La journée avait débuté avec quelques dizaines d'élèves piailleurs, pleurnicheurs et raleurs. Vendredi. La dernière journée de la semaine, la plus terrible.
Un élève en avait transformé le jouet d'un autre en gnome et donc, forcement... ils s'étaient battus et HOP ! Direction le bureau de la directrice. C'est surtout que je n'avais pas le moins du monde envie de m'embeter avec des enfants insolents aujourd'hui.
Ensuite j'étais rentrée chez moi pour me faire a manger. Le frigo vide. Bravo ! Quelle belle organisation que de remettre les courses toujours a plus tard. Je reclaqua méchament la porte du frigo, en colère.
– M'en fous ! J'avais envie de rien d'abord !, me lançais je a moi meme.
Non c'est faux. Je crevais la dalle comme pas deux. Et donc entre midi et 14h, le moment ou il doit y avoir le plus de monde dans les petits commerces je m'aventurais dans cette jungle pour débusquer un petit repas rapide. Je ferais les courses plus tard. Là s'était juste pour me remplir le ventre avant de retourner bosser.
D'ailleurs rien de plus simple qu'un plat surgelé ! … Enfin... façon de parler. Il y a le fameux sandwich qui écrase aisément toute forme de concurrence. Je m'achète donc une pastabox. Des pates avec une cuillère de crème bien grasse, quelques morceaux d'une viande inconnue. 2Minutes au micro-onde et le tour est joué !
C'était un vendredi ! J'avais pas envie de me casser le cul a faire un truc vachement élaboré avec un frigo vide de toute façon. Ensuite encore deux longues heures de cours avec des élèves enfin un peu plus matures. Le plus jeune devait avoir... je sais pas... presque 16 ans. A cet age la on est un poil plus intéressant et les chamailleries de morveux agaçants sont remplacés par des bavardages incessants. J'aime encore mieux ça. Suffit de les engueler une ou deux fois pour leur dire de parler moins fort ou d'écouter le cours avec un peu plus d'attention.
Je préfere qu'ils ne me porte pas d'attention plutot que de les voir transformer leur petit camarade en crapaud. Et enfin ! Ce que tout le monde attend avec impatience
– Ce sera tout pour cette semaine ! Vous pouvez y aller !
Bon d'accord je les ai fait sortir, comme toujours, avec une dizaine de minutes d'avance. Mais de toute façon ils ne me captaient plus depuis déjà 40 bonnes minutes donc je nous ai tous rendu service ! Je les voyais là, à regarder leurs montres en permanence, se demander l'heure, se lancer des boulettes de papiers et des projectiles. J'en ai même vu un qui a lancé un projectile avec un bouchon, de la colle et un papier direction le plafond. Comment je vais réussir a le retirer de la haut moi ?
Je range mes affaires, tourne la clé dans la serrure
CLIC
Et a la semaine prochaine travail lassant avec des élèves qui n'écoute que ce qu'ils daignent entendre de moi. Je crois qu'ils ne savent pas ce que c'est que le respect... Je leur ferais peut etre un petit cours la dessus la semaine prochaine. Mais a présent je vais faire mes courses ! Sinon je vais encore me faire piéger !
Le pain, les brioches, les petits pains au lait, les biscuits au chocolat.
L'eau en p'tites bouteilles, les sirops, les boissons gazeuses et le jus d'orange.
Les pastabox, le jambon, les pates a faire cuir, les frites et les sandwiches surgelés.
Un p'tit tour du côté des fringues mais je n'ai pas le temps de m'y attarder. Je repasserais.
Un tour du côté de la poissonnerie. Ça donne envie... Mais c'est trop long à faire. Je me contenterais de maquereaux en boites.
Soudain je remarque que j'ai oublié le couscous. Je vais le chercher. Je passe dans le rayon de papier toilettes. Et oui ! Tout le monde en prend ! Personne ne le dit !
J'attrape au passage deux bouteilles de gel douche, une de shampoing. Et je crois qu'avec ca il ne me reste plus qu'a aller chercher le pot d’Agendas Macadamia de récompense pour ce parcours en temps record et cette longue semaine achevée.
La foule fait comme moi et se précipite comme dans une course jusqu'aux caisses et les pauvres employées débordées s'agacent dès qu'il leur manque un prix. Je sors mon sachet, prépare ma carte, monte mes courses sur le tapis roulant et les récupère de l'autre côté.
Il faut aller vite ! Pour que je sois rapidement en weekend !
Tout le monde bouscule. C'est incroyable ce besoin qu'on a tous, Humain ou pas d'ailleurs, de se serrer dans les allées des caisses. Un peu comme si ça irait plus vite.
– Mais arrêtez de me pousser bordel !
Je me retourne pour râler plus fort. Le fautif est un homme.