Tu rabats ta capuche devant tes yeux. La pluie te cache autant qu'elle cache le monde. Une aubaine et une difficulté. Comment suivre une ombre quand elles se ressemblent toutes sous la brume ?
Tu fais taire le bruit autour de toi et te concentre sur les émotions qui se dégagent autour de ton corps. L'énervement, la tristesse, l'agacement, l'ennui, l'impatience. Les humains autour de toi renvoient beaucoup de négatif. Mais pas assez, tu cherches plus fort jusqu'à le trouver, cette haine immense et viscérale, cette folie meurtrière et en même temps colère froide.
Elle a bifurqué à droite alors tu la suis.

Lorsque Green a appris que votre père était arrivé à Sydney, il a attrapé Elaïa par la main et a aussi réservé plusieurs vols sous différents noms d'emprunt. Il ne t'a pas dit où il allait, cela aurait été peu prudent… Tout comme tu ne lui as pas parlé de tes plans.
Ne pas fuir, ne pas se cacher, mais traquer ton père. Faire du chasseur le chassé. Utiliser la formation, les coups, les heures de sueur dans la cave contre ton géniteur. Pour découvrir les informations d'Allen, comment il était parvenu jusqu'à vous et surtout, surtout, comment lui échapper. Comment protéger ton frère et ta nièce.

Dans la ruelle passante devant toi, le monarque Soul bifurque encore une fois et tu accélères un peu pour le rattraper. Mais ton pied glisse sur les pavés et tu te tords la cheville. Gardant ton équilibre à grande peine – il serait ridicule de se faire griller en s'étalant de tout son long et tu ne tiens pas à voir le regard de pitié de ton père devant une chute aussi pathétique – tu lâche une bordée d'injures mentale. Tu jures beaucoup ces derniers temps, peut-être est-ce ta façon de faire face à ton chagrin d'amour ? Certains se réfugient dans la nourriture, d'autres dans les larmes, toi c'est les gros mots.
Ça fait un peu rire Elaïa. C'est presque la seule chose qui la déride, d'ailleurs. Les injures et le surf.
Tu éloignes la pensée de ta nièce, essayant d'oublier qu'il y a quelques jours encore, vous étiez sur vos planches à ramer avec vos bras. Tu détestes ça toi, le surf. L'eau qui s'abat sur toi, les requins que tu imagines rôder dans les profondeurs, le sel qui se colle à la peau. Tu as ça en horreur. Mais tu t'accroches parce que tu sais le plaisir de ta nièce quand elle se retrouve sur l'eau, tu sens son relâchement, une pointe de bonheur, enfin. Alors tu apprends, tu la suis, tu utilises ta maîtrise du vent pour créer pour elle des vagues un peu plus grande.
Tu essaies de lui transmettre l'amour dont t'ont entourée tes six frères. Qu'un peu de Red, Cyan, Olive, Silver et Bianco se retrouvent dans la petite. Les bons côtés seulement.

Tu retrouves ton équilibre, boîte sur quelques pas avant de retrouver une démarche plus assurée et de pouvoir retourner à ta filature. La silhouette musclée de ton père est déjà loin devant, mais qu'importe. Personne ne t'attend, nul part. Tu as toute ta vie devant toi pour le perdre et le retrouver, encore et encore.

Alors comment ça, le gars que je traque est déjà traqué ?

Étonnant.
Ça bouillonne chez Orpheo autour de cette mission. Allen Soul traque sûrement Green Soul, qui a quitté l’embarcation. Les histoires et les rumeurs qui courent entre lui et Anja Von Duisbourg sont nombreuses ; impossible d’en tirer une conclusion suffisante. Il est par ailleurs incroyablement étonnant qu’Allen fasse le sale boulot lui-même, qu’il se salisse à suivre des traces ; pourquoi a-t-il été poussé ainsi ?

Ont-il perdus trop de soldats, trop d’esclaves avec le retour du Mystery ?

Et pourquoi Green aurait-il quitté le navire, à nouveau ? Une fille ?

Bref, suffisamment de questions pour lancer une équipe à la recherche du fameux Soul — les autres, et moi, en Australie. Les plages de la maison valent tout à fait celles, brûlées de soleil et de lumières d’ici, et les ruelles pluvieuses du coin sont les bienvenues. Parce que mes indics chez Orpheo sont très fort, je suis certain d’être dans le bon endroit, et extrêmement frustré d’avoir pour ordre de ne pas intervenir. On suit, c’est tout. On essaie de gauler Green plutôt, de comprendre. Les deux en même temps si possible. Alors je le suis, véritable clebs pisteur.

Et je ne suis pas le seul.

Cette odeur ne m’évoque rien du tout, même pas un esclave, rien du côté d’Orpheo non plus. Et qui se méfie d’un little feral cat ?

