Artémis remontait la rue en pressant sa sacoche contre son ventre. La bandoulière était encore trop desserrée et risquait de se détacher - surtout avec le vent, et surtout avec le vide. Elle n'emportait rien dedans, un bloc-notes, un petit livre de poche titré « Conflagration » d'un auteur inconnu, quelques stylos et une trousse de maquillage (comprenant les mouchoirs). Ses deux bras l'entouraient comme un cadeau, un objet ayant une importance sentimentale ou une quelconque valeur: il n'en était rien. Un vulgaire sac en toile de jute bourré de poches inutiles, sans forme et usé.

Elle tripotait de sa main gauche libre quelques fils laineux d'un pull qui se détricotait au niveau de la hanche. Elle roulait et déroulait sans arrêt autour de son index et son majeur ces petites boules de tissu filandreux: stress. Artémis se sentait bien pourtant, glacée par l'atmosphère mais heureuse de quitter son petit chez soi abandonné pour la chaleur du village et des conversations. Simplement, son pull se détricotait -elle y participait, oui- parce qu'elle s'était trompée de lessive et il était nécessaire qu'elle aille demander une explication: elle tenait à ce pull, contrairement à la sacoche.

Elle traînait cette chose antique jusqu'à son café préféré - ou tout du moins le seul - de Little Angleton, le "Lonely" comme elle l'appelait dans un effort de raccourci et de familiarité; ou plutôt dans la flemme incomparable de prononcer le nom complet. Elle avait l'intention de parler un peu avec Sophia. Elle l'appréciait tout autant que le café dans lequel elle servait. N'ayant pas vraiment de famille ni beaucoup d'amis, Artémis passait du temps à bavasser avec la jeune femme: elles étaient sur la même longueur d'onde et en absence de clients, il fallait avouer que toutes deux n'avaient rien d'autre à foutre.

Elle entra dans la salle chaleureuse mais endormie par rapport à l'extérieur froid, venteux et humide (ah, l'Écosse!). Elle salua Sophia de suite qui officiait derrière le comptoir à remplir deux grands bols d'un liquide brun-lait: sans doute du chocolat chaud. Artémis ignora tout le reste du café, rien ne l'intéressait vraiment; un de ses grands défauts d'ailleurs, elle ne prenait pas souvent le temps de s'arrêter sur les détails ou les éléments quand elle ne se sentait pas l'envie de réfléchir.

Elle s'installa sur un grand tabouret devant le zinc et regarda la serveuse finir son action; il restait quelques clients, elle aurait donc le temps de lire avant que les deux compères puissent discuter. Elle tira son bouquin de sa sacoche qu'elle posa (ou plutôt lâcha négligemment) à ses pieds et se plongea dans le polar.

Caught cold; not taken advices

Il n'y avait rien que Joshua puisse faire, rien du tout, il était là, dans le café, assit au comptoir. Il essayait de se réchauffer, buvant des tonnes de litres de chocolats chaud. Josh était sortit tôt, en T-shirt et pantacourt, et s'était laissé surprendre par les rafales de vent qui avaient commencé à le titiller 15 minutes après sa sortie de l'appartement. Il lui semblait pourtant que Zacharia avait déclarer qu'il ne fallait pas faire le guignol dehors, mais pourquoi Josh s'obstinait-il à ne jamais suivre les conseils de son meilleur ami? Un bon point pour Zac, Joshua aurait du l'écouter plus attentivement, il s'excusera à son retour.

Continuant de boire du chocolat -il en était déjà à son dixième bol- il se dit qu'à un moment il devrait quand même aller aux toilettes. Logiquement, c'est ce que font les gens normalement constitués quand ils ont avalé une trop grande quantité de liquide, quel qu'il soit. Josh était toujours frigorifié, le chocolat chaud n'avait pas l'air de faire effet sur sa personne; ou bien était-ce une simple impression. Josh sentait qu'il tomberai sûrement malade, en été, c'est un comble, surtout qu'il y a eu deux semaines de grand soleil à Little Angleton, et maintenant il vente, dès fois il pleut, bref, pas de doute, c'est bien l'écosse.

Quelqu'un entra dans le café, curieux comme un enfant, Joshua ne pu s'empêcher de tourner la tête dans la direction de la porte, pouvant ainsi observer le nouveau venu. La nouvelle dans le cas présent, c'était une jeune femme brune, elle portait un pull qui commençai à se détricoter. Grâce à son don, Josh voyait tout, Josh entendait tout, il lui était donc facile de repérer ce genre de détails alors que les humains ordinaires s'en fichaient complètement.
La jeune femme avançait vers le comptoir, ignorant tout le parterre, bien qu'il y ait peu de monde. Elle s'y installa, commençant par regarder la serveuse faire son oeuvre, puis elle prit un live dans sa sacoche, sacoche elle même qu'elle laissa tomber par terre dans un bruit dur et sourd à la fois.

