on track. On a des choses à accomplir.

Absorbé dans le tourbillon
Le trou noir qui n’en finit pas
La misérabilité qui suit son cours
Toujours plus loin profond

Gorgée
Plus rien ne coule
Deux gouttes auront coulé dans la gorge

Déception

L’ex noir se lève
Tourne le dos

J’y fais même pas attention

Staring at the void

Nawel

Nawel ?

Nawel.

Mon corps se lève.
Harry n’existe plus
Caché par la copine
Mes lèvres sourient
Le cœur bat plus fort il a envie de vivre
Excitation
Bonheur ?

(Imaginez c'est Nawel)

Edwin il dit que frapper les gens c’est mal dans la plupart des situations et je suppose que la plupart des situations incluent Logan, ainsi quand il me fait un câlin, quand bien même je suis excédée, je ne le gifle pas bruyamment dans la rue, à la place je m’entends dire la seule chose que je suis capable de dire aujourd’hui : « Putain, LOGAN. » Je me retourne et vraiment, l’envie d’une bonne claque mouillée me taraude alors à la place je l’attrape par les joues et lui serre le visage. « Logan, sérieux. Wake up. » Je ne sais pas à quel point il est ivre (si il est vraiment ivre ou juste trop habitué pour en ressentir encore les effets) et je détaille sa peau qui a déjà pris les coups de l’alcoolisme.
C’est pas joli joli à voir.
« C’est important là, tu comprends pas ? »
Visiblement son cerveau est en train de faire des bulles, comme lui dans le lac un peu plus tôt. Les badauds nous dévisagent et j’adresse un doigt d’honneur à une petite fille d’une dizaine d’années sous le regard choqué des parents. Cassez vous j’ai mieux à faire.
« Les instructions des conservateurs sont claires : retrouver les sorciers noirs. Même ceux ayant changé d’avis, même ceux ayant des aspirations différentes que continuer la guerre, et je sais que c’était le projet pour les nazis hauts gradés et qu’ils »
Je cesse brutalement de parler parce que j’ai finalement très peu envie de me justifier.
« Ils nous font chercher les méchants. Pas les gentils. La guerre n’est pas gagné si c’est eux au pouvoir. » J’veux dire, si quelqu’un de bien peut se rallier à la cause, c’est bien le Logan du passé. Pourquoi n’est-il pas en train de se remonter les manches comme tout le monde ? Il n’a pas d’enfants, pas de présent, pas d’ambitions carriéristes et je me fiche de l’état de ses finances. « Suck it up for fuck’s sake. » Déjà que Ian me casse les couilles putain.

La gifle part toute seule. J’irai chanter des Avé Maria plus tard et me repentir auprès d’Edwin. Et nianiania et je suis perdu et je suis seul et bloubloublou un poisson rouge dans un bocal qui ne peut pas se sauver jusqu’à l’étang le plus proche.
Mais Logan n’a ni le QI d’un poiscaille ni la vulnérabilité d’un petit qu’on fait tourner en rond depuis des millénaires. « Comment est-ce que t’as eu ton job aux services secrets Calimero ? En étant mignon ? » Parce que le pire c’est que c’est une petite possibilité, même si pas vraiment.
J’hésite à appeler Edwin, mais il va encore me dire que j’ai la maturité émotionnelle d’un nourrisson et l’hyperattachement d’un chiot de la SPA. Franchement j’ai ni les oreilles tombantes ni la gueule qui pue, mais soit.

— Why d’you feel this sorry for yourself ?

Je sais même pas pourquoi je dois le trimballer comme un enfant de six ans. C’est lui ! la maturité émotionnelle d’un nourrisson ! c’est lui le chiot à qui on doit apprendre la propreté !
Putain.
Putain Logan, même.

Mais j’ose pas le répéter et je nous téléporte chez moi et je le pousse directement dans la douche en lui jetant une serviette propre et des fringues de mecs qui les ont oubliés ici et qui font office de pyjamas à la maison.