Beaucoup de sorciers noirs ne peuvent pas blairer les animaux mais je tente ma chance et me coule dans le minuscule. Je trottine à la suite de l’odeur après avoir laissé mes affaires dans un coin magique. Ma vision déformée dû à ma taille et à mes yeux me permettent de scruter un moment, sans que je ne reconnaisse pour autant la figure ou la silhouette et, rapidement je redeviens humain pour m’approcher de plus près.

Et ce que je vois me fait immédiatement réagir, alors que je l’épingle contre un mur : «  TOI ! ». Ma voix est blanche et a fusé comme une flèche alors que je la regarde dans les yeux. J’ai la nausée au bord des lèvres, la rage tout au bout des doigts.

Ange me l’a montrée sur son téléphone, amoureux et délicat, drôle. Sa jolie fille d’été. Et au milieu de la guerre, y’en avait pas beaucoup des comme ça pour le faire sourire, alors on a tous retenu je crois. Sa jolie fille d’été.

Salope.

Myaw aussi devrait bien reconnaître ce visage également ouais. Je déglutis, le corps entier en feu, l’envie de la secoue et la tuer là dans cette ruelle, à coups de pieds. Ange m’en voudrait-il vraiment ?

Après Myaw ?

Vraiment ?

L’idée d’attraper Allen ou de le suivre caracole un instant à côté de moi avant de filer avec ma cible. Plus rien à foutre.

Je crache à ses pieds, la colère colorant mon monde.

Normalement, ça n'aurait pas dû arriver.
Tu as été entraînée depuis ta plus tendre enfance. On t'a donné des couteaux plutôt que des hochets ou des doudous. Tu as supporté les combats au corps à corps contre tes frères plus lourd, plus grand et plus entraîné jusqu'à ton adolescence. Tu as été réveillée tous les matins, avant même l'aurore, pour te retrouver dans la sueur poisseuse des salles d'entraînement.
Si tes parents ne t'ont pas donné d'amour, ils t'ont offert des armes à la place des mains pour pouvoir te battre.
Normalement, ça n'aurait pas dû arriver.

Tu te retrouves épinglée contre un mur, ta capuche tombant dans ton dos, alors qu'un cri guttural déchire tes tympans. Une syllabe que tu ne comprends pas bien – a-t-elle d'ailleurs seulement un sens ou est-ce juste un hurlement de haine ? – alors que tu peines à retrouver tes sens. Une douleur irradie dans ton omoplate gauche et tu imagines déjà l'hématome qui y éclot. Qu'importe, tu en as connu d'autres, des bleus. Ce que tu ne connais pas, par contre, c'est ton agresseur.
Ça ne peut pas être ton père – tu es certaine que son don n'est pas de pouvoir se téléporter et la distance qui vous séparait à l'instant est trop grande pour qu'il te saute ainsi à la gorge. Alors tu relèves les yeux pour tomber nez à nez avec un jeune homme d'à peu près ton âge, très mignon, très en colère et beaucoup trop musclé.

Scheisse.

– Mais t'es qui toi, putain ?!

Une chose est certaine : tu n'as jamais vu cet homme de ta vie. Il ne sort clairement pas de Rosenrot, ça ne peut donc pas être un garde du corps de ton père – de toute façon, depuis quand le vieux a-t-il besoin d'un garde du corps ? – et quelle est la probabilité de tomber sur une autre personne du monde magique au hasard des rues de Sydney, alors que tu as tenté de dissimuler ton visage autant que possible ?
Clairement, cette personne est en mission.
Probablement pas contre toi. Pas assez importante pour Orpheo et, une fois encore, ce n'est pas un mec de Rosenrot qui s'agite férocement devant tes yeux. Contre ton père, donc. Ok, super. Super, super. Tu assimiles doucement les éléments. Quelqu'un d'autre que toi suivait Allen Soul. Qui ?
Orpheo. 90% de probabilité.

Ton cerveau, enfin réveillé, analyse les différents éléments. Un mec d'Orpheo te bloque le passage. Il semble clairement capable de t'écraser comme une mouche. Tu n'as aucune idée de ses capacités magiques. Tu ne vois aucune possibilité de fuite. Tu doutes clairement de t'en sortir dans un combat au corps à corps. Lui semble voir clairement qui tu es, et te détester. Peut-être même connaît-il tes pouvoirs. Ta propre vulnérabilité te crève les yeux.

En résumé, tu es dans un sacré pétrin.

Immédiatement au poids que j’ai dans les mains, je la devine vraiment plus légère que moi. Même si je sais que le poids ne change pas toujours à la force, l’impact des coups et les retournements de corps sont largement aidés par la masse musculaire.

Je ne suis pas très grand, mais je la dépasse quand même et, avec l’effet de surprise, j’ai largement l’avantage. L’adrénaline m’électrise un coup alors que je resserre ma prise, un tambourin dans la tête qui tapote myaw myaw myaw myaw myaw myaw dans mon esprit.

