Le plus méchant des méchants [PV Jackichou]

Ses mains tremblaient. Tremblaient. Incontrôlable. Et ça c'était inadmissible. Ses propres mains ne pouvaient pas la trahir. Elle devait garder le contrôle de chaque partie de son corps. Agacée Anja gratta une allumette afin de pouvoir donner vie à une faible lueur au bout d'une chandelle. Arrachant une feuille, elle la jeta sur la table. Le bouchon de sa bouteille d'encre subit le même sort et, enfin, la jeune femme pu se permettre de tremper le long bec argenté dans le rouge écarlate.
Sa main ne tremblait plus. Elle dansait sur le papier, étalant les mots, les sentiments. Etalant sa vie.

Little Angleton, 30 juillet 2011
Chère Maman,

Tout commençait normalement. Une journée banale dans ce monde pourri dans lequel je vis. Pourri par tous ces humains qui ne méritent pas de vivre, pourri par ton absence, pourri par le soleil qui illuminait Little Angleton. Je n'aime pas le soleil. Tu sais qu'à ton enterrement il faisait beau ? Une véritable offense. Moi je voulais qu'il pleuve. Le ciel aurait dû pleurer ta mort. Le soleil n'a fait que sourire.
Une journée banale donc. Sauf que ce jour ci, je reçu un ordre de la Croix. La Croix c'est ma vie, c'est ma mort. C'est ma vengeance, c'est ma souffrance. Je les hais et je les aime. C'est eux qui t'ont tué maman. Ils t'ont tué à cause de moi. C'est eux qui ont tué papa aussi. Mais lui ils l'ont tué à cause de lui même.
Tout ça n'a aucune importance. Papa était une ordure, j'ai aucune envie d'en parler. Ni aujourd'hui, ni jamais.
Une journée banale pour un ordre un peu intrigant. D'habitude, on me commande d'aller tuer des gens. Un boulot facile, d'autant plus que la plupart n'ont aucune disposition pour la magie ou alors sont des novices. Un coup de lame bien placé et plus de problème. La Croix est contente, moi j'ai eu ma ration de sang pour la période et tout va bien.
Sauf qu'aujourd'hui c'était pas ça.
C'était pas un ordre de mort. Il fallait que je retrouve quelqu'un. Un certain Jack Weiss. D'après la Croix, il s'était caché à Little Angleton. Sans doute à la suite d'une connerie, il avait dû avoir peur et se planquer ici. Quel lâche ! Et surtout il n'a pas compris que la Croix a des yeux et des oreilles partout. Il est impossible de se cacher. Il aurait dû mourir pour cet affront.
Mais le sang de cet homme, ce n'était pas moi qui pourrais le faire couler. Pas aujourd'hui tout du moins. Car cette pourriture avait l'honneur d'intéresser certains chefs qui demandaient un retour au bercail du poulain égaré... Le pourquoi n'était pas précisé, mais aucune importance. Ce gars était chanceux. Très chanceux. Sa mort n'était pas au programme. Dommage.

Dans les ordres, il y avait aussi une photo. Là j'ai eu mon premier choc. Ce visage, je l'avais déjà vu. Il ressemblait tellement à papa. Pas les yeux et les cheveux. Mais cette lueur imbécile de fierté qui brillait dans ses yeux. Et les traits... Sans le connaître, je haïssais déjà ce Jack. C'était un lâche et il ressemblait un peu trop à papa à mon goût. Et puis c'était un homme.
Il ne méritait que mon dégoût.

J'ai mémorisé le visage et brûlé la photo. Hors de question de garder un tel souvenir. De toute façon, il faut effacer les documents que m'envoie la Croix. Surtout ce genre de choses qui rappellent de si mauvais souvenirs. Puis j'ai enfilé un jeans, un top bleu passe-partout et une veste en cuir avant de me glisser jusqu'au Lonely Ghost. Tout le monde va dans ce bar. Pourquoi pas lui ?
Je me suis plongée dans la lecture d'un journal. L'humanité ne va pas très bien maman, elle est malade. Les japonais ont de la peine à se remettre de Fukushima, l'économie américaine se casse la gueule, un attentat a tué pas moins de 92 personnes... Comme c'est comique. Les humains ont un don pour s'autodétruire. Ils n'ont même pas besoin de nous finalement. Mais c'est plus drôle si on leur donne un petit coup de main. On peut les voir souffrir et nous supplier. "Non, non, ne me tuez pas ! Je vous en prie, je ferai tout ce que vous voudrez !" Tout ? Alors meurt imbécile.
Le problème c'est que les nouvelles du jour étaient trop délectables. Je me suis plongée dans ce journal et je n'y suis plus ressortit avant un bon moment. Et quand j'ai relevé la tête, il était là. Tout près.
Et il lui ressemblait tellement.

Pas le temps pour les sentiments, pas le temps pour les sentiments. Posant une pièce sur la table pour payer mon café, je me suis relevée pour me diriger d'un pas nonchalant vers sa table. Malgré sa ressemblance frappante avec papa, je dois pourtant dire qu'il était beau. Mais bon, c'était un homme. Les hommes sont des êtres abjectes. Même les sorciers sont trop indignes.
Ils me dégoûtent. Et il me dégoûtait.
J'ai tiré la chaise en face de la sienne, mon bras a rapidement passé sous la table, un poignard se libérant de ma manche menée par ma télékinésie pour venir glisser jusqu'à ce fameux Jack. S'il tentait de s'échapper, la lame se planterait dans ses entrailles. Ne t'inquiète pas pour lui maman, je ne l'aurais pas tué, j'aurais évité les organes vitales. Mais pas les endroits douloureux. Disons qu'il aurait juste eu... très mal. Vraiment très mal.

- Ne bouge surtout pas ou tu risques de souffrir. La Croix te réclame. Tu as donc tout intérêt à me suivre sans faire d'histoire ainsi ça nous économisera du temps et de la salive.

Sur le moment, j'espérais vraiment que cet inconnu me suivrait facilement. J'étais lasse d'utiliser la force, qui plus est si ce n'était pas pour tuer, ce n'était pas très intéressant...
Mais bon, je ne savais pas encore à qui je faisais face.

[...]

La main d'Anja a cessé de danser l'espace d'une seconde. Un mauvais vent un peu trop fort a fait vaciller la flamme de la bougie un peu trop vite et la lumière s'est reteinte. Agacée, la jeune femme use de son pouvoir pour refermer la fenêtre d'un coup sec, si bien que les carreaux bougent presque, le cadre en bois s'entrechoque avec encadrement et la fenêtre manque de se fendiller. Puis les allumettes se mettent à bouger toute seule, menée seulement pas le don de la jeune femme, jusqu'à ce qu'une faible lueur permette enfin de rallumer la chandelle.
Il est mal de jouer avec le feu.

The Lonely Ghost. Seul bar de Little Angleton, mais à dire vrai, Jack est bien content qu'il y est un bar dans ce coin perdu. Pourquoi donc? Pour boire du whisky bien sûr. Il est là, assis à une table. Il a le barman dans le colimateur, et une jolie blonde qui lit un journal dans le rétro. Mais, plus important, il a un verre de whisky, devant lui. Et ça, ça évince toutes les autres merveilles de la pièce à ses yeux. A part peut être Pearl, cachée quelque part sous ses fringues.

Whisky, whisky, whisky, whisky, whisky

Et ça continue en boucle jusqu'à ce que sa main droite atteigne le verre, et le porte ensuite à ses lèvres. Verre qu'il vide consciencieusement, méthodiquement, et lentement. Pour se donner bonne conscience... Non fait, pour faire croire aux autres qu'il a bonne conscience, il y a un journal sur sa table.
Journal qu'il n'a même pas encore déplié. C'est juste pour faire genre, faire croire qu'il n'est pas venu juste pour s'enfiler un, deux, trois, quatre verres, pourquoi pas plus? Dans tous les cas, le verre est rapidement fini. Trop rapidement. Jack le repose, et le fait glisser sur la table jusqu'au bord, où il se penche juste au dessus avec une mine dépitée

J'irai acheter une bouteille. Ça vaut aussi cher que le journal et un verre, quelle arnaque. Mais là y'a plus de whisky. Pourquoi le whisky est toujours à sec quand on a besoin de lui?

