"Nanabozo ayant toujours habité avec nous, tes regrets ombrageux sont sincères et Isis les lavera enfin" KG

- Aïe !

Ambre se releva douloureusement parmi les débris de planches. Elle se trouvait dans une petite cabane au milieu de la forêt. Une cabane, ou plutôt ce qu'il en restait, car elle l'avait bien amochée en s'écrasant sur le toit...
En même temps, elle n'avait pas vraiment pu contrôler sa chute. Une simple couverture pour se ralentir, il fallait avouer que c'était un peu léger pour maîtriser parfaitement la situation... Mais bon, elle pouvait vraiment pas les sentir ces allemands. Au sens propre comme au sens figuré. Parce qu'à dix dans un petit hélicoptère ils sentaient au moins dix fois plus mauvais qu'une zibeline en rut. Et puis quoi ? Il fallait se calmer aussi ! Juste parce qu'elle avait pas de papiers... bon d'accord, elle avait pas pu changer de vêtements depuis le Pakistan et sa tenue de terroriste avait dû leur faire peur. Les trois poignards, l'arc, le Katana et les autres armes qu'elle avait sur elle aussi. Mais c'était pas une raison pour lui tirer dessus ! Oui, elle avait dégainé la première, mais l'autre pervers n'avait qu'à pas la tripoter ! Ils l'avaient eue par derrière en plus, avant qu'elle ait le temps de faire appel à son don. BAM ! une balle dans la cuisse. Comment elle était censée se battre après ? Elle en avait quand même tué trois pour faire bonne figure avant qu'ils arrivent à l'immobiliser. Après ça, pas étonnant qu'ils aient été de mauvaise humeur...
Ils l'avaient menottée et foutue sans cérémonie dans l'hélico, et avaient décollé pour l'emmener "Im Verhör", comme ils disaient. Elle s'était sentie un peu bête comme ça à se prendre des baffes toutes les trois secondes, les mains coincées derrière le dos, sans pouvoir rien faire. Mais quand le froid de l'altitude avait commencé à se faire sentir, elle avait profité que les allemands s'occupent à sortir des couvertures pour passer les bras par dessus sa tête. C'était pas très agréable, il fallait se déboîter les deux épaules pour que ça passe, mais elles se remettaient tout de suite en place et ça donnait d'excellents résultats. Heureusement, le froid les avait rendu encore plus cons qu'ils l'étaient déjà et avant qu'ils comprennent qu'elle était en train de s'échapper, elle avait pris une couverture, attrapé le sac qui contenait les affaires qu'ils lui avaient piquées, ouvert la porte et sauté dans le vide.
La chute avait pas été évidente. D'abord, elle avait du tenir la couverture par un bout avec les dents pendant qu'elle s'attachait comme elle pouvait le sac dans le dos. Après, il avait fallu qu'elle arrive à choper les quatre coins de la couverture pour en faire un parachute improvisé. Ça avait plus ou moins marché, mais ça l'avait suffisamment ralentie pour qu'elle ait le temps de se préparer à l'atterrissage. En se concentrant sur son don pour rendre son corps résistant à la chute, elle avait pu s'en sortir indemne.

On pouvait pas en dire autant de la cabane. En la voyant, elle avait bien essayé de se diriger dessus, mais elle avait pas prévu de s'y écraser. Et maintenant le toit ressemblait plus à grand chose...
Ambre regarda autour d'elle. Dans l'unique pièce, sous les planches cassées, il y avait un matelas en mousse bleue, un tas informe qui ressemblait à un duvet, un sac à dos de voyage et un petit réchaud à gaz...
Merde. Elle avait atterrit chez quelqu'un. Et ce quelqu'un risquait de pas être très content quand il rentrerait chez lui. Il valait mieux qu'elle s'en aille le plus vite possible. Elle prit ses affaires, la couverture, fouilla rapidement dans le sac pour en ressortir quelques boîtes de conserve et un plan de la région - elle lui avait déjà détruit son abri, autant aller jusqu'au bout - et se prépara à sortir quand, jetant un coup d’œil par la fenêtre, elle vit un homme arriver en courant dans sa direction...

Merde. Trop tard.

