Cross

Dorian & Mathias

J'étais venue parler à Père aujourd'hui, je ne l'avais jamais fait depuis qu'il était mort. Je crois que je n'en avais pas vraiment la force, parce qu'il fallait intérieurement que j'accepte qu'il ne soit plus de ce monde. Mais vivre dans une illusion ne m'a rien apporté d'autre que la décadence et le déclin. Mon père était enterré à Sarzeau, dans le domaine des Cross. Ce qui veut dire que j'ai dû revenir et pénétrer le domaine pour enfin avoir l'opportunité de lui parler. Ce n'était pas une mission aisée que d'entrer par effraction dans le domaine des Cross, il existe une multitude de Runes de détection installées un peu partout, en plus de divers pièges mortels pour ceux qui ne savent pas où poser les pieds. Je crois que j'étais encore en mesure de me rappeler où certaine d'entre elles étaient placées à l'époque, même après cinq ans d'absence. De toute façon, je voulais juste atteindre le cimetière et non aller au Manoir qui est un peu plus loin sur le chemin.
J'ai dit ce que j'avais à dire à mon père, après être restée à regarder sa tombe pendant une bonne vingtaine de minutes sans rien dire. Les mots ne voulaient pas vraiment sortir, il m'avait fallu chercher la force au plus profond de moi pour que je réussisse enfin à me délier la langue. Mais toute bonne chose avait une fin et je ne pouvais me permettre de rester trop longtemps dans ce cimetière, le risque de me faire repérer était toujours constant. Même si ça me faisait bien chier, j'étais dans l'obligation de m'en aller et sans me retourner. Je repris le même chemin pour sortir du cimetière, je devais faire vite... J'étais venue accompagnée... Et je n'aimais pas beaucoup le fait de les laisser seul, surtout si une personne venait malencontreusement tomber sur eux. Ouais. Il y avait de fortes chances que ça parte en cacahuète et je déteste avoir à payer les pots cassés. Toutefois, je ne tardai pas à retrouver mon chemin et quitter le domaine par l'endroit où j'y étais entrée.

Mais c'est une fois le pied à l'extérieur que deux hommes m'attendaient. « Mathias Cross. » Annonce l'un deux tandis que mon regard se lève vers le ciel, lâchant passage un « merde ». Pas besoin de vous faire un dessin, ce sont tous deux des sorciers de l'ordre de Croix. Une certaine colère est très légèrement montée en moi, je sors alors mon revolver sans tarder et le pointe dans leur direction. Un beau spécimen de Colt, le même que j'ai depuis mes quinze petites années. Presque immédiatement, ils lèvent leurs mains et l'un d'entre eux m'incite à attendre deux secondes. « Wow, doucement ! Tu nous as bien vus ? On n'est pas armée. » M'annonce cette fois l'autre gars tandis que je sors à présent de ma ceinture mon poignard à lame noire. « Prends-moi encore une fois pour une conne et t'es le premier que je buterai ! » Lui crachais-je, ma voix se voulait glaciale et mon regard perçant. Pour qui ils me prennent, je suis la mieux placée pour savoir que même sans armes un sorcier reste dangereux.
« Donnez-moi une bonne raison de ne pas vous abattre ! » J'étais un peu énervée là maintenant, j'avais été certainement détectée quand je suis rentrée dans le domaine. Cependant, pour que ces gars m'attendent à l'endroit où je suis rentrée par effraction, ils devaient avoir pris le temps de retracer mon parcourt jusqu'au cimetière. En gros, ils m'avaient probablement repéré depuis un bon bout de temps sans pour autant m'intercepter au moment où je parlais à mon Père... Pourquoi ? « Tu dois t'en douter, c'est le patron qui nous envoie. » J'enclenche l'armement de la gâchette prête à tirer afin de les inviter à être plus convaincant. « Il ne veut pas te faire fuir, il te propose une discussion ! » M'annonce-t-il, alors que son pote à côté se faisait plus discret après depuis que je l'avais menacé. Je ne réponds rien, me contentant de les observer pour déceler un détail qui pourrait me paraître louche, qui pourrait trahir le comportement. Dorian est devenue très puissant depuis qu'il avait pris le contrôle dans le monde magique.