Bois moins Jack, y'en aura peut être plus. Il demande un autre verre, et daigne enfin jeter un oeil sur son journal. Oh, c'est pas la joie à Londres. Londres, Londres, Londres... Cette chère Londres. Dieu qu'il prie bien fort pour que jamais l'on apprenne son implication dans les derniers évènements au sein de Croix. Parce que les exorcistes qui ont attrapé Luka, il était sencé... Les tuer. Ou tout du mons les suivre à la trace et indiquer régulièrement leur position.
Manque de chance, il avait été "appelé ailleurs".
Intérêt personnels qui passent bien avant le reste, comme toujours. C'est à se demander comment il peut être encore ne vie à l'heure actuelle. Toujours à s'attirer des ennuis, nombre de gens qui veulent sa peau, et pourtant toujours là. Mais après tout, Jack est particulièrement imprévisible. Alors, il mourra bien un jour, oui.
Mais quand personne ne l'aura prévu.
En parlant d'ennuis, voilà que la belle blonde qu'il ne reluquait plus depuis quelques secondes s'approche de sa table, et s'assoit même en face de lui. Jacky la regarde faire, perplexe.

Une touche si facilement? Je suis un être plus génial encore que je ne le pensais.

La jeune femme s'assoit, et un mauvais présentiment frappe soudain Jack. Son intuition est la personne qu'il croit le plus au monde. Aussi, au moment où il voit la jeune blonde glisser une main sous la table, il sort par réflexe sa propre dague, Pearl. Grand bien lui fasse, car au léger tintement entendu une seconde après, l sait qu'il vient tout bonnement de parer une autre dague.

- Ne bouge surtout pas ou tu risques de souffrir. La Croix te réclame. Tu as donc tout intérêt à me suivre sans faire d'histoire ainsi ça nous économisera du temps et de la salive.

La Croix, déjà? Tout le monde me veut, il n'est même plus possible de prendre des vacances. La dame ne veut pas jouer, quel dommage. Sa dague ne sera jamais aussi belle que ma Pearl, même sans la voir. Maintenant que je suis assuré d'être encore entier, je peux servir à la demoiselle un sourire charmeur. Jolie donzelle, dommage que toutes les roses aient des épines. Et... Ces yeux...

Les yeux l'intriguent, le voilà à détailler la jeune femme sans retenue. Jack n'a jamais été quelqu'un de très discret. Et puis de toute façon, c'est la demoiselle qui a commencé.

- Dis moi trésor, je ne t'aurais pas déjà charmée par le passé? Super technique d'approche, au fait.

Il bouge légèrement sa dague pour montrer de quoi il parle. Le serveur approche alors pour déposer sa dernière commande, et il ne peut retenir une petite expression d'étonnement à voir comment les deux se scrutent. Enfin, surtout le visage de Jack. Ce dernier le renvoie d'un coup de tête avant de se pencher en avant vers la demoiselle pour lui souffler:

- Les gens vont croire qu'on fait des choses sous la table trésor, ne voudrais-tu pas retirer ta lame de là où elle n'a rien à faire? Après nous pourrions peut être disons, discuter calmement.

Jack est décidément un attire ennui. Même quand il est sage. Fichue Croix, ce qu'ils pouvaient être lourds quand ils s'y mettaient. Le sorcier se recule pour se caler dans son dossier, non sans attraper son verre au passage et en boire une gorgée avant de le reposer. Jack ne perd jamais le nord.

- Dis moi, que me veulent ces gens?

La distance mise avec la dame est bien volontaire, pour qu'elle contrôle ses paroles en ayant à les ennoncer plus fort pour se faire entendre. On ne sait pas ce qui rode à Little Angleton.

Le barman est louche.

Il suffisait d'un seul regard sur les gens pour savoir si Anja les détesterait ou pas. Non. Faux. Elle n'avais même pas besoin de ce regard, en fait elle les détestait tous. Mais lui... ce Jack qu'elle avait rencontré le jour même... C'était pire que de la haine. Rien que le souvenir de son visage la mettait en colère.
Et la plume continue à danser sur le papier.

[...]

Ce qu'il dégageait... c'était de l'arrogance. Une sale arrogance qui ne méritait rien d'autre que de la haine en réponse. Chaque particule de mon corps aspirait à cette haine foudroyante qui, je l'espérais follement, pourrait le réduire en poussière. Mais jamais la chair ne devint grise et je dû donc continuer à supporter cet homme si... agaçant.

- Dis moi trésor, je ne t'aurais pas déjà charmée par le passé? Super technique d'approche, au fait.

Et tu sais ce qu'il a osé faire à ce moment maman ? Utiliser une autre lame pour bloquer la mienne. Je savais bien que j'aurais dû lui enfoncer mon arme dans le bide directement. Cela n'aurait malheureusement pas été très discret et la Croix n'aurait pas forcément apprécier. Toi non plus maman. Car je te connaissais plus subtile que ça. Tu aurais su quoi faire face à tout son arrogance.
Maman, si seulement tu étais encore là...
Mais j'étais seule face à cet imbécile vantard qui croit pouvoir m'appeler "trésor" sans souffrir des conséquences.
Alors je suis restée de marbre à le regarder froidement. Pas un tressaillement, pas un battement de cil. J'étais la plus forte face à lui, la plus tenace. Droite, droite, droite. Il ne pouvait rien me faire, ce n'était qu'un sorcier stupide et arrogant. Droite. Il ne faisait pas le poids face à mon calme et à mon sang froid. Droite. Juste le foudroyer du regard. Pas dire un mot, pas un seul...

- Les gens vont croire qu'on fait des choses sous la table trésor, ne voudrais-tu pas retirer ta lame de là où elle n'a rien à faire? Après nous pourrions peut être disons, discuter calmement.

Je l'ai regardé se reculer afin de se caler contre sa chaise. Etais-ce de la fierté dans son regard ? Il était content d'avoir pu parer mon coup, content de sa petite phrase, content de pouvoir m'appeler trésor ?
Il n'avait rien compris à la vie.
Mais qu'il compte bien sur moi pour la lui apprendre en long, en large et en travers. Je n'ai pas bougé mon arme, maman. Pas d'un seul millimètre. Il ne m'aurait pas avec des mots.

- Elle est parfaitement là où elle doit se trouver. On peut aussi discuter calmement avec elle entre nous.

Un coup d'oeil à son verre. C'était du whisky... Je n'ose pas imaginer cet homme saoul. Tu imagines tout ce qu'il a sans doute fait subir à des femmes. Je n'aime pas les humaines, mais ce n'est pas pour autant que j'apprécie ces hommes qui se permettent des le prendre un soir dans leur lit avant de les jeter. Et c'est bien son genre à ce Jack... Il sentait - que dis-je ? -, il puait le dragueur venu uniquement dans le but de trouver de quoi prendre son pied le soir même. Dégueulasse. Répugnant. Rien que pour ça, il faudrait l'abattre.

- Dis moi, que me veulent ces gens?

Ces gens... malheureusement ils ne lui voulaient aucun mal. Pas de mort cette fois Anja... les ordres sont les ordres. Quel dommage. Je l'aurais bien égorgé celui là, je crois même que cela m'aurait fait sourire. Ca fait bien longtemps que je ne souris plus... Mais pas de mort Anja. Juste le ramener à la Croix. Ils ont besoin de lui vivant, quelle tristesse. Mais peut-être qu'après ils voudront bien... ? Je me suis dit qu'il fallait que je leur demande.

- Si tu te décidais à me suivre, tu le saurais...

Mais pourtant, avant même de pronnoncer ces paroles, je savais qu'il n'accepterait pas. Trop fier pour cela. Alors qu'il aurait été tellement plus simple pour lui de me suivre... quel dommage, je vais devoir utiliser d'autre moyen. Plus douloureux. Dommage qu'on soit dans un bar, il ne faut pas que je le fasse trop crier.

[...]

Dommage en effet... les cris des victimes sont pourtant si délectables pour Anja. Elle ne tue pas pour le plaisir, même si elle prend un certain plaisir à tuer. Cela lui rappelle qu'elle n'est pas la seule à souffrir.
Même si elle même adore souffrir.

Petit instint adoré me dit que j'ai encore fait une connerie. Maman ne va pas être contente, mais qu'y puis-je si les ennuis viennent me chercher? Oh, la prochaine fois que j'ai à me cacher, ça sera sur un bâteau en pleine mer, qui m'emmènera sur une île inhabitée. J'emmènerai une réserve de whisky, et pour le reste... J'irai d'île en île.
Dans mon esprit, ça sonne super bien. Il faut juste empêcher mademoiselle de me vider de mon whisky par l'intérieur, avec sa dague.