Putain !

Est-ce Ange m’en voudrait vraiment ? Je me répète mais la question se pose tout de même. Alors que je m’attendais à un retour violent, au moins magique, elle s’exclame : 

— Mais t’es qui toi, putain ?!

En tout cas elle n’essaie pas vraiment de se barrer non plus, ce qui est tout à fait étonnant et, sous le coup de l’impulsion, mon visage pas très loin du sien, je siffle :

— Vous êtes tous comme ça les Soul de toute façon n’est-ce pas ? À se croire assez bien, assez amoureux pour trainer du côté du bien.

L’histoire de Green paraît-il et maintenant Rhyan putain, RHYAN ! Rhyan qui trouve du sens de l’autre côté des rails, qui ferme les yeux, qui presse les détentes interdites.

Voyez-vous, il est éminemment compliqué de mentir à ces potes qui vous connaissent si bien, mais alors à un empathe doublé d’un animal instinctif, vous pouvez pas gagner.

Putain.

La haine s’engouffre dans mon estomac, épaisse et sirupeuse, vraiment pas contenue.
Je la lâche après l’avoir repoussée contre le mur. J’ai pas l’impression de vouloir des réponses ni vraiment de vouloir comprendre, mais si ma rage et mon dégoût peuvent trouver un exutoire alors I’m down for it.

— T’as cru qu’il resterait avec toi quand il saurait tout ce que vous faites dans les bas fonds de vos caves ?!

L’émotion me déborde et, si j’imagine un instant la juguler je lui éclate juste à la tête de tristesse et d’incompréhension. Tant pis tant pis tant pis tant pis, leurs esclaves et leurs tortures et leurs misères et ce qu’ils ont fait du Mystery Orphanage. Le pire du pire incrusté dans les murs.

— Je comprends juste pas. Vous êtes répugnants.

Parti, Allen, partis, mes mots tout douloureux à son visage. Mes lèvres tremblent mais je me sens tellement, tellement présent ici que j’ai l’impression de simplement attendre une ouverture puis lui éclater le nez dans le crâne.
Peut-être qu’après je sifflerais Allen pour qu’il vienne contempler les dégâts ou ramasser les morceaux. Je songe au fait qu’il traque Allen et que chez les méchants, les noirs, les pourris, ça a l’air de toujours finir comme ça : buté par sa propre famille, ses proches, ses soldats qu’on a tellement fait souffrir, qu’on a tellement forcé qu’ils finissent par mordre cette putain de main qui bat, qui viole, qui assassine.

Qui viole, ouais.

Une pensée éclair me fait penser à Carla et la vengeance m’écume les lèvres.

Ses mots ressemblent à ceux d'un serpent. Un serpent dangereux et cannibale. Tu t'astreins à la prudence alors que ton cerveau carbure à toute vitesse.
Tu es dans ce qu'on peut considérer comme une belle situation de merde.
Bonne blague, tu pourrais appeler papa Soul à la rescousse. Histoire de bien terminer ton humiliation. Papa Soul qui ne bougerait probablement pas le petit orteil en te regardant crever là. Papa Soul qui lâcherait, en te voyant à l'agonie, que si tu crèves sous les coups d'un batard d'Orpheo, alors c'est que tu l'as bien cherché. Papa Soul dont la seule raison de te sauver serait pour pouvoir te buter lui-même. Après t'avoir torturée pour obtenir des informations sur Green.
Ok. Papa Soul est une mauvaise solution, faut chercher ailleur.

– Vous êtes tous comme ça les Soul de toute façon n’est-ce pas ? À se croire assez bien, assez amoureux pour trainer du côté du bien.

Bon, et bien une énigme de résolu. Ce mec est un pote d'Ange. Super, comme si ton coeur meurtri avait besoin que ton corps le soi également. Au moins bonne nouvelle : s'il te tue tu pourras dire adieu au chagrin d'amour. À la vie aussi, et ça c'est moins rigolo.
Tu t'arrêtes cependant sur un mot. "Tous comme ça" ? Qui d'autre que toi a pu traîner du côté du bien ? Green c'était avec une simple humaine. Et puis ça remonte à trop loin pour que ce chien d'Orpheo puisse être au courant. Silver aussi c'était une simple humaine. Bianco aime personne. Red ne s'abaisserait jamais à ça. Les jumeaux sont dans une sorte de relation fusionnelle et chelou. De quoi peut bien parler ce malade ?

– Mais qu'est-ce que… ?! Mais de quoi tu parles bordel ?! Quel Soul ? Quel bien ?

Quel bien, quel mal. On pourrait croire que tu lui demandes une dissertation philosophique, mais tu souhaites juste qu'il balance des noms.
De quoi peut bien parler ce mec ?