— Ça s’organise dans les bas-fonds pendant que t’étais trop occupé à chialer. Tu connais Autumn ? T’as des nouvelles de Luka ? T’es pote avec Ian ? T’as déjà rencontré Voniestosiwjski ?

Je souffle un grand coup en hurlant mentalement WHY DO I BOTHER mais alors je me rappelle que Logan est Logan. Et c’est parce que Logan est Logan que je n’ajoute pas que s’il répète ses noms je le réduis en miette et j’avale les miettes.

— Logan. Je souffle en espérant qu’il soufflera aussi avec ses grands yeux perdus. Est-ce que le manque va être un problème ?

Si il commence à trembler on a franchement d’autres problèmes que sa dépression. Parce qu’arrêter l’alcool brutalement tue et que je sais pas à quel point il est dans la merde, déjà.

La joue rougit, douloureuse.

Je
Quoi ?

Ma tête est tournée sous le coup de l’impact. Sous le choc, je reste comme ça, un long moment.

- Comment est-ce que t’as eu ton job aux services secrets Calimero ? En étant mignon ?

- ah oui mais c’est ma fête aujourd’hui carrément

J’vais vraiment commencer à me vexer en fait. J’voulais juste rire avec la copine, qu’est-ce qui arrive là

— Why d’you feel this sorry for yourself ?

J’détourne encore plus le regard. J’voudrais être une souris et aller me cacher loin, pas affronter ce regard de jugement qui fait mal parce que j’fais de la merde depuis de longs mois maintenant.

Parce que j’vais pas bien

En un mot, la solitude.
C’est tout
Ça me détruit
Pourquoi autant
Pourquoi j’me laisse aller comme ça
Jsp
Plus la force ?
Pas la force … ?

Une nouvelle téléportation et je crois reconnaître l’appartement de Nawel mais je suis rapidement, une fois de plus, sous la flotte.

Je prends rapidement cette douche forcée en me débarrassant de tout ce que l’étang a pu mettre sur moi, m’habille de fringues qui ne me ressemblent pas

Pas le temps de souffler, elle continue déjà

— Ça s’organise dans les bas-fonds pendant que t’étais trop occupé à chialer. Tu connais Autumn ? T’as des nouvelles de Luka ? T’es pote avec Ian ? T’as déjà rencontré Voniestosiwjski ?

Qué que quoi
Trop d’info à process là
Je
Hein

Je soupire

- j’en avais aucune idée, j’ai juste l’impression d’être tout seul à Londres et que tout le monde est parti loin ?

J’me sens juste impuissant en fait et j’suis pas David, j’peux pas me battre contre Goliath tout seul…

- Luka… t’sais… c’est compliqué …

Oui j’ai des nouvelles mais elle a toujours été si autonome et indépendante…

Ian et Autumn, des … connaissances ? Collègues ? Pas proches.

L’autrichien, peut être croisé une fois ou deux, comme le directeur d’Ottawa.

Zach il est au Canada aussi…

- mais si ya une résistance, bien sûr que je veux en être !

Ma voix est pas hyper convaincue. J’ai peur…

Elle souffle encore en disant mon prénom. Oui oui je sais. Vilain Logan. Loque Logan. Perdu Logan. Masse inutile Logan.

- Est-ce que le manque va être un problème ?

- le manque de ? De quoi ? De quoi tu parles ?

Manque d’humanité, oui. Manque de solidarité, oui. Manque de chaleur humaine, oui. Mais c’est l’état habituel, j’vis avec, j’suis déjà dans ce manque là, c’est déjà un problème et c’est comme ça que j’me retrouve dans cet état lamentable.

J’vais me poser dans son canapé.

- t’aurais pas un truc à boire dis?

Fort de préférence. Avec du thé. Tout pour se réconforter quoi. Même si j’sens que j’en ai pas fini avec Nawiwi.