Mine de rien, Jack est déjà en train de chercher un plan pour s'échapper. Il n'allait pas lever la main sur une femme au milieu d'un bar -d'autant plus que son pouvoir premier n'était du genre offensif-, et puis, il était venu chercher un peu de calme ici. Le fait que la jeune femme reste de glace devant lui ne lui fait ni chaud ni froid. A dire vrai, vu son air de psychopathe en puissance -dans l'esprit de Jack, elle a de grandes dents, des griffes, et elle boit du sang, oui madame-, c'est même tant mieux. De toute façon, il flirte et drague sans même s'en rendre compte, plus fort que lui.

- Elle est parfaitement là où elle doit se trouver. On peut aussi discuter calmement avec elle entre nous.

Croix abrite des cas sociaux.

Toi le premier. A nouveau, Jack l'observe. Il ne parvient pas à se défaire de ces yeux qui lui semblent on ne peut plus familiers. Non, Jacky n'est pas du genre à se souvenir de ses conquêtes -ou si peu-, et puis la demoiselle n'a de toute façon pas l'air d'être la conquête de personne sur Terre. Pourtant, les yeux...

Ça fait mauvais film d'horreur tout ça. Elle a des yeux, on dirait ceux de papa. Finalement, je savais que l'air écossais ne me ferait pas de bien, même si maman affirmait -en me menaçant avec sa dague- le contraire. Merci m'man.

- Elle serait bien plus à l'aise rangée au chaud, mon ange. Ils me veulent vivant, non?

Cette fois Jack affiche clairement un sourire en coin très satisfait de lui même, parfaitement au courrant que Croix le veut vivant. Ça fait des années qu'ils le veulent vivant à cause de son don, et de son pouvoir qui leurs sont mine de rien terriblement utiles. C'est la seule raison pour laquelle ils ne l'ont pas encore tué. Enfin, ça et le fait que Jack puisse être très malin quand il veut, et qu'il ait jusque là évité la mort.

Des fois, je m'étonne moi même.

Et Jack est toujours en train de chercher mentalement une issue de secours. Il a un peu de mal, cela dit. Pourtant, il pose un coude sur la table, appuie son menton dessus, pointe un index devant lui pour faire signe à la jeune femme de ne rien dire, et se lance, en regardant son vis à vis dans les yeux:

- Supposons que tu sois moi et que je sois toi. Moi étant toi, et toi étant moi, je me dois d'absolument te rammener à Cr... Mes supérieurs. Sauf que tu n'y es pas très encline, et que tu préfèrerais tranquillement finir ton verre de whisky en paix. Moi, devant absolument accomplir ma mission, en bon membre d'une organisation mondiale, je pense d'abord à te démonter pièce par pièces avec disons... Une dague, pour ensuite te ramener à mes supérieurs en kit. J'éviterais bien entendu de te tuer, puisqu'il faut que tu sois en état de marche là bas. Le problème, c'est que je ne peux pas faire ça devant un tas de gentils innocents, ou même d'exorcistes qui sait, parce qu'on ne sait jamais. Peut être que quelqu'un dans la pièce est capable de me démonter en moins de deux. Alors, moi étant toi qui est j'en suis sûr, très intelligente, j'opte pour une nouvelle option. Marchander, sans verser une goûte de sang. Maintenant, si on reprends nos vrais rôles respectifs, sans vouloir donner mon avis, je trouve que le marchandage est une excellente option. Tu m'as suivi?

Quel baragouineur. Il a en plus l'air complètement convaincu de ce qu'il dit. En fait, Jack est toujours convaincu de ce qu'il dit, même quand ça ne fait aucun sens. Il attrape son verre de whisky et le vide d'une partie de son contenu en se redressant.

- Si tu te décidais à me suivre, tu le saurais...

Le voilà qui fronce les sourcils en réponse à cette réplique qui ne l'aiguille en rien. Il entrouve la bouche, la referme, et finalement:

- Ahmm... Finalement, je ne veux plus savoir. Au revoir trésor.

Il ponctue la fin de sa phrase d'un étirement de ses lèvres en un sourire rapide et sans aucun sentiment, et attrape son verre pour le vider pour de bon.
Ça fait le deuxième.
Jackie, t'es mal barré.

Des cas comme celui-là, Anja n'en avait jamais rencontré. C'est pour ça que sa main se crispe au dessus de la feuille, pour ça que son écriture est emprunte de folie. Cet homme a dérangé un esprit déjà dérangé. Il lui a rappelé des souvenirs de son père qu'il n'aurait jamais dû. Jamais.
Anja se souvient... son père l'emmenait souvent manger une glace dans un parc. Elle, elle choisissait toujours fraise car, comme toutes les petites filles, c'était son parfum préféré. Son père lui était plus compliqué. Il choisissait vanille chocolat et demandait au marchand de mettre le chocolat sous la vanille. Comme ça il était obligé de manger la glace vanille qu'il ne pouvait pas supporter avant de enfin pouvoir déguster la glace au chocolat, sans aucun doute son parfum préféré.
"Tu sais Anja, disait-il. Il n'y a rien de mieux que le chocolat"
La petite fille croyait son père sans aucun problème. C'est drôle, en se souvenant bien, Jack a un peu la même voix que papa... Mais maintenant elle déteste son géniteur, car elle se rend compte que sous la couche vanille, il n'y avait rien d'autre que toute son arrogance. Ce qui l'impressionait quand elle était enfant ne fait aujourd'hui que la dégoûter.
Elle hait son père. Elle hait Jack. Et sa lettre le montre bien.

[...]

Je veux le tuer, mais je ne peux pas, je n'ai pas le droit. Je veux enfoncer ma lame dans sa chaire blanche afin de faire jaillir l'écarlate sur l'albâtre, mais à nouveau je ne peux pas, ce ne serait pas assez discret. Tout mon être tend à assassiner cet inconnu, comme ça, en plein jour au milieu des badeaux. Sans aucun doute un acte suicidaire, comme ses gens qui montent dans un avion avec une bombe. Sauf que je ne peux pas exploser, pas encore, car je t'ai promis maman de te venger. Mourir serait trop simple. C'est moi la coupable, c'est moi qui doit en souffrir en conséquence.
Je ne peux pas le tuer, mais ça il l'ignorait. Et quand les gens ignorent quelque chose, la bêtise de leur ignorance est presque aussi délectable que le sang. Le problème c'est que cet homme n'était pas bête. Il l'ignorait, mais il compris bien vite la vérité. La devina.

- Elle serait bien plus à l'aise rangée au chaud, mon ange. Ils me veulent vivant, non?

Ranger ma lame aurait été avouer que j'avais perdu. Cependant je la retirai, la remettant dans ma manche, prête à surgir n'importe quand. Ce n'était pas là une défaite que j'encaissais, je ne perdrais que s'il refusait de m'accompagner. De gré ou de force.
Mais quand même. J'avais dû la ranger et ça faisait mal.
Ce qui m'agaçait le plus, c'était ce petit sourire qui flottait sur les lèvres. J'avoue que ce sourire j'aurais bien aimé pouvoir le détruire. À coup de hache. Avant d'arracher toutes ses dents une à une, puis de jeter ce qu'il reste du corps à des animaux. Cette vision me fit regagner toute ma confiance même si, extérieurement, je ne le montrais pas. Tuer cet homme, c'était un peu comme tuer mon géniteur pour la deuxième fois. Et ça, ça aurait été bien. Terriblement bien.
Qu'as-tu ressentit en tuant mon père, maman ?

- Supposons que tu sois moi et que je sois toi. Moi étant toi, et toi étant moi, je me dois d'absolument te rammener à Cr... Mes supérieurs. Sauf que tu n'y es pas très encline, et que tu préfèrerais tranquillement finir ton verre de whisky en paix. Moi, devant absolument accomplir ma mission, en bon membre d'une organisation mondiale, je pense d'abord à te démonter pièce par pièces avec disons... Une dague, pour ensuite te ramener à mes supérieurs en kit. J'éviterais bien entendu de te tuer, puisqu'il faut que tu sois en état de marche là bas. Le problème, c'est que je ne peux pas faire ça devant un tas de gentils innocents, ou même d'exorcistes qui sait, parce qu'on ne sait jamais. Peut être que quelqu'un dans la pièce est capable de me démonter en moins de deux. Alors, moi étant toi qui est j'en suis sûr, très intelligente, j'opte pour une nouvelle option. Marchander, sans verser une goûte de sang. Maintenant, si on reprends nos vrais rôles respectifs, sans vouloir donner mon avis, je trouve que le marchandage est une excellente option. Tu m'as suivi?