— T’as cru qu’il resterait avec toi quand il saurait tout ce que vous faites dans les bas fonds de vos caves ?!

Tu regrettes en fait. C'était mieux quand il se taisait, malgré la douleur. Tu préfères les coups physiques que le coût des mots. Évidemment. Fallait que ce putain d'inconnu vienne parler d'un truc sur lequel il ne connaît rien. Youpie. Journée de merde.
Les gros mots, donc.

— Je comprends juste pas. Vous êtes répugnants.

Tu as le dos contre le mur, mais au moins il t'a relâchée. Tu n'es pas beaucoup plus avancée. Impossible de partir par derrière. Impossible de passer à droite ou à gauche. Impossible d'utiliser tes pouvoirs en pleine rue. Bon, c'est au moins une bonne nouvelle : ça sera sacrement plus difficile pour lui de te tuer au milieu d'autant d'humains innocents. Alors que toi, tu aurais beaucoup moins de culpabilité à le faire : au diable cette frontière de merde entre humanité et sorciers. De toute façon Orpheo enverrait des gens pour effacer leur mémoire. Et comme c'est pas toi qui paie...
En attendant, le faire parler. Une solution va bien finir par se manifester. Un Green sortant de nul part ? Haha. Bonne blague.

– Demande à ton pote. Il n'était pas au courant de la liste de nos esclaves, mais crois moi qu'il savait très bien ce qu'on leur faisait. Et je t'assure que c'est pas ça qui l'a empêché de jouir.

C'était… pas tout à fait faux. Pas tout à fait vrai non plus, cela dit. Ange avait mis de la distance entre vous après avoir appris que tu étais à Rosenrot. Mais vous aviez fini par vous retrouver. Et il t'avait acceptée, telle que tu étais.
Enfin jusqu'à apprendre que tu étais une Soul et que tu détenais Myaw dans ta cave.

Je voudrais m’empêcher de savoir ce qu’elle ressent, mais une rapide inquisition m’apprend quelques détails plaisants ; un brin d’inquiétude et de contrariété, un chagrin qui suinte, purulant, que même un premier année pourrait détecter et oui, une fatigue. Je crois.

Pas sûr, je ne sais pas.

Je me coupe d’aile comme j’arracherais les ailes à une mouche, d’un coup sec, la langue sur les dents.

— Mais qu’est-ce que ?! Mais de quoi tu parles bordel ?! Quel Soul ? Quel bien ?

Mais ses questions ne m’intéressent absolument pas, je veux des mots des explications, des réponses, quelque chose qui pourrait faire du sens, remettre un peu d’ordre dans mon monde savonné au sang sur lequel je glisse sans cesse. Et vas-y que ça dérape, que ça s’éclate les genoux, que ça dérape encore bam, les coudes cette fois, la sérénité celle d’après, les coups au coeur et à l’espoir aussi.

Elle check ses espoirs de sortie, et je sens le loup gronder en moi. C’est sourd, vibrant dans ma gorge et j’imagine lui déchirer la gorge immédiatement. Qui verrait quelque chose d’autre qu’un loup ? Bon, okay, incongru. Un poney pour lui rouler dessus ? Une panthère ?

Une loutre ?

Une loutre déchaînée, une loutre gone savage comme dans Zootopia.

Mais je m’égare, et j’essaie de repousser un instant l’image de mes crocs dans ses yeux pour l’écouter parler, répondre, suffoquer des mots stupides.

— Demande à ton pote. Il n’était pas au courant de la liste de nos esclaves, mais crois moi qu’il savait très bien ce qu’on leur faisait. Et je t’assure que c’est pas ça qui l’a empêché de jouir.

Je suis bien heureux qu’elle ne balance pas des atrocités sur Ange et Myaw genre, des choses fausses mais faciles qui m’auraient fait partir au quart de tour. Mais non, elle dit un morceau de vérité comme si je ne la connaissais pas, comme si j’en voulais pas à Ange. Absolument incapable de comprendre Myaw d’ailleurs, mais je sais bien que là n’est pas ma place. Pour moi c’est pas vraiment un gars bien, et Myaw le voit comme le prince charmant qu’il n’est pas, mais ce n’est pas à moi de le dire.

Autant relâcher ma frustration sur toi, n’est-ce pas ? Qui pour m’en empêcher, qui pour me dire que c’est pas la bonne cible ?

Les gens nous regardent vaguement dans la rue : oh le couple qui s’engueulent ! Je passe de l’anglais à l’allemand pour ne pas me faire comprendre de la populace et bouge.

Je l’attrape par la bouche, mes doigts pressés contre ses dents :

— C’est parce que c’est tout ce que t’es Bleuann Soul, un réceptacle à foutre.

