Rosie rodait comme a son habitude dans les méandres de sa ville. Les yeux vides les sens en alerte. Le pas des passants résonnait sur les dalles, emportant son esprit ailleurs. Elle rêvait, elle imaginait. Son prochain crime, le prochain cris. Les yeux de désespoirs. Allait-il demander grâce ? Se jeter à ses pieds comme un enfant ? *oui, oui il criera son pardon, implorera tes dons mais tu le l'écoutera pas, tu lui..*. Elle tituba se cogna contre un mur, mais la douleur ne vînt pas. Son corps glissa le long de la parois froide puis s'écroula dans les entrailles de Londres.
La rue était déserte, vide. Elle était seule, à l'agonie. Cette voix résonnait dans sa tête, elle lui disait et lui répétait *tu lui coupera la gorge, il mourra. Mais son sang, jamais ne te touchera... Il criera son pardon, implorera tes dons mais tu ne l'écoutera pas..* Rosie saisis une petite fiole. Violette ou peut être grise qu'est-ce que cela change ? Le liquide se répandit dans sa gorge, brulant. Le goût acre de sa liqueur la rassurait. Et la voix se tue. La jeune femme lâcha le flacon vide qui roula lentement a ses pieds. La tête renversée contre le mur les yeux clos, elle attendait.
Big Ben sonna. Neuf heures. Elle ouvrit les yeux, et se leva. En automate. Ses idées s'éclaircissaient au fur et a mesure que le poison entrait dans ses veines. Steven Walker serait au CIB de Fleet Street a neuf heure jusqu'à dix. Il était son cadavre. Sa prochaine cible. Ce qu'il avait fait ? Elle n'en savait rien. Qui il était ? Aucune idée. Elle savais juste que, comme tous les jeudis depuis deux mois, il se rendrais là bas. Y resterais une heure et rentrerais chez lui. Rosie connaissait ses habitudes, sa façon de marcher. Sa voix, sa famille. Tout ce qui pouvais l'aider. L'aider à le tuer.
Elle marchait d'un pas rapide a travers les méandres de cette ville. Elle la connaissais tant, toutes ses impasses, toutes ses ruelles. Personne ne la verrais passer jusqu'à Fleet Street. La bas elle serait une passante, comme les autres. Éliminera son cadavre et repartira. Inchangée, toujours parfaite. Personne ne saura car personne n'avais jamais su.

Fleet Street, neuf heures passé de cinq minutes elle devait ralentir. Il était trop tôt. Rosie leva les yeux, observa les alentours. Il n'y avait pas grand monde, des habitués sauf... Son regard s'accrocha à un jeune homme. Le teint pale, collé au mur d'un air niait. Elle s'arrêta. Laissa sur lui ses yeux avant qu'il fit volte face. Il n'était pas mal, plutôt bien formé sans défauts apparent mais il sentait la magie. Il empestait le sang. Celui qui coule dans les veines des sorciers, celui qu'elle détestait tant. Celui que sentait sa mère et ceux qui l'avaient tués. Il la fixait, dans les yeux. Pour qui se prenait-il pour ainsi la regarder ? Comment osait-il soutenir son regard. Il n'aurait pas dû, elle le savait. Il fallait qu'il s'abaisse, comme les loups devant leur chef, comme les chiens devant leur maître.
-baisse les yeux et marche droit.

Son regard devînt glacial, ce n'était pourtant pas la première fois qu'on lui répondait sur ce ton. Il se sentait surement supérieur avec sa magie. Que pouvait-il faire de si extraordinaire pour oser la défier ? La pointe d'insolence de sa voix lui donnais envie de vomir. De cracher son venin, de le faire retourné au néant. Conclure la boucle de sa vie, arrêter son temps comme elle l'avait fait tant de fois. Elle avait choisi et s'était mise au service de la dictature du temps. Elle n'était qu’exécutrice, elle rompait son cour selon les règles, selon ses lois.

-Non, tu es encore en vie. Mais on peux s'arranger.

Il ne lui fallait que trente secondes pour attraper son stylet, vingt de plus pour contrôler le jeune homme et lui planter sa lame dans la jugulaire. Le poison agirait en dix secondes. Si elle le voulait son temps s'arrêterait dans une minute. Si elle le voulait.