Le problème c'est qu'il n'était pas moi et que je n'étais pas lui. Bien heureusement d'ailleurs. Je ne supporterais pas de me trouver dans sa peau crasseuse avec ses mains baladeuse et son alcoolisme palpable. Comment diable les femmes pouvaient s'approcher de cet homme monstrueux qui tenait toujours son verre à la main ? Il était comme tous les autres hommes. Répugnant. Et pire encore, parce que lui, il ressemblait au pire salop de l'Univers. Mon père.
Il n'était pas moi et je n'étais pas lui. Malheureusement pour lui d'ailleurs, car si j'étais à sa place, je ne m'enfilerai pas whisky sur whisky en face d'une ennemie. Qui sait ce que j'aurais pu glisser dans ce verre ? Dommage que je ne me balade pas avec des somnifères sur moi... autrement ils auraient bien servit. Mais le whisky n'endort-il pas déjà assez à lui tout seul ? Il suffisait d'attendre que cet homme soit suffisemment saoul pour ne plus être capable de réfléchir, puis de l'aider à marcher, prétextant pour les autres personnes du bar que je le raccompagnait chez lui. Si, par hasard, il se mettait à protester et à déblatérer des inepties sur moi, les gens mettraient ça sur le compte de l'alcool. Au final, il me fallait juste attendre.
Dommage pour ce Jack. Je suis très patiente. N'est-ce pas maman ? Toi, tu le sais, je t'ai assez attendue pour que tu le comprennes.

- Marchander, hein ? Parce que tu crois que nos supérieurs s'abaisseraient à marchander avec un pouilleux tel que toi ? Tu dois te croire bien important... Mais soit, si tu insistes, que comptes-tu me demander en échange de me suivre ?

D'abord il fallait le caresser dans le sens du poil. Lui faire croire qu'il avait raison, que je le suivais, qu'il avait tout simplement gagné. Pour célébrer ces victoires, nul doute que les whisky s'enchaîneraient, entraînant au loin son arrogance et sa fierté, noyées sous l'alcool. Après cela - quel dommage ! -, il ne serait plus capable de se relever et donc, comme je l'ai dit précemment, je serais obligée de le ramener chez lui. Chez Croix donc.
Un plan parfait, non ?
Même si je devrais encore supporter son arrogance un certain moment. Cet homme se les jouait peut-être grand avec son alcool et ses propos, mais au fond ce n'était qu'un gamin. Et tout comme ses "trésors", il n'était bon qu'à une seule chose. Être jeté à la poubelle. Malheureusement, ce n'était pas ce que la Croix voulait de lui, quelle tristesse. Elle voulait autre chose, mais ça, Anja ne le dirait pas à Jack. Il le découvrirait bien assez tôt, en la suivant.

- Ahmm... Finalement, je ne veux plus savoir. Au revoir trésor.

Encore un trésor. Encore une provocation qui me donnait envie de l'égorger. Il a fini son verre et j'ai regardé le récipient vide devant lui. Va-t-il en recommender un ? Je sais que ça le titille. Je n'ai jamais été alcoolique, mais j'en ai déjà connu certain. Et je suis presque sûre que cet homme l'est aussi. Malheureusement, contrairement aux humains, les sorciers noirs ont plus de contrôle et Jack pouvait parfaitement s'arrêter juste avant d'être bourré. Mon plan était peut-être parfait, mais pas si sûr que ça. C'est pour ça qu'en même temps, mon cerveau continuait de chercher, pour en trouver un meilleur. En attendant, il fallait que Jack reste assis dans ce bar. Lui tenir la conversation.
Cela m'enchantait d'avance, comme tu peux le deviner maman.

- J'ai connu un homme comme toi Jack.

Exactement comme lui au fond. Aussi bien physiquement qu'intérieurement. La même arrogance, la même façon d'être si sûr de soi, la même façon de lâcher la Croix. Mon géniteur était mort à cause de ça et un jour viendra où ça sera le tour de Jack. Ce jour là, j'espère que je serais encore en vie et que c'est moi qu'on enverra. Je n'avais pas pu cracher sur le cadavre de mon père. À l'époque je ne savais pas tout ça, je ne connaissais pas la magie, ni la Croix... Je n'avais fait que pleurer misérablement sur le corps de cet imbécile. Mais la vie me donnait une chance de me rattraper sur cet alcoolique en face de moi. Un jour ma lame se plongerait dans son coeur. Je te promet que je ferais tout mon possible pour cela maman.

- Il est mort.

Et lui aussi, il mourra.

[...]

Il mourra.
Dans la tête d'Anja se rappelle le jour où elle avait demander à son père si, même elle, sa propre fille, n'était pas mieux que le chocolat. Il avait sourit, un sourire un peu triste avant de la serrer dans ses bras et de murmurer "Non ma chérie".
Mais au fond, lui ne valait pas mieux que la vanille.

Lorsque la dague de la sorcière se retire, Jack lui jette un coup d'oeil suspicieux.

C'est quoi ça, un coup foireux? Ou peut être qu'elle se rend au marchandage.

- Marchander, hein ? Parce que tu crois que nos supérieurs s'abaisseraient à marchander avec un pouilleux tel que toi ? Tu dois te croire bien important... Mais soit, si tu insistes, que comptes-tu me demander en échange de me suivre ?

Jack jette un regard blessé à son vis à vis, mais range sa dague, maintenant plus ou moins convaincu qu'il ne risque plus de se faire percer.

Quelle tristesse, on dirait qu'elle veut ma mort à chacun de ses mots.

- Tu me vexes, trésor. Par ailleurs, c'est avec toi que je veux marchander, pas avec eux.

Y'a plus de whisky...

Qu'à cela ne tienne, Jack apostrophe joyeusement un serveur pour en demander un troisième, laissant l'homme attendre pour voir si la sorcière blonde allait demander quelque chose aussi. Puis, une fois le serveur parti, il se tourne vers la jeune femme.

- Je suis convaincu de t'avoir déjà vue.

Pour la première ou peut être la seconde fois depuis le début, Jack a vraiment l'air sérieux. Enfin, il a toujours l'air sérieux. Certaines fois plus que d'autres seulement. Là, c'est une des fois "plus". Une des fois "plus plus", même. Impossible pourtant de dire où il avait pu la voir. La jeune femme semble pourtant être du genre de celles dont on se rappelle avoir faire la rencontre. Même précisément où et quand. La sorcière lui fait penser à la Grande Faucheuse, celle qui vient vous chercher à la mort. Sauf que cette blonde là, c'est aussi celle qui donne la mort.

- Quel est ton nom?

Peut être que de l'entendre lui rappellera des souvenirs, mais il en doute. Quant au marchandage, il cherche encore sa sortie, parce qu'il n'a pas l'intention de retourner à Croix se faire remonter les bretelles comme un gamin.

- J'ai connu un homme comme toi Jack.

Jacky hausse un sourcil.

Comme moi?

Il sourit.

- Tu es sûre que ce n'était pas moi?

- Il est mort.

Le sourire de Jack s'écroule comme un château de cartes pour laisser l'espace d'un instant la place à une mine perplexe.

- C'était pas moi...

Il reprend contenance, et se saisit du verre que dépose devant lui le serveur, avant d'en prendre une gorgée en toute insouciance. De toute façon, il a une haute tolérance à l'alcool. Bien qu'il se surestime régulièrement. Mais Jack a cette fascinante capacité à s'endormir comme une pierre après avoir trop bu. Jamais de coma éthyllique. Jamais ivre au point de faire des choses qu'il ne ferait sous aucun prétexte sobre. Enfin, s'endormir lui avait apporté des surprises de part le passé, et continuerai à lui en apporter sans aucun doute.

- Qui était-ce alors?

La réponse m'intrigue honnêtement, un homme comme moi. Quel dommage qu'il soit mort. Une énorme perte.

Bien évidement, de tout le long, Jack n'a pas perçu les diverses menaces de mort sous jacentes. En fait, il serait même étonné si la jeune femme resortait sa dague.

Jack non plus n'était pas mieux que la vanille. Ce n'était qu'un déchet, un simple déchet qui un jour devrait payer. Lâchant sa lettre un instant, Anja saisit une autre feuille de papier sur lequel elle écrivit "Jack Weiss". Puis elle la passa au dessus du feu, attendant que le blanc soit entièrement carbonisé, attendant même que les flammes viennent lui lécher les doigts, la brûlant.
La douleur était agréable.
Satisfaite de son acte, elle balança les cendres restantes dans la boîte de sa mère et se remis à sa lettre. Elle écrivait un peu moins bien car sa main brûlée le lui en empêchait.
Mais quelle délectable douleur...

[...]

- Tu me vexes, trésor. Par ailleurs, c'est avec toi que je veux marchander, pas avec eux.