Du coup, s'il voulait ma mort, il aurait très bien pu envoyer des hommes un peu plus armée sans que ces derniers m'attendent poliment. Peut-être que le fait d'envoyer des hommes si peu préparé à combattre, c'était un acte de bonne volonté de la part Dorian pour m'inviter à sa discussion. Je tapote la lame de mon couteau, ce qui trahit le fait que je suis plongés dans une profonde réflexion. Je soupire un moment avant de ranger ma lame, mais pas le colt qui était toujours pointé dans leur direction. Puis à la suite, je colle mon pouce et mon doigt entre mes lèvres avant de siffler vers les quelques arbres à une dizaine de mètres derrières les deux hommes. Trois grands Canidés de couleur noir sortis des bois et passèrent à côté des hommes surpris sur le coup. Une fois mes chiens à mes côtés, je caresse le crâne de l'un deux qui était le plus proche de moi, rangeant le colt en passant. « Okey, je vais parier sur l'intelligence de Dorian. Mais je vous préviens, faites quelque chose de louche et... » L'un d'eux m'interrompit et ajouta. « On a compris. »
Je m'accroupis au niveau de mes chiens, caressant toujours le crane de celui qui était le plus proche de moi. « Je ne crois pas non. » Dis-je en rajoutant tout de suite après. « Tu vois ces trois merveilles, ce sont des chiens de chasses et ils n'ont pas encore mangé depuis hier soir. » Annonçais-je pour leur faire comprendre bien comme il faut, qu'elle était l'un des régimes alimentaires de mes gosses. Je me redresse à la suite en les invitant à me conduire au manoir, je claque au même moment du doigt pour ordonner à Azazel, Baltazar et Cerbère de me suivre cette fois. Arrivée près du Manoir, j'aperçois à la fenêtre un visage, une blonde qui disparaît aussitôt qu'elle m'a vue et j'ai une très bonne idée de qui ça pouvait être. Je claque du doigt à nouveau en indiquant de l'index le sol, mes chiens s'asseyent alors sans broncher. Ils n'entreront pas à l'intérieur pour l'instant, surtout pour la sécurité de ceux qui y vivent. J'entre en suivant les deux sorciers et la tête à la tignasse blonde réapparaît. CLAC. Le son de la baffe résonne dans tout le manoir.

« Heureuse de te revoir aussi... Mère. » Dis-je, essuyant le filait de sang qui s'échappait de mes lèvres, mon regard fixant le sien sans s'en détourner. C'était un coup puissant pour une simple baffe, je comprends désormais un peu mieux pourquoi Père l'a épousé. Elle ne dit rien, mais je comprends aussi que j'aurais une longue discussion avec elle plus tard. Je poursuis mon chemin avec les deux autres sorciers, qui nous emmène au sous-sol. Je peux entendre des cris, me laissant deviner qu'une personne était en pleine séance de torture. Les deux autres sorciers s'en allèrent à la suite une fois que j'étais entrée dans la pièce. Il prit soin de me laisser le colt, ce qui, ironiquement, ne me rassurait pas tellement. Puisque cela veut tout simple dire que même un peu armé, je suis à leur merci et cela ne fait aucun doute dans mon esprit. Je reste silencieuse, posant mon dos contre le mur le plus proche, attendant qu'il finisse ce qu'il a à faire.