Elle l'observa s'envoler, ses ailes battre à toute allure le vent souffler dans ses plumes. Ses yeux se troublèrent et son cœur s'emballa. La rue se mit à tourner et virevolter, le temps ralenti. Elle connaissait cette sensation, ce moment où tous ses sens se décuplent où le sang boue dans ses veines. Ce moment où son corps réclame du sang, cet instant où il défini un nouveau cadavre.
Lorsque la rue devint de nouveau claire, l'étranger la regardant du haut de son immeuble les yeux rivés sur elle. Il voulait jouer. Personne aux alentours, aucun passant aucun bruit sinon celui de son souffle. Et maintenant ? L'immeuble était ancien, les pierres qui le constituaient saillantes et les grilles des fenêtres plutôt stables... Un jeu d'enfant.
Elle saisit d'un bond la rambarde du premier étage et commença son ascension. Chacun de ses mouvements calculés au centimètre, chacune de ses options analysées dans sa tête. Rosie se stoppa au dernier étage, juste sous le dernier balcon. Elle était invisible du toit, invisible du jeune homme. Elle s'accrocha au métal noir des barreaux, se laissa balancer doucement avant de se jeter sur l'échelle de secours six mètres plus à gauche. Elle ne resta qu'un instant à porté de vue avant de s'engouffrer à travers une fenêtre malencontreusement laissée ouverte. Elle traversa les pièces en quelques secondes aussi silencieuse que le vent.
Rosie connaissait ce bâtiment, l'agencement des appartements. Tous identiques formé d'un grand couloir qui partait du centre de l'immeuble pour rejoindre la baie vitrée de la façade, les pièces disposées le long de celui-ci.
Une fois le palier atteint, elle força la serrure de l'appartement opposé. Un homme se trouvait dans le couloir, encore en peignoir une tasse à la main. Il comprit vite. Se jeta à terre avant que le couteau ne siffle au dessus sa tête. La vitre se brisa et les morceaux de verres s'envolèrent tels des diamants dans la cour intérieur.
Elle sourit, jubilant, avant de s'effacer vers le toit du bâtiment. arrivée en haut elle ouvrit silencieusement la porte avant de découvrir le spectacle jouissif auquel elle s'attendait. L'étranger, sans défense, les yeux fixés sur le mur interne de l'immeuble. Lui montrant son dos pâle et immaculé bientôt tacheté de rouge.

Ses yeux avait perdu de leur flamme, fixés sur le liquide rougeâtre qui coulait le long de sa jambe. Était-ce son sang ? Elle ferma les yeux, son corps toujours en action. Il déployait machinalement ses armes, glissait le long de son adversaire mais elle, elle n'était plus là. Au milieu de cette violence elle se perdait dans ses pensées. Comment était-ce arrivé ? Son sang coulait, lui brulant la peau mais elle n'avait pas mal. La douleur était muette. Un nouveau coup la projeta au sol, ses paupière toujours closes s'ouvrirent brutalement. Elle se releva lentement observant l'homme revenant à lui, son pelage se résorbant, laissant place à de futiles bandages.

-Je me nomme Ange

Rosie reprit soudain conscience, arraché par la voix du jeune homme elle en avait oublié la sienne. Son cadavre. Sa mission, tombée à l'eau par la faute de ce sorcier. La jeune femme l'observa alors attentivement, captant chacun de ses gestes chacune de ses attitudes, tout défaut serait un arme toute erreur... Bingo.
Un son sacré retenti à ses oreilles, celui de son sang, son propre sang s'écrasant goute à goutes au pied de son adversaire. Elle sourit, ou plutôt lui sourit, lui rendant ainsi son cynisme. Il avait fait jaillir son sang, à ses risques et périls.

-Je te donne trois heure, Ange. Trois heure avant que tu devienne fou. Je ne suis pas une sorcière mais mon corps est un poison. Tu pensais pouvoir épandre mon sang ? Me blesser ? Ton paris est réussi tes mains en sont couvertes mais à quel prix ?

