Pour des dizaines de millions de milliards de raisons je n’étais pas retournée a Croix depuis plusieurs mois. D’abord parce que Dorian me faisait extrêmement peur et que je n’étais contrainte nulle part et dans aucun contrat de me présenter devant un Dorian en colère a chaque fin de mission. Surtout que dans la plupart des cas tuer restait quelque chose qui m’était juste inabordable. Il y avait aussi un peu de culpabilité et de honte qui m’empechaient de me pointer la bouche en cœur. J’avais donc repoussé autant que possible mon retour au QG de Croix. Cela faisait pratiquement un an maintenant.
Dorian avait été occupé avec sa femme et ses marmots, la prise du Mystery… J’avais réussit a plutôt bien m’en tirer. Personne ne savait ou j’étais, ce que je faisais. Dorian recevait mes comptes rendus par la poste ou par email et ca ne devait pas lui déplaire vu qu’il n’avait rien dit.
Cela faisait donc un an tout rond quand je recu un email en retour. On exigeait de me voir a Croix immédiatement. Mais ce n’était pas possible, je ne pouvais pas y aller parce que je n’étais qu’une gosse immature et totalement inconsciente qui avait caché sa bétise sous un tas d’autre pour que ca ne se voit pas. Si j’y allait il est certain que Dorian se serait enervé sur moi et m’aurait tué. Il ne fallait pas qu’il voit ce que j’avais fait.
Car oui la bétise était grave. Il était rare que les miennes soient petites et inofensives.
J’avais déménagé dès mon recrutement a Croix dans un petit village ou personne ne me connaissait. J’y avait fait mon petit potager et faisait les économies au maximum mais je partais souvent pendant plusieurs jours en missions et quand je revenais tout avait séché, été arraché par les animaux des voisins, saccagé. SI bien que quand je suis arrivée j’étais déjà maigre et fine mais là ça tournais au minimum. Je m’endormais parfois debout, j’aurais peut etre meme pu voler tellement j’avais faim. Et avec ca, ma bétise.
Quand cela fit sept mois je ne savais pas a quoi m’attendre. Je ne savais pas si un hôpital d’humains serait capable de me venir en aide mais je n’avais pas le choix et heureusement tout ce passa bien. C’était un matin ou le soleil a peine levé rendait déjà l’air si chaud qu’il était irrespirable. Je n’avais jamais rien fait avant ce jour. Je m’étais sentie particulièrement nerveuse la veille au soir, je n’avais pas su dormir,j’avais fait les sens pas et je m’étais décidé. Et là ! Seigneur ! j’étais partie pour toute la procédure. Echographie, test, et toute la paperasse.
Le medecin qui me prit en charge analysa le tout et me laissa deux solutions :
- Arriver a terme sans etre sure qu’il soit toujours vivant
- Accoucher maintenant pour pouvoir le soigner
Si j’avais été un peu moins émotive j’aurais pris la première solution ou j’aurais demandé a ce qu’on l’abatte. Mais moi… Avec mes sentiments de mère pas encore mère et dans le dos de tous… J’avais prit la deuxième option. Cet accouchement, bien que je savais que je donnais la vie, me dégouta tout particulièrement. Je ne voyais que cet homme qui me touchait. Pourtant lui il devait faire ca souvent ici. Mais je ne m’y faisait pas.
Il y eut un long moment de silence et d’attente au fond de moi quand j’eus fini mon travail forcé. J’attendais je ne savais quoi jusqu’à entendre les hurlements effrontés de mon bébé. Mon cœur qui avait semblé s’arreter avait reprit ses batemnts et on me le donna enfin.
- C’est un garçon. Né a 6h43 exactement a 2 kilo 5 et sept mois.
Il était encore tout englué de sang et de chair et je l’essuyai avec la petite serviette qui l’emmitouflait. Je ressentis un immense bonheur a l’entendre pleurer comme un petit raleur. Un petit anonyme sur cette planete parmis des millions d’autres inconnus. Son nom : Danny. Danny Matthew Sullivan.
Mais contrairement a cet instant de bonheur tous les autres pleurs étaient engoissants. Il avait un appétit d’oiseau et la nuit quand il ne voulait pas dormir je n’avais d’autres choix que de lui masser le dos. Il avait une santé de fer comparé aux autres enfants né comme lui prématurément mais en même temps il avait peur de presque tout.
J’avais toujours été là et il ne montrait aucun signe particulier de Don ou Pouvoir. Mais j’appréhendais… C’est pour ca que je ne rentrais plus a Croix. Cette fois pas le choix. Je ne pouvais pas l’emmener mais je le fit quand même. Je mis son couffin dans la voiture, et après plusieurs heures d’autoroute nous voila dans le petit village. Non, je n’allais pas le mettre sous le né de Dorian et d’ailleurs il était hors de question que je lui dise que c’était le sien. Ces choses là je les garderais pour moi.
Quand j’arrivai il était aux alentours de midi. Je sortis Danny de son couffin et en même temps quelque peu de son sommeil. Heureusement j’avais prévu le coup et prit sa tétine, les biberons, les couches. Je le prit contre moi et entra sans réfléchir. Si je me posais trop de questions j’allais tourner les talons et retourner me cacher chez moi. Personne ne pourrait décrire a quel point j’étais terrorisée en passant la porte.