(bah écoutez imaginez c'est Nawel)

Si seulement tous les sorciers étaient forcés d’aller voir une psychologue, on n’en serait pas là. Peut être que Logan aurait besoin de soutien, de confort, d’un patpat sur la tête, d’une tisane et d’amis au coin du feu. Franchement : je ne suis pas la bonne personne.
Mais au moins je suis là, quand Luka n’y est pas.
Quand pas grand monde y est à vrai dire mais c’est comme les masque à gaz dans les avions. Si tu t’aides pas toi même, tu pourras jamais aider personne, et on est un peu occupés à s’aider nous-même, même si cela passe par des doses de MD dans les narines.
En vrai, si vous testiez, vous kifferiez un maximum vous aussi c’est sûr et certain. Logan continue de geindre, et je suis seul, et c’est compliqué et je veux pas être left behind mais je compte pas marcher pour autant. Je sais qu’il est malade, alcoolique et dépressif, mais je n’ai pas les capacités pour le

oh.

je n’ai pas les capacités pour le guérir.

Ding dong.

Si les maladies mentales se soignent au même titre que les maladies physiques, est-ce qu’un guérisseur magique pourrait remettre Logan sur pieds ? Comme le polonais ?
Est-ce que vraiment le polonais serait d’accord pour remettre sur pieds quelqu’un qu’on sait même pas trop si il va être utile ou ferait-il un choix franc de continuer à mener la révolution ?
Mmmh.
Et Alec Meyer, le gars que Sam Carver se tape ?
Mmmmmmh.

- t’aurais pas un truc à boire dis?

Je m’enfoncer les paumes dans les globes occulaires en tournant en rond devant l’homme qui choit déchu sur le canapé. Je sais pas je sais pas je sais pas je sais pas je sais pas je sais pas.

— On sait tous que tu visites régulièrement le fond de la bouteille.

Je sais pas c’est qui tous, mais nous voilà moi et mes amis imaginaires dans le même bateau. J’espère que ça les dérange pas que je sois au gouvernail.

— Est-ce que t’aurais besoin d’aller dans un centre ? D’aller un moment quelque part paumé élever des fraises, des choux et des chèvres pour soigner le dedans de ta tête ? Dans un centre de désintoxication ? Parce que dans cet état, les portes de la Résistance risquent de ne pas être franchement ouvertes, c’est qu’une bande de chiens galeux qui lèchent encore leurs propres plaies.

Je lui adresse un sourire.

— C’est pas pour autant qu’ils savent plus mordre.

Purée, j’espère qu’il répètera à personne que je les ai comparés à des bêtes malades.

Ah ouais j’demande juste à boire parce que j’ai soif que ça ferait du bien et j’lui provoque ça. L’HOSPITALITÉ NAWIWI TU CONNAIS PAS

— On sait tous que tu visites régulièrement le fond de la bouteille

Je secoue la tête
Que quoi ?
Pardon ?!

[color=goldenrod] — Est-ce que t’aurais besoin d’aller dans un centre ? D’aller un moment quelque part paumé élever des fraises, des choux et des chèvres pour soigner le dedans de ta tête ? Dans un centre de désintoxication ? Parce que dans cet état, les portes de la Résistance risquent de ne pas être franchement ouvertes, c’est qu’une bande de chiens galeux qui lèchent encore leurs propres plaies. C’est pas pour autant qu’ils savent plus mordre.

Elle a le cran de sourire en plus de ça. Je me lève du canapé, j’suis pas venu me faire insulter là en fait

- mais t’es en train de me traiter d’alcolo là en fait ?!

Nan mais on aura tout vu. Rien ne va là. J’ai besoin d’amis, de chaleur humaine, de rires, de partage, de confier parfois ma peine

Et on m’insulte … ?!

Ouais prendre des vacances loin des conservateurs ça m’a traversé l’esprit. Prendre une pause loin de tout ce merdier, retrouver des gens qui m’aiment avec qui je peux profiter, pleurer aussi un peu peut être parce que je déteste ma vie en ce moment, je déteste ce que les conservateurs me font faire, parce que je sais à quoi vont servir les machines sur lesquelles je travaille.