J’ai conscience d’avoir le visage masqué par la colère, et mes yeux clairs la scrutent, tout son visage, pour pas oublier. J’ai l’impression parfois d’être le seul, toujours du bon côté, dans des tords tellement minuscules que ça en est ridicule. J’ai trompé ma meuf.
Voilà.
D’autres sautent des meufs qui torturent les nôtres. Je comprends pas.
Un vent de solitude me soulève le coeur et je me surprends à avoir envie de raconter ça à Carla. J’ai le ventre liquide.

Ton don s'affole dans ta tête, dans ton corps, partout jusqu'au bout de tes doigts. Aïe. Ce que tu lui dis ne lui plait pas. Ce que tu es non plus. Ta relation – ancienne relation – avec Ange encore moins. Ce qui n'est pas vraiment pour arranger tes affaires.
Tu devrais te raisonner à la prudence Bleuann. Tu le sais et tu le sens, ton corps entier vibre de cet avertissement. Tes cellules s'affolent, tes poils se hérissent. Tu devrais te raisonner à la prudence, te calmer, trouver un moyen de te tirer d'ici, et vite. Mettre en œuvre toutes tes capacités, toutes tes années d'entraînement pour filer loin, le plus loin possible de ce fou.
Mais t'as pas le niveau. Juste pas le niveau et tu le sais.

Il glisse ses doigts sales autour de ta bouche, ses ongles crissant contre ta peau, sa main musclée te morcelant le visage de sa force. Il glisse ses doigts autour de ta mâchoire et t'attire à lui, basculant sur l'allemand :

— C’est parce que c’est tout ce que t’es Bleuann Soul, un réceptacle à foutre.

Tu mords de toutes tes forces. Tu fermes la bouche et tu mords sa main, oubliant toute prudence, oubliant le calme et ton plan de t'enfuir, oubliant qu'il lui suffirait sans doute d'une claque pour te foutre à terre et te tuer dans la seconde suivante. Tu mords, trop estomaquée par autant de misogynie pour faire autrement.
Ces connards d'Orpheo. Toujours à faire genre qu'ils sont mieux que tout le monde, au-dessus de tout, gentils petits toutous immaculés. Énorme mytho. C'est les pires sous leurs airs angéliques. Les pires de tous.

Tu recraches les mots et le sang de ton adversaire en même temps.

– Ferme ta gueule. T'as aucune idée de qui je suis, t'as aucune idée d'où je viens. Ferme ta putain de grande gueule, le chien d'Orpheo.

Tu sais que la dérouillée que tu vas prendre va être douloureuse. Très douloureuse. Mais tu n'arrives pas à t'arrêter pour autant. C'est des années de silence, des années à se retenir dans l'arrière-fond de la salle à manger de tes parents qui te fusillaient du regard si tu avais un mot de travers, en particulier devant les éminents personnages qu'ils recevaient.

– On vous apprend pas ça dans votre orphelinat de merde ?! La putain de tolérance ?! Il semblerait qu'on ait bien fait de vous le prendre alors, si vous êtes même pas capables de transmettre vos valeurs naïves à vos enfants.

Oups. C'était un peu de trop. C'était même sûr que c'était de trop. Tu as craché ces mots comme du poison, comme pour être sûre qu'ils s'extraient le plus rapidement possible de toi, être sûre que ce parfait inconnu les reçoivent avant de répandre ton sang à toi sur le bitume.
Le Mystery Orphanage. Tu la sens la bonne idée, Bleuann ? La sacrément bonne idée ? Ça va saigner, là. Et ça va faire mal.

Petite meuf dans une ruelle finira mal.
Je crois que j’ai eu peur à un moment de ne rencontrer aucune résistance, d’affronter un mollusque — pas vraiment. Elle me mord la main, ses dents dans ma cher et bien sûr je recule d’un cran, bondit même, toute ma volonté pressée pour que le loup ne sorte pas.

– Ferme ta gueule. T'as aucune idée de qui je suis, t'as aucune idée d'où je viens. Ferme ta putain de grande gueule, le chien d'Orpheo.

Alors allons-y !
Le chien d’Opheo — saurait-elle que je suis mêlé, ça ne la dérangerait sûrement pas après Ange. Tous brisés et perdus dans cet univers dégueulasse qu’ils essaient de peindre.

Et le pire c’est qu’elle continue.

– On vous apprend pas ça dans votre orphelinat de merde ?! La putain de tolérance ?! Il semblerait qu'on ait bien fait de vous le prendre alors, si vous êtes même pas capables de transmettre vos valeurs naïves à vos enfants.

La gifle part et s’abat aussi fort que possible sur sa face. Pas vraiment à cause de ses mots mais pour le sport, elle est coincée et elle le sait sûrement aussi bien que moi.

Elle est pathétique, c'est à admettre.

Un sourire naît sur mes lèvres, même pas menaçant : elle est drôle. Enfin presque. Elle pourrait l’être, quoi. Elle pourrait.

— Oh, Rosenrot me parle de tolérance, l'élite du racisme me parle de tolérance !