Elle lu la crainte dans le regard de l'étranger, la crainte qu'elle lisait dans le regard de ses cadavres. Peut être moins poussée, moins violente, mais elle était belle et bien là. Cependant il ne méritait pas ce sort, il devait vivre. Il était pour la jeune fille une clé qui la mènerait à son père. Un pion qui lui donnerait vengeance.

-Tu as trois heure pour m'aider à réduire en cendre Steven Walker. Le travail bâclé d'amateur me dégoute, mais ton don me sera utile pour rattraper le temps que tu m'as fait perdre. Je veux que tu goutes la jouissance de mon mal, que tu regardes un humain mourir et me supplier sa vie. Alors tu comprendras que tu n'aurais jamais dû me défier. Si il meure tu vivras. Tu peux cependant partir, ou continuer ce combat, mais d'en trois heure exactement tu mourras. Fait ton choix.

7 days to the poisons !

La vue de son sang parut déstabiliser l'étrangère. Et sembla comme prise d'une transe, Ange s'effaça pour la regarder.
Soudain, elle le regarda fixement, comme si elle avait repris une certaine forme de connaissance, que la voix du jeune homme se présentant l'avait tirée du choc d'être blessée. Elle devait être habituée à toujours gagner. A être celle qui gardait la peau lisse et blanche, quoi qu'il arrive. Le sang qui coulait n'était jamais le sien. Pas cette fois-ci.

La voix de la jeune femme retentit, acide, pleine de venin. Trois heures ? Que voulait-elle dire par cette énigme ? Ange se rendit compte soudain qu'il lui avait donné son vrai nom. C'était peut être que le visage de l'inconnue lui avait inspiré la franchise. Le jeune homme pâlit, et regarda le sang sur ses mains. Il n'y en avait que peu, et sous les ongles, mais du sang quand même.

-Que veux-tu dire ?, demanda-t-il d'une voix blanche, qu'il tenta de teinter d'assurance.

Il se sentait tout à coup perdu, comme dans un autre monde, le monde de la jeune femme, sa réalité. L'inconnu. Il prit une profonde inspiration. Elle lui parla de tuer un homme, elle lui répéta qu'il allait mourir dans trois heures. Il sentit sa tête lui tourner. Elle ne l'avait pas touché, elle ne pouvait pas l'avoir empoisonné. C'était impossible. Il tendit une main vers le visage de l'inconnue. Il effleura sa joue, puis son bras retomba le long de son corps. Ange plongea son regard dans le sien, et demanda :

-Qui es-tu ? Pourquoi veux-tu que je tue pour toi ?

Il n'avait jamais tué, même s'il se doutait qu'il serait bientôt temps pour lui de le faire. En tant que traqueur, il tuerai du sorcier noir, ou se ferait tuer à son tour. C'était ainsi. Et là, l'inconnue lui proposait un marché, comme un entrainement, une occasion de racheter, son elle, une faute. Mais il lui fallait comprendre. Trois heures ? Pourquoi ? Et surtout, comment étais-ce possible ?

- Qui suis-je ? Rien de plus qu'une simple mercenaire qui offre ses soins aux plus offrant. Je te répète mon offre décide toi vite où il sera trop tard.

Dans sa tête les informations se bousculèrent, il fallait trouver un autre plan d'attaque, une nouvelle opportunité.

L'horloge sonna onze heure, il lui restait une chance, Steven Walker devait se rendre à une réunion dans un petit quart d'heure. C'était un homme prévoyant, jamais en retard. Il sera à l'heure et même en avance. Elle le voyait déjà sur le trottoir attendant son taxi. Il lui faudrait 2minutes pour redescendre du toit, deux de plus pour provoquer un accident avant que le taxis n'arrive. Quelques secondes pour se débarrasser du conducteur, proprement. Et seulement dix minutes pour rejoindre le point de rencontre entre elle et son cadavre.
Son regard se posa alors sur le jeune homme. Une gène, un boulet. Elle haïssait les boulets. Il ne lui servirait finalement à rien. De toute façon il mourra, son sang avait déjà pénétré le cœur du jeune homme dans quelques heures...
*il ne mourra pas*.