" - Un jour ou l’autre les choses changent.
- Ouais et ça sa craint ! "

Le jeune esclave ferme les yeux un instant. Il n'a rien à faire, rien du tout, mais Anja l'a envoyé pendant une semaine super loin de tout. Juste pour le mettre à l'épreuve, affûter ses sens. Ce qui l'agace au plus au point. Jake, toujours si parfait est envoyé dans une pauvre forêt ? Ouai, ça l'agace profondément. Mais il ne dit rien - que pourrait-il dire ? - mais de toute façon, demain, c'est finit. Le voilà donc dans une foutue cabane, mais c'est son dernier jour. Il a bien perdu six ou sept kilos en une semaine. Il sait chasser, bien sûr, là n'est pas le problème. Mais quand on a rien pour chasser c'est franchement dur. Alors à main nues il a eut une biche, et c'est tout. De la viande, d'un seul animal, c'est dur.
Très dur.
Il doit avouer que ses réflexes sont devenus plus rapides, sont ouïe plus fine. Sa vision plus perçante et son toucher plus précis. Enfin bref, ok, ça lui a fait du bien au final, parce qu'il doit faire plus gaffe et moins se laisser vivre. Bref. Il reprend le chemin de sa cabane. Il a trouvé deux pommes et les a dévorées sur le champ. Affamé. Vraiment, vraiment très affamé. Mais du coup, il a l'impression d'avoir mangé comme dix. Ce qui est plutôt surprenant.
Il revient en courant - à la base tranquillement - vers ce qui fut, un jour, l'endroit où il pouvait dormir à peu près tranquillement. Il sursaute. Y'a un tas de planches à la place. Un OVNI serait donc tombé dessus ? Avec autant de précision ? Chapeau bas au lanceur.
Vraiment.
Il court donc avec un intérêt bien plus développé. Sa maison ne lui aurait servit qu'une seule nuit encore, il ne prendra même pas la peine de la reconstruire. Il n'a pas peur, à moins que l'OVNI soit armé.. l'OVNI n'est sans doute pas humain pour commencer. Foulées souples et rapides il arrive vite et oh, SUPRISE GUY ! Une jeune fille. Il hausse un sourcil, se met de profil pour que sa surface d'impact sois moins importante, vérifie qu'il n'y ait pas d'arme à feu, ne vois pas de lame mais est sûr qu'il y en a une quelque part. Il se méfie. Elle a pas l'air si dangereuse mais ne sait-on jamais. Il serre les dents. Puis sourit. Parce qu'elle n'a théoriquement rien contre lui et ne sait pas qu'il est esclave. Il est sûr qu'elle n'est ni de Croix, ni de Rosenrot. Il ne lui doit rien.

" C'était ma maison à vrai dire.. "

Il ne se pose même pas de question sur comment elle a pu arriver là sans se casser les os. Non. Cela ne lui pose aucun problème de compréhension, il n'est pas de ceux qui ont besoin de tout expliquer pour pouvoir s'adapter. C'est ainsi, le comment du pourquoi, il s'en tape le cul sur la banquise voyez-vous. Il prend une inspiration avant de se détendre un peu plus rapidement. Si elle avait vraiment voulut le tuer, ils seraient déjà en train de lutter. Alors du coup, il fait quand même celui qui est curieux. Je dois vous avouer qu'il n'a quasiment jamais le droit de l'être. Au moins, dans cette semaine il aura eut quelque chose d'intéressant.
Enfin.
Il l'attendait, ce miracle. Et depuis un bon bout de temps déjà. Il est sûr qu'Anja sera contente de voir arrivé un esclave amaigri mais affûté. Il se fou de ce qu'elle pense, tant qu'elle n'est pas trop injuste. Enfin, bien sûr, l'injuste Jake, il connait pas vraiment.
Avouez tout de même que c'est un peu intriguant, une jeune fille, les cheveux blonds encadrant son visage fin. Il sourit, elle est assez jolie. Il aimerait surtout pouvoir s'occuper cette journée avant de rentrer tranquillement. Quelqu'un devrait l'attendre sur la route, devant cette forêt qui est du genre immense. Puis il la détaille. Couverture. Sac. Affaires. A lui. Son sourire s'éteint. S'efface en quelques centièmes de secondes. Il serre les poings. Ses muscles se tende. Ses respirations se ralentit.
Il se dit que ce qu'elle a prit aurait peut être été la seule chose qui le maintenait en vie. Encore les boîtes de conserve elle s'en fou, le comique qui lui a filé n'avait pas prévu d'ouvre boîte.
Ses lèvres se pincent.
Il saute sur la jeune fille.