Je me déplace légèrement sur le côté. L’idée de la ramener à Orpheo fleurit doucement à l’arrière de mon crâne, s’épanouit. Peut-être est-elle liée à Green Soul. Tout ça parce qu’Ange n’a pas pu s’empêcher de la montrer, de l’exhiber ; qui aurait pu ne pas reconnaitre un visage Soul parmi non ?
Son amour qui la tue deux fois, en la quittant, en l’exposant. Quel malheur !

— Ça fait quoi d’être tombée amoureuse d’un mêlé ? C'est sale, tout de même, un mêlé. Faudrait voir à faire gaffe. Que dirait Papa Soul, enfin, s’il savait ? Les frères ? La cheffe ?

Je renifle. Le mépris me fait saliver. J’hésite à lui proposer maintenant un tour à Orpheo mais j’ai finalement tout mon temps, bien plus qu’elle. C’est drôle, on nous vend tellement les Soul comme des armes suprêmes, l’élite de l’entraînement et de la perfection et là, face à moi se retrouve une freluquette véhémente, inutile à elle-même. C’est décevant. Les profs nous mentaient-ils pour nous motiver ?

Les directeurs d’Orpheo nous mentaient-ils pour qu’on se dise au final « ah mais en fait ça vaaa, large ? »

Mon pouvoir roule sous ma peau, conquérant, bâtard. Un mêlé ! Que des mêlés chez Orpheo dites donc, que des rebuts, suffisamment puissants pour faire tomber une petite sorcière pas bien tombée qui se défend avec des mots trop grands. Bouhou je ne suis pas ce que tu dis de moi, bouhou tu ne me connais pas, bouhou vos valeurs enfin, tout de même, Ian, vos valeurs c’est d’être gentil ! Bouhouhou tu sais pas ce que j’ai vécu.

Mais toi non plus, Bleuann Soul.

Toi non plus.

La claque part d'un coup. Fallait s'y attendre à celle là, tu n'as d'ailleurs presque pas mal tellement tu étais prête à la recevoir. Et puis une gifle. Vraiment ? C'est tout ce qu'Orpheo avait dans le ventre ? Des gros muscles pour un des coups les moins douloureux qui puisse exister ? Ou alors c'était pour le geste, le côté dramatique, le "oh, regardez comme je domine la situation".
Tu lèches consciemment les dernières gouttes de sang de l'inconnu qui traînent encore sur tes lèvres. Son sang, le tien à cause de cette claque dramatique ? Goût métallique, ignoble, le sang d'un ennemi mêlé au tien. Tu n'as jamais compris la fascination de Redwan pour le sang, son attrait pour ce liquide chaud et poisseux qui t'a si souvent fait vomir.

– Oh, Rosenrot me parle de tolérance, l'élite du racisme me parle de tolérance ?

Et le sourire dégueulasse qui naît sur son visage. Tu as envie de l'arracher de sa gueule ce sourire et de le lui faire bouffer jusqu'à ce qu'il en vomisse. Lui faire manger sa propre chair, avaler son sang, ses vaisseaux, sa peau dégueulasse. Il te pousse à bout et tu sais à quel point c'est dangereux.
L'image fugace d'Anja naît dans ton esprit. Elle garderait son froid sans nul doute dans cette histoire. Mais quelle histoire ? Anja n'en serait jamais arrivée jusque là déjà. Elle aurait remarqué qu'on la poursuivait. Elle aurait tué avant même d'être repérée.
La mécanique dans ton cerveau cliquète. Il faut que tu trouves une solution pour sortir de ce bourbier.

– Mets tes registres à jour, fumier. Je suis plus à Rosenrot.

Très malin ça. Le seul élément qui pouvait te sauver d'une mort certaine, tu viens de le ruiner. Plus à Rosenrot. Plus d'informations dessus. Aucune utilité donc de te capturer pour te torturer.
En même temps, avais-tu vraiment envie d'être torturée par ces connards ? Non. Bon, problème réglé.

L'exorciste se déplace légèrement sur le côté. Une porte de sortie ? Ne pas se précipiter.

– Ça fait quoi d'être tombée amoureuse d'un mêlé ? C'est sale, tout de même, un mêlé. Faudrait voir à faire gaffe. Que dirait Papa Soul, enfin, s'il savait ? Les frères ? La cheffe ?

Tu manques d'exploser de rire. L'avis de ta famille ou d'Anja sur tes fréquentations est bien le dernier de tes soucis. Au contraire même, tu aimerais bien qu'ils sachent, qu'ils apprennent. Un coup derrière la nuque de ton père ; ça lui ferait bien chier de savoir que tu as baisé un mêlé de la pire espèce. Bien, bien chier. Tu devrais penser à lui envoyer une lettre d'ailleurs.