T'as vu ça maman ? Je l'avais vexé. Le pauvre chéri... Il était pathétique. Et encore une fois ce "trésor" qui tombait dans l'une de ses phrases... L'espace d'un instant je me suis vue me lever pour aller le gifler. Cela n'aurait pas été étrange, après tout combien de couple et d'amis ont sans doute déjà dû se prendre la tête au Lonely Ghost ? Le sang n'aurait pas coulé, j'aurais juste été... soulagée. Mais je me suis retenue. Cela aurait été stupide et puérile de ma part de réagir de la sorte. Et j'ai trop de maîtrise pour m'abaisser à un tel niveau. À son niveau en fin de compte.

Le verre était vide et cela n'avait guère l'air de l'enchanter. C'est pour ça que cet imbécile de Jack en a immédiatement commander un autre. Il était en train de tomber en plein dans mon piège le pauvre. Le serveur est resté un instant à notre table, comme s'il s'attendait à ce que je commande quelque chose. Mais il n'avait pas la seule boisson qui m'assoifait alors.
Le sang de Jack.
Je l'ai donc ignoré, attendant qu'il se rende compte tout seul que je ne désirais rien et qu'il se soit enfin décidé à disparaître chercher le whisky du sorcier en face de moi. C'était un véritable ivrogne ce gars.

- Je suis convaincu de t'avoir déjà vue.

Ce qui est sûr, c'est que ce n'était pas dans son lit qu'il m'avait vu. À vrai dire, j'ignorais où cela pouvait bien être et... je m'en fichais comme de ma première chaussette. Qu'il croie ce qu'il veut, qu'il soit convaincu de n'importe quoi, le principal était qu'il me suive.
En même temps... c'était bizarre. Parce que moi aussi j'avais cette impression de déjà vu. Sans doute à cause du fait qu'il ressemble tant à mon père, ce salop. C'était troublant, je l'avoue. Je me demande ce que toi tu aurais fait à ma place maman.

- Quel est ton nom?

Mon nom n'a jamais été un secret pour personne. Il n'a jamais terrifié quiconque, après tout je suis encore peu connue dans la sphère de la Croix. Le peu de personne qui ont entendu parler de moi ont peut-être un peu peur au nombre de cadavre que j'accumule pour mon jeune âge. Mais après tout, presque tous les membres de la Croix sont des assassins. Et de toute façon, mon nom n'évoque de loin pas la vérité.
C'est pour ça que je n'ai pas hésité à lui lancer au visage le nom que mon père et toi aviez choisis à ma naissance. Enfin... pas exactement. Petite j'avais vos deux noms de famille accrochés à mon prénom. Maintenant j'en ai plus qu'un, le tien maman.
Tout ce qui appartient à mon père est pourri.

- Anja von Duisbourg.

Je le dis avec un accent allemand parfait. Normal étant donné que c'est ma langue maternelle. J'ai toujours habité en Allemagne, dans la même maison. Juste les gens autour de moi ont changé. Dansé. Bouleversé. Au début il y avait toi et mon père. Puis toi et Diego. Juste Diego. Et juste moi. J'ai été la dernière habitante des von Duisbourg a vivre dans cette maison. Je crois que je n'y retournerai plus, même si j'ai toujours les clés avec moi. C'est ma seule faiblesse cette maison... et tout le passé qu'elle renferme. Une autre Anja. Moins forte. Moins froide.
Mais les temps ont changé et de toute façon, je déteste penser au passé.
Le passé est mort.
De toute façon, ils sont tous mort.
Même toi maman. Je n'ai plus aucune famille.

Jack a semblé intrigué quand je lui ai annoncé que je connaissais quelqu'un qui lui ressemblait. Un de ses sourcil s'est levé et il a sourit. Il a sourit cet imbécile. Comme s'il n'avait pas compris que je haïssais la personne que je venais d'évoquer. Et par conséquent, lui aussi. Il semblait fier.
Toujours aussi arrogant.

- Tu es sûre que ce n'était pas moi?

Toujours ce sourire d'idiot... qui s'écroule quand je lui ai annoncé la mort de ce sosie qu'il n'a pas connu. Il faisait moins le malin d'un coup. Pauvre Jack... En anglais il y a une expression avec son nom, "to jump like a jack in the box". Cela veut dire surgir comme un jack dans une boîte, le fameux jack étant un jouet enfermant un petit diable qui effraie les plus jeunes en surgissant au bout d'un ressors quand on ouvre la boîte.
Et bien aujourd'hui le Jack est resté dans sa boîte. Plus aucun sourire maléfique n'est peint sur son horrible figure. Le ressort c'est cassé. Le diable c'est écroulé.

- C'était pas moi...

Bonne réflexion petit Jack. Tu es si... intelligent. Il a alors tenté de reprendre contenance en saisissant son verre de whisky. Finalement parler de mon père n'a pas que des mauvais côté si cela pouvait faire boire mon ennemi.
J'ai observé Jack un peu plus en détail. Décidemment... plus je lre regardais, plus je me disais que c'était son portrait craché. Avec quelques années de moins, des lentilles et les cheveux teint. Je pouvais sans problème translater le visage de mon père sur le sien et toutes leurs ressemblances étaient de plus en plus troublantes... Mais il ne fallait pas que je montre à Jack que cela m'intriguait. Je devais rester froide et dure, comme je l'étais toujours depuis que j'avais décidé de me venger de toi maman.
Mais face à son propre père ce n'est pas facile.

Non. Ne pas confondre. Jack est pas papa. Papa est pas gentil. Jack non plus. Mais Jack n'a pas trahi. Papa a trahi. Papa est pas gentil. Jack est de mon côté. Ne pas le tuer. Pas maintenant. Ne pas confondre. Papa est mort. Ne pas être triste. Papa est mort. Tant mieux. Papa est pas gentil. Papa est méchant. Jack aussi. Mais pas comme papa. Jack n'est pas papa. Ne pas confondre. Ne pas appelé papa "papa". L'appellé mon père. Ou mieux encore, mon géniteur. Il a juste été là pour me créer. Mon père est méchant. Le chocolat ce n'est pas bon. La vanille si ? La fraise c'est meilleur. Tout se confond. Mais je sais que père est méchant. Ne pas confondre avec Jack. Jack n'est pas mon père. Mon père n'est pas Jack.

Tu vois maman, je suis toujours aussi troublée. Et dire que j'ai aimé mon père. Quelle horreur. Quelle déchéance. Quelle honte. Mais tout ça, je ne dois pas le montrer à Jack. De toute façon Jack n'est pas mon père. Mon père est mort.
Point.

- Qui était-ce alors?

Bonne question Jack, très bonne question... Maman tu vois comme je suis perturbée ? Je commence à m'adresser à Jack dans des lettres qui te sont pourtant adressées. Jack, un vulgaire inconnu.
J'aimerais pouvoir le jeter de ma mémoire. Et jeter mon père aussi.

- Mon géniteur. Un imbécile qui n'a eu d'autre talent que de mettre la honte sur toute ma famille. Pathétique.

Je ne lui ai pas dit "père" parce que je ne pronnonce jamais ce mot à voix haute. Il m'a déjà fallu un certain temps pour pouvoir l'écrire sur papier, mais le pronnoncer, je ne peux pas.
Je le hais trop.

Je ne veux plus parler de mon père. Pas maintenant. Il faut que je te raconte ce qui s'est passé avec ce Jack. Avant que j'oublie. Tu sais maman, tes lettres sont aussi un bon moyen de me souvenir. Certains écrivent des journeaux intimes. Moi des lettres. Je sais que tu es morte maman. Probablement que les gens me prendraient pour une folle s'il savait que je t'écrivais. Probablement.
Mais ils l'ignorent.

Donc revenons à Jack. Je n'avais pas oublié qu'il voulait marchander avec moi. Et j'attendais toujours sa proposition. Je m'étais même un peu prise au jeu... Il fallait le faire parler pour qu'il ait soif et qu'il boive.
Je lui posais donc la question. Que voulait-il ?

- Alors ce marché ? Que souhaiterais-tu ?

Je l'ai affronté du regard. Allez Jack, bois mon petit.
Et encore une fois je m'adresse à lui au travers de ta lettre.

[...]

Sa main est toujours brûlée. Mais Anja n'y pense déjà plus.
Elle n'a que Jack en tête.
Jack et son père.