" Je suis le maitre de mon destin, le capitaine de mon âme. "

L'homme entra en trombe dans la cabane à moitié défoncée. En l'apercevant, il se mit instinctivement en position défensive, le corps de profil pour encaisser le choc qu'il semblait attendre. Mais Ambre n'avait aucune raison de l'attaquer, elle préférait toujours essayer la manière diplomatique, au cas où ça marcherait...
Il se détendit légèrement et dit tout simplement :

« C'était ma maison à vrai dire... »

Une remarque absolument inutile dans le fond. Elle savait très bien qu'elle venait de fracasser ce qui représentait sûrement son seul abri. Mais il ne paraissait pas énervé, comme s'il ne faisait que constater. Ambre se relâcha un peu. Elle s'était attendu à ce qu'il lui saute dessus pour l'égorger. Mais elle n'était pas à l'aise pour autant. Car l'inconnu lui paraissait étrangement... impersonnel. Son expression ne montrait rien d'autre qu'un total manque d'intérêt, avec malgré tout une curiosité timide, enfantine presque indécelable. Elle crut même deviner dans ses yeux un air de soumission - comme celui qu'affichaient les chiens dressés qu'elle avait vus dans un camp militaire en Pologne. Impersonnel oui c'était ça. C'était peut-être un zombie ? Elle se souvenait de ceux qu'elle avait vus au Cameroun, les yeux vides... non, ce n'était pas ça. Lui au moins avait quelque chose à l'intérieur, ça c'était sûr. Enfin bon... puisqu'il semblait disposé à faire la conversation - ou du moins à ne pas lui taper dessus - , elle estima que c'était le bon moment pour se présenter, impersonnel ou pas.

« Je m'appelle Ambre. Désolé pour ta maison, je suis tombée dessus... »

Elle commençait tout juste à se réhabituer à l'allemand. C'était une langue assez agréable à parler, mais qui comme toutes demandait un petit échauffement avant que ça coule plus spontanément. Heureusement, son père lui avait appris suffisamment cette langue pour qu'elle arrive à se faire comprendre. Bon. Elle lui avait quand même fracassé sa cabane, elle allait pas le laisser tout seul dans sa merde !

« Si tu veux je peux t'aider à répar... »

Avant qu'elle ait fini sa phrase, l'homme posa les yeux sur les affaires qu'elle tenait à la main. En un dixième de seconde, le vague sourire qui flottait sur ses lèvres se transforma en une expression meurtrière et il bondit sur elle.

Merde ! Elle avait oublié qu'elle avait encore les affaires qu'elle voulait lui voler ! Le choc la projeta à terre, et elle se retrouva écrasée sous le poids de celui qui était désormais son adversaire. Alors qu'elle se débattait pour écarter les mains qui s'approchaient résolument de sa gorge, elle entendit le cri dément dément de l'homme.

« Je suis le maître de mon destin. Le capitaine de mon âme »

"Etrange..." pensa-t-elle alors qu'elle se dégageait en tordant violemment le bras de l'homme. "On dirait une sorte de formule toute faite..." Elle se releva d'un bond et s'éloigna de l'homme encore par terre. "... Comme si le simple fait de prononcer cette phrase allait en faire une réalité..." La sangle de son sac lui avait coupé le cou, mais au moins elle gardait ses armes à proximité. "En tous cas, il est complètement taré celui-là !" Au moins, elle était prête, à présent. Elle se réprimanda mentalement. Il fallait toujours qu'elle soit prête à réagir ! Elle ne pouvait pas se permettre de se relâcher sa vigilance sous prétexte que l'autre se détendait !

Elle aurait pu s'enfuir, mais quelque chose la retenait. Elle était sûre que l'homme était magique. Mais c'était très étrange, car l'aura caractéristique qu'il dégageait semblait étouffée. On aurait presque dit un simple innocent. Elle voulait en savoir plus sur lui avant de s'en aller. Et elle ne risquait plus rien, il ne l'aurait plus par surprise. Mais pour en apprendre plus, il fallait d'abord le calmer.

« Excuse-moi ! Je ne voulais pas te voler, je... voulais juste dégager tes affaires de sous les planches, pour ne pas les abimer plus ! Si tu veux je peux t'aider à réparer ta cabane. Mais dis-moi qui tu es d'abord ! »

Grossier mensonge. Mais bon, ça restait crédible, alors autant essayer...