Josh commençait vraiment à s'ennuyer, mais habillé comme il l'est, il n'avait pas très envie de retourner affronter les bourrasques de vent, même pour rentrer chez lui, Zac se moquerait sûrement de sa bêtise, comme il le fait à chaque fois qu'un conseil n'est pas suivit.
-ATCHOUM!!
Ce bruit à du faire sursauter tout le monde. Voilà, plus de doutes maintenant, Josh était enrhumé. Il maudissait le fait de ne jamais écouter Zacharia quand il le fallait, et surtout il maudissait l'écosse à cet instant précis; son cher Tennessee ensoleillé en été et recouvert de neige l'hiver lui manquait terriblement. Mais un peu de bonne fois, Josh est là pour Hayley, il ne va pas laisser tomber, même si depuis son arrivé il ne se bouge pas trop et traîne dans les rues et dans la campagne, sans savoir que faire de ses journées.
-Excusez moi. Lâcha t'il poliment à l'attention collective.

» Il tenait quand même à faire une constatation: son jean était trop serré. Il se demandait de quoi il avait l'air, quelle impression il donnait en marchant avec, sans doute était-il beau comme ça. Mais pour être bien sapé, apparemment, il fallait supporter une ceinture qui approchait de la castration et des cuisses comme celles d'un rôti ficelé. Il douta un instant: un rôti ficelé a-t-il des cuisses ? Qu'importait. Cela le rassurait de se savoir à la mode. La veste Benetton, contrairement au pantalon-saucisson à trois-cent dollars, il nageait dedans. Pas au niveau des manches, naturellement -il se rappelait avoir toujours eu des bras trop longs- mais plutôt qu'elle soit large au niveau de la hanche. La chemise par contre, était parfaite. Il devait ressembler à un jeune entrepreneur nonchalant, mais conscient d'être dans la réussite, la richesse et la fleur de l'âge. Il sourit de fierté -sourire qui se perdit, sans destinataire, le quai était désert. Il se sentait enfin bien. Un peu plus, il aurait dansé et chanté. «

Elle n'eut pas fini son paragraphe qu'un bruit d'éternuement la fit sursauter et la tira complètement de sa lecture. Elle se redressa, posant son livre de poche sur le comptoir, et observa l'inconnu qui, plus proche qu'elle ne l'avait pensé, s'excusait platement.

- A vos souhaits.

C'était un grand blond à l'air bon-vivant, avec la barbe des rockeurs californiens, ou quelque chose dans ce goût là: et il avait l'air enrhumé. Il arborait une tenue pour le moins courte, ce qui devait expliquer certaines choses. Il ressemblait vaguement à un chanteur: dans tous les cas, il jurait dans le décor écossais. Elle réfléchit un instant; c'était un touriste. Il se couvrait peu, débarquait sans doute à l'improviste dans un pays froid sans avoir prévu la fraicheur, ressemblait à un américain en voyage, tout concordait. Il avait même un accent prononcé du sud des États-Unis -elle supposa, car elle ne connaissait pas les accents, en réalité. Cela lui paraissait juste logique.

- Vous voulez un mouchoir ? proposa Artémis en continuant de détailler sans vergogne le buveur de chocolats chauds. Un bol restait sur le zinc en attente d'être rempli à nouveau. Elle ne l'avait pas remarqué au début -elle n'avait rien remarqué, pensa-t-elle. Il tentait sans doute de se réchauffer en buvant. Tout le monde aimait le chocolat chaud. Elle trouvait cela elle-même plus réconfortant qu'un simple café, fort ou non. Elle en commanderait peut-être un, même si ce n'était pas la raison de sa visite. Mais pour sa visite, elle devrait attendre la fermeture, car Sophia n'avait pas l'air de se libérer.

Elle sourit vaguement au rockeur californien en se baissant pour ramasser sa sacoche et fouiller dans sa trousse de maquillage pour le paquet de mouchoir: elle devrait le mettre plus à portée.

Thank you.

- A vos souhaits.
La jeune femme avait enfin l'air de s'intéresser à ce qu'il se passe autour d'elle. En même temps, avec cet éternuement comment rester indifférent? Josh regardait attentivement le visage de la jeune femme, il pensa qu'il était très beau, il n'y a pas beaucoup de gens qui ont un visage aussi bien équilibré.
- Vous voulez un mouchoir ?
Elle sourit et prit sa sacoche pour fouiller dedans. Josh se disait que c'était bien une plaie un piercing au nez dans un cas pareil, surtout qu'il ne tombait pas souvent malade. En général, il n'enlève pas son piercing lorsqu'il se mouche, il le nettoie le soir et c'est tout. C'est un peu répugnant, mais imaginez les narines d'un homme avec des écarteurs à la place du piercing de Josh, c'est pire que tout.
-Merci bien, sourit Josh à son tour.