Jack fait tournoyer le liquide ambre dans son verre. Les deux précédement avalés ne font pas encore sentir leurs effets, il est trop tôt. Et ce ne sont pas deux verres qui l'empêcheront de marcher droit de toute façon.
Le sorcier est songeur. Les yeux de la jeune femme, et ceux de son père, sont pratiquement identiques. Dans ses souvenirs tout du moins, puisque la dernière fois qu'il a vu son cher papa, c'était à son dixième anniversaire. Alors évidemment, pas moyen d'être complètement sûr, mais cela reste perturbant. Même si, l'alcool aidant peut être un peu, il ne le montre pas le moins du monde.
Son père, c'est la personne qu'il veut venger. Mais Jack ne veut pas seulement la peau du tueur. Il veut celle de chaque personne impliquée dans l'affaire, comme un bon petit tueur en série. C'est la seule série de meurtre qu'il s'autorise à commettre, étant de nature plutôt contre les combats. Il n'y a qu'à voir ses dons et sa formidable capacité à toujours avoir quelque chose à répliquer, et à tourner son auditoire en bourrique.
Mais dix-huit ans après la mort de son père, il ne sait toujours pas qui l'a tué.

- Anja von Duisbourg.

Allemande. Comme papa, comme moi même si je suis né en France. J'ai peut être besoin d'un verre supplémentaire.

Il ne laisse rien paraitre, mais ça commence à cogiter. Et si il acceptait de la suivre en échange de quelques renseignements? Il trouverai toujours le moyen de s'échapper après. Fonce d'abord, réfléchis ensuite.
Une gorgée de whisky avalée en plus.

Verre presque vide. Note à pour plus tard: toujours, toujours, TOUJOURS acheter une bouteille.

Il fait la moue en regardant le contenu de son verre. Ça part trop vite, vraiment trop vite selon lui. Sans relever les yeux, il décide parler alors qu'un sourire ironique vient orner ses lèvres:

- Jack Weiss, ravis d'ête ta cible Anja.

Il sait que la Croix lui a déjà fourni les renseignements mais qu'importe, il aime bien se présenter de temps en temps.

- Mon géniteur. Un imbécile qui n'a eu d'autre talent que de mettre la honte sur toute ma famille. Pathétique.

Cette fois, il faut à Jack toute sa concentration pour garder son sourire et ne rien laisser paraitre à cette déclaration. La père d'Anja est allemand. Les yeux d'Anja ressemblent à ceux du propre père de Jack. Anja est allemande. Jack n'arrive pas à metter le doigt dessus, mais son intuition lui dit qu'il y a là anguille sous roche. Et qu'il ferait bien d'obtenir l'air de rien quelques infos sur Anja.

Intéressante petite blonde. Définitivement.

- Voyons, montre plus de respect à tes propres parents, et encore plus aux morts, trésor. Comment est-il mort?

Jack caresse le manche de sa dague, faussement songeur et les yeux levés vers le plafond. Comment obtenir des informations sans avoir l'air suspect, dans ce marchandage?

En continuant à la draguer, quelle idée.

Jack finit de moitié ce qui reste du verre, et rend son regard à Anja avec un sourire en coin.

- Alors ce marché ? Que souhaiterais-tu ?

Jackie pose un coude sur la table et s'approche de la jeune femme, tout à son jeu de séduction qu'il sait par avance qu'il ne conduira à rien. Parce qu'Anja est définitivement froide comme la glace. Mais lui faire croire qu'il veut juste flirter avec elle avant de la suivre lui plait.

- Parle moi de toi, trésor. Quel âge as-tu donc? Tu fais particulièrement jeune pour cette organisation, même si il emploient à tout âge.

Jack a toujours son sourire collé aux lèvres, très sûr de lui. Pourtant, il n'a strictement aucune idée de comment il sortira des pattes d'Anja et de Croix quand il y sera. Enfin, tant qu'il reste en vie, tout devrait aller.

- En fait, je me demande même ce qui a pu te pousser à entrer dans nos rangs.

Jack dit "nos", mais il ne le pense qu'à moitié. Après tout, on a déjà vu plus dévoué.

Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack. Son père. Jack.
Les images des deux hommes apparaissent dans sa tête et se supperposent. Même sourire arrogant. Exactement le même nez. Des ressemblances frappantes. Mon Dieu. Mais qui est vraiment Jack ?
Anja repousse ses questions pour continuer à écrire. Elle n'est pas au bout de sa lettre. Elle a encore tant à raconter...

[...]

- Jack Weiss, ravis d'ête ta cible Anja.

Peut-être que lui était ravi, mais le plaisir n'était pas réciproque. Je n'étais pas entrée à la Croix pour faire dans le social et tenir une conversation n'était pas vraiment un de mes atouts. Pourquoi ce Jack ne voulait-il pas me suivre ? Tout aurait été alors beaucoup plus simple. Je ne me serais pas posé autant de question sur qui était cet inconnu. Mon esprit serait demeuré froid face à ses ressemblances avec mon père. Mais plus on parlait, plus cela me perturbait.
Jack Weiss...

- Voyons, montre plus de respect à tes propres parents, et encore plus aux morts, trésor. Comment est-il mort?

Ma mâchoire c'est inexorablement crispée. Montrer du respect à mon père ? Tu serais encore de ce monde maman que je suis sûre que tu en aurais rit de dégoût. Comment pouvait-il penser de telles inepties ? N'avait-il pas comrpis que mon père avait détruit toute ma vie ?
Jack l'imbécile.

- J'en montre déjà suffisamment à ma mère, ça compense largement. Mon père est mort et le pourquoi du comment n'a pas grande importance. L'important c'est juste qu'il soit là où se trouve sa place, six pieds sous terre.

Je l'ai observé finir son verre avant de me regarder à nouveau, un drôle de sourire en coin. Ce sourire, je m'en méfiais. Et je m'en suis d'autant plus méfiée quand il a posé son coude sur la table, s'approchant de moi un peu plus. Prise de dégoût, j'ai failli reculer. Il m'a fallu un énorme sang froid pour rester droite face à lui.

Maman, maman... il me faisait perdre le contrôle. Etais-ce ça aussi que tu avais ressentis lorsque tu avais tué mon père ? Avait-il essayé de te convaincre de l'épargner. Le connaissant je suis sûre qu'il t'a parlé de belle chose, qu'il t'a fait miroiter la vie en rose. Il a dû m'évoquer aussi. Evoquer son enfant comme défense, comme bouclier. Mais toi maman tu n'as pas faibli et tu l'as tué. Moi non plus je ne devais pas faiblir face à Jack. J'avais une mission à accomplir et rien de plus.
Plus facile à dire qu'à faire...

- Parle moi de toi, trésor. Quel âge as-tu donc? Tu fais particulièrement jeune pour cette organisation, même si il emploient à tout âge.

Il est tellement... sûr de lui. Vantard, oui, c'est le mot. Et cela avait le don de m'agacer au plus au point. Mais pour qui se prenait-il ? Un instant l'idée de retourner le tatiller avec ma lame m'effleura. Mais ne fit que m'effleurer. J'avais un plan plus ingénieux. Tenir la conversation. Le faire boire. Le rendre ivre et le ramener chez mes commanditaires.
Un plan rempli d'incertitudes.

- En fait, je me demande même ce qui a pu te pousser à entrer dans nos rangs.

Etait-ce ses affaires ? Non, évidemment que non. Et pourtant il posait quand même la question. C'était donc ça qu'il voulait marchander ? En savoir plus sur ma vie ? C'était dangereux, très dangereux. Pour lui comme pour moi. Il risquait de ne pas forcément apprécier la réponse qui allait suivre.

- Nous dirons que je suis trop jeune pour finir dans le lit d'un vieillard dégoûtant comme toi, mais bien assez âgée pour avoir déjà débarasser nos supérieurs de petits... problème. Quand à ce qui m'a poussé à faire ce choix de carrière... ma mère.

Oui maman. C'est grâce à toi que j'ai rejoint la Croix. Plus exactement grâce à ta mort, mais ça je ne le lui dirait jamais. Je n'ai pas envie d'étaler ma vie devant cet inconnu qui ressemble tant à mon père. Il n'a pas besoin de savoir.
Jack le maudit.

- Prêt à me suivre ?

Une fois en dehors du bar cela sera plus facile de le menacer. Même s'il risque de vouloir s'échapper ce qui serait assez dérangeant.
Mais pourquoi Jack le têtu ne veut-il pas se laisser faire. Cela serait plus simple.

[...]

La bouteille d'encre est finie et Anja en rouvre une autre. Le rouge s'étale sur les feuilles comme du sang. Déjà plusieurs pages ensanglantées. Mais elle préfèrerait que ce soit du vrai sang et non de l'encre sur le papier. Le sang de Jack, par exemple.
Par exemple.

Plus Jack y pense, plus il est sûr de tourner autour de quelque chose d'important sans toutefois pouvoir poser le doigt dessus. Ce qui se révèle somme toute assez frustrant pour le sorcier.