made by black arrow

Cross

Dorian & Mathias

Dos contre le mur, les bras croisés ou bien les mains parfois dans les poches, j'attends, j'observe. Je l'observe frapper cet impur, il n'y a rien de beau dans son geste, rien de jouissif et puis en frappant ce gosse il prend le risque de laisser le sang de cet impur se mêler au sien. Parce que quand on frappe sans protection, eh bien on s'ouvre la chair du poing, c'est comme ça. Et cette torture manque de délicatesse, ça me dégoûte, c'est trop sauvage et pas assez recherché. J'aurais pris le temps d'enfoncer des aiguilles chauffées sous chacune de ses ongles, j'aurais enlevé un par à par un ses globes oculaires et dépecer sa chair pendant qu'il aurait été encore conscient... Ou, bien je lui aurais donné de l'espoir en lui proposant de fuir loin de moi, loin de la mort... avant d'envoyer mes chiens à sa poursuite. Azazel, Baltazar et Cebère adorent ça, chasser dès qu'ils ont l'occasion, la chair humaine est un mets délicieux pour ces trois voraces.
Quoi qu'il en soit, à mes yeux Dorian ne prend vraiment pas le temps de faire souffrir cette merde et je trouve que c'est un beau gâchis. Mais, je reste silencieuse, indifférente, il fait ce qu'il veut, dans le fond je m'en fous pas mal. Je le vois alors mettre fin à la vie du môme, maintenant je vois à présent ce que je vais donner à bouffer à mes gosses. Il s'essuie les mains, souillée par le sang de cet impur... C'était quoi, un humain doué ? Ou peut-être un mêlé et cela en serait que davantage écœurant s'il s'agissait bien d'un mêlé. L'abattre aussi machinalement, si rapidement. Non. C'est eux qui doivent le plus souffrir avant de rejoindre la mort, la souffrance serait alors la pénitence de leur existence. Beaucoup de temps s'est écoulé, en effet, quatre ans c'est long et en quatre ans j'étais devenue un monstre que j'aurais essayé de fuir à l'époque. Le genre de monstre qui aurait hanté mes cauchemars. Ouais. J'étais devenue ma propre hantise.

Je devais tuer cette ancienne gosse pathétique pour laisser entrer la femme que je suis désormais. Je suis moins bête et plus cultivée qu'à l'époque, j'ai étudié et je me suis renforcée à tous les niveaux : intellectuellement et physiquement parlant. Je l'ai appris, je l'ai compris, une personne cultivée sera toujours plus dangereuse et supérieure qu'un idiot ignorant et mécréant. C'est là où on fait la différence entre un gangster tuant ouvertement et un tueur minutieux, réfléchi et maniaque. Je voulais cesser d'être une racaille et devenir ce tueur réfléchi. J'ai rejoint Santiago, je me suis endurcie et je suis devenue cette menace qui plane au-dessus des impurs. J'ai tué beaucoup de sorcier aussi, Santiago se fout pas mal des races, ils n'ont pas la même idéologie que l'ordre de Croix ou de Rosenrot, malgré que leur cheffe est clairement une sorcière noire. Et en parlant d'elle, personne ne semble savoir qui est le chef de Santiago à part leur membre... Vais-je être poursuivie si je devais cracher le morceau ?
Bah, ce serait excitant, mais je ne suis pas du genre à trahir, peut-être avant quand j'étais cette pauvre gamine influençable. Influencée par une humaine, cette humaine... Rien que d'y penser j'en ai les mains qui tremblent de rage. Une colère qui est autant destinée à cette garce qu'à moi-même. Enfin bref... Revenant à Dorian qui s'essuyait les mains. Le ton de sa voix contrastant avec sa phrase, il m'annonce que c'est un plaisir de me voir ici. « Disons que j'avais des choses à dire à Père. » Crachais-je simplement, le dos toujours collé contre le mur. Dans ma voix, il y a une intonation d'indifférence. Puisque, après tout, je m'en fous pas mal de ce qu'il peut bien penser de moi actuellement tant que je sais désormais qui je suis et ça me suffit. Mon regard le fixe, le dévisage par moment à cause du sang qu'il a sur lui. Un sang si impur pour qu'un sorcier de son rang en soit maculé. Ca me dégoûte.