Salut papa,

Juste pour te dire, j'ai baisé avec un mêlé d'Orpheo. On a même oublié de se protéger une fois, avec un peu de chance je suis tomber enceinte.

Bisous,

Bleu

Tu gardes l'idée dans un coin de ta tête. Mais pour l'instant tu as d'autres problèmes et l'inconnu ne s'est toujours pas remis droit face à toi. Inattention ou piège tendu ? Qu'importe si c'est un piège après tout, tu n'as pas vraiment le choix.

Tu prépares la tempête.

– Demande aux putes de ton espèce pourquoi elle préfère baiser avec des sorciers noirs qu'avec les toutous d'Orpheo. Vous êtes de si mauvais coups que ça ?

Tu balances la tempête. La force du vent vient cueillir ton adversaire à l'estomac. Tu y a mis toute ton énergie, impossible qu'il ne vacille pas face à cette puissance, pas sans y être préparé.
Tu n'attends pas de voir s'il tombe et tu plonges sur le côté libre, te précipitant dans la foule aussi vite que tes jambes te le permettre. Tu sais que si tu tiens 200 mètres, tu pourras rejoindre une des artères principales de Sydney, toujours noire de monde. Tu pourras alors te glisser dans la foule et te perdre parmi les innocents.

Faut juste tenir.
Et courir vite.

Tout va déraper, je le sais bien. La situation ne m’appartient pas vraiment, quelque chose cloche, mais allons-y.

– Mets tes registres à jour, fumier. Je suis plus à Rosenrot.

C’est noté.
Au moins je repartirais avec une info demi-utile avec moi, ce qui est toujours mieux que me trimballer une sorcière tout à fait useless. Mon instinct stridule jusque dans mes dents d’une tonalité désagréable mais je m’approche d’elle.

– Demande aux putes de ton espèce pourquoi elle préfère baiser avec des sorciers noirs qu'avec les toutous d'Orpheo. Vous êtes de si mauvais coups que ça ?

Même pas le temps de me dire que sa répartie est complètement éclatée que je me fait jeter contre un mur. J’entends le bruit de mon crâne, l’impact qui immédiatement me fait danser des étoiles devant les yeux, puis un voile noir qui s’abat alors que je crache et tousse sur le sol. Pourtant, la deuxième attaque ne vient pas et je sais qu’elle a détalé. Je mute immédiatement, chat pour essayer d’être discret, mais la douleur me soulève le coeur.

Oh et puis merde.

Je mute loup et la piste à la trace. Je pourrais dire qu’elle a une odeur bien singulière, ce qui serait vrai, mais ses émotions le sont toutes aussi et je galope à la recherche de ce bouillon noir et crasseux qui la détermine. Les gens hurlent sur mon passage, quel étrange animal se faufile dans la foule, et je sais que le grabuge est de son côté.

Tant pis.

Vraiment plus rien à foutre, et le sol sous mes pattes, tactactactact, myawmyawmyawmyaw et cette catin de Soul qui se sert d’innocents pour se planquer. Ils disaient pas ça les Soul quand il s’agissait de faire exploser tout le monde, ugh ?

Je mets la truffe sur son odeur — quel humain courrait aussi vite qu’un loup ? — remute humain, lui attrape les cheveux pour lui éclater la tête contre un mur, sous le hurlement affolé d’humains. Des grappes d’humains qui ont peur et leur stress se coule dans mes veines, pâteux. Je m’apprête à en remettre une couche quand un bras m’enserre la gorge, m’attire en arrière et pouf.

Disparition.

Le noir d’un appart aux volets fermés m’accueille, et face à moi un newbie d’Orpheo, les mains tremblantes et les lèvres exsangues qui dit « c’est, c’est, c’est les règles enfin Ian, t’imagine pas toutes les mémoires qu’on va devoir efface eff effacer là déjà ». J’attrape mon visage à pleines mains, me mord un poing et hurle de frustration « mais PUTAIN, c’était BLEUANN SOUL, servie sur un plateau ! » et sa peur à lui aussi me monte au crâne. Comme c’est désagréable ! Et il ose en rajouter une couche « la guerre est terminée pour eux de toute façon, il restera la purge » et puis une autre voix que je n’avais pas remarquée alors prend le relais « il semblerait qu’elle soit sur la piste d’Allen Soul. Et qui de mieux que sa fille pour le retrouver ? ».

Je me tourne doucement, comprenant immédiatement que quand je suis lâché seul en mission, je ne suis jamais lâché seul en mission. Ils flattent l’ego de l’homme en bridant l’impulsion du loup. Je hoche la tête doucement.

Putain de ses morts.