Il me faut une bouteille, les verres vont finir par me coûter cher. En dix-huit ans, je n'ai pratiquement rien appris sur l'assassin de papa. A Croix, ils n'ont jamais rien voulu lâcher. Pour eux, cet homme était mort et n'avait jamais existé. Dans une salle d'archives en allemagne, ils avaient pourtant une fiche sur lui. Sa date de naissance, son nom, son origine, son nombre d'enfants connus... Qui était d'ailleurs de un. Moi, je suppose. Il était aussi marqué comme élément "perturbateur", si je peux employer ce terme moi même. Tel père tel fils après tout.

- J'en montre déjà suffisamment à ma mère, ça compense largement. Mon père est mort et le pourquoi du comment n'a pas grande importance. L'important c'est juste qu'il soit là où se trouve sa place, six pieds sous terre.

Et Anja qui ne laisse rien filtrer. La haine envers son père est presque palpable, et pour un peu elle ferait grimacer Jack si il ne s'appliquait pas déjà à garder son masque et son sourire.

- Pauvre homme, commente Jack, songeur.

Non, il n'aura obtenu aucun renseignement ici. Et insister semblerait trop suspect, aussi laisse t-il couler comme si cela ne l'intéresse pas outre mesure.

Peut être que quelques recherches sur cette Anja seraient plus fructueuses... Tout ça parce que ses yeux ressemblent à ceux de papa.

- Nous dirons que je suis trop jeune pour finir dans le lit d'un vieillard dégoûtant comme toi, mais bien assez âgée pour avoir déjà débarasser nos supérieurs de petits... problème. Quand à ce qui m'a poussé à faire ce choix de carrière... ma mère.

Jacky fait une moue vexée.

Vieillard dégoûtant, moi? Ça c'est pas vrai. Je ne ferai jamais rien à une femme non conscentante.

Le sorcier se redresse et croise les bras avant de lancer un:

- Surveille tes paroles, je ne m'en prendrai jamais à une femme non consentante. Et puis je ne suis pas vieux.

Il n'arbore pas une mine boudeuse mais presque. Et encore une fois, Anja a éludé la question. Pour un peu, il en pousserait presque un gémissement de frustration. Pas que monsieur soit un impatient -quoi que-, mais parce que la sorcière ne semble même pas le faire exprès, à ses yeux. Mais il se contient, se contentant de jeter un regard suspicieux à la sorcière avant de reprendre une mine neutre. Le visage de Jack éprouve des difficultés à rester stoïque, contrairement à celui de la jeune femme en face de lui. Ce qui ne le dérange pas outre mesure, et ne l'a d'ailleurs jamais dérangé. C'est un excellent acteur quand il veut.

Je décrète qu'elle remplit mal sa part du marché.

- Prêt à me suivre ?

La réponse vient immédiatement, plate, courte, concise:

- Nan.

Avec une petite nuance puérile peut être bien. Le sorcier décroise ses bras, l'air le plus sérieux du monde, et continue:

- Tu joues mal le jeu. Tu dois répondre pour de vrai aux questions. Pas te servir de chacune pour me faire comprendre que tu me hais.

Après un instant de silence où Jack fixe son vis à vis, il ajoute en marmonant:

- Sans compter que c'est totalement injustifié.

Le whisky commence peut être à lui monter au cerveau, et Jacky a fortement l'impression de se faire arnaquer. Sans que ça puisse vraiment se justifier.

Quelle sont mes chances d'atteindre la porte, me cacher dans un mur, et ensuite aller chercher une bouteille, sans me faire attraper par Anja?

Une nouvelle bouteille est à présent ouverte et Anja se replonge dans l'écriture. Ses souvenirs sont fixe et elle n'a absolument aucun problème à se les remémorer. Elle revoit tout en détail... La façon dont Jack se mouvait qui était si comparable à celle de son père, son nez qui ressemblait tant à celui de son père et tout ses autres petits détails qui rendait Jack insupportable à ses yeux. Et son arrogance... oh oui, son arrogance.
Son père tout craché. Quelle horreur.

[...]

- Pauvre homme.

Jack ne le connaissait pas, Jack n'avait aucun droit de juger. Il ne savait pas ce que celui qu'il appelait "pauvre homme" avait fait. J'avais très envie de lui crier de se taire, de fermer sa gueule. Jack ignorait tout.
Mon père avait trahi. Il s'était engagé dans la Croix et il avait trahi. S'il savait que la Croix n'était pas ce qui lui conviendrait, pourquoi s'y était-il engagé ? Le peu de fois où Diego parlait, il le décrivait comme un libre penseur... J'ai appris plus tard dans une de tes correspondance avec une de tes amies que mon père était même d'Orpheo. Puis il était partit parce que leurs idées ne correspondaient pas aux siennes. On l'avait laissé partir, le prévenant tout de même que, si il tombait dans le camps adverse, ses anciens amis ne seraient pas aussi clément.
Il était tombé dans le clan adverse.
Le sorcier noir qui avait toujours été caché en mon père était ressortit d'un seul coup. Il avait envie de tuer, mais pas de tuer les méchants. De tuer les gentils. Il voulait gagner du pouvoir, être quelqu'un que les gens redouteraient. À cette époque là il était encore jeune... 22 ans je crois. Quelque temps après il t'avait rencontrée maman, et vu que deux méchants sont plus fort qu'un, vous vous étiez mis ensemble. Il avait encore fallu attendre plus d'une dizaine d'année avant que vous décidiez que trois c'était mieux que deux. Et j'étais née.
Toujours d'après la même correspondance, c'était à partir de ce moment là qu'il avait changé. Je ne sais pas si c'était le fait d'être père qui l'avait attendrit ou autre chose. Mais il a voulu quitter la Croix. Et on ne quittte pas la Croix comme on quitte Orpheo.

Mon père est mort.

Je te l'avoue maman, à l'époque je suis très souvent allée sur sa tombe. Avec Diégo, toute seule ou même avec des amis. Je lui parlais comme s'il était toujours en vie. Sa pierre tombale était un substitut d'un père que j'avais besoin d'avoir.
Honnêtement, dès le début je lui en ai voulu. Voulu d'être mort, d'être partit trop tôt. Mais je l'aimais. Puis quand j'ai appris qu'il avait trahi la Croix et surtout qu'il t'avait trahi toi maman... Là c'était pire que tout. En plus de lui en vouloir j'ai décidé de ne plus l'aimer. J'ai décidé de ne plus aimer personne, surtout les hommes.
Sauf toi maman. Toi tu es un exception et je t'aimerai toujours.

Et Jack souriait toujours. Oh, comme il m'agaçait son petit sourire figé sur son visage. J'avais envie de le lui arracher à coup de lame. Mais j'ai réussis d'une autre manière à obtenir une petite moue dégoûtée en le traitant de vieilllard. Et bien Jack, on n'aime pas regarder la vérité en face ?

- Surveille tes paroles, je ne m'en prendrai jamais à une femme non consentante. Et puis je ne suis pas vieux.

J'ai décidé de ne pas répliquer, le laissant bouder le fait d'être traiter de vieux. Une décennie nous séparait et pour moi c'est simple, il était vieux. Je ne m'appelle pas Laeticia Hallyday moi et je ne supporte pas la présence d'homme plus vieux dans ma vie.
En vérité, je ne supporte pas la présence d'homme dans ma vie tout court. Mais il fallait bien que je prenne sur moi le temps d'une promenade jusqu'à la Croix avec ce Jack. Ce Jack qui quelques secondes après que je lui aies demandé de me suivre m'a répondu :

- Nan.

Oui maman, tu as bien lu. "Nan". Comme un bébé. Je commençais lentement à comprendre que la mission que m'avait confié la Croix n'était rien d'autre que du baby-sitting. Moi qui ai horreur des gosses.

- Tu joues mal le jeu. Tu dois répondre pour de vrai aux questions. Pas te servir de chacune pour me faire comprendre que tu me hais.

Quel jeu ? Nous n'avons établit aucune règle. Ce Jack Weiss pouvait déjà s'estimer heureux que je ne lui mente pas.

- Sans compter que c'est totalement injustifié.

Et bien mon grand, c'est justifié par le fait que je n'aie aucune envie d'étaler ma vie privé devant un inconnu. Inconnu qui de plus ressemble étrangement à mon père que je détestais.
Ô malheur, je m'adresse encore à lui... tu vois comme il me déstabilise.

- Très bien. J'ai 19 ans et j'ai rejoins la Croix afin de venger la mort de ma mère. J'ai respecté les règles cette fois ?