« Tu voulais me proposer une discussion ? » Je le tutoie, car il n'est pour l'instant pas mon boss. Ma cheffe, elle, se trouve l'autre bout du monde au QG de Santiago. Je me redresse à la suite pour être un peu plus à son niveau, ce n'est pas non plus agréable de discuter avec une personne un peu trop éloignée comme si cette dernière craignait quelque chose, lorsqu'il n'y a rien à craindre. Moi, ça a tendance à m'énerver et cela attire mon envie de véritablement lui faire du mal. Je m'approche de l'homme, jetant un œil au cadavre. Il y avait que très peu de chair sur les os, mais il fera l'affaire pour les chiens... Ils dévoreront ses os s'ils ont vraiment faim.

made by black arrow

Cross

Dorian & Mathias

On prend vraiment conscience de ce qu'on a, que lorsqu'on l'a perdu... Il n'y a rien de plus véridique que le sens de cette phrase. Lorsque j'ai fait le bilan de ma vie, que je me suis remise en question, j'ai vu à quel point j'avais fait de ma vie un enfer, à quel point j'avais lamentablement tout perdu. En crachant sur mon rang, j'avais laissé l'humiliation s'installer dans ma vie. Une femme enceinte m'avait kidnappé à une époque où j'étais amnésique, mais le fait que je fus si faible, si vulnérable avait laissé l'opportunité à cette rapace de s'en prendre à moi. Et cela parce que j'avais été une idiote qui ne comprenait pas les bienfaits de l'éducation Cross. Non, je ne voulais juste rien comprendre par simple arrogance et défi. Je voulais prouver que j'étais meilleure, trop bien pour cette famille, croyant que sans elle j'allais trouver ma voie. Mais la vérité, c'est que sans elle, j'étais et je devenais de plus en plus faible. Ridicule petite chose qui croit tout savoir, qui croit être meilleure que tout le monde.
Lorsque j'ai pris conscience de qui était vraiment Mathias Cross, de ce qu'elle était devenue, je n'avais plus qu'un seul désir... L'égorger. Et si cela avait pu se faire, je l'aurais observé agoniser, se vidant de son propre sang. Si physiquement cela en revenait à me suicider, j'ai quand même pu tuer mentalement cette petite salope d'égoïste. La première chose que j'ai alors fait, c'est de tuer les personnes qui étaient proches d'elle et au courant pour son côté surnaturel, tous des humains sans talents magiques... Mais l'une d'elle fut ma toute première victime et j'ai mangé sa chair pour m'en rappeler à jamais. Endurcie par cette expérience, je me remémorai chaque parole, chaque enseignement de mon père. Je me remis à entraîner mon corps devenu si faible et pour cela, je n'hésitai pas à chasser des mêlés ou des humains doués, même si j'ai souvent pris le risque de trépasser à plusieurs reprises. Chaque expérience me rendait plus forte... On dit que ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort et je suis bien placée pour le confirmer.

Mais la crainte de la mort planait au-dessus de moi, j'étais une traître et une traître seule était une traître morte. Alors, j'ai rejoint Santiago, elle m'offrit asile et protection pendant plusieurs années. Je profitais de cette protection pour acheminer mon chemin vers la femme que j'étais devenue. Forte, indomptable, fière et surtout, cruelle. Mais le problème c'était que je ne pouvais guère le montrer à ma famille que j'avais rejetée et qui m'avait sans aucun doute rejeté. Ce fut le poids d'une solitude que j'avais cherchée et que je regrettais amèrement, qui pesait lourd sur ma conscience. Si lourd que le désir de parler à père en devint insupportable. Et me voilà, à présent de nouveau dans le manoir, j'aurais pu fuir et profiter du fait que ces deux hommes étaient totalement désarmés pour disparaître à nouveau. Je ne l'avais pas fait, car au fond de moi brûlait inconsciemment cette flamme d'espoir incapable de s'estomper. Un espoir que ce dialogue en soit vraiment un, que ce n'était pas une manière pour les Cross de m'abattre sans avoir à bouger de leur demeure. Ainsi, mourir dans la honte.
Mon regard se perd un moment dans les iris bleutés de Dorian, le fixant d'un air qui trahissait un sentiment d'incertitude. Oui. J'étais déconcertée, suite à la demande si simple de Dorian comme si les conséquences de mes actes avaient été balayée par le simple revers de sa main. Une main qui vient se poser sur mon épaule, accompagnée d'un sincère sourire. Mon esprit si structuré, si ferme vient à être ébranlé par la simplicité du Patriarche de la famille Cross et grand dirigeant de l'ordre Croix. Qui était cet homme qui au final, je ne connaissais guère ? Moi qui ai toujours cru qu'il haïrait le plus cette prétentieuse que je fus. Même Ysoline, ma propre mère m'avait infligé une baffe dont j'ai encore les marques de rougeur, alors je m'attendais à bien pire venant de cet homme. J'étais incapable de dire ce que j'éprouve intérieurement, si ce n'est qu'un immense soulagement. En effet, c'était comme si je pouvais respirer de nouveau, face à un homme plus tendre qu'il en avait l'habitude de l'être.