La foule t'apparaît comme une fleur dans laquelle tu te laisses fondre. Ta respiration s'apaise, tu essaies de reprendre une démarche normale malgré la chaleur contre ta joue et la douleur lancinante sur ton omoplate.
Jamais il n'osera te poursuivre au milieu de tant d'innocents.
Jamais ?
Tu entends des cris derrière toi, comme si le monde se déchirait. Instinctivement, tu accélères le pas pour de perdre encore plus dans le monde. Instinctivement tu cherches à te couler parmi les humains. Impossible qu'ici il t'atta…

Tu as à peine le temps de sentir la main saisir tes cheveux que déjà ta tête valse contre un mur, ton front s'imprimant douloureusement sur le béton.
Ça fait mal et tu vois des étoiles papillonner autour de ta tête. À tâtons, te doutant que tu n'as aucune chance de survie, tu cherches la lame glissée dans ton manteau. Tes doigts saisissent le métal froid alors que ton cerveau cherche instinctivement une porte de sortie. Tu pourrais attraper un otage humain, il n'oserait sans doute pas…
Il n'oserait pas quoi ? Ce fou a l'air de prêt à tout péter pour te défoncer la gueule. Tu te doutais que les ruptures faisaient mal, mais à ce point… C'est pas juste ton coeur qui est piétiné de regret, mais tout ton visage qui se retrouve explosé.

Le sang roule devant tes yeux, nul doute que c'est bien le tien cette fois. Mais tu ne te laisseras pas mourir sans te battre au moins un peu. Tu retrouves l'équilibre malgré la douleur et essaie de lever ton arme, prête au combat.
Mais soudain, ton adversaire disparaît. Tu crois avoir vaguement vu un éclair flou derrière lui, mais aucune certitude.

Tu ne cherches pas à comprendre ou à analyser la situation. Tu en as assez vu. Tu attrapes ta capuche d'une main pour la rabattre sur ton visage défiguré et tu files sans demander ton reste. L'eau tape fort contre le tissu de ta veste, comme des millions de blessures s'acharnant sur ta peau. Tu manques plusieurs fois de t'évanouir avant d'enfin te glisser dans un café.
Sans demander ton reste, tu vas directement dans les toilettes et ferme la porte à double tour avant de te laisser glisser contre elle. Tu restes un instant ainsi, à essayer de reprendre ton souffle, de calmer ton cœur dans ta poitrine.

En quittant Rosenrot, tu t'étais dit que tu risquais de faire de mauvaise rencontre. De devoir te battre pour sauver ta vie. Tu savais dans quoi tu t'embarquais et que ta vie ne tenait plus à grand chose.
Mais aussi vite ? Et face à un connard d'Orpheo ? Tu n'es clairement pas assez préparée.

Tu te relèves face au miroir et avec du papier, essaies vainement d'apaiser le sang sur ton front. Tu en as partout : dans le cou, les cheveux, les yeux. Tu vois rouge. Heureusement que ta tête est solide, même si tu te doutes qu'il te faudrait quelques points de suture.
Un coup d'œil à ta montre : il est 17h. Bientôt les cabinets médicaux fermeront et tu pourras espérer te glisser dans l'un d'entre eux pour éponger les dégâts et peut-être trouver un peu de sommeil. Ne surtout pas retourner à la maison de Green. Ne pas les mettre en danger, lui et Elaïa.
Après avoir difficilement fait un bandage avec des vieux bouts de papier autour de ta tête, tu tes poses un instant sur les toilettes pour vérifier quelque chose avec ton téléphone. Tu ne dois pas laisser filer ton agresseur.

Rapidement, tu te connectes à la base de données de Rosenrot avec l'identifiant de Bianco. Cet idiot a un jour laissé traîner un carnet avec tous ses mots de passe dans sa chambre et comme ça fait cinq ans qu'il semble ne pas les avoir changés... Tu remercies le ciel d'en avoir appris certains par coeur. Ça peut toujours servir. Ça sert.
Puis tu fais défiler les dossiers. Rien de très sensible ; il faudrait pour ça d'autres mot de passe que, ceux-là, Bianco n'a pas laissé traîner. Mais ce n'est pas ce qui t'intéresses, tu as juste besoin d'un visage et d'un nom.
Un rapide tri par âge et la face de ton agresseur apparaît en grand sur ton écran. Ainsi que son nom. Tu bascules alors dans tes messages en tapant le numéro d'un portable jetable de Green dans les messagers.

Déjà entendu parler de Ian Coley ?
Je veux sa peau. Alors si tu as des info…

Puis tu hésites un instant, tes doigts tremblant au-dessus du clavier. C'est tellement tentant…
Nouveau message, numéro connu trop par coeur.

La prochaine fois que tu voudras te venger de ton ex, viens de toi-même. Pas besoin d'envoyer ton pote Ian pour me casser la gueule.

Envoyé.

Cinq minutes plus tard tu es dehors des toilettes en chemin pour trouver un endroit pour te soigner. Derrière toi, tu abandonnes un évier rouge de sang et un téléphone exploser flottant au fond de la cuvette.