Toujours plus de sang, toujours plus de morts.

On est vraiment les gentils dans ces conditions ?!

- Non je vais pas bien Nawel, non.

Depuis la première disparition de Kiki ça va pas. Et puis ensuite, tout n’a fait que creuser et m’enfoncer un peu plus loin, les guerres, Luka, les conservateurs …

Et je fais quoi avec tout ce merdier, tout seul ?!

Putain Nawel.

Pas une putain de raison pour me traiter d’alcoolique.

Bon, peut-être que Logan le prend mal (ce qui est étonnant, parce que je n’ai pas beaucoup changé). Un bulldozer un jour, un tractopelle le lendemain. Je n’ai ni le courage ni la patience de faire dans la dentelle, et il ose me regarder genre j’ai insulté tous ses aïeux et pissé sur les tombes.
Alors que c’est pas le cas.
Je lâche un soupir long, à fendre des coeurs dans les chaumières. Je sais qu’il va mal, qu’il se sent seul, qu’il a peur, qu’il est fatigué, découragé, démoralisé, tout ça je le sais et je l’ai compris mais
1) se relever est une question de survie
2) il reste suffisamment de sorciers noirs pour s’en prendre à lui, et il fait une proie drôlement choisie
3) il me saoule
4) c’est pas en usant son cul qu’on arrive où que ça soit
5)

Je suis coupée par Sloane Carver qui entre dans mon appartement sans prévenir. C’est tout à fait dans son style parce qu’elle me le répète suffisamment de fois par mois : c’est qui qui paie cet appart ? Ugh ? Et ton salaire ? Et le maintient de la police magique ?!

— Salut Nawel, oh dis-donc O’Connell, la tête que tu tires — j’ai besoin de toi. J’ai vraiment besoin de toi pour nous téléporter avec un autre mec dans un endroit de ses souvenirs. J’ai parlé à la cellule de téléportation et ils m’ont dit que c’était pas possible. J’ai besoin que tu me dises que toi tu peux. Parce que |
— Tu te tapes toujours Alec Meyer ?

Attendez, je vous fais la traduction : besoin de toi = tu viens au QG et tu fais. Téléporter un mec = un noir que l’on torture actuellement en ravageant son cerveau. La cellule téléportation = les quatre pauvres gars qui restent et qui ont été le plus touchés par les massacres et qui sont pas chauds pour se TP en territoire ennemi.
Je jette un regard à Logan qui veut dire : SEE ?! HOW IMPORTANT IT IS QU’AUCUN CONSERVATEUR NE SE REPRODUISE ?
Elle balbutie un truc genre bbb-b-b-b-b beh c’est pas le propos et je lève les yeux au ciel.

— Je viens si tu trouves comment réparer Logan.

Et je le pointe du doigt parce qu’il est le propos du moment.

Toujours debout, poings serrés. Nawel soupire, encore encore encore

Ouais bah déso que tu trouves pas le gars hyper guilleret que j’aimerais bien retrouver. J’voulais aussi hin, c’est toi qui arriver avec tes grands chevaux et qui a commencé à dire blabla t’es beau comme un mort de deux siècles

Et à me traiter d’alcolo

Nan mais on va où là ptn

Et la fillette recueillie de Scrimgeour débarque dans l’appart

MAIS C’EST QUOI CE CIRQUE

Je regarde Nawiwi avec des « ???????? » plein la tête.

What the hell. What the fucking hell.
Pourquoi elle est là. Comment elle est arrivée là. POURQUOI ELLE ME PARLE ?!

J’me renferme encore, détourne les yeux. Je veux pas je veux plus. Je sais à quoi ça va vous servir et je refuse d’en faire parti, j’en ai marre que vous détruisiez tout ce que vous touchez. Marre marre marre.