« Okey ! » Fut la simple réponse que je lui offris pour la simple demande qu'il me fit et elle sortit d'elle-même, avant même que je réfléchisse aux conséquences. Santiago, ma cheffe... Je n'y pensais même pas, je m'en foutais royalement. Je n'ai jamais aimé servir ces fanatiques, j'ai dû supporter de côtoyer des humains et des mêlés qui me regardaient d'un mauvais œil lorsqu'ils entendaient l'appellation de mon nom. Un nom qui sait apporter la crainte chez ces impurs. Et même les sorciers là-bas ont un état d'esprit qui entre en conflit avec mes idéologies noires. Alors, j'étais seule, malgré que la cheffe elle-même a des croyances identiques aux miennes, à celles de Croix ou de Rosenront. Mais parce que c'est la cheffe, elle se devait de mettre de côté sa nature, ce que je trouve pathétique. Mais j'ai supporté parce que je n'avais pas le choix... Aujourd'hui, elle m'est servie dans une assiette en or, pourquoi irai-je cracher dedans ? J'étais devenue forte, mais limités par Santiago. En effet, je peux encore progresser, aller plus loin que si je reviens dans un élément et un environnement qui exploiteraient toute cette rage et cette haine cloisonnées à l'intérieur de mon coeur...
Mon esprit se recentre très vite et mon visage redevient dur, ce moment ne devait pas continuer dans cette tendresse pour moi et surtout pour lui. Il avait une image à garder et je ne tenais pas à être trop longtemps la raison de cette... affection. Mon regard se pose alors sur le cadavre pas loin de nous. « J'ai avec moi des bêtes qui n'ont pas mangé depuis hier soir, cela ne vous dérange pas que je leur serve ça ? » Dis-je en désignant cette impureté gisant à côté de nous. Je le vouvoie, car une distance et un respect se sont de nouveau installés depuis que j'ai accepté de revenir à Croix.