Joshua attendait patiemment que le jeune femme lui donne un mouchoir, il n'était pas du genre à presser les gens, d'autant plus que son nez ne coulais pas encore, donc tout allait bien, enfin presque, car un autre éternuement lui titillait le nez. Josh faisait tout ce qu'il pouvait pour se retenir. Impossible, il lâcha un autre éternuement, plus violent cette fois car il manqua de se prendre le bord du comptoir dans la tête avec l'élan. Il pensait qu'il était en train de se ridiculiser, devant deux jeunes femmes en plus. En même temps, Joshua n'a plus vraiment de dignité à défendre avec toutes les bêtises qu'il a fait avec Zacharia au lycée, mais ici personne ne le connaît, à part Takeji et David, donc si il se ridiculise, on pourrait vite parler de lui, surtout dans une bourgade aussi petite. Enfin, ce n'est pas très important, puisque Josh désire seulement ramener son amie d'enfance avec lui et Zac, donc s'en aller retourner au Tennessee, Nashville, mais pas dans l'orphelinat.

- Merci bien.

Artémis tendit au rockeur californien le paquet complet de mouchoir qu'elle avait réussi à sortir avec difficultés de son sac. Maladroite et tremblante quand elle s'adressait aux gens, pourtant peu timide, elle aurait eu honte de lutter pour en tirer un seul sur la dizaine. Elle détourna le regard vers le comptoir ensuite, attendant qu'il fasse ce qu'il avait à faire avec le paquet puis son mouchoir.

Quand il eut finit, elle posa sa question.
- Vous venez d'où ?

Elle n'imaginait pas qu'il puisse être du coin: les habitants de la région connaissait le temps, ils portaient donc des vêtements moins aérés et se trimballaient sans doute pour la plupart avec des paquets de mouchoirs. Qu'est-ce qui pouvait bien l'amener ici, dans ce coin reculé ? Soit c'était un touriste -il en avait l'allure- soit c'était une personne intéressée par le Mystery Orphanage plus haut. Elles n'étaient pas en grand nombre, mais pas rares non plus. Pour la plupart des gens dans le Secret qui venaient voir la famille ou suivre voire donner des cours.
Cela faisait un moment qu'Artémis n'était pas remontée voir l'orphelinat. Elle y retournerait bien un jour.

C'était possible aussi que l'homme ait un paquet de mouchoir mais ne le sorte pas par politesse, car Artémis lui en avait proposé. Elle avait déjà vu ça. Puis cela se comprenait aisément vu la lenteur et la difficulté avec lesquelles elle s'était débrouillée pour lui donner ce qu'il voulait: il n'avait peut-être pas envie de la froisser après ce temps. Elle le reprit quand il le lui rendit, mais ne le rangea pas. Au lieu de ça, elle laissa traîner le paquet sur le comptoir.

Sophia passa rapidement demander à Artémis si elle souhaitait une boisson, elle répondit négativement et l'observa continuer ses allées et venues. Elle se libérerait bientôt.

U.S.A. guy

Lorsque la jeune femme tend son paquet, Joshua s'en saisit et se dépêcha de se moucher avec un ravissant bruit de trompette pour le rendre au plus vite à son propriétaire.
- Vous venez d'où ?
La jeune femme avait l'air de détailler Josh.
-États Unis, je suis de passage pour voir quelqu'un, peut être même l'emmener avec moi.
Joshua se sentait obligé de se justifier, car après "d'où venez-vous?", la question qui brûle les lèvres et le plus souvent "et que faites vous ici?". Il voulait épargner à son interlocutrice de devoir poser cette question.

Joshua rendit le paquet de mouchoir que la jeune femme laissa traîner sur le comptoir, peut être au cas où le jeune homme en aurait encore besoin.
-Merci pour le mouchoir, vous me sauvez la vie, je ne pensais pas en avoir besoin en cette saison.
Il se demandait si il allait continuer sur une conversation avec la jeune femme ou bien rester là, silencieux. Il commanda un autre chocolat, ce qui apporta un grand sourire à la serveuse, peut être le trouvait-il drôle, en même temps, un homme qui prends 11 chocolats d'affiler ce n'est pas une chose qu'on voit tous les jours, et Josh avait le chic pour faire rire sans pour autant le vouloir.

-Vous avez l'air d'être des environs, vous êtes parfaitement accommodée au climat. Sourit Joshua.
Il voulait engager une conversation polie, en espérant que la jeune femme ne le prenne pas pour un dragueur stupide et ne lui dise pas d'aller se faire voir. Cependant, ça ne lui était jamais arrivé, alors pas d'inquiétude.

Le vent soufflait toujours dehors et ça s'entendait bien, c'était un bruit agréable, mais désagréable pour les quelques personnes dehors. Joshua se demandait à quel moment ça s'arrêterait, car sinon il allait devoir faire un périple pour rentrer chez lui. Mais le point positif c'est qu'il y a une douche et de l'eau chaude dans l'appartement de Joshua et Zacharia.