Et surtout elle a même pas le temps de finir, Nawel la coupe

— Tu te tapes toujours Alec Meyer ?

La prend au dépourvu, et ça fait plaisir.

Attends, Meyer… il fait plutôt parti de chez nous non ? Non ? Après c’est plutôt un soigneur, ils sont compliqués ces soigneurs, tout neutre, pas prendre parti, à la rigueur contre les noirs et préserver les innocent mais la suite ? Protéger tout le monde c’est pas mieux ? Franchement ? Le serment d’Hippocrate tout ça ?

Les magiques ils ont le serment d’Hippocrate … ?

— Je viens si tu trouves comment réparer Logan.

Si j’avais un liquide dans la bouche j’aurais tout recraché. À la place, je m’étouffe

- QUOI ?! NAWEL C’EST PAS BIENTÔT FINI CES BLAGUES ?! Hors de question qu’elle me touche, ils brisent tout, tout, TOUT. Ils laissent de la cendre partout et ça leur plaît. J’sais pas ce qu’ils me feraient, hors de question d’avoir un lavage de cerveau et de rejoindre leur rang ! Jamais je leur ferai confiance, JAMAIS.

Je sens la glace se former au bout de mes doigts. Je vois la buée sortir de ma bouche tandis que je fulmine.

J’ai envie de la lâcher de partout, surtout sur cette conservatrice de mes deux, petit chien de Scrimgeour.

Je savais bien que Nawel aurait des arguments pour pas tenter ce que je veux tenter. Je ne reconnais pas ce que je vois dans le crâne du sorcier, et le sketch artist qui dessine ce que je raconte, même s’il a fait un travail formidable, n’a permis à personne d’établir le lieu exact pour qu’on puisse aller voir. Et même si madame Meish refuse de voir pourquoi ça serait important d’aller éradiquer les vermines, elle peut sûrement comprendre en quoi ça serait une avancée de ouf dans la magie.
À la place de me contrer, elle me donne quelque chose à faire en échange (réparer Logan) mais c’est lui qui pete un plomb. Il me semblait bien qu’O’Connell semblait bancal. Pfffff.

- Mais de quoi |, j’entame, avant de me faire vulgairement couper la parole. Qu’est ce qu’elle me saoule mon dieu.
- On parle pas de Sloane Carver, banane. Elle a des connexions avec des guérisseurs qui seraient peut être à même de t’aider. Genre Alec Meyer.
- Il a probablement mieux à faire, genre, sauver des vies.
- Ou remettre en service l’un des agents les plus actifs des agents secrets.
- Ouais enfin il est plus actif depuis sacrément longtemps…

Tout ça devant Logan.

- Il a qu’à choisir. Tu veux être réparé O’Connell ? Lance-t’elle avec un grand sourire. Évidemment je soupire.

Ça parle ça soupire ça souffle ça ça ça

Ça fait du bruit

Et surtout ça parle de moi comme si j’étais pas là ? Et du Meyer. Mais comment on peut fricoter avec les conservateurs comme ça ? Et puis je repense à des gars d’Orpheo qui ont fricoter avec des Noirs carrément.

Logan, stop, respire. Tout le monde a le droit à une seconde chance pitié aller tout va bien. Les gens ont le droit de vivre, de faire des erreurs et surtout, surtout

On peut naître dans la mauvaise famille, avec le mauvais entourage …

Alors que Ange ai fricoté avec Rosenrot, au final ? Comme si moi même j’aurais pas le syndrome du sauveur si j’arrivais à me connecter avec un.e noir.e ?

… te fais pas d’illusion Logan. Assurément que si tu t’attacherais à la personne et tu voudrais la sortir des griffe de ces personnes qui lui veulent du mal et essaierait de la remettre dans le droit chemin.

Les questions de Harry ont beaucoup plus de sens désormais

Eh oui Jamie.