made by black arrow

Cross

Dorian & Mathias

Le regard endurci de l'homme me plaît déjà un peu mieux que ce geste de douceur qu'il a eu plus tôt à mon égard. Non pas que je crache sur l'affection des gens, mais à mes yeux on n'est pas censé prendre Mathias Cross avec trop de tendresse. Mathias Cross doit être vu comme une honte, une traître et elle ne devrait même plus porter le nom des leader de Croix. Je n'aime pas l'idée qu'on tente de pardonner mes péchés, ou qu'on essaye tout simple d'agir avec moi comme si de rien n'était, parce que moi je ne me pardonnais pas d'avoir été cette petite prétentieuse autrefois. En effet, je ne veux pas qu'il me considère comme l'une des leurs, je ne veux pas qu'ils soient tolérants avec moi. Je veux que ma mère me déteste et que Dorian ait continuellement le désir de me voir crever à chaque qu'il se servira de moi en mission. Je ne veux pas de sa tendresse, ni de celle de mère et d'aucun autre Cross. Je ne la mérite pas. Alors, oui, regarde-moi avec ses yeux, garde bien cette pulsion meurtrière que tu ressens pour moi. Je la préfère, je la désire... Elle me rend bien plus forte que tu ne le crois mon cher oncle.
La peur de la mort, me pousse à devenir plus forte, plus vile et sournoise à chaque fois qu'elle s'empare de mon être. Ne m'affaiblis pas avec ta tendresse non-méritée, ce serait bien la seule chose pour laquelle je pourrais te maudire sans aucune once d'hésitation. J'ignore quelles sont les intentions de Dorian, mais je ne veux pas que parce que je suis une Cross qu'il m'offre un privilège en plus de renoncer à me tuer pour trahison. Non... Autant mettre les choses au clair, je ne retournerai pas au manoir... je servirai Croix s'il me laisse l'opportunité, mais je ne vivrais pas au Manoir. Les sorciers noirs lambda de Croix ne vivent pas au Manoir, ils n'ont pas cette chance et au même titre qu'eux, je ne veux pas avoir cette chance non plus. Je me suis réfugiée dans un monde de noirceur et de solitude et je l'aime beaucoup trop ce monde pour m'en séparer. Je serai d'autant plus efficace seule, du moins je l'imagine.

Anna avait compris que j'avais du mal à bosser avec ses espèces d'impure, alors mes missions étaient toujours en solo, je pense que je me suis faite à cette solitude. Je me suis habituée à vivre seul, bien que je me servais de l'influence des fanatiques de Santiago pour être protégée d'une éventuelle attaque d'un agent de Croix. Je ne changerai pas cette habitude et on ne me forcera pas le changer non plus. Dorian est devenu bien silencieux, ironiquement ça le rend d'autant plus agaçant et ça me donne envie d'être aussi un peu agaçante... Mais je ne le serai pas, j'ai déjà eu ce que je voulais en soit en lui donnant une simple réponse qu'il ne semble pas avoir apprécié. Un simple « Okey » après ce qu'il me proposait, c'était limite de la provocation, du moins pour lui probablement, pas vraiment selon moi qui étais tout bonnement indifférente à la situation. Peut-être qu'un peu surprise et soulagée au début, mais en soit indifférente à la proposition.
L'homme quitte la pièce sans me donner de réponse, ce n'est pas grave je prendrai quand même ce corps plus tard, il ne servira plus à personne de toute façon, si ce n'est qu'à la cuisine des corbeaux et des vers. Je suivais l'homme et leader de Croix vers son bureau, m'ayant si gentiment fait signe de sortir de la pièce avec lui plutôt. J'étais curieuse de savoir ce qu'attendait de moi le silencieux, voulait-il avoir une riche conversation en mimétisme ? Il sortit un dossier confidentiel semble-t-il, ce qui m'irrite légèrement. Il veut me faire croire qu'il veut déjà me révéler un projet tenu secret. C'est quoi le piège, il veut me tester, trouver une opportunité nouvelle de me mettre à mort ? Je ne réagis pas, si ce n'est que mon sourcil se lève légèrement. Il ouvre alors le dossier et là, j'ai presque eu envie de rire... Mais quel fou celui-là ! Il faut vraiment qu'Anna et Dorian se rencontrent parce que dans le genre ciboulot en moins, les deux semblent se valoir. Ouais, si Anna ferait une bonne sorcière de Croix, Dorian ferait un très bon fanatique.