J'avais pris un ton sec et cassant et gardé mon expression de froideur. Je ne voulais pas qu'il comprenne combien ça me coûtait de parler de ta mort maman. C'est la Croix qui t'a tué. Qui t'a tué à cause de moi.
Si tu savais comme je m'en veux.
Si j'avais été moins égoïste, tu serais encore en vie. Quelle conne je suis. Je ne mérite rien d'autre que de souffrir. Souffrir c'est la seule façon qui fera que tu pourras me pardonner.
Je t'aime tellement maman.

[...]

Sa mère. La seule qui ait vraiment compté dans sa vie.
Pourquoi est-elle morte ?

Jack envisage très sérieusement d'aller chercher cette bouteille à laquelle il pense depuis un bon moment, et de faire le chemin avec elle. Une fois sérieusement bourré, il songerait à trouver un moyen de fuir, et rien à faire d'Anja. PLus facile à penser qu'à appliquer.

Fichue Croix.

- Très bien. J'ai 19 ans et j'ai rejoins la Croix afin de venger la mort de ma mère. J'ai respecté les règles cette fois ?

Oh, mademoiselle a changé de ton.

Impossible de dire si c'est parce que Jacky a réussi à grignoter sa patience, ou si c'est pour une autre raison. Il sort de sa poche de quoi payer pour ses verres, et est même secrètement étonné d'avoir assez sur lui. Il ne tient jamais ses comptes. Jacky dépose l'argent sur la table d'un air nonchalent, la tête lui tourne un peu des trois verres avalés, mais il sait qu'il pourra toujours marcher. Pour le moment, parce qu'il a bien l'intention de se mettre en quête d'une bouteille.

- Tu vois quand tu veux.

Les femmes sont des créatures étranges, décidément.

Retour du sourire en coin de Jack.

- Tiens, on a un point commun. Moi aussi je suis là pour venger la mort d'un parent.

La première phrase a été dite sur un ton moqueur, Jackie soulignant le "point commun", sachant que ça risque de déplaire à la sorcière. Il ne devrait pas faire le malin comme ça. Mais c'est plus fort que lui, il veut jouer avec le feu et taquiner Anja. Qui n'est pourtant clairement pas du genre de celles à chatouiller.
Le sorcier se lève en tirant sa chaise en arrière, s'assure de la stabilité de sa situation debout, puis va au bar demander où se trouve la superette/combini/truc où il est suceptible de trouver des boissons entre autres. Une fois le renseignement obtenu, il retourne à sa table, remet sa chaise en place et lance en direction d'Anja:

- Je suppose qu'il est inutile de te dire que je reviens juste après avoir fait mes courses, tu ne me croirais pas. Jack réfléchi un instant et ajoute: Et en fait t'aurais raison, je ne serais pas revenu. Qu'importe, on sait tous les deux que je te suivrai bien plus docilement avec un peu plus d'alcool derrière les oreilles. Alors je vais chercher une bouteille, la vider d'une partie de son contenu, et je te suivrai. A toi de voir si tu veux me suivre là bas, où me chercher dans tout le village d'ici une vingtaine de minutes.

Oui, oui, Jack a toujours dans l'idée de fuir à un moment où à un autre Anja. Mais si faire tout ce qu'il a dit peut lui apporter une bouteille, alors il fera. Il sera toujours temps de s'échapper après, non?

Toujours. Elle aura bien le dos tourné à un moment ou à un autre.

Fort de cette nouvelle résolution, Jack se retourne sans un mot de plus, et marche tranquillement vers la sortie, manquant au passage de rentrer dans un serveur, et titubant sur le côté pour l'éviter.

Ouch, peut être pas si sobre que ça.

Et le voilà parti à droite en sortant du bar, en chemin pour trouver une bouteille, ne s'inquiétant même pas de la jeune Anja et de son choix.

De toute façon, elle ne peut pas me tuer.

La plume se plonge dans l'encre comme Anja se plonge dans le cauchemar de cette journée.
Jack Weiss, hein ? Un imbécile selon elle. Qui ne mérite que la mort. Comme son père. Pourquoi la Croix l'appréciait-elle autant ? Un jour il finirait pas trahir, Anja en était sûre. Jack était ce genre de gens, la sorcière l'avait sentit dès le premier regard. Et pas uniquement parce qu'il ressemblait à son père.
À cause de... son arrogance. Un jour ou l'autre il se croira meilleur que ses employeurs et tentera de les devancer...
... et échouera lamentablement.
Du moins Anja en était persuadée. Et ça c'était pour elle une raison de plus de le haïr.

[...]

- Tu vois quand tu veux.

Cet homme méritait décidemment que je lui crache au visage. Heureusement pour lui, tu m'as mieux élevée que ça maman. Mais quand même, j'étais au bord de l'implosion. Ce qu'il pouvait être agaçant. Une personne moins froide que moi l'aurait sans doute déjà giflé. Mais bon, j'allais bien trouver un moyen de me venger de lui en l'amenant à la Croix.

Puis il a à nouveau sourit. J'ai directement pas aimé ça.

- Tiens, on a un point commun. Moi aussi je suis là pour venger la mort d'un parent.

Super sa vie, n'est-ce pas maman ? Honnêtement j'en avait rien à faire d'avoir un point commun avec ce lourdeau. C'était même presque insultant de lui ressembler. Sur un point qui me tenait autant à coeur, ça l'était d'autant plus. Savoir que nous avions des valeurs communes... Je n'avais pas besoin de l'apprendre au fond.
Mais par curiosité et pour me renseigner sur un futur ennemi possible, je me suis quand même vue lui demander.

- Ah bon ? Une personne vivant à Little Angleton peut-être ? Ca semble décidemment être le nouveau lieux à la mode pour venir se cacher. Encore mieux que la Suisse.

Et me voilà en train de plaisanter. À croire que je m'étais prise au jeu. Pathétique. Mais ce qui l'était encore plus, c'était de voir Jack se lever et se diriger vers le bar en titubant afin de demander où il pourrait aller acheter une bouteille d'alcool. Je n'ai même pas pris la peine de me lever sachant que, de toute façon, je serais plus rapide que cette ivrogne s'il tentait de s'échapper. Je le laissais donc libre de perdre l'équilibre dans le bar puis il est revenu vers moi repousser sa chaise contre la table - quelle conscience, j'en étais impressionnée - et payer ses consommations.

- Je suppose qu'il est inutile de te dire que je reviens juste après avoir fait mes courses, tu ne me croirais pas. Et en fait t'aurais raison, je ne serais pas revenu. Qu'importe, on sait tous les deux que je te suivrai bien plus docilement avec un peu plus d'alcool derrière les oreilles. Alors je vais chercher une bouteille, la vider d'une partie de son contenu, et je te suivrai. A toi de voir si tu veux me suivre là bas, où me chercher dans tout le village d'ici une vingtaine de minutes.

Jack était visiblement vraiment désireux de finir ivre mort. Tant mieux, ainsi il se débattrait moins. Quand à sa petite proposition de le chercher dans le village durant une vingtaine de minutes, je l'ai aussitôt repoussée. J'avais d'autre choses à faire que de poursuivre un imbécile bourré.
Pour le moment il était surtout bien lancé vu la façon dont il venait presque de rentrer dans un serveur. Sans un mot je me suis relevée histoire de le suivre, quelques pas derrière lui, mais tout de même assez près pour lui arracher un bout de son anatomie avec mon poignard au cas où il tenterait de fuir.

D'après la Croix, Jack pouvait entre autre traverser les murs et j'étais priée de faire attention à ce pouvoir là. Compréhensible. Car moi je ne pourrais pas le suivre et il lui aurait été ainsi aisé de fuir. C'est pour ça que je m'interposais dès qu'il faisait mine d'aller saluet les briques d'un peu trop près.
Il ne faut pas abuser avec moi. Je suis peut-être blonde, mais loin d'être stupide.

On a donc pris le chemin de la recherche du whisky avant que je puisse l'accompagner jusqu'à Croix. Mais la suite maman, je te la raconterais demain. Je vais plutôt clore cette lettre et aller dormir ; j'ai besoin de sommeil tant cet imbécile heureux m'a fatigué.
À demain maman.

Ich liebe dich Mutti,
Anja.

Anja range ses affaires, plie la lettre et la fait rejoindre toutes les autres dans sa boîte. Un jour peut-être qu'elle ira les enterrer près de sa mère. En attendant elle se glisse dans son lit, tentant de fuir les cauchemars du jour pour rejoindre ceux de ses nuits...

[HRP : Je te propose d'ouvrir un nouveau rp autre part, à moins que tu souhaites rajouter une conclusion à celui-ci. ]