- je suppose que ça dépend ce que tu entends pas « réparer » ? Mais oui, j’aimerais bien… aller mieux… ne pas avoir ces pensées qui obscurcissent ma vue H24…

I would like that. Live a Little.

- Tant que elle ne me touche pas. Ni aucun autre conservateur.

Moi doigt accusateur tendu sur Sloane.

Jamais je ne lui ferais confiance, jamais je ne le pourrais. Je ne sais même pas comment Nawel peut lui demander service comme ça.

Logan accepte — enfin il accepte pas vraiment mais j’pense qu’il accepte suffisamment beaucoup pour que je considère que c’est bon, c’est oui.
Et nianiania le consentement, écoutez, le gars se rend pas compte qu’il est alcoolique, alors c’est super d’attendre qu’il soit en état de dire oui mais je manque de temps. On manque de temps. Sloane dit :
— Ça sera pas avec Meyer.
Je dis :
— D’accord.
Je réfléchis.
— Avec Vonistosiwjski ? je tente.
C’est risque, je sais qu’il a pris un rôle très actif dans la rebéllion, mais c’est avec lui que j’ai cramé le QG d’Allen-le-directeur-du-canada-je-sais-plus quoi, je repense à Ian et sourit avant de me rattraper.

— Il est prof de runes quelque part en Pologne, rien à voir Nawel, vraiment, mets toi à jour. Tu fais une sacrée espionne !

Hyper vexée, mes sourcils remontent quasiment jusqu’à mon cuir chevelu mais elle roule des yeux sans me laisser le temps de réagir elle répète :

— Ça ne sera pas avec Meyer.

Et Nawel la débile comprend enfin ce qu’elle veut dire. Le sous-entendu me percute enfin et je pèse le pour et le contre au moins dix secondes. Pour ma défense, dix secondes, c’est vraiment beaucoup pour moi, je suis une experte en roulage de pelles et du coup en dix secondes j’ai le temps de tourner cette fois ma langue dans ma bouche.
Je dévisage Logan.
Sloane me regarde.
Je la regarde, elle regarde Logan et tire une moue genre : téma la gueule qu’il tire, et elle a pas tord. Peut-être qu’elle le formule pas comme ça mais l’essentiel est qu’elle a pas tord. Je pense à l’institut (neutre, pas conservateurs, et il a dit pas conservateurs), je pense aux chambres, aux rendez-vous, au sevrage à la solitude, aux temps de parole et au temps qu’il faut pour guérir et aux ressources qu’on n’a pas toujours et jusqu’où il va falloir puiser pour le sortir de là. Je pense à la chambre qui ressemble à celle de tous les autres, je pense au psy et aux guérisseurs et aux runes et aux gens qui hurlent la nuit. Au moins, ça sera des professionnels. Le centre n’accepte que des gens très importants qu’il faut remettre sur pieds vraiment vite. Il coûte tellement cher que les admissions doivent être checkée par plusieurs personnes.
Mais Sloane Carver est qui elle est.
Je serre les dents.
Il a besoin d’amis, mais j’en ai pas pour lui sous la main.
Je ferme les yeux.
Sloane hoche la tête et j’ai une boule dans la gorge mais je hoche doucement la tête en retour.
— Je ferai les papiers.
— Je suis désolée Logan, je dis, en attrapant son bras.
J’ai des tas d’autres choses à rajouter, appelle Edwin si t’as besoin, je viendrais te voir si tu le veux (quel mensonge, je hais les hôpitaux et les soignants) et puisses-tu un jour me pardonner (mais je m’en tape en vrai, je ne me suis jamais pardonnée et le temps ne s’est jamais arrêté), get better you bitch (ça c’était pensé), je suis désolée que t’aie à passer à travers ça, je suis désolée de te faire ça, je suis désolée pour la guerre et je suis désolée que tu n’en peuves plus, mais la vérité c’est que mon empathie s’est fait arracher les dents, la langue et les yeux et n’a plus jamais eu sa voix au chapitre.

Je nous téléporte.