Il me confie cette mission à peine après qu'il m'est proposé de revenir à Croix... C'est clairement une mission pour me tester, tuer mon ancien chef pour ses beaux yeux. Un chef qui n'est ancien que de quelques malheureuses petites minutes. C'est quoi le plan, il veut m'envoyer tuer Anna ? Bravo, vu qu'elle ne sait pas que je suis à nouveau de Croix, je peux l'approcher sans soucis et la poignarder dans le dos. Sauf qu'après, ben je meurs. Puisque Anna n'est pas une cheffe sans protection, elle a toute une organisation derrière elle. Certes si on compare à celle de Croix c'est une très petite organisation, mais elle est bien organisée depuis qu'Anna semble en être le chef. On peut compter 300 membres actifs sur 500. Il y a en plus cette nouvelle section au sein même de l'ordre ; les Valkyries, un groupe de combattant d'Elite dont la seule mission est de protéger leur petite pute de Reine. Donc clairement, si je bute Anna, elles me butent après... OU, si la règle de Santiago tient toujours, « ce que je prends m'appartient »... je suis censée devenir le chef de Santiago.
Mais ça me fait chier de parier ma vie sur des « et si »... Parce que ce n'est même pas sûr que j'atteigne Anna qui a de très bons réflexes aux corps à corps. Cette connasse continue à s'entretenir physiquement. Donc je suis intriguée, intriguée de savoir comment il va me tester ou m'envoyer à l'abattoir. Je reste silencieuse à mon tour, songeuse, cherchant à construire un plan afin de prendre la fuite après avoir éventuellement tué Anna... Si je maîtrisais pleinement mon don, j'aurais pu jouer avec le temps et le ralentir pour facilité les choses... Mais je n'en ai vraiment aucune maîtrise pour l'instant. Je croise les bras, mon regard se reposant à la suite sur celui de Dorian. Il ne m'a certainement pas attendu pour mettre ce projet en place, il doit forcément y avoir d'autre sorcier sur le coup... « Qu'est-ce que Croix attend d'une traître fraîchement graciée ? » Demandais-je alors à Dorian pour qu'il soit un peu plus spécifique dans son petit jeu de silence.

made by black arrow

Cross

Dorian & Mathias

Je me demande comment il y a quatre ans la pauvre petite folle rebelle que j'étais, aurait réagi à cette rencontre. Elle aurait certainement provoqué l'enflure que pouvait être le leader de Croix. Et elle sera probablement morte, quoique si cette enfant avait toujours été là elle n'aurait peut-être pas suivi ses deux sorciers noirs… Elle ne serait même pas venue se recueillir sur la tombe de son propre père. Oui. Ce tête à tête avec l'homme n'aurait jamais eu lieu et elle serait toujours accrochée à sa fragile petite Kara. Aveuglée par un sentiment qui aujourd'hui la dégoûte férocement. L'amour est une bien trop mauvaise expérience pour la sorcière noire que je tends à devenir, que je ne suis peut-être pas encore forcément. Je pars du principe que la cruauté ne suffit pas forcément, je devais encore affiner mon esprit, si j'espérais faire revivre Gaël Kerrian Cross à travers mes actions. Puisque ses enfants sont indéniablement l'héritage de ce qu'il était.

Moi et mon petit frère devons emprunter le même chemin que cet homme selon son éducation. Je sers les dents en me rappelant qu'Edouard n'était qu'un bébé, il ne se souviendra même pas de l'homme qu'était son père. Je n'ai pas de doute quant à son éducation, la dureté de mère fera de lui un très bon Cross. Mais le fait est qu'il ignorera ce que cela fait d'être éduqué directement par cet homme, avec mère ce ne sera jamais vraiment pareil. Enfin bref... Mon regard se pose sur les yeux froids du vieux, puis ensuite sur le dossier. « Alors, je retournerai à Santiago pour prendre sa tête. » Il y a une petite lassitude dans mon visage qui laisse place un sourire sanguinaire l'espace d'un moment. Finalement, cette mission peut devenir amusant d'un certain point de vue. Et si je dois mourir là-bas, bah écoute... Au moins, je serais bien éclatée avant de rejoindre mon vieux de l'autre côté.

« Veux-tu m'annoncer autre chose avant que je débute la mission ? » Commençais-je, son regard à mon égard dévoile de bien loin ses intentions quelles qu'elles soient. Elle m'accorde sa clémence sans contrepartie ? La blague... Je sais quelque chose arriverait tôt ou tard. Qu'il se dépêche d'agir que ça m'enlève un autre poids sur les épaules.